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(Tu n'es pas un Arabe, t'es un chacal) De Straub à Kafka : Canaan à l'instant de la mort

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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 13:57

(Tu n'es pas un Arabe, t'es un chacal) De Straub à Kafka : Canaan à l'instant de la mort  VoNG4

"Tu n'es pas un Arabe, t'es un chacal".
(pourparlers, p.23)

que voulait donc dire deleuze, par là, à son critique sévère.



Pour en finir avec tout ça, je voudrai, juste un peu comme preuve, commenter un texte de Kafka : "Chacal et Arabes". On voit très bien pourquoi il mélange tout, pourquoi il tend des pièges. Dans "Chacals et Arabes", on peut dire que tout y est, pour Freud ou pour Marthe Robert. Il y a les arabes qui sont explicitement à la ligne mâle; et puis il y a les chacals qui sont explicitement rattachés à la ligne mère. Dès le début, le chacal dit :"il y a une éternité que nous t'attendions, ma mère t'attendait, et sa mère et toutes les mères, en remontant jusqu'à la mère de tous les chacals". Entre les chacals et les arabes, il y a en bordure l'homme du nord, c'est à dire l'homme aux chacals. Y'a que Freud qui sait pas ce que c'est qu'une horde de loups. Les chacals prennent à part l'homme du nord et lui disent que les arabes, c'est dégoûtant, et c'est dégoûtant parce qu'ils tuent les bêtes pour manger. Ils tuent les veaux pour manger. Ça c'est vraiment l'obsession fondamentale de Kafka : d'où vient la nourriture ?

Les chacals disent que ça ne peut pas continuer parce qu'ils sont contre, ils disent : nous, on est le contraire : on mange pour nettoyer les charognes. Donc, ou bien tuer les bêtes vivantes pour manger, ou bien manger pour nettoyer les bêtes mortes. D'où la tension arabes-chacals. Il y a l'homme du nord qui est là et les chacals lui disent : tu vas tuer les arabes et ils emmènent une grande paire de ciseaux rouillés. Je n'insiste même pas sur ce que les psychanalystes peuvent faire avec ces ciseaux, tout ça se passe dans le désert.

Les arabes sont présentés comme une masse armée étendue dans tout le désert. Les chacals sont présentés comme une meute qui va de plus en plus loin dans le désert, qui est forcée de s'enfoncer de plus en plus dans le désert, des particules folles. Et, à la fin du texte, l'arabe dit à propos des chacals : ce sont des fous, des vrais fous. Et les chacals disent le secret de l'histoire lorsqu'ils disent, avec l'histoire des ciseaux, l'homme du nord est tout prêt à dire : vous voulez que je les tue, et les chacals, ça, ça ne les intéressent pas. C'est une question de propreté, c'est l'épreuve du désert. Ça veut dire que, dans cette espèce de tension, la masse arabe, la meute des chacals, un appareil oedipien manifeste et un appareil contre-oedipien, va se jouer l'épreuve du désir sous la forme : c'est une question de propreté. Une fois donnés ces quatre éléments, qu'est-ce qui va se passer, si on m'accorde que tout énoncé est le produit d'un agencement ? Comment est-ce qu'on pourra définir un énoncé comme produit d'un agencement machinique ? Il va de soi que tout ça, c'est bien le problème de l'inconscient, i.e. qu'une analyse qui n'atteint pas aux multiplicités, double type de multiplicités, aux multiplicités de masse et aux multiplicités de meutes, qui, à nouveau d'une manière double, sont celles auxquelles un individu participe, et sont aussi bien intérieures à un individu, et bien, on peut dire que l'analyse n'a même pas commencé. Quand on n'a pas atteint les positions de bordures, les positions paranoïaques de masse, le type d'appareil anti-oedipien que quelqu'un est en train de monter, son appareil oedipien, on n'a absolument touché à rien des formations de l'inconscient, et quand on n'a pas su surtout quel agencement, et comment ça fonctionnait pour lui et chez lui, c'est à dire quel type d'énoncé c'était capable de produire, et des types d'énoncés au besoin très loin de ce qui se passe dans l'inconscient.

