Rohmer est mort : le reste est beauté
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Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
JM a écrit:Bonsoir,
Je me pose une question un peu bête depuis la sortie de "Les Amours d'Astrée et Céladon" à propos du médaillon de Astrée que possède Céladon. S'agit-il d'une peinture ou d'une photographie ? Je ne sais pas...
J'ajoute ici la peinture du portrait peint dans le temple :
que manque-t-il ?
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Il serait très intéressant de voir le sens de ce lapsus...levallois/courbevoie...
si une équipe pouvait se former autour de ce problème à mes yeux essentiel, nous pourrions faire avancer les études rohmériennes de façon décisives...
merci
voici les éléments
(ça vient du cinéclubdecaen)
naturellement on voit évidemment le lien entre la voie courbe et la droite... mais le lien à victor hugo est aussi important, de lui Loïc, lira un poème, dont "le sujet" est la transmigration des âmes... la métempsychose, on discute magie et religion; loïc en bon catholique, et en bon philosophe rejette ça comme des croyances populaires bonnes pour les idiots; il fera de même avec l'idée de réminiscence de platon, dont la valeur vraie est rationnelle...
Historiquement quel rapport entre levallois où habite cette fille et courbevoie?
est-ce simplement comme le pense cavell à partir de son désir inconscient de ne pas être retrouvé qu'il faut penser?
ne doit-on pas aussi tenter de penser cette substitution d'un nom à l'autre à partir d'un désir d'habiter ailleurs...d'habiter "courbevoie" plutôt que levallois...
(félicie, est assez rare comme prénom; il fait assez vieux, et presque ridicule, sans même penser à la chanson)
la devise de courbevoie
Curva via mens recta
félicie ne tient pas en place, ne se décide à rien, comme tous les personnages de rohmer elle passe son temps en aller-retour, comme si elle n'avait pas vraiment de chez, elle; elle subit une espèce d'expérience que cavell nomme transcendantale dans une église...
droit/courbe : félicie est fasciné par les nez droit, elle n'aime pas son nez, pas plus que celui de loïc, pas droits tous deux, alors que celui de son grand amour est droit; notons que la première fois que nous apprenons cette fascination pour les nez droit c'est dans un contexte religieux...
si une équipe pouvait se former autour de ce problème à mes yeux essentiel, nous pourrions faire avancer les études rohmériennes de façon décisives...
merci
voici les éléments
Au cours de vacances en Bretagne, Félicie tombe amoureuse de Charles, un jeune cuisinier qui doit partir en stage aux Etats-Unis. Lorsqu'ils se séparent, sur le quai de la gare, elle lui donne son adresse, rue Victor Hugo, mais se trompe de localité, indiquant Courbevoie au lieu de Levallois.
Cinq ans passent. Injoignable à cause de cette malencontreuse erreur, Félicie élève seule Elise, la fille qu'elle a eue de Charles, et se partage entre deux hommes : Loïc, bibliothécaire dans le 18ème arrondissement et Maxence, le patron du salon de coiffure de Belleville où elle travaille.
(ça vient du cinéclubdecaen)
naturellement on voit évidemment le lien entre la voie courbe et la droite... mais le lien à victor hugo est aussi important, de lui Loïc, lira un poème, dont "le sujet" est la transmigration des âmes... la métempsychose, on discute magie et religion; loïc en bon catholique, et en bon philosophe rejette ça comme des croyances populaires bonnes pour les idiots; il fera de même avec l'idée de réminiscence de platon, dont la valeur vraie est rationnelle...
Historiquement quel rapport entre levallois où habite cette fille et courbevoie?
est-ce simplement comme le pense cavell à partir de son désir inconscient de ne pas être retrouvé qu'il faut penser?
ne doit-on pas aussi tenter de penser cette substitution d'un nom à l'autre à partir d'un désir d'habiter ailleurs...d'habiter "courbevoie" plutôt que levallois...
(félicie, est assez rare comme prénom; il fait assez vieux, et presque ridicule, sans même penser à la chanson)
la devise de courbevoie
Curva via mens recta
félicie ne tient pas en place, ne se décide à rien, comme tous les personnages de rohmer elle passe son temps en aller-retour, comme si elle n'avait pas vraiment de chez, elle; elle subit une espèce d'expérience que cavell nomme transcendantale dans une église...
droit/courbe : félicie est fasciné par les nez droit, elle n'aime pas son nez, pas plus que celui de loïc, pas droits tous deux, alors que celui de son grand amour est droit; notons que la première fois que nous apprenons cette fascination pour les nez droit c'est dans un contexte religieux...
