Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
les neiges du Kilimandjaro de Guédiguian
- Spoiler:
- il y a trois prises d'otage, trois moments où la vie d'individus, de personnages, est saisie hors du passage inexorable, organisé, oublieux, du temps; malmenée, et réintroduite dans le jeu, alors que les règles qui le maintenaient actif, désirable, commencent à s'estomper, face au doute, au choc de la violence, une violence politique, qui s'appuie sur une critique des mécanismes de l'égalité sociale.
Premier moment, Darroussin, dans son rôle de syndicaliste en chef _deux daïmons s'affichent sur son casier au taf, Jaurès et Spiderman_ choisit les noms de 20 collègues parmi tous ceux présents, 20 morceaux de papiers blancs. 20 types, jeunes ou vieux, mariés ou célibataires ou veufs qui sait, il y avait peut-être une femme aussi, je ne sais plus, des histoires différentes assujetties au sceau du hasard, qui sont virés de la boîte, certains en pré-retraite, d'autres avec une petite somme, un lot de consolation.
Darroussin tire son propre nom; son pote le regarde sans y croire : "pourquoi as tu mis ton nom dans la boîte, idiot?"
Que ce passe t-il après la lutte syndicale? et quelle a été l'objet de cette lutte, quand cette dernière n'a fait qu'accompagner une lente délitescence de la fraternité?
second mouvement, seconde prise d'otage, alors que Darroussin et son pote jouent, avec leurs moitiés, à la belote ou au tarot, un autre jeu de hasard, alors que l'amabilité coutumière se trouble de sentiments plus froids, plus mordants, d'un discret antagonisme entre les couples, comme si les liens qui les fondaient s'affrontaient sur le terrain de la performance: deux types masqués font irruption et les braquent; volent l'argent et les billets d'avion obtenus lors d'une célébration précédente.
Pourquoi cela leur arrive t il à eux?
Le pote de Darroussin ne veux pas le comprendre, la colère le submerge, il a trimé toute sa vie, a lutté dans les syndicats contre les patrons, pourquoi devrait-il l'accepter?
Alors qu'ils étaient enfants, il a volé un Strange, un magazine de superhéros, qui appartenait à son ami; c'est si peu de chose. Sans gravité, aucune.
quelle relation me direz vous? je ne sais pas; les liens de l'amitié prennent parfois d'étranges détours pour se retrouver, à la fin, sur le bas côté, toutes distances annihilées.
Alors oui, cela a à voir avec l'enfance.
L'un des braqueurs, la vingtaine fraichement cueillie, était un collègue _un passant_ de Darroussin; (ce dernier a tiré son nom, sur un bout de papier, dans un boîte, au début.)
Et ce petit con l'a même dépossédé du Strange dont je parlais auparavant: comme quoi, la relation s'étoffe.
Il s'occupe seul de ses deux frères, juste des gamins: veille à ce qu'ils fassent scrupuleusement leurs devoirs, les emmènent au bus la matin, au mac do le soir, fait la queue à l'ANPE et contemple avec mépris le vieux Darroussin, un possédant, le responsable de sa délicate situation, en couple avec Ascaride, fêter ses je-ne-sais-combien années de mariage, entourés des amis, des proches, des collègues, dans un état de félicité inconnu.
Daroussin découvre l'identité du braqueur, grâce, à cause du, magazine, le dénonce à la police, se confronte à lui et reconnaît la haine _qu'il exprime raisonnablement_ à son encontre (pourquoi avoir pioché des noms au hasard alors qu'une grève, ou une évaluation des situations personnelles aurait été plus juste?), commence à s'interroger.
Et c'est là qu'intervient la 3è prise d'otage:
les jeunes frères du braqueur sont recueillis par le couple Darroussin/Ascaride, sans qu'on leur donne d'explication, de motifs, sans qu'ils en demandent.
Ce sont des histoires de lutte politique, de passation avortée, d'erreurs qu'il faut rattraper, en toute pédagogie; des histoires de grandes personnes.
Pour moi c'est là que le film s'effondre, même si, à l'instar de JMFrodon, on pleure, lamentablement.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"Donoma".
Un "film guérilla" qui se vante de son budget de production : "150 euros". Mais les deux premiers plans du film sont respectivement les logos d'Arte et de France Culture. (Ils ont chacun donné 75 euros ?)
Tous les dialogues (en français) sont sous-titrés (en français), en blanc et/ou en jaune, à droite et/ou à gauche. Et le sous-titre d'une scène d'amour c'est "...". Pourquoi tout ces sous-titres ? C'est une question. Peut-être que le réalisateur en parle quelque part ?
Un "film guérilla" qui se vante de son budget de production : "150 euros". Mais les deux premiers plans du film sont respectivement les logos d'Arte et de France Culture. (Ils ont chacun donné 75 euros ?)
Tous les dialogues (en français) sont sous-titrés (en français), en blanc et/ou en jaune, à droite et/ou à gauche. Et le sous-titre d'une scène d'amour c'est "...". Pourquoi tout ces sous-titres ? C'est une question. Peut-être que le réalisateur en parle quelque part ?
Leurtillois- Messages : 131
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"Moi je trouve que les comédiens ne devraient pas être syndiqués ou bénéficier d'une convention collective. Ils doivent être payés selon leur mérite : sacrément bien pour certains, et sacrément mal pour d'autres. Il y a une certaine tendance à l'autorégulation. On ne peut fonctionnariser la communauté des comédiens et je déteste qu'un comédien dise : "Je ne travaille qu'au début de la pièce." Les gens comme ça doivent être virés. L’inconvénient des troupes permanentes c'est que les théâtres sont moralement obligés de garder tout un stock de comédiens médiocres, alors qu'il serait plus humain de les licencier pour qu'ils puissent faire autre chose. Cette demi-mesure, cette attitude humanitaire est mauvaise. Il faut se débarrasser des parasites."
Ingmar Bergman à Sten Hammar.
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
http://blogs.mediapart.fr/blog/la-redaction-de-mediapart/301111/le-2-decembre-mediapart-ouvre-ses-portes-numeriques
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Leurtillois a écrit:"Donoma".
Un "film guérilla" qui se vante de son budget de production : "150 euros". Mais les deux premiers plans du film sont respectivement les logos d'Arte et de France Culture. (Ils ont chacun donné 75 euros ?)
Tous les dialogues (en français) sont sous-titrés (en français), en blanc et/ou en jaune, à droite et/ou à gauche. Et le sous-titre d'une scène d'amour c'est "...". Pourquoi tout ces sous-titres ? C'est une question. Peut-être que le réalisateur en parle quelque part ?
C'est pour les sourds et malentendants. Même les débats sont "traduits" en langage des signes.
Quant à Arte & France Culture je suppose qu'ils sont intervenus après, en tant que partenaires du film et non comme coproducteurs.