C'est ce problème des multiplicités à faire jouer les unes dans les autres, comme des multiplicités de multiplicités, c'est cette analyse des multiplicités comme étant à la fois extérieures et intérieures à l'individu, que il faut atteindre sinon on n'a rien atteint de l'inconscient.



ce n'est pas une introduction à la pensée du film de straub-kafka, mais un écart par rapport à toute tentative d'introduction, donc de volonté d'un accès direct, immédiat...il faut d'abord errer autour de l'oeuvre, pour en repérer le centre, l'origine absente...l'errance, le désert.



Dernière édition par Borges le Lun 16 Jan 2012 - 9:26, édité 2 fois
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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 14:16

le film de straub ne va pas directement au texte de kafka, il prend le détour de la musique, de la mise en musique de quelques fragments du journal, correspondance... par György Kurtag...dont j'extrais ce fragment, parce qu'il parle de pureté, d'amour, et de saleté, du chant des damnés donc...


Je suis sale, Milena...
Je suis sale, Milena, infiniment
sale, c’est pour cela que je fais
grand bruit autour de la pureté.
Personne ne chante de manière
aussi pure que ceux qui se
trouvent dans le plus profond
des enfers ; ce que nous
prenons pour le chant des
anges, c’est leur chant à eux.






si nous mettons en rapport ce passage avec le film sur dante (qui s'ouvrait sur un scandale musical, et l'idée du désert) on voit le souci de straub, non pas les anges déchus, mais la pureté du chant des damnés...


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Message par NC Sam 14 Jan 2012 - 14:51

Pauvre Freud, avec ses histoires de tuer le père, il s'est fait plein de fils adoptifs qui vinrent se ruer sur lui, pensant que c'était ça qu'il fallait faire, qu'il attendait

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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 15:32

un écran gris, pas noir, gris, des violons, une voix, on chante...





Wiederum, wiederum
Wiederum, wiederum, weit
verbannt, weit verbannt. Berge,
Wüste, weites Land gilt es zu
durchwandern.


De nouveau, de nouveau, banni
au loin, banni au loin.
Montagnes, déserts, il faut
marcher à travers un grand
espace.

donc un écran gris, pas noir, comme dans o somma luce, qui s'ouvrait sur un écran noir et l'enregistrement historique de Déserts (Edgar Varese); la couleur change, mais reste la musique (contemporaine) les déserts...

pq le gris?

on peut imaginer que straub s'est souvenu de ceci :

"J’étais à Talloire. Des gris en veux-tu en voilà et des verts, tous les verts de gris de la mappemonde. Les collines environnantes sont assez hautes, il m’a semblé. Elles paraissent basses, et il pleut. Il y a un lac entre deux goulets, un lac d’anglaises. Les feuilles d’album tombent toutes aquarellées des arbres. Assurément c’est toujours la nature, mais pas comme je la vois, comprenez-vous ? Gris sur gris. Gris sur gris. On n’est pas un peintre tant qu’on n’a pas peint un gris. L’ennemi de toute peinture est le gris dit Delacroix. Non, on n’est pas un peintre tant qu’on n’a pas peint un gris. »

(cézanne, à gasquet)

il y aurait ainsi dit deleuze deux gris, le gris de l'échec, et le gris d'où sortent les couleurs...

(je me souviens avoir parlé de tout ça, à propos du boulevard de la mort; c'était sur le Forum des Cahiers)




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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 16:00

Pourquoi commencer par des fragments du journal, de la correspondance, du gris, et par la musique, le chant, des violons ? voir, sans se poser l’une ou l’autre question, même la plus bête, la plus évidente, c’est refuser de voir ; ce que nous voyons ne peut venir dans le visible, et s’en tenir à distance que dans la question… c’est mal dit, mais c’est dit.

Si straub commence avec la musique, c’est que la musique est essentielle dans la vie pensante de kafka, dans son œuvre (biographiquement, il y était complètement fermé; il n'avait aucune sensibilité musicale ) mais comme le disent D et G, ce n’est pas la forme musicale qui intéressait kafka, ce qui l’intéressait c’était la pure matière sonore

Ils recensent les principales scènes d'intrusion sonore dans son œuvre :

- Dans Description d'un combat, le concert à la John Cage, où le Dévot veut jouer du piano, parce qu'il est sur le point d'être heureux ;

- Dans Recherches d'un chien, les chiens musiciens produisent un grand vacarme, mais on ne sait pas comment, puisqu'ils ne parlent, ne chantent, n’aboient pas, faisant surgir la musique du néant.