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
donc, elle dit habiter au 36 rue victor hugo à courbevoie...
hugo, un des écrivains favoris de rohmer, son favori même a-t-il dit...
on se souvient que rohmer avait réalisé pour la télé scolaire un doc sur hugo (qui a vu? pas moi); ici quelques images
de ce film, j'extrais comme indice pour penser la relation du cinéma à la nature, et donc le réalisme de Rohmer, ce passage de la lettre de hugo à l'ami belge : "si vous étiez ici, quels beaux vers vous feriez; les vers sortent en quelque sorte d'eux mêmes de cette splendide nature..."
Dans "le goût de la beauté", contre les modernes (par exemple picasso qui ne peint pas les choses telles que nous les voyons), il rappellera la leçon des classiques, des Grecs : l'art vient de la nature."
les choses telles que nous les voyons, c'est la norme; là encore nous voyons le modèle de la vision, donc du cinéma comme médium absolument ontologique, mode de monstration des choses; mais cette monstration n'a pas un sens uniquement empirique, on le voit dans "conte d'hiver", où félicie après son expérience transcendantale dit à loïc, "j'avais vu, pas compris, vu..."; comme l'avait déjà dit bien avant, saint augustin, le verbe voir dit aussi le rapport de l'homme aux choses spirituelles, invisibles, on dit j'ai vu, même pour ce qui ne se voit pas (quelque chose de cette leçon aura été retenu par james cameron, ou la relation fondamentale à l'essence est pensée comme vision; l'allusion à augustin est évidemment contenue dans le nom du personnage de SW, grace augustine... avant de mourir, elle dira je l'ai vue, elle existe, cette vision s'oppose naturellement à celle que peuvent lui donner ses instruments scientifiques, par exemple son microscope...
)
hugo, un des écrivains favoris de rohmer, son favori même a-t-il dit...
on se souvient que rohmer avait réalisé pour la télé scolaire un doc sur hugo (qui a vu? pas moi); ici quelques images
de ce film, j'extrais comme indice pour penser la relation du cinéma à la nature, et donc le réalisme de Rohmer, ce passage de la lettre de hugo à l'ami belge : "si vous étiez ici, quels beaux vers vous feriez; les vers sortent en quelque sorte d'eux mêmes de cette splendide nature..."
Dans "le goût de la beauté", contre les modernes (par exemple picasso qui ne peint pas les choses telles que nous les voyons), il rappellera la leçon des classiques, des Grecs : l'art vient de la nature."
les choses telles que nous les voyons, c'est la norme; là encore nous voyons le modèle de la vision, donc du cinéma comme médium absolument ontologique, mode de monstration des choses; mais cette monstration n'a pas un sens uniquement empirique, on le voit dans "conte d'hiver", où félicie après son expérience transcendantale dit à loïc, "j'avais vu, pas compris, vu..."; comme l'avait déjà dit bien avant, saint augustin, le verbe voir dit aussi le rapport de l'homme aux choses spirituelles, invisibles, on dit j'ai vu, même pour ce qui ne se voit pas (quelque chose de cette leçon aura été retenu par james cameron, ou la relation fondamentale à l'essence est pensée comme vision; l'allusion à augustin est évidemment contenue dans le nom du personnage de SW, grace augustine... avant de mourir, elle dira je l'ai vue, elle existe, cette vision s'oppose naturellement à celle que peuvent lui donner ses instruments scientifiques, par exemple son microscope...
)
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
levallois/Courbevoie sont voisins et sans doute sur la même ligne de bus ; chez Rohmer la rencontre est affaire de trajet ou le trajet est affaire de rencontre ; on peut prendre beaucoup de ses films depuis ma nuit chez Maud où Trintignant traque Barrault en voiture jusqu'à conte d'hiver, tu as raison, un des meilleurs Rohmer - personnellement j'ai un faible pour le femme de l'aviateur - où la rencontre finale se fait dans le bus.
D'ailleurs tout ( quoi au juste ? ) laisse à penser qu'elle a raison de croire qu'elle le retrouvera, le suspens vient du bus.