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
J'ai vu ce week-end Anatomie d'une Relation de Luc Moullet.
C'est le prototype du film français qui utilise le public pour trouver un recul à la fois sociologique et esthétique sur l'échec d'un couple, donc c'est à la fois crispant (le film recherche recherche un point de vue objectiviste sur un récit autobiographique, et finalement le féminisme n'est traité ici que comme un contexte et un moyen de parvenir à cette objectivité) et séduisant car ce qui se dit en marge du film est très fort, et Moullet laisse finalement assez de champs à ses personnages pour résister à cette objectivation.
J'ai été impressionné par l'interprétation de Marie-Christine Questerbert (Christine Herbert) et ai trouvé cette interview intéressante où elle explique que le film s'est fait à la fois par elle et contre elle, mais aussi contre Moullet, avec lequel les relations étaient productives mais houleuses. j'ai remarqué qye le mot "travail" revient à la fois dans la manière dans A-C Questerbert se présente elle-même, et dans les films de Moullet, mais dans un sens opposé. Dans le film il est utilisé pour décrire l'effort de respect hétérosexuel ("je te repsecte assez pour faire ce travail avec toi") mais ici comme finalement dans d'autre film ("Genèse d'un Repas"), Moullet laisse d'ailleurs l'autre énoncer les enjeux du travail: la délégation de cet énoncé n'est en effet pas que du côté de la critique de l'exploitation, Questerbert perçoit sans doute que derrière l'humour de Moullet, elle il y a un technique d'englobement de la critique sociale dans la distance ironique sur le travail ):
http://www.kinok.com/index.php?option=com_content&view=article&id=392:interview-nom-realisateur-pour-nom-du-film&catid=38:interviews#_ftn1
...le première prise a dû être la bonne pour la scène où elle écrase un set de thé sur la tête de Luc Moullet
Bizarrement le nom d'Eustache n'est jamais cité, alors qu'il me semble que son personnage se tient en quelque sorte au milieu de Marie et Veronika (le monologue sur l'avortement est très proche de celui du scénario d'Eustache)
(je me demande également comment elle peut dire qu'elle a eu Panofsky comme prof, sans doute un lapsus oral dans lequel elle place sur le même plan formation et influence).
Elle a aussi fait un film en 2000, la "Chambre Obscure", relecture féministe de Boccace, qui a l'air d'avoir été bien accueilli, qui semble intéressant.
C'est le prototype du film français qui utilise le public pour trouver un recul à la fois sociologique et esthétique sur l'échec d'un couple, donc c'est à la fois crispant (le film recherche recherche un point de vue objectiviste sur un récit autobiographique, et finalement le féminisme n'est traité ici que comme un contexte et un moyen de parvenir à cette objectivité) et séduisant car ce qui se dit en marge du film est très fort, et Moullet laisse finalement assez de champs à ses personnages pour résister à cette objectivation.
J'ai été impressionné par l'interprétation de Marie-Christine Questerbert (Christine Herbert) et ai trouvé cette interview intéressante où elle explique que le film s'est fait à la fois par elle et contre elle, mais aussi contre Moullet, avec lequel les relations étaient productives mais houleuses. j'ai remarqué qye le mot "travail" revient à la fois dans la manière dans A-C Questerbert se présente elle-même, et dans les films de Moullet, mais dans un sens opposé. Dans le film il est utilisé pour décrire l'effort de respect hétérosexuel ("je te repsecte assez pour faire ce travail avec toi") mais ici comme finalement dans d'autre film ("Genèse d'un Repas"), Moullet laisse d'ailleurs l'autre énoncer les enjeux du travail: la délégation de cet énoncé n'est en effet pas que du côté de la critique de l'exploitation, Questerbert perçoit sans doute que derrière l'humour de Moullet, elle il y a un technique d'englobement de la critique sociale dans la distance ironique sur le travail ):
http://www.kinok.com/index.php?option=com_content&view=article&id=392:interview-nom-realisateur-pour-nom-du-film&catid=38:interviews#_ftn1
...le première prise a dû être la bonne pour la scène où elle écrase un set de thé sur la tête de Luc Moullet
Bizarrement le nom d'Eustache n'est jamais cité, alors qu'il me semble que son personnage se tient en quelque sorte au milieu de Marie et Veronika (le monologue sur l'avortement est très proche de celui du scénario d'Eustache)
(je me demande également comment elle peut dire qu'elle a eu Panofsky comme prof, sans doute un lapsus oral dans lequel elle place sur le même plan formation et influence).
Elle a aussi fait un film en 2000, la "Chambre Obscure", relecture féministe de Boccace, qui a l'air d'avoir été bien accueilli, qui semble intéressant.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Un entretien avec Jean-Charles Hue dans la jeune (et plutôt austère) revue Perséverance que j'ai découverte récemment : http://www.revueperseverance.fr/?p=374
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
http://www.gala.fr/l_actu/on_ne_parle_que_de_ca/nicolas_sarkozy_veut_recevoir_a_l_elysee_l_equipe_d_intouchables_247983
Bref...
Bref...
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"L'Oeuf du Serpent" de Bergman.
D'abord je me suit dit que c'est génial, un croisement entre Musil et THX 1138 pour décrire la montée du facisme.
Sauf que cela pue un peu beaucoup, c'est un film puritain, en ce sens qu'il incarne non pas le point de vue des hommes sur la culpabilité, mais l'inverse, et qu'il fait du nazisme et de l'humanité deux objets isomorphes, pareillement extérieurs à un mal fondamental. Formellement c'est parfait mais ça reste un film de la vague "rétro" des années 1970, qui il me semble a surtout influencé le traitement de la BD réaliste sur le facisme. Quand même en dessous des Damnés de Visconti
D'abord je me suit dit que c'est génial, un croisement entre Musil et THX 1138 pour décrire la montée du facisme.
Sauf que cela pue un peu beaucoup, c'est un film puritain, en ce sens qu'il incarne non pas le point de vue des hommes sur la culpabilité, mais l'inverse, et qu'il fait du nazisme et de l'humanité deux objets isomorphes, pareillement extérieurs à un mal fondamental. Formellement c'est parfait mais ça reste un film de la vague "rétro" des années 1970, qui il me semble a surtout influencé le traitement de la BD réaliste sur le facisme. Quand même en dessous des Damnés de Visconti
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Vu "Le sacrifice" de Tarkovski.
C'est beau. Alors je m'en repasse des images :
C'est beau. Alors je m'en repasse des images :
Eyquem- Messages : 3126
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"Two gates of sleep" d'Alistair Banks Griffin, un premier film.*
Oh punaise : ça commence dans la torpeur des soirs d’été, et ça finit au fond du trou, de la nuit, dans la boue, avec des asticots en embuscade prêts à se jeter sur votre cadavre. Une épreuve.