- Dans Joséphine la cantatrice ou le Peuple des souris, il est improbable que Joséphine chante, elle siffle seulement et pas mieux qu'une autre souris, plutôt moins bien, de telle manière que le mystère de son art inexistant devient encore plus grand.

- Dans Amérique, Karl Rossman joue trop vite ou trop lentement, ridicule, et sentant un autre chant monter en lui

-Dans la Métamorphose, le son intervient d'abord comme piaulement qui entraîne la voix de Grégoire et brouille la résonance des mots; et puis la soeur, pourtant musicienne, n'arrive qu'à faire piauler son violon, gênée par l'ombre des locataires.


dans le texte très court "chacals et arabes", il n'est apparemment question de musique...pourtant


Dernière édition par Borges le Dim 15 Jan 2012 - 9:50, édité 1 fois
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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 17:44




prenons le film, là où il commence, depuis son commencement, supposé, ce que nous croyons être son commencement...

du gris, de la musique...c'est l'expérience immédiate ;

(croit-on ou pas assez ?)

quelqu'un chante ;
une femme ?
que chante-t-elle ?
des fragments de kafka... mais cela c'est du savoir, ce qu'elle chante c'est pas ce savoir, ce que nous savons.


elle chante autre chose ; avant de demander quoi, il faut poser une autre question, essentielle, pour qui regarde un film : où sommes-nous ?

Où situer la voix qui chante les fragments de kafka ?

A l’image... dans le film, plus loin, là où elle est enregistrée... Bien entendu. C’est la bonne réponse, mais une bonne réponse ne doit pas nous écarter d’une réponse moins assurée, nous en écarter. Une réponse n’est bonne que lorsqu’elle nous écarte de toute assurance, de toute évidence. La bonne réponse c’est celle qui en répondant à ce qui doit être pensé se cherche, se risque hors de la piste qui lui est tracée, fait donc un pas de plus hors de son espace de maîtrise.

Il ne faut écrire que les mots qui nous surprennent dans notre absence de pensée, ceux qui nous arrêtent, nous font faire un pas au-delà... c'est l'écriture la plus risquée, elle ne nous met pas en valeur, n'a rien de narcissique, d'originale, parfois, en elle ne vient en présence que la répétition, le cliché, le retour des choses lues... c'est pourtant essentiel, de laisser la pensée aux mots, de penser ainsi.

(je fais un usage trop fréquent des mot"pensée", "penser"...)


Donc les Arabes, les chacals...

Partons du plus simple, de ce que nous vivons, expérimentons immédiatement quand nous regardons ce film. Nous sommes là devant un écran. On entend des violons, de la musique, dite contemporaine, d’où n’est donc pas absente la matière, le bruit, l’informe. C’est ça la musique contemporaine, en un sens ; ce qui a fait scandale en elle, c’est le bruit. Ce que nous entendons, sans voir celui qui joue, qui chante, c’est donc de la forme et de l’informe. Nous entendons, mais sans entendre, sans comprendre ce qui est chanté, à moins de comprendre l’allemand. Pour qui ne parle pas allemand, cette musique est encore plus informe. C’est pas rien, de le remarquer, c’est l’essentiel. Pour qui ne parle pas allemand, le sens ne vient que par la lecture de sous-titre, donc dans la traduction… Ce chant ne s’adresse directement qu’aux allemands, et à ceux qui parlent allemand.

oui, mais en même temps, musique contemporaine oblige, il nous faut renverser cet ordre : si l'informe est premier, c'est d'abord à ceux qui ne parlent pas allemand que cette musique s'adresse, que la musique de kafka s'adresse... renversement trop simple, qui risque de nous confronter dans un idée un peut trop rassurante de l'informe musical, de la musique du texte, de l'écriture...




comme souvent chez straub, avec ou sans huillet, d’emblée, nous est posée une des questions du film, un de ses problèmes, la langue maternelle, la traduction… le même et l’autre…

Cette voix chante du kafka, des fragments de kafka ; l’œuvre de kafka on le sait est une œuvre sans œuvre, une œuvre fragmentée ; une pensée du fragment, de la multiplicité, donc, d’une unité, qu’il ne faut pas immédiatement dire perdue. La dire perdue, c’est déjà tout dire, tout décider à propos de l’errance, du retour, de la diaspora, du sionisme.