Quoi de plus naturel, c'est la même ligne.
Quant au médaillon de JM c'est évidemment une photo : vraisemblance ne veut pas dire réalisme.
D'ailleurs tout ( quoi au juste ? ) laisse à penser qu'elle a raison de croire qu'elle le retrouvera, le suspens vient du bus.
Quoi de plus naturel, c'est la même ligne.
Quant au médaillon de JM c'est évidemment une photo : vraisemblance ne veut pas dire réalisme.
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
de quel texte de cavell sur conte d'hiver, parles tu, Borges ?
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Deux liens vers des blogs où il est question de Rohmer :
http://anaximandrake.blogspirit.com/ (l'entretien sur Pascal)
http://mourlet.blog.mongenie.com/index.php?idblogp=907627
http://anaximandrake.blogspirit.com/ (l'entretien sur Pascal)
http://mourlet.blog.mongenie.com/index.php?idblogp=907627
adeline- Messages : 3000
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
ccamille a écrit:de quel texte de cavell sur conte d'hiver, parles tu, Borges ?
deux contes d'hiver : shakespeare et rohmer.
c'est dans "le cinéma nous rend-t-il meilleur?
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
adeline a écrit:Deux liens vers des blogs où il est question de Rohmer :
http://anaximandrake.blogspirit.com/ (l'entretien sur Pascal)
http://mourlet.blog.mongenie.com/index.php?idblogp=907627
Excellent la mauvaise foi du texte de Mourlet. En tout cas si certains perpétuent quelque part la tradition, d'autres n'ont pas abdiqué..
il est aussi question de la mort de Rohmer ici :
http://fr.novopress.info/45256/in-memoriam-eric-rohmer-un-genie-francais/
http://afe-blog.com/2010/01/14/tombeaux-de-janvier/ (je vous rassure, c'est pas le Chauvin des Cahiers)
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Mourlet
-Ca pue l'extrême droite, sans en avoir l'air
-combien de fois Rohmer a-t-il affirmé, rappelé qu'il n'avait rien à voir avec Marivaux?
méditer ceci :
-Ca pue l'extrême droite, sans en avoir l'air
-combien de fois Rohmer a-t-il affirmé, rappelé qu'il n'avait rien à voir avec Marivaux?
méditer ceci :
-une troisième caractéristique nous permet de ranger les films de Rohmer dans une catégorie résolument à part de ce qui se fait aujourd'hui : loin de les asperger de l'écume sociologique d'une actualité toujours menacée de désuétude et très éloignée de la permanence profonde d'un peuple (tant qu'il n'est pas remplacé par un autre),
http://mourlet.blog.mongenie.com/index.php?idblogp=907627
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
ccamille a écrit:levallois/Courbevoie sont voisins et sans doute sur la même ligne de bus ; chez Rohmer la rencontre est affaire de trajet ou le trajet est affaire de rencontre...
tu vas tout de même assez vite, la référence à la psychanalyse est dans le film; dans le bus même, on nous la rappelle, la copine du grand amour, la fille avec qui il est assis, s'appelle Dora (c'est l'un des cas-prénom les plus fameux de freud, et de la littérature psy)
le thème de la folie; félicie dira d'elle-même souvent qu'elle est folle, dans un lapsus, elle dit "je suis conne à lier"; et c'est le mot qu'elle utilise pour expliquer à son amoureux son erreur...
conne à lier, folle à lier ; chez lacan on a un rapprochement de la folie et de la connerie ; quand il dit qu’il faudrait après l’éloge de la folie d’érasme faire un éloge de la connerie, mais que ce serait moins simple ; la connerie dit-il, et, on retrouve le lien ( la conne à lier, sans doute, par les liens du mariage, qui vont lier le con à un seul homme) :
« c'est quelque chose comme un noeud, un noeud autour de quoi s'édifient bien des choses, et se délèguent toutes sortes de pouvoirs » ;
le plus amusant c’est que la lacan met en relation cette connerie, dans un jeu de mot, avec la connaissance, grand sujet de conte d’hiver (connaissance, intelligence…, l’héroïne est une simple coiffeuse (mais pas si bête, Cavell la dit même génial au sens de Emerson)
conte d’hiver, c’est un peu l’inverse de la dentellière dans la mise en scène du rapport savoir non savoir, même si on peut dire que les deux films affirment la supériorité du mystique sur le savoir ;
rohmer est un metteur en scène du non-savoir (les philosophes chez lui sont toujours un peu ridicule ; ) ;
(à suivre )
on note que c'est au moment précis, où ils parlent de lapsus que le mec se tourne vers la fille à côté de lui, pour la présenter : félicie, Dora.