* les deux portes du sommeil, ce sont les portes de corne et d'ivoire dont parle Virgile à la fin de la descente aux Enfers d'Enée : "Il est deux portes du sommeil, l'une, dit-on, est de corne, par où une issue facile est donnée aux ombres véritables ; l'autre, d'un art achevé, resplendit d'un ivoire éblouissant, c'est par là cependant que les Mânes envoient vers le ciel l'illusion des songes de la nuit." C'est par ces portes que les rêves viennent hanter le sommeil des dormeurs, et c'est par elles aussi que les dormeurs se transportent en l'autre monde.
Eyquem- Messages : 3126
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"La Source" de Bergman, que j'ai beaucoup aimé. En effet très proche du cinéma japonais de la même époque (mais sns doute plus Mizoguichi que Kurosawa).
Les scènes où les meurtriers viennent à la ferme des parents de leur victime son très riches, en apparence c'est un conte symbolique, mais les enjeux politiques sont montré de façon immédiatement littérale, (la mère chrétienne, portée spontanément sur le pardon et symétriquement la mortification, mais qui en fait préparematériellement la vengeance de son mari en enfermant l'enfant innocent avec ses frères, mais qui pour juger la vengeance doit la laisser à autrui, contradiction que les personnages païens ne connaissance pas).
Dans les années 1990 il y avait dans le cinéma français toute une vague de films mettant en scène dans une atmosphère de conte cruel des tueurs (Sombre, Peau d’Homme Cœur de Bête, A tout de Suite, de manière plus indirecte Roberto Succo qui lui se donnait comme une double démystification, à la fois de Succo et de Koltès, et le beau personnage joué par Isild le Besco disparaissait progressivement) , finalement assez intéressants, et il me semble qu’ils devaient beaucoup à la Source dans leur manière insister sur l’évènement « pur » de la rencontre plus que sur le profil psychologique du tueur.
Ce courant a d’ailleurs progressivement disparu dans les années 2000 (conséquence indirecte du fait que le concept politique de « lien social » a été absorbé dans celui de « sécurité » ?)
Aussi vu "India Song" de Duras, pas mal non plus, sans en avoir l'air presque un documentaire sur les micro-sociétés occidentales en milieu colonial (où le recul moral sur le colonialisme est dans la réalité aussi une sorte de voix off, individuelle, la recréation monologué d'un dialogue imaginaire, sans doute identique à ce qui se passe dans celle des subjectivités voisines. Les sentiments s'échangent plus sur un régime de séparation dans la ressemblance que de réciprocité, d'où l’importance de la spéculation sur la sexualisé d'autrui, qui complémente directement la langue diplomatique, qui montre que le pouvoir excède la notion d'intérêt )
Les scènes où les meurtriers viennent à la ferme des parents de leur victime son très riches, en apparence c'est un conte symbolique, mais les enjeux politiques sont montré de façon immédiatement littérale, (la mère chrétienne, portée spontanément sur le pardon et symétriquement la mortification, mais qui en fait préparematériellement la vengeance de son mari en enfermant l'enfant innocent avec ses frères, mais qui pour juger la vengeance doit la laisser à autrui, contradiction que les personnages païens ne connaissance pas).
Dans les années 1990 il y avait dans le cinéma français toute une vague de films mettant en scène dans une atmosphère de conte cruel des tueurs (Sombre, Peau d’Homme Cœur de Bête, A tout de Suite, de manière plus indirecte Roberto Succo qui lui se donnait comme une double démystification, à la fois de Succo et de Koltès, et le beau personnage joué par Isild le Besco disparaissait progressivement) , finalement assez intéressants, et il me semble qu’ils devaient beaucoup à la Source dans leur manière insister sur l’évènement « pur » de la rencontre plus que sur le profil psychologique du tueur.
Ce courant a d’ailleurs progressivement disparu dans les années 2000 (conséquence indirecte du fait que le concept politique de « lien social » a été absorbé dans celui de « sécurité » ?)
Aussi vu "India Song" de Duras, pas mal non plus, sans en avoir l'air presque un documentaire sur les micro-sociétés occidentales en milieu colonial (où le recul moral sur le colonialisme est dans la réalité aussi une sorte de voix off, individuelle, la recréation monologué d'un dialogue imaginaire, sans doute identique à ce qui se passe dans celle des subjectivités voisines. Les sentiments s'échangent plus sur un régime de séparation dans la ressemblance que de réciprocité, d'où l’importance de la spéculation sur la sexualisé d'autrui, qui complémente directement la langue diplomatique, qui montre que le pouvoir excède la notion d'intérêt )
Dernière édition par Tony le Mort le Dim 25 Déc 2011 - 23:43, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"Medium Cool" de Haskell Wexler (directeur photo chez Forman, Malick, Ashby, Jewison et... Lucas).
Le sous-titre du film aurait pu être "où est la réalité ?", tellement cette question est récurrente et amené en long et en large dans le film (montage alternant entre "pure/impure fiction et "impures/pures" séquences documentaires à la Wiseman). Mais là encore, Wexler brouille totalement les pistes (la plupart des séquences dites documentaires sont minutieusement préparées). Les séquences concernant les émeutes rappellent ce que Scorsese fera avec "Streets Scenes" en 1970.
Du gaz lacrymogènes est répandu, les manifestants reculent et la caméra se met à vaciller. On peut alors entendre une personne crier à l'adresse du cameramen : "Tu vois, Haskell, c'est bel et bien la réalité cette fois".
Mais comme dirait Anne : "La réalité c'est autre chose".
De Palma s'est très probablement inspiré de ce film pour son "Hi, Mom !". On y retrouve en tout cas les mêmes thèses, "le cameraman, c'est le voyeur et sa caméra son sexe" (les scènes de violences filmées sont souvent suivies par des scènes de sexe d'ailleurs), ainsi que la même utilisation du faux documentaire (Mondo Carne, autre documentaire bidon célèbre, est d'ailleurs cité dans le film). Grande utilisation du zoom dans la première partie du film : la masturbation selon Daney/Godard.
Tout est théâtre, répétions. Des militaires participent à un exercice anti-émeute avant d'avoir affaire à la vraie foule, on prépare les interviews avant de les filmer, on répète deux fois les mêmes choses etc.. (le film s'ouvre et se clôt sur un accident de voiture, référence à JLG qui est cité de long en large).
Wexler n'est pas très complaisant avec les hippies et les jeunes, dès qu'ils apparaissent à l'écran il superpose par dessus les paroles vitriolés anti-Flower Power de Zappa. "Peace, Peace", mais pas trop quand même. D'ailleurs, le symbole de la paix est le pigeon et non la colombe. Dans ce sens, on pourrait peut être le rapprocher de "Electric Glide In Blue", je ne sais pas.
Bergala doit surement détester ce film, lui qui se plaint tout le temps que le cinéma de la fin des années 60 doit toujours montre "les caméras en action et différencier le réel du faux". Je me rappelle qu'il avait un peu égratigné "La Chinoise" à cause de cela.