Je dois aller plus lentement ; c’est le moyen le plus assuré d’errer…

Une voix ; une voix enregistrée est séparée de sa source, de son origine, du corps ; c’est une trace, comme on dit ; une écriture ; dans la voix enregistrée, il y a toutes les diachronies, toutes distances du monde, dans la voix enregistrée, il y a la distance, le bannissement, l’exclusion, la séparation, la mort et la survie.

Ce que dit toute voix, séparée de sa source, de son origine, c’est ce que chante le fragment, ce qu’est le fragment : la non présence à soi, l’absence d’une forme, d’une identité…le bannissement loin, au loin..

De nouveau, de nouveau, banni
au loin, banni au loin.
Montagnes, déserts, il faut
marcher à travers un grand
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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 18:18

Où sommes-nous?
qui nous?

(ou mieux : où maintenant, qui maintenant…? cette question est plus forte, elle ne nomme rien ni personne, ni le lieu ni celui qui croit l'occuper...quand nous sommes au cinéma, devant un écran, c'est l'expérience première;je pense ici au grand livre sur l'homme ordinaire au cinéma )

En tant que spectateurs du film, nous sommes ici et maintenant, dans l’espace du film, cet appartement contemporain, nous sommes en 1917, avec kafka, en europe, pendant la guerre, dans le texte nous sommes dans un espace de fiction, dans un lieu que nous croyons pouvoir situer dans les parages de la palestine d’alors, dans ce qui s’esquisse du conflit israélo-palestinien ; nous sommes dans cette guerre où se font, se mêlent tant de guerres, depuis si longtemps…mais dans le texte, y a autre chose, en plus de la guerre que nous croyons y lire, il y a d’abord la guerre dans le désert entre les arabes et les chacals, qui dure depuis un temps immémorial, depuis qu’il y a des arabes et des chacals… ces personnages n’existent que dans le récit de kafka… ce lieu n’a lieu que dans le texte de kafka, dans l’image, chez straub, nous ne sommes pas dans le désert, mais dans un appartement, aujourd’hui… une femme à genoux dit le texte de kafka, loin de la Palestine, d’alors, d’aujourd’hui… A moins que le texte de kafka ne soit pour elle, pour nous, le moyen le plus évident, d’aller là bas, de nous situer dans cette guerre… Cette femme, et nous, devons traverser un grand espace avant d’arriver …où donc ?


De nouveau, de nouveau, banni
au loin, banni au loin.
Montagnes, déserts, il faut
marcher à travers un grand
espace.



Le compositeur hongrois György Kurtag s’est emparé en 1985 d’un corpus choisi de citations de l’écrivain tchèque. Fidèle à son style, à son sens de l’économie musicale, de la mise à nu du discours instrumental, Kurtag a composé quelques 40 miniatures sonores pour deux voix, illustrant les interrogations et les aphorismes de Kafka.


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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 19:00

Le texte de kafka, texte curieux, comme tous les textes de kafka, dira-t-on, oui, mais c'est stupide de dire ça, chaque texte de kafka a sa curiosité propre, est aussi seul que le fut kafka.

Je l’ai lu, il y a des siècles ; le retrouver avec straub, c’est étrange ; nous avons tous les deux beaucoup changé... faut pas imaginer que les textes ne changent pas, que seuls changent les horizons de perception et de lecture, les puissances qui les font agir, penser, signifier... c'est idiot ; les textes changent ceux qui croient les changer...

ce texte n'a eu aucun effet sur moi ; je l'avais lu, sans lui prêter trop d'attention... un petit texte de kafka, comme d'autres... une erreur ? je sais pas.


pourquoi ce texte nous revient-il avec straub ?


C’est pas leur première rencontre, bien entendu, pas leurs premiers rapports… pas les premiers rapports entre les mots de kafka, ses images, ses histoires, ses personnages et les images, les corps, les voix, de straub, ses acteurs… Avant cette rencontre, ils s‘étaient rencontrés à trois, sur une autre terre promise, en Amérique, étrange coïncidence : huillet, straub, kafka ; kafka, l’homme qui n’a jamais réussi à garder une femme, une fiancée ; il en a eu plusieurs, on le sait ; straub l’homme d’une seule femme, officiellement… huillet a rejoint kafka, reste straub, qui ne fait plus de cinéma que depuis cette absence...

donc, il y a d'abord eu l'Amérique (la nouvelle terre promise) et ses rapports de classes (la négation de la terre promise) et puis là, viennent la palestine et israël... c'est pas un pur hasard ; on ne peut pas les séparer... l'homme du nord, aujourd'hui, c'est les USA... dans une lecture actualisante...

est-ce la bonne lecture ?