on ne peut pas manquer le lien
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
oui tu as raison mais je suis sur une question indissoluble dans la psychanalyse : pourquoi le cinéma de Rohmer tracassé par principe par la question de l'intériorité est il au contraire si impropre à l'expression de la vie intérieure ?
Déjà les contes moraux en pratiquaient constamment la négation.
Alors si ce son cinéma n'est pas moral, il est religieux, et c'est de ce côté là qu'il faut en chercher la beauté ?
Déjà les contes moraux en pratiquaient constamment la négation.
Alors si ce son cinéma n'est pas moral, il est religieux, et c'est de ce côté là qu'il faut en chercher la beauté ?
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
ccamille a écrit:oui tu as raison mais je suis sur une question indissoluble dans la psychanalyse : pourquoi le cinéma de Rohmer tracassé par principe par la question de l'intériorité est il au contraire si impropre à l'expression de la vie intérieure ?
Déjà les contes moraux en pratiquaient constamment la négation.
Alors si ce son cinéma n'est pas moral, il est religieux, et c'est de ce côté là qu'il faut en chercher la beauté ?
Là tu le rabats sur le cinéma de RR; non? c'est ce qu'il dit de rossellini, dans son article sur stromboli, quand il oppose la manière dont Hitch et RR filment IB...
beauté-religion
n'oublions pas Kierkegaard, et ses trois stades, un des axiomes de la critique rohmérienne
-le stade esthétique (le désir, la séduction, les mecs et les filles entre plusieurs choix... les collectionneurs; ceux qui comme dans les nuits de la pleine lune, affirment qu'être, c'est séduire )
-le moral (chez rohmer, comme chez K, c'est le mariage, et l'enfant)
-le religieux (les moments d'être transcendantaux, ou quelque chose se passe au-delà de la volonté des personnages, et qui les ouvre à une autre dimension; par exemple dans "conte d'hiver", le passage dans la cathédrale de félicie où la conduit sa fille, et sa conversion... c'est alors qu'elle décide de vivre dans l'espoir, et de renoncer aux deux hommes, pour vivre dans l'attente... si les personnages de rohmer doivent choisir souvent, la vérité comme dit félicie c'est quand le choix n'est pas à faire, par exemple avec son premier amour, il y avait rien à choisir, donc, c'est un au-delà de la subjectivité, de la volonté, de la décision... la grâce )
-les vrais mouvements de l'âme disait K, cité par deleuze, je pense à propos de rohmer, échappent à la psychologie
l'âme n'est pas la psychologie, mais n'oublions pas que Rohmer est pour un cinéma de la psychologie, psychologique...
mais là encore, le problème est bien de distinguer l'âme comme objet des "sciences", et l'âme comme donnée non positif, non chosique...
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Dont acte pour Rossellini
Mais psychologique le cinéma de Rohmer, quand il ne cesse de nous répéter que les sens sont trompeurs ? Que ses personnages se trouvent incapables de regarder le monde faute de lui avoir prêté suffisamment attention ? Qu'il déclare à Douchet : " il y a une explication beaucoup plus théologique si vous voulez : le cinéma échappe peut être à la causalité humaine " ?!?
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/actions-france_830/cinema_886/promotion-du-cinema-francais_5370/diffusion-non-commerciale_5634/collections_5635/eric-rohmer_17853/eric-rohmer-preuve-appui_17949/index.html
Mais psychologique le cinéma de Rohmer, quand il ne cesse de nous répéter que les sens sont trompeurs ? Que ses personnages se trouvent incapables de regarder le monde faute de lui avoir prêté suffisamment attention ? Qu'il déclare à Douchet : " il y a une explication beaucoup plus théologique si vous voulez : le cinéma échappe peut être à la causalité humaine " ?!?