Le sous-titre du film aurait pu être "où est la réalité ?", tellement cette question est récurrente et amené en long et en large dans le film (montage alternant entre "pure/impure fiction et "impures/pures" séquences documentaires à la Wiseman). Mais là encore, Wexler brouille totalement les pistes (la plupart des séquences dites documentaires sont minutieusement préparées). Les séquences concernant les émeutes rappellent ce que Scorsese fera avec "Streets Scenes" en 1970.
Du gaz lacrymogènes est répandu, les manifestants reculent et la caméra se met à vaciller. On peut alors entendre une personne crier à l'adresse du cameramen : "Tu vois, Haskell, c'est bel et bien la réalité cette fois".
Mais comme dirait Anne : "La réalité c'est autre chose".
De Palma s'est très probablement inspiré de ce film pour son "Hi, Mom !". On y retrouve en tout cas les mêmes thèses, "le cameraman, c'est le voyeur et sa caméra son sexe" (les scènes de violences filmées sont souvent suivies par des scènes de sexe d'ailleurs), ainsi que la même utilisation du faux documentaire (Mondo Carne, autre documentaire bidon célèbre, est d'ailleurs cité dans le film). Grande utilisation du zoom dans la première partie du film : la masturbation selon Daney/Godard.
Tout est théâtre, répétions. Des militaires participent à un exercice anti-émeute avant d'avoir affaire à la vraie foule, on prépare les interviews avant de les filmer, on répète deux fois les mêmes choses etc.. (le film s'ouvre et se clôt sur un accident de voiture, référence à JLG qui est cité de long en large).
Wexler n'est pas très complaisant avec les hippies et les jeunes, dès qu'ils apparaissent à l'écran il superpose par dessus les paroles vitriolés anti-Flower Power de Zappa. "Peace, Peace", mais pas trop quand même. D'ailleurs, le symbole de la paix est le pigeon et non la colombe. Dans ce sens, on pourrait peut être le rapprocher de "Electric Glide In Blue", je ne sais pas.
Walked past the wig store / Danced at the Fillmore / I'm completely stoned / I'm hippy & I'm trippy / I'm a gypsy on my own / I'll stay a week & get the crabs & / Take a bus back home / I'm really just a phony /But forgive me / 'Cause I'm stoned
Bergala doit surement détester ce film, lui qui se plaint tout le temps que le cinéma de la fin des années 60 doit toujours montre "les caméras en action et différencier le réel du faux". Je me rappelle qu'il avait un peu égratigné "La Chinoise" à cause de cela.
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Une Aventure de Billy the Kid (a girl is a Gun)
Vraiment très bien, à nouveau beau personnage Marie Christine Questerbert. Léaud inégal, mais ça sert le film. Rappelle un peu Fando & Lis de Jodorowski, annonce Deadlock de Roland Klick (la très belle musique de Patrice Moullet n’est pas si éloignée de celle de CAN) et tournage digne de Werner Herzog ( Marie Christine Questerbert a bien failli se tuer à la fin du film, et impossible de penser à un accident vu l'enchaînement thématique et le fait que le film était tourné dans l'ordre). Montage de Jean Eustache.
Le film contient un vrai propos sur le féminisme et sa cohérence avec la libération économique et intellectuelle projetées dans les années 60 (quoiqu’un un peu obvie, car chez Moullet il semble que le travail de liberté et de la critique n’est jamais montrée seul, mais à égalité avec quoi il s ‘arrache et ce qui le retient). La fin est à la fois incompréhensible et transparente, il y a sûrement moyen de faire coïncider le film avec une analyse ambitieuse de l’idée que dans les années 60 on faisait coïncider libération réelle et dépassement de la narration, et que par conséquent, la réaction était déjà formellement contenue dans le fait que le retour à une discours littéral et descriptif inclut la théorie et la critique, et que le film représente déjà cette inquiétude, mais je vais vous l’épargner.
En effet Jeanne Balibar a raison, la chanson est jolie.
Vraiment très bien, à nouveau beau personnage Marie Christine Questerbert. Léaud inégal, mais ça sert le film. Rappelle un peu Fando & Lis de Jodorowski, annonce Deadlock de Roland Klick (la très belle musique de Patrice Moullet n’est pas si éloignée de celle de CAN) et tournage digne de Werner Herzog ( Marie Christine Questerbert a bien failli se tuer à la fin du film, et impossible de penser à un accident vu l'enchaînement thématique et le fait que le film était tourné dans l'ordre). Montage de Jean Eustache.
Le film contient un vrai propos sur le féminisme et sa cohérence avec la libération économique et intellectuelle projetées dans les années 60 (quoiqu’un un peu obvie, car chez Moullet il semble que le travail de liberté et de la critique n’est jamais montrée seul, mais à égalité avec quoi il s ‘arrache et ce qui le retient). La fin est à la fois incompréhensible et transparente, il y a sûrement moyen de faire coïncider le film avec une analyse ambitieuse de l’idée que dans les années 60 on faisait coïncider libération réelle et dépassement de la narration, et que par conséquent, la réaction était déjà formellement contenue dans le fait que le retour à une discours littéral et descriptif inclut la théorie et la critique, et que le film représente déjà cette inquiétude, mais je vais vous l’épargner.
En effet Jeanne Balibar a raison, la chanson est jolie.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Dans la famille Varda, Demy les documentaires de Agnès Varda sur "Arte" ,"Amerciano" de Mathieu Demy et "peau d'âne" de Jacques Demy
Maya- Messages : 280
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Carnage de Polanski
Tout est affaire de cadre chez Polanski, en tout cas dans ce film; il suffit que l'écran digital d'un téléphone portable cadré serré montre le mot « mother » pour que le public dans la salle s'esclaffe, se délectant de l'exaspération d'un personnage confronté aux appels incessants d'une mère inquiète: mais peut être cela est il également un indice plus fécond à la compréhension, car le spectateur, handicapé qu'il est par l'impossibilité de voir hors du cadre proposé, est comme l'enfant à l'intérieur du ventre maternel, dont le monde, l'extérieur, est dissimulé, voilé. En allant plus loin, on peut imaginer que symboliquement, la mère serait le cadre, ce qui est donné au regard candide, la première sensation, vision. Un ensemble fermé.
Le fait que Polanski ait ajouté dans sa scénographie un large miroir sur un mur à côté de l'entrée de l'appartement, dans le vestibule ouvert menant au séjour, miroir dans le plan mais présentant un hors champ de ce plan, c'est une manière de divulguer au spectateur un aperçu émancipé des contraintes de l'image cinématographique, qui dissimule autant qu'elle montre, rétrécie la perception du monde autant qu'elle le dévoile.