J’avais lu le texte, donc, mais, sans voir dans les chacals, des juifs ; c’étaient des chacals ; les arabes, des arabes, et l’homme du nord, une figure du messie…

C’est bien plus tard que l’association des juifs et des chacals s’est faite, après qu’un type m’a demandé : pq kafka représente-t-il les juifs en chacals ?



-Dans le film, la femme est le chacal, elle s’adresse à quelqu’un d’absent, invisible, une voix lui répond, écran noir, celle de straub, dans son allemand, accentué, très français. La question de l’accent est bien entendu essentielle, comme celle de l’absence d’image. Ici, ce qui importe c’est de savoir ce que c’est que parler, en dehors de l’image, dans une langue étrangère, parler la langue allemande, par exemple, sans être allemand. C’est la question mineure, la question du mineur ; la question de kafka selon d/g...

-une femme jouant les chacals, un chacal, s'adresse à straub jouant l'homme du nord, celui qui doit délivrer les chacals des arabes... c'est simple… straub n'est donc ni chacal ni arabe, c'est un homme du nord, l'homme du nord, le messie projeté par les chacals…

c'est aussi kakfa, en un sens, un étranger dans la langue allemande qui a œuvré dans la langue allemande...


un étranger : "le narrateur" est un homme, un homme du nord, un homme étranger au désert…

Quel est cet homme du nord ? est-ce un européen? un simple européen ?

A l’époque où l’histoire fut publiée, 1917, si je me trompe pas, dans la revue sioniste de MB… les lecteurs du texte, des juifs sionistes, voyaient en lui plutôt un juif assimilé, un juif occidentalisé, qui en tant que tel n’est ni juif ni européen...

donc les chacals, qu'on dit juifs, s'adressent à un juif assimilé, un juif allemand, peut-être...


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Message par Borges Sam 14 Jan 2012 - 19:30

Juif ou chacal ?


Le juif en chacal, c’est pas le juif, tout le juif, tous les juifs, ce n’est rien du juif, en fait… à l'époque de la parution du texte, pour ses premiers lecteurs, des juifs sionistes, donc, ce chacal n'a de juif que l'antisémitisme, c’est la représentation antisémite du juif. Nous sommes dans une représentation ironique, comique… kafka joue avec les clichés.

De ce point de vue, dans cette lecture, il y aurait deux juifs, le juif occidentalisé, assimilé, et la caricature du juif de l’antisémite, antisémite qui peut être un juif assimilé…

Avant le conflit avec les arabes, dans le désert, il y a le conflit des juifs entre eux, avec les européens, avec la culture européenne ; le sionisme, la question du sionisme traverse les juifs, elle les confronte les uns aux autres, à propos de leur identité, de leur être.

Avant la guerre avec les Arabes, il y a le conflit entre le juif assimilé, occidentalisé, et l’autre juif, le juif non éduqué, le juif de l’est, le juif oriental, le juif qui n’a jamais quitté l’orient, le juif chacal ;


L’origine du sionisme, c’est pas une réaction à l’antisémitisme, ce dernier n'est que l'occasion contingente d'une prise de conscience par certains juifs d'une cruelle vérité... : un juif restera toujours un juif...

(on pense à cronenberg)

pour les sionistes, à côté de l'antisémitisme, il y a un autre problème : l’assimilation des juifs aux non-juifs, à la culture des classes moyennes européennes ; dans le sionisme vient en lumière, l’échec du projet émancipateur des lumières ; en ce sens, combattre l’antisémitisme ne pouvait pas être une solution; il fallait se tourner vers soi, vers l’identité juive, le nationalisme juif…

Au début kafka et son ami max brod rejettent le sionisme ; vers 1910-11, brod est attaqué pour son manque de critique de l’assimilation ; son manque de conscience nationale… Ce qu’on attaque chez lui, c’est le juif assimilé qui déteste tout ce qui est juif et ne jure que par l’aryen, wagner, la consolidation de la puissance germanique.

On pense ici à freud, et à ss.