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/actions-france_830/cinema_886/promotion-du-cinema-francais_5370/diffusion-non-commerciale_5634/collections_5635/eric-rohmer_17853/eric-rohmer-preuve-appui_17949/index.html
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
ccamille a écrit:Dont acte pour Rossellini
Mais psychologique le cinéma de Rohmer, quand il ne cesse de nous répéter que les sens sont trompeurs ?
C'est lui qui le dit :
« Contre la convention psychologique, d’accord. Contre la consistance psychologique du caractère, non. J’aime montrer sur l’écran des êtres pensants, doués d’une psyché. Je crois toujours qu’un cinéma fondé sur une intrigue et des caractères est toujours moderne, sinon plus qu’un cinéma apsychologique et dédramatisé. «
(le goût de la beauté, entretien de 1983, p. 37)
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
mais je persiste à croire qu'il y a comme une verticalité de la profondeur de champ dans ses films, un catholicisme diffus, fantomatique qui ne tient pas tant à sa représentation des réalités humaines ( les sujets qu'il aborde, les thèmes ) qu'à la conception de la représentation qui le fonde.
c'est lui qui le dit : "J'ai soif de montrer la transcendance d'une façon détournée, comme un jeu". entretien à positif ( n°309, 1986).
c'est lui qui le dit : "J'ai soif de montrer la transcendance d'une façon détournée, comme un jeu". entretien à positif ( n°309, 1986).
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
j'ai trouvé la trace d'une thèse de Jacques Bodet-Dockès - directeur Jacques Aumont au carrefour du ciné et de la philo, sur les liens entre l'ouevre de Rohmer et la pensée trancendantale, mais je n'arrive pas à mettre la main dessus.
qu'est ce que ça veut dire Rohmer est mort : le reste est beauté ?
qu'est ce que ça veut dire Rohmer est mort : le reste est beauté ?
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Il y a un article de ce JBD dans l'ouvrage collectif "Rohmer et les autres", ça s'appelle "Naissance d'un soleil dans Conte de printemps". C'est très intéressant, ça démontre que Rohmer puise sa conception du monde directement chez Kant, ce qu'il est possible de prouver à partir de ce qu'il a écrit dans son livre sur Mozart et Beethoven. La profondeur de Mozart et Beethoven (et presque d'eux seuls, surtout Mozart, selon Rohmer), c'est la prise de conscience transcendantale dans son expression la plus pure. C'est-à-dire le rapport réflexif de soi à soi, de la pensée à elle-même - on peut dire aussi : le pur questionnement. C'est de cette prise de conscience transcendantale que procède toute liberté de l'homme. Je ne saisis pas bien tous ces vieux trucs mais c'est très beau.
La scène où la prof de philo écoute son amie jouer du piano, et où la caméra fait un zoom arrière sur elle, libérant l'espace autour d'elle, illustrerait le surgissement de ce plan transcendantal, où (ou quand ?) elle prend conscience en quelque sorte de l'étendue de sa liberté. Mais le film dans son ensemble ne dit pas autre chose, puisqu'il s'agit de faire de l'ordre, ranger, clarifier sa vie, retrouver au passage un collier perdu, pour faire de l'ordre dans son esprit, sortir de la confusion et enfin savoir ce que l'on veut.
La scène où la prof de philo écoute son amie jouer du piano, et où la caméra fait un zoom arrière sur elle, libérant l'espace autour d'elle, illustrerait le surgissement de ce plan transcendantal, où (ou quand ?) elle prend conscience en quelque sorte de l'étendue de sa liberté. Mais le film dans son ensemble ne dit pas autre chose, puisqu'il s'agit de faire de l'ordre, ranger, clarifier sa vie, retrouver au passage un collier perdu, pour faire de l'ordre dans son esprit, sortir de la confusion et enfin savoir ce que l'on veut.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
je ne vois pas ce que tout ça peut avoir avec le transcendantal kantien...
Eric Rohmer à propos de Murnau
Eric Rohmer à propos de Murnau
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Je ne sais toujours pas ce qu'est le transcendantal ; ce qui est sûr c'est que Rohmer est convaincu que Mozart et Beethoven ont à voir avec. Dans De M en B :
D'ailleurs c'est l'idéalisme allemand, sans doute qui est visé plus largement par ER :
Enfin bref, quelle que soit l'exactitude de l'analyse de ER vis-à-vis de Kant, on voit bien qu'il s'agit pour lui de livrer sa doctrine personnelle, mais aussi la méthode qui lui sert à faire ses films. Par exemple ce zoom arrière dans Conte de printemps correspond sûrement avec l'idée que
- "De cette profondeur j'exclus même Haydn, et je ne vois que Mozart, puis Beethoven, à en être les dépositaires. La pensée musicale de l'un et de l'autre a des affinités avec la pensée transcendantale de Kant."