De même, le premier plan, fixe, recentre le trajet du regard par deux arbres dénudés qui encerclent le lieu de la dispute muette entre les enfants, enjeu de la rencontre entre leurs parents respectifs.
Ce plan revient à la fin, avec les deux mêmes enfants; des badauds promènent leurs chiens, des joggeurs vont de part et d'autre de l'espace et disparaissent hors du champ, des bateaux naviguent sur le fleuve que surplombe les grattes ciels: le monde et son fourmillement tend à désintégrer ce cadre à l'intérieur du cadre, un effet inverse à celui du miroir, qui lui aussi fait office d'extériorité, mais qu'il convient de rapprocher, car ces deux éléments font partie de la construction formelle, renvoient l'un à l'autre (...)
Tout est affaire de cadre chez Polanski, en tout cas dans ce film; il suffit que l'écran digital d'un téléphone portable cadré serré montre le mot « mother » pour que le public dans la salle s'esclaffe, se délectant de l'exaspération d'un personnage confronté aux appels incessants d'une mère inquiète: mais peut être cela est il également un indice plus fécond à la compréhension, car le spectateur, handicapé qu'il est par l'impossibilité de voir hors du cadre proposé, est comme l'enfant à l'intérieur du ventre maternel, dont le monde, l'extérieur, est dissimulé, voilé. En allant plus loin, on peut imaginer que symboliquement, la mère serait le cadre, ce qui est donné au regard candide, la première sensation, vision. Un ensemble fermé.
Le fait que Polanski ait ajouté dans sa scénographie un large miroir sur un mur à côté de l'entrée de l'appartement, dans le vestibule ouvert menant au séjour, miroir dans le plan mais présentant un hors champ de ce plan, c'est une manière de divulguer au spectateur un aperçu émancipé des contraintes de l'image cinématographique, qui dissimule autant qu'elle montre, rétrécie la perception du monde autant qu'elle le dévoile.
De même, le premier plan, fixe, recentre le trajet du regard par deux arbres dénudés qui encerclent le lieu de la dispute muette entre les enfants, enjeu de la rencontre entre leurs parents respectifs.
Ce plan revient à la fin, avec les deux mêmes enfants; des badauds promènent leurs chiens, des joggeurs vont de part et d'autre de l'espace et disparaissent hors du champ, des bateaux naviguent sur le fleuve que surplombe les grattes ciels: le monde et son fourmillement tend à désintégrer ce cadre à l'intérieur du cadre, un effet inverse à celui du miroir, qui lui aussi fait office d'extériorité, mais qu'il convient de rapprocher, car ces deux éléments font partie de la construction formelle, renvoient l'un à l'autre (...)
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Intouchables est un film qui pose la question de la différence, comme on dit. Banlieue Versus Handicap, rencontre au sommet des tabous de la société française, il fallait oser, ils l'ont fait, et ça parle aux gens.
Le Noir est joué par un vrai Noir, c'est dire s'il n'est pas joué du tout, au contraire tellement authentique, tellement naturel, naturellement pas-comme-nous. Sa différence ? Zéro culture, mais une vitalité énorme. C'est parce qu'il n'a pas de culture qu'il peut être si spontané, si simple et si funky. C'est vraiment l'africain de Sarko et Guaino, qui n'est pas encore entré dans l'histoire, etc. Chic, voilà l'histoire.
A l'inverse, le handicapé est joué par un non-handicapé. Ce n'est pas par phobie du handicap, mais plutôt par professionnalisme : car il est essentiel de montrer que le malade et le sain sont deux faces réversibles : le handicap c'est ce qui reste quand on nous a tout enlevé, notre vaporeuse "identité".
Dans ce film, le handicapé est le même, et le Noir est l'autre, et il s'agit de leur bonne vieille rencontre. Qu'apprennent-ils ? Que le maître-même peut allégrement bazarder son encombrante, fastidieuse culture, qu'il s'amusera bien davantage avec l'autre mais restera bien le même. Car en dernière analyse, ce qui caractérise ce même est d'être celui qui a plein de pognon. Ça suffit amplement, et ça ne se discute pas.
C'est un discours bulldozer.
C'est explicitement un film sur le dégoût, et l'habitude qui finit par lever le dégoût.
On voit les aides-soignants venus candidater chez Cluzet tous nuls, insipides, on se rit de leur "humanisme" gluant, de leurs mièvres bons sentiments genre souci du care. A l'inverse une franche relation commerciale, si possible détaxée, apporte le bonheur à l'employé aussi bien qu'à l'employeur. L'employé rigole, il semble épanoui, mais ce Vendredi n'entre toujours pas dans l'histoire, rien à faire, ça ne l'intéresse pas, et l'employeur s'apprête à le rejoindre pour entrer dans la légende. Images d'Epinal.
L'art contemporain est le motif du gag principal du film. Le serviteur se moque de voir son maître contempler un tableau non-figuratif, mais finalement se prend au jeu, peint sa propre toile, que le maître parvient à vendre onze mille euros - et les lui rend ! quelle élégance dans la remise de la prime à la motivation - en abusant toutefois du snobisme d'un acheteur.
Occident millénaire, pauvre Occident!... Ton art dégénéré témoigne de ton épuisement, toi qui as donné au monde la clepsydre, le cabestan. Deviens jachère, où viendront piller les peuples au sang plus neuf!... mais surtout reste bien le maître.
Le Noir est joué par un vrai Noir, c'est dire s'il n'est pas joué du tout, au contraire tellement authentique, tellement naturel, naturellement pas-comme-nous. Sa différence ? Zéro culture, mais une vitalité énorme. C'est parce qu'il n'a pas de culture qu'il peut être si spontané, si simple et si funky. C'est vraiment l'africain de Sarko et Guaino, qui n'est pas encore entré dans l'histoire, etc. Chic, voilà l'histoire.
A l'inverse, le handicapé est joué par un non-handicapé. Ce n'est pas par phobie du handicap, mais plutôt par professionnalisme : car il est essentiel de montrer que le malade et le sain sont deux faces réversibles : le handicap c'est ce qui reste quand on nous a tout enlevé, notre vaporeuse "identité".
Dans ce film, le handicapé est le même, et le Noir est l'autre, et il s'agit de leur bonne vieille rencontre. Qu'apprennent-ils ? Que le maître-même peut allégrement bazarder son encombrante, fastidieuse culture, qu'il s'amusera bien davantage avec l'autre mais restera bien le même. Car en dernière analyse, ce qui caractérise ce même est d'être celui qui a plein de pognon. Ça suffit amplement, et ça ne se discute pas.
C'est un discours bulldozer.
C'est explicitement un film sur le dégoût, et l'habitude qui finit par lever le dégoût.