Au début, kafka se moque de cet idéal, qui veut soumettre la littérature à un goût nationaliste, qui veut soumettre la littérature faite par les Juifs à un goût sioniste.

En 1910, il écrit dans son journal : "Qu'ai-je de commun avec les Juifs ? C'est à peine si j'ai quelque chose de commun avec moi-même et je devrais me tenir bien tranquille dans un coin, content de pouvoir respirer ".

Brod deviendra un sioniste pur et dur ; kafka résiste, puis, se tourne vers le sionisme, à travers un intérêt croissant pour la « culture juive , le théâtre yiddish : « je me suis rendu compte que je n’ai pas toujours aimé ma mère comme elle le méritait, comme j’aurais dû, à cause de la langue allemande »

La mère juive n’est pas « mutter », à travers ce mot, elle ne devient pas seulement comique, mais aussi étrange ; le mot allemand est trop froid, le yiddish est chaud : mame, mamele, mamenyu ; idem, avec le père. Seule la mémoire du Ghetto peut prévenir l’oubli du sens originaire de mots aussi essentiels que « mère » ou « père ».


Kafka sera attiré par un idéal de sionisme socialiste très spartiate : importance de l'hébreux, moralité de l’existence, refus du confort, des beaux vêtements, des boissons fortes, du tabac, de la propriété privée, de possessions personnelles, en dehors de quelques livres, d'un peu de nourriture, un vêtement. On vivrait dans des huttes, on ne mangerait que des lentilles, des haricots, la nourriture du plus pauvre des pauvres, l’abri le plus pauvre… tout le reste irait aux pauvres… pas de droit, d'avocats, des relations basées sur la seule confiance… pas d'argent…



kafka dira du sionisme "réel", s'il existe, s'il y en a un, s'il est un, un seul : le sionisme m'attire et me dégoûte


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Message par NC Sam 14 Jan 2012 - 19:49

Décidément, en ce moment...

Sholem disait, je n'ai lu que deux livres, Kafka et la kabbale.

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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 10:05

ajouter cet élément à la discussion :

JMS : Le film militant de nouveau enferme les gens dans l’urgence. Et l’urgence on y est, c’est l’aboutissement du système qui a inventé les chambres à gaz ; l’urgence actuellement, elle nous vient de la social-démocratie anglaise et de la social-démocratie française, ça consiste non plus à massacrer des Juifs mais à massacrer des centaines de milliers de bêtes de manière préventive pour maintenir le marché. Même si certains Juifs en prennent ombrage, il n’y a pas de différence entre ça et le massacre des Juifs, c’est le même esprit et c’est le même système industriel et c’est « der gleiche Geist », comme dirait Hölderlin, qui a inventé les chambres à gaz et ce système-là. Après tout il n’y a pas besoin d’être hindou pour savoir qu’un être vivant est un être vivant [qu’il soit un Juif ou un mouton], d’ailleurs les Juifs le savent bien parce que l’agneau pascal c’est eux qui l’ont inventé.

Moi je vois un grand film politique quand, dans Arsenal de Dovjenko, je vois un paysan qui s’appelle Ivan et qui se met à frapper son cheval, tout seul sur un champ désert, qui ne peut plus s’arrêter parce qu’il est à bout, et que soudain on entend une voix qui dit : « Ivan, Ivan, tu t’es trompé d’ennemi ! »

on sait que kafka a été végétarien et même plus

« Maintenant je peux vous regarder en paix, je ne vous mange plus. »
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Message par NC Dim 15 Jan 2012 - 10:20

Et c'est la sortie de route, le crash

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Message par NC Dim 15 Jan 2012 - 10:25

Il y a une dame, Valérie Igounet, qui a étudié le discours de Faurrisson, et qui l'a résumé sous le vocable "discours révolutionnaire Faurissonnien" consistant en ceci :

Dans la pensée politique contemporaine, le fascisme joue avant toute autre idéologie, le rôle du diable, mais cette idéologie est d'abord le moyen de noyer les perspectives du prolétariat dans la confusion et d'intégrer cette classe dans la défense du monde capitaliste.

Le mythe des six millions de victimes juives du deuxième conflit mondial est devenu la clef de voûte d'une représentation religieuse universelle.

Les morts en déportation sont mis en avant au détriment des millions d'hommes qui meurent chaque année à travers le monde.