- "Si je me suis placé, dès le début, sous le patronage de Kant, c'est pour bien marquer que ma démarche entend être de l'ordre de l'ontologie, et non du langage."
D'ailleurs c'est l'idéalisme allemand, sans doute qui est visé plus largement par ER :
Puis finalement, le livre n'est-il pas là pour avertir le public qu'il y aurait d'étonnantes affinités entre M, B et... Rohmer. Car "Je crois au contraire que, comme la musique, le cinéma jouit du privilège - ou du fardeau - d'un classicisme constitutif."- "(Hegel ): "Ce n'est pas seulement l'évocation d'un sentiment défini, amour, tristesse, joie, qui devient la chose principale, mais l'intériorité qui le dépasse, qui s'épanouit dans sa souffrance comme dans sa joie et jouit d'elle-même." Peu importe que ce "dépassement", ou dédoublement, soit dit "dialectique", ici, "transcendantal" chez Kant. C'est de lui que nous essaierons de déceler chez Mozart la présence."
- "La philosophie allemande, surtout depuis Kant, revendique le nom de philosophie du sujet. Mais elle a mis un certain temps à reconnaître la musique comme sa soeur."
Enfin bref, quelle que soit l'exactitude de l'analyse de ER vis-à-vis de Kant, on voit bien qu'il s'agit pour lui de livrer sa doctrine personnelle, mais aussi la méthode qui lui sert à faire ses films. Par exemple ce zoom arrière dans Conte de printemps correspond sûrement avec l'idée que
"Cette musique, la moins taxable de laisser-aller, chante la liberté. Elle fait reculer les limites de l'espace où elle se meut. Elle introduit une troisième dimension."
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
j'aime bien ce conte de printemps, époque à laquelle on fait le ménage, y compris dans ses pensées.
et j'apprécie particulièrement la digression du vol du collier, en contrepoint, qui montre l'opposition de maturité entre les deux héroïnes justement parce que chez l'une il y a tempête sous son crâne, et chez l'autre la zénitude - très séduisante !!!
c'est élitiste mais bon ... les films de rohmer et ça n'est pas étonnant dans le fond, auraient pu tout aussi bien illuster les thèses de cavell sur la comédie du remariage - faisant, refaisant au contraire la seule promotion d'hollywood, why not.
une chose sûre : son sujet ( à rohmer ) est la fidélité.
et j'apprécie particulièrement la digression du vol du collier, en contrepoint, qui montre l'opposition de maturité entre les deux héroïnes justement parce que chez l'une il y a tempête sous son crâne, et chez l'autre la zénitude - très séduisante !!!
c'est élitiste mais bon ... les films de rohmer et ça n'est pas étonnant dans le fond, auraient pu tout aussi bien illuster les thèses de cavell sur la comédie du remariage - faisant, refaisant au contraire la seule promotion d'hollywood, why not.
une chose sûre : son sujet ( à rohmer ) est la fidélité.
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Y a même pas à chercher l'exactitude dans ces passages sur Kant, c'est tellement vide que ça ne veut rien dire..
Rohmer, dans ces passages du moins, j'ai pas lu le livre, ne semble pas savoir ce que veut dire "ontologie" (sans quoi il ne l'opposerait pas à langage) ni "transcendantal", d'ailleurs...
Rohmer, dans ces passages du moins, j'ai pas lu le livre, ne semble pas savoir ce que veut dire "ontologie" (sans quoi il ne l'opposerait pas à langage) ni "transcendantal", d'ailleurs...
Borges- Messages : 6044
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
mais toi tu sais et tu n'es pas un vieux gâteux mais pas rohmer non plus
Invité- Invité
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Ça ne m'étonnerait qu'à moitié. Il a un peu l'air de mélanger tout ça à sa sauce. Enfin, pour ce que j'en sais, il rentre vraiment dans le vif du sujet, avec plein de subtiles comparaisons entre Kant, Hegel, Schopenhauer et Heidegger. Si c'est du chiqué, c'est rudement bien imité.