On voit les aides-soignants venus candidater chez Cluzet tous nuls, insipides, on se rit de leur "humanisme" gluant, de leurs mièvres bons sentiments genre souci du care. A l'inverse une franche relation commerciale, si possible détaxée, apporte le bonheur à l'employé aussi bien qu'à l'employeur. L'employé rigole, il semble épanoui, mais ce Vendredi n'entre toujours pas dans l'histoire, rien à faire, ça ne l'intéresse pas, et l'employeur s'apprête à le rejoindre pour entrer dans la légende. Images d'Epinal.
L'art contemporain est le motif du gag principal du film. Le serviteur se moque de voir son maître contempler un tableau non-figuratif, mais finalement se prend au jeu, peint sa propre toile, que le maître parvient à vendre onze mille euros - et les lui rend ! quelle élégance dans la remise de la prime à la motivation - en abusant toutefois du snobisme d'un acheteur.
Occident millénaire, pauvre Occident!... Ton art dégénéré témoigne de ton épuisement, toi qui as donné au monde la clepsydre, le cabestan. Deviens jachère, où viendront piller les peuples au sang plus neuf!... mais surtout reste bien le maître.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"Louise Wimmer" : ça c'est pas mal. Le scénario est peut-être un peu trop balisé, mais voilà un personnage qui existe.
La fin est forte, par sa manière de renverser l'image qu'on se fait des tours de banlieue : sous une belle lumière, elles arrivent au terme du parcours comme le pays de cocagne. Ca change.
(Les fins à la Chaplin ne sont plus possibles : filer à l'horizon, sur la route, rien dans les mains, rien dans les poches, on n'y croit plus. Ici, c'est le retour à la sécurité d'un foyer, le repos de se savoir attaché à un point fixe, la fin de l'errance.)
En plus, on y entend en boucle des bribes de "Sinnerman" de Nina Simone.
Eyquem- Messages : 3126
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
des articles de Cédric Biagini, ingénieur en mécanique il a écrit des articles et des essais trés intéréssants sur les nouvelles technologies et leurs impacts sur notre société.
http://www.franceculture.fr/oeuvre-la-tyrannie-technologique-critique-de-la-societe-numerique-de-guillaume-carnino.html
http://www.franceculture.fr/oeuvre-la-tyrannie-technologique-critique-de-la-societe-numerique-de-guillaume-carnino.html
Maya- Messages : 280
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
le château dans le ciel de Miyazaki accompagne les rêves de filiation de deux orphelins, un petit garçon travaillant à la mine, une fillette au passé opaque, tombant du ciel; ces rêves, qui coïncident bientôt avec l'image de Laputa, le château aérien mythique, sont travaillés par l'histoire japonaise du début du XX ème siècle, impérialisme et militarisme, traumatisme de la guerre, des bombardements, statut quasi divin de l'empereur.
Ces rêves n'appartiennent pas à ces enfants (l'un dicté par un père, dont l'absence hante le garçon, l'autre par une pierre magique, volante, dont est, à nombreuses reprises, pointée l'ambivalence, la dangerosité), il les exploitent, en font des esclaves soumis, émus par une féérie dangereuse, qui a coupé ses racines avec la terre, c'est ainsi que Sheeta, la fillette, le comprend, à la fin, en se souvenant d'une comptine pastorale.
L'adversité, face aux enfants, dans le film, se décompose en trois figures, positives ou négatives, on ne le sait pas au début du film, on le comprend peu à peu:
_Il y a des pirates, les joyeux pirates de l'île au trésor, bien qu'ils soient plus dans les acrobaties aériennes (Europe réinventée entre pâturages miniers et vastitude du ciel explorée par des machines sortie du giron du roman scientifique), des enfants, des garnements eux aussi, soutenus par l'énergie vitale, fondamentale, créatrice, de leur "Maman", personnage plein d'ardeur, d'une énergie et d'une sagacité inépuisable. La cupidité des pirates est pleine de fantaisie: pour eux les babioles brillantes qu'ils pensent trouver sur Laputa, ces bijoux et pierres précieuses, ignoré leur éclat, sont promesses de nouvelles aventures, de nouvelles facéties aériennes, absoutes de tout sérieux, de toute inquiétude mortelle.
L'important, c'est l'image de la mère, la pulsion vitale qui pousse et génère.
_A côté, sur une ligne strictement parallèle, l'image du père, de la masculinité autoritaire, se scinde: d'une part l'uniformité dogmatique, brutale, aveugle, du militarisme représenté par un groupe indistinct de soldats poursuivant dans une forteresse volante la puissance potentielle que représenterait Laputa. Et en leur sein, en un premier temps, un agent du gouvernement dont on comprend que les mobiles sont indépendants, individualistes: à l'instar des enfants, à la recherche d'une ascendance; il se proclame roi de Laputa et fait exemple du pouvoir annihilateur du château, provoquant en pleine mer une explosion dont les effets ressemblent à un nuage atomique. Est-il pour Miyazaki, pour la compréhension symbolique du récit, la figuration d'une autre volonté de puissance, mégalomaniaque, américaine celle-ci? On pense à ce que disait Godard de ce pays sans Histoire, l'Amérique, qui va en guerre en Irak parce que c'est là que se situe le berceau de la civilisation. Je ne sais pas.
Il y a aussi cette scène "furiosa" de la destruction de la forteresse des militaires, très émouvante, d'une étrangeté angoissée, dans laquelle un robot en apparence éteint, et détenu, se remet à fonctionner quand Sheeta prononce, comme un écho à un souvenir, quelques mots interdits qui réactivent le pouvoir de sa pierre. Le robot la poursuit, cherche à la saisir, marche dans le métal en fusion, comme une boue originelle et brulante. Elle s'enfuit dans le chaos et les flammes. Il y a le même sigle à l'intérieur de la pierre et sur le poitrail de l'élégant monstre mécanique, témoignage d'un lien, d'une filiation, qui soudain se trouble des sentiments de peur et de désir, de reconnaissance et d'horreur.
Beaucoup de similarités, d'inquiétudes, qui se retrouvent chez Cameron en fait, dans Avatar entre autres.
Ces rêves n'appartiennent pas à ces enfants (l'un dicté par un père, dont l'absence hante le garçon, l'autre par une pierre magique, volante, dont est, à nombreuses reprises, pointée l'ambivalence, la dangerosité), il les exploitent, en font des esclaves soumis, émus par une féérie dangereuse, qui a coupé ses racines avec la terre, c'est ainsi que Sheeta, la fillette, le comprend, à la fin, en se souvenant d'une comptine pastorale.