Auschwitz apparaît comme le « grand alibi » de la bourgeoisie démocratique pour camoufler la réalité de l'exploitation quotidienne du Capital (reprise des arguments d'Auschwitz ou le grand alibi).

Les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale masquent leurs propres atrocités. Quant à la légitimité et l'avenir de l'État d'Israël, ils reposent sur les « cadavres juifs vrais ou inventés de cette même guerre ».


$$$

Qu'un juif soit un mouton, c'est peut être la déclaration matérialiste la plus anti judéo-chrétienne que l'on puisse formuler. N'en déplaise à Brigitte Bardot.

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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 10:31

NC a écrit:Et c'est la sortie de route, le crash

tu règles la circulation?

de qui?
de quoi?

tu dois penser ce que raconte Straub depuis adorno :


Les humains te regardent - L'indignation que suscitent les cruautés commises diminue à mesure que les victimes cessent de ressembler aux lecteurs normaux, qu'elles sont plus brunes, « plus sales », plus proches des « Dagos » . Voilà qui éclaire autant sur les atrocités que sur les spectateurs. Peut être la schématisation sociale de la perception est elle ainsi faite chez les antisémites qu'ils ne voient plus du tout les Juifs comme des hommes. L'assertion courante selon laquelle les Sauvages, les Noirs, les Japonais ressemblent à des animaux, par exemple à des singes, est la clé même des pogromes. Leur éventualité est chose décidée au moment où le regard d'un animal blessé à mort rencontre un homme. L'obstination avec laquelle celui ci repousse ce regard - « ce n'est qu'un animal » - réapparaît irrésistiblement dans les cruautés commises sur des hommes dont les auteurs doivent constamment se confirmer que « ce n'est qu'un animal », car même devant un animal ils ne pouvaient le croire entièrement. Dans la société répressive la notion d'homme est elle même une parodie de la ressemblance de celui ci avec Dieu. Le propre du mécanisme de la « projection pathique » est de déterminer les hommes détenant la puissance à ne percevoir l'humain que dans le reflet de leur propre image, au lieu de refléter eux-mêmes l'humain comme une différence. C'est alors que le meurtre apparaît comme une tentative constamment répétée, dans une folie croissante pour déguiser en raison la folie d'une perception aussi erronée : celui qu'on n'a pas perçu comme un être humain et qui pourtant est un homme, est transformé en chose afin qu'aucun de ses mouvements ne mette en cause le regard du maniaque.



l'intérêt, c'est de rapprocher kafka et straub sur la question des "animalités"...



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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 10:39

NC a écrit:Il y a une dame, Valérie Igounet, qui a étudié le discours de Faurrisson, et qui l'a résumé sous le vocable "discours révolutionnaire Faurissonnien" consistant en ceci :

Dans la pensée politique contemporaine, le fascisme joue avant toute autre idéologie, le rôle du diable, mais cette idéologie est d'abord le moyen de noyer les perspectives du prolétariat dans la confusion et d'intégrer cette classe dans la défense du monde capitaliste.

Le mythe des six millions de victimes juives du deuxième conflit mondial est devenu la clef de voûte d'une représentation religieuse universelle.

Les morts en déportation sont mis en avant au détriment des millions d'hommes qui meurent chaque année à travers le monde.

Auschwitz apparaît comme le « grand alibi » de la bourgeoisie démocratique pour camoufler la réalité de l'exploitation quotidienne du Capital (reprise des arguments d'Auschwitz ou le grand alibi).

Les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale masquent leurs propres atrocités. Quant à la légitimité et l'avenir de l'État d'Israël, ils reposent sur les « cadavres juifs vrais ou inventés de cette même guerre ».


$$$

Qu'un juif soit un mouton, c'est peut être la déclaration matérialiste la plus anti judéo-chrétienne que l'on puisse formuler. N'en déplaise à Brigitte Bardot.

j'ai bien envie de supprimer ce message; je ne vois pas le rapport avec ce que dit straub

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Message par NC Dim 15 Jan 2012 - 10:52

Crash, Cronenberg voyons...
Et celui qui dit ça est celui qui fait rapport entre tout ; désolé d'en prendre ombrage. Le vieux Straub je le connais. Entre Kafka et Straub, il s'est passé quelque chose, alors la question ne peut plus être la même vois tu. Tu ne peux pas les faire discuter ensemble, les mettre sur un même plan d'horizontalité, dans une suite du discours, ou à la limité tu fais parler le premier puis le second, mais discutons en sans courroux, cité Straub qui dit qu'un mouton c'est juif, et revenir sur le vegétarisme de Kafka, ça ne va pas.