"Car dans le questionné lui-même, dit Heidegger, nous questionnons déjà l'être quant à son fondement." Cette question est, d'après le philosophe : "Qu'en est-il de l'être ?" Elle n'appartient pas à cette partie de la métaphysique que la scolastique nommait metaphysice specialis, la métaphysique des grandes questions, mais à la metaphysice generalis, celle que l'on désigne sous le nom d'ontologie, c'est-à-dire science de l'être.
Nous ne nous éloignons pas pour autant de Kant que nous nous étions proposé comme fil conducteur. Certes, le problème de l'être n'est pas textuellement au centre de la réflexion kantienne, mais, sans pour autant assimiler "transcendantal" et "ontologique", comme le voudrait Heidegger, nous dirons, avec l'accord de tout le monde, que Kant a été le premier à reconnaître le caractère concret, parce que synthétique, du temps, et à marquer la différence entre logique formelle et logique transcendantale, entre général et abstrait. La certitude transcendantale se présente dans l'acte concret de penser, en même temps qu'elle est plus générale.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Rohmer est mort : le reste est beauté
Plus intéressant pour le commun des mortels cinéphiles, le bref passage concernant directement le cinéma, dans lequel il est sûrement plus facile de décoder les présupposés de Rohmer :
Je crois au contraire que, comme la musique, le cinéma jouit du privilège - ou du fardeau - d'un classicisme constitutif. Et pour des raisons exactement opposées. La musique, parce que nous l'avons vu, bon gré mal gré idéalise. Lui, parce qu'il en est incapable, se trouvant du fait de sa nature même condamné à coller au réel. Il n'a pas à se détacher des apparences, étant donné qu'elles constituent son bien essentiel, comme l'a magistralement, montré André Bazin dans la première section "Ontologie" de son recueil Qu'est ce que le cinéma ?. Là, Bazin, au sein du petit monde des théoriciens du film, a créé sa révolution à la Copernic. Le cinéma n'a pas besoin de nous mener au-delà de la perception commune, puisque c'est par la reproduction fidèle de celle-ci, dans son "objectivité" maximale, qu'il accède à l'être, en tant qu'art autonome. Paradoxalement, l'art sera d'autant plus grand et plus authentique chez lui qu'il y aura copie pure et simple, et non volonté d'interprétation. Cette inversion du rôle de la réalité et de l'artiste, contraire de celle qu'opère le peintre moderne, peut introduire à sa façon dans l'oeuvre une dimension transcendantale, ne serait-ce que par la conscience particulière et toute nouvelle qu'elle nous donne de la forme du Temps.
Rien n'a été écrit de plus profond sur ce point que l'article intitulé "Mort dans l'après-midi", à propos du film la Course de taureaux, de Pierre Braunberger et Myriam. Ce film, nous dit Bazin, restitue l'essentiel de la corrida, "son noyau métaphysique : la mort... Or, la mort est un des rares événements qui justifie le terme, cher à Mauriac, de spécificité cinématographique. Art du temps, le cinéma a le privilège exorbitant de le répéter. Privilège commun aux arts mécaniques, mais dont il peut user avec infiniment plus de puissance que le disque ou la radio. Précisons plus encore, car il est d'autres arts temporels comme la musique. Mais le temps de la musique est immédiatement et par définition un temps esthétique, tandis que le cinéma n'atteint ou construit son temps esthétique qu'à partir du temps vécu." La faculté qu'a le film de reproduire et répéter tous les instants "objective" ce vécu et le trahit - ce que nous admettons, "malgré sa contradiction ontologique, comme une sorte de réplique objective de la mémoire". Sauf, remarque Bazin, dans deux moments de la vie, l'acte sexuel et la mort, dont la représentation est "aussi une obscénité, mais métaphysique", lorsqu'elle est réelle, et non pas jouée. Si cette représentation de la mort, sur l'écran, est à ce point insoutenable, c'est qu'elle est "pour l'être le moment unique par excellence. C'est par rapport à lui que se définit rétroactivement le temps qualitatif de la vie. La mort n'est qu'un instant après un autre, mais c'est le dernier."
balthazar claes- Messages : 1009
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