L'adversité, face aux enfants, dans le film, se décompose en trois figures, positives ou négatives, on ne le sait pas au début du film, on le comprend peu à peu:
_Il y a des pirates, les joyeux pirates de l'île au trésor, bien qu'ils soient plus dans les acrobaties aériennes (Europe réinventée entre pâturages miniers et vastitude du ciel explorée par des machines sortie du giron du roman scientifique), des enfants, des garnements eux aussi, soutenus par l'énergie vitale, fondamentale, créatrice, de leur "Maman", personnage plein d'ardeur, d'une énergie et d'une sagacité inépuisable. La cupidité des pirates est pleine de fantaisie: pour eux les babioles brillantes qu'ils pensent trouver sur Laputa, ces bijoux et pierres précieuses, ignoré leur éclat, sont promesses de nouvelles aventures, de nouvelles facéties aériennes, absoutes de tout sérieux, de toute inquiétude mortelle.
L'important, c'est l'image de la mère, la pulsion vitale qui pousse et génère.
_A côté, sur une ligne strictement parallèle, l'image du père, de la masculinité autoritaire, se scinde: d'une part l'uniformité dogmatique, brutale, aveugle, du militarisme représenté par un groupe indistinct de soldats poursuivant dans une forteresse volante la puissance potentielle que représenterait Laputa. Et en leur sein, en un premier temps, un agent du gouvernement dont on comprend que les mobiles sont indépendants, individualistes: à l'instar des enfants, à la recherche d'une ascendance; il se proclame roi de Laputa et fait exemple du pouvoir annihilateur du château, provoquant en pleine mer une explosion dont les effets ressemblent à un nuage atomique. Est-il pour Miyazaki, pour la compréhension symbolique du récit, la figuration d'une autre volonté de puissance, mégalomaniaque, américaine celle-ci? On pense à ce que disait Godard de ce pays sans Histoire, l'Amérique, qui va en guerre en Irak parce que c'est là que se situe le berceau de la civilisation. Je ne sais pas.
Il y a aussi cette scène "furiosa" de la destruction de la forteresse des militaires, très émouvante, d'une étrangeté angoissée, dans laquelle un robot en apparence éteint, et détenu, se remet à fonctionner quand Sheeta prononce, comme un écho à un souvenir, quelques mots interdits qui réactivent le pouvoir de sa pierre. Le robot la poursuit, cherche à la saisir, marche dans le métal en fusion, comme une boue originelle et brulante. Elle s'enfuit dans le chaos et les flammes. Il y a le même sigle à l'intérieur de la pierre et sur le poitrail de l'élégant monstre mécanique, témoignage d'un lien, d'une filiation, qui soudain se trouble des sentiments de peur et de désir, de reconnaissance et d'horreur.
Beaucoup de similarités, d'inquiétudes, qui se retrouvent chez Cameron en fait, dans Avatar entre autres.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Vu Parmi nous de Clément Cogitore. J'ai trouvé ça très beau, très fort. Je ne sais plus si tu l'as vu Adeline, je suppose que oui, en avais-tu parlé par ici ?
Il y a une scène de rave qui rappelle un peu le cinéma de Klotz/Perceval, entre La Blessure et La Question Humaine. On peut aussi penser à Des Pallières (Adieu).
Amin, jeune clandestin, vient de rejoindre un campement au bord de la forêt. Chaque nuit est l’occasion de tenter de gagner la zone portuaire et d’embarquer sous les camions. Au cours de cette trajectoire sans cesse renouvelée dans le paysage, il découvre qu’entre la forêt et les hommes qui la parcourent, agissent d’autres groupes, d’autres visages, d’autres espaces.
Il y a une scène de rave qui rappelle un peu le cinéma de Klotz/Perceval, entre La Blessure et La Question Humaine. On peut aussi penser à Des Pallières (Adieu).
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Je ne savais pas que James Baldwin avait écrit sur Bergman comme journaliste pour Esquire.
je n'ai pas encore tout lu, mais ça a l'air fort intéressant, son ton et sa description des studios rappellent un peu ceux des articles que Truffaut écrivait à la même époque
http://bergmanorama.webs.com/esquire_baldwin.htm
je n'ai pas encore tout lu, mais ça a l'air fort intéressant, son ton et sa description des studios rappellent un peu ceux des articles que Truffaut écrivait à la même époque
http://bergmanorama.webs.com/esquire_baldwin.htm
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Je suis encore fait blouser. Et cette fois, c'était pas marqué sur la jaquette.
Un des nanars le plus consternants de ces cinq dernières années, facilement.
J'ai rencontré le diable de Kim Jee-woon.
Déjà, j'avais pas gaffe. Après 15 minutes, j'ai reconnu l'espèce de tentative de style syncrétique-bouillabaisse du même mec qui avait signé "a bittersweet life", qui me semblait difficilement surpassable
Encore une histoire de vengeance pondue par un écolier sadique-anal-régressif de 6 ans en retenue.
Primé dans des tas de festivaux, ce truc s'est ramassé une tripotée de 5 étoiles un peu partout dans la presse qui pense.
Je m’attellerai éventuellement à en dresser un pitch le plus scientifiquement fidèle, et ce sera un sacré challenge, bien plus difficile que pour "la porte du passé". Un défi spéculatif face à l'indicible du kitsch absolu enrobé de vide.
Pour tenter d'imaginer ce que ça peut être, il faut postuler une sorte de miction entre les power-rangers (dans la parodie des inconnus), Pierre Richard (période "les malheurs d'Alfred") Claude Lelouch, Wes Craven, Tarantino, William Lustig, Tom and Jerry, Bronson (période "le justicier de minuit), et Jean-Jacques Rousseau*, le belge, "cinéaste de l'absurde". Et pour la musique un mix entre André Rieu, Morricone (pas inspiré), Jean-Michel Jarre et Richard Clayderman.
Tout ça en moins bien.
Le truc qui achève:
Je découvre sur wiki que ce "j'ai rencontré le diable" a raflé l'an passé trois prix, et non des moindres: de la critique internationale, du public, et du jury jeune., au festival de ? de?
Géééérardmer, bien sûr! ça devient un running gag éculé.
Quand c'est trois fois plus nul que d'habitude, ils récompensent trois fois plus.
C'est l'effet "Gérardmer", la malédiction Gérardmer. Je pense vraiment que ça se passe à la cantine.
(* réédité sur le topic "JJ Rousseau)
Un des nanars le plus consternants de ces cinq dernières années, facilement.
J'ai rencontré le diable de Kim Jee-woon.
Déjà, j'avais pas gaffe. Après 15 minutes, j'ai reconnu l'espèce de tentative de style syncrétique-bouillabaisse du même mec qui avait signé "a bittersweet life", qui me semblait difficilement surpassable
Encore une histoire de vengeance pondue par un écolier sadique-anal-régressif de 6 ans en retenue.
Primé dans des tas de festivaux, ce truc s'est ramassé une tripotée de 5 étoiles un peu partout dans la presse qui pense.
- Une oeuvre choc dont on ne ressort pas indemne.
- On ressort de "J'ai rencontré le diable" durablement marqué, avec le sentiment d'avoir assisté à un spectacle d'une rare intensité, sans concession mais ni complaisance non plus, jouant avec les émotions, les sensations et l'intelligence du spectateur sans jamais tricher. (...) On ne peut que saluer la puissance d'une oeuvre implacable.
- [...] ceux qui auront le courage d'embarquer pour ce voyage ambigu et nihiliste [...] décèleront l'empreinte d'un film majeur.
- Brillant. Un des plus gros chocs ciné de l'année.
etc, etc
Je m’attellerai éventuellement à en dresser un pitch le plus scientifiquement fidèle, et ce sera un sacré challenge, bien plus difficile que pour "la porte du passé". Un défi spéculatif face à l'indicible du kitsch absolu enrobé de vide.
Pour tenter d'imaginer ce que ça peut être, il faut postuler une sorte de miction entre les power-rangers (dans la parodie des inconnus), Pierre Richard (période "les malheurs d'Alfred") Claude Lelouch, Wes Craven, Tarantino, William Lustig, Tom and Jerry, Bronson (période "le justicier de minuit), et Jean-Jacques Rousseau*, le belge, "cinéaste de l'absurde". Et pour la musique un mix entre André Rieu, Morricone (pas inspiré), Jean-Michel Jarre et Richard Clayderman.
Tout ça en moins bien.
Le truc qui achève:
Je découvre sur wiki que ce "j'ai rencontré le diable" a raflé l'an passé trois prix, et non des moindres: de la critique internationale, du public, et du jury jeune., au festival de ? de?
Géééérardmer, bien sûr! ça devient un running gag éculé.
Quand c'est trois fois plus nul que d'habitude, ils récompensent trois fois plus.
C'est l'effet "Gérardmer", la malédiction Gérardmer. Je pense vraiment que ça se passe à la cantine.
(* réédité sur le topic "JJ Rousseau)
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
« Sex Jack » de
Wakamatsu.
C’est très bien mais je réalise que ma cinéphilie est très petite bourgeoise, parce des coffrets DVD hors de prix me donnent une image très précise de la manière dont l’extrême gauche révolutionnaire japonaise a pris conscience en 1970 de l’impasse dans laquelle elle se mettait (l’effacement du lien avec le prolétariat, l’idée que le masochisme fasse l’objet d’une herméneutique qui suffit à constituer une conscience minoritaire, l’idée que la violence est l’achèvement d’un programme, plutôt que la préparation de ce programme, qui fait que le groupe ne peut plus critiquer uniquement que les formes non-achevées et non consolidées du capitalisme – comme l’idée que la sexualité détermine un camps). Mais par contre j’en sais rien sur la Grèce de 2012, j’apprends qu’il y a des manifestations le mois d‘après.
Par contre le film se prêtent à des interprétations très plastiques (Gaspard Noé: "c'est l'homme seul qui va plus loin que le groupe", sur un autre forum l'idée que le survivant devient un vengeur ultraviolent, radical et invincible, mouai... Wakamtsu aurait dit plus simplement "je voulais montrer que ces groupes étaient très tôt infiltrés et manipulés"). On cernerait plus la vraie spécificité du film en parlant de la raison d'être et de l'impact des brusques passages à la couleur sur la même bobine et dans le même plan, au moment où les femmes victimes de viols résument les raisons de leurs agresseurs et reprennent sur le mode de la croyance pour elles ce qui est une justification chez l'autre. L'idée que l'histoire du monde continue après la sommation des raison de sa critique, la mélancolie du révolutionnaire: le signification sentimentale de l'évènement qui est déjà donné avant l'évènement lui-même, et constitue la limite de la recherche et de l'invention de situations, et est devient la figuration commercialement vendable d'une révolution qui n'a pas eu eu lieue. A cause de cela la violence reste articulée à l'idée d'expression.
Wakamatsu.
C’est très bien mais je réalise que ma cinéphilie est très petite bourgeoise, parce des coffrets DVD hors de prix me donnent une image très précise de la manière dont l’extrême gauche révolutionnaire japonaise a pris conscience en 1970 de l’impasse dans laquelle elle se mettait (l’effacement du lien avec le prolétariat, l’idée que le masochisme fasse l’objet d’une herméneutique qui suffit à constituer une conscience minoritaire, l’idée que la violence est l’achèvement d’un programme, plutôt que la préparation de ce programme, qui fait que le groupe ne peut plus critiquer uniquement que les formes non-achevées et non consolidées du capitalisme – comme l’idée que la sexualité détermine un camps). Mais par contre j’en sais rien sur la Grèce de 2012, j’apprends qu’il y a des manifestations le mois d‘après.
Par contre le film se prêtent à des interprétations très plastiques (Gaspard Noé: "c'est l'homme seul qui va plus loin que le groupe", sur un autre forum l'idée que le survivant devient un vengeur ultraviolent, radical et invincible, mouai... Wakamtsu aurait dit plus simplement "je voulais montrer que ces groupes étaient très tôt infiltrés et manipulés"). On cernerait plus la vraie spécificité du film en parlant de la raison d'être et de l'impact des brusques passages à la couleur sur la même bobine et dans le même plan, au moment où les femmes victimes de viols résument les raisons de leurs agresseurs et reprennent sur le mode de la croyance pour elles ce qui est une justification chez l'autre. L'idée que l'histoire du monde continue après la sommation des raison de sa critique, la mélancolie du révolutionnaire: le signification sentimentale de l'évènement qui est déjà donné avant l'évènement lui-même, et constitue la limite de la recherche et de l'invention de situations, et est devient la figuration commercialement vendable d'une révolution qui n'a pas eu eu lieue. A cause de cela la violence reste articulée à l'idée d'expression.
Dernière édition par Tony le Mort le Dim 19 Fév 2012 - 21:48, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"La Saison de la Terreur" de Wakamatsu génial. Deux flics mettent sur écoute et espionnent dans une cité HLM améliorée un militant trotskyste radical qui choisit de se cloîtrer dans un son appartement et de se ratatiner dans le triolisme sexuel goujat et érotico-grabataire avec deux secrétaires de bureau au lieu de passer à la lutte comme il l'a sans doute annoncé juste avant le film. On ne sait pas s'il s'agît de brouiller les pistes pour déjouer la surveillance politique ou de vraiment pêter les plombs, il s'infiltre peut-être dans la vie célibataire et la beauferie comme on infiltrerait une organisation et finalement se place en dehors du discours politique en se révoltant contre la vie qu'il a décidé au lieu d'une révolte contre la vie subie. Et 5 personnes s'ennuient. Très bien filmé, là j'avoue que Wakamatsu compte.
Sorte de croisement entre "Conversation Secrète", Antonioni et "Dillinger est Mort", beaucoup à en dire, je ne suis pas sûr de vous l'épargner
Sorte de croisement entre "Conversation Secrète", Antonioni et "Dillinger est Mort", beaucoup à en dire, je ne suis pas sûr de vous l'épargner
Invité- Invité
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