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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 11:01

sur la question du sionisme et de l'anti-sionisme de kafka, il y a des pages justes et évidentes chez blanchot; dans la perspective juive, il y a pas, dit-il, une séparation entre deux mondes, le vrai et le faux, comme dans le christianisme, compris du moins très simplement : l'exclusion de Canaan est aussi une exclusion du monde, de la vie ordinaire, mariage, famille, enfants...l'errance dans le désert (c'est bien le sujet du film de straub) est une malédiction, et non pas l'affirmation de l'essence de la condition juive... c'est dans la lutte contre cet exil, cette errance, cet bannissement du monde, qui est un bannissement de la religion aussi, que doit se comprendre le sionisme de kafka, qui on le sait a d'abord des origines cultures, dramatiques, religieuses... il y a deux idées, deux affirmations, celle qui dans l'exil cherche un territoire saint dans la bible, le royaume, le sol juif, c'est le texte, l'écriture, la bible, et puis ceux qui veulent réconcilier les deux, fonder une terre pour l'écriture d'un peuple, un sol réel, un fond..."le sionisme est la guérison de l'exil, l'affirmation que le séjour terrestre est possible, que le peuple juif n'a pas seulement pour demeure un livre, la bible, mais la terre et non plus la dispersion dans le temps. Cette réconciliation, Kafka la veut profondément, il la veut même s'il en est exclu, car la grandeur de cette conscience juste a toujours été d'espérer pour les autres plus que pour lui et de ne pas faire de sa disgrâce personnelle la mesure du malheur commun. "Magnifique, tout cela, sauf pour moi et avec raison." Mais à cette vérité il n'appartient pas, et c'est pourquoi il lui faut être antisioniste pour lui-même (...) sa migration ne consiste pas à se rapprocher de Canaan, mais à se rapprocher du désert, de la vérité du désert, d'aller toujours plus loin de ce côté là..."

ce désert, c'est l'écriture... comme forme de prière...
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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 11:24

NC a écrit:Crash, Cronenberg voyons...
Et celui qui dit ça est celui qui fait rapport entre tout ; désolé d'en prendre ombrage. Le vieux Straub je le connais. Entre Kafka et Straub, il s'est passé quelque chose, alors la question ne peut plus être la même vois tu. Tu ne peux pas les faire discuter ensemble, les mettre sur un même plan d'horizontalité, dans une suite du discours, ou à la limité tu fais parler le premier puis le second, mais discutons en sans courroux, cité Straub qui dit qu'un mouton c'est juif, et revenir sur le vegétarisme de Kafka, ça ne va pas.

non, il ne dit pas que les moutons sont des juifs, les juifs, des moutons (comme l'a fait arendt par exemple, comme le font, dans un tout autre esprit, tous les israéliens qui veulent nous faire comprendre que les temps changent et que désormais les juifs doivent s'emparer de la violence... blablablabla... ); il ne dit pas non plus que les juifs sont des chacals...

non, je ne cite pas straub, puis le végétarisme de kafka, je cite le passage, pour indiquer la sensibilité chez straub aux animaux, comme chez kafka, pour tenter de penser ensuite la place du chacals dans le film...(les deux "nouvelles" publiées dans la revue de buber ("recherche d'un chien", et "chacals et arabes") sont regroupées sous un titre collectif "histoires d'animaux"...

Dois-je rappeler l'importance des animaux, des devenirs-animaux chez kafka... ou qu'il y a une tradition de la métempsychose dans la kabbale (scholem, la lie à l'horreur de l'exil...); kafka ne l'ignorait pas (certains lisent samsara dans samsa, le héros de la métamorphose)...


pour moi l'essentiel est de penser les chiens et les chacals, des deux "nouvelles", de préparer un horizon de perception de la mise en scène de kafka par straub...que la place des sionismes soit essentielle...



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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 11:26

« Maintenant je peux vous regarder en paix, je ne vous mange plus. »

(dit kafka aux poissons)

regarder en paix, ne plus manger

introjection de l'autre, comment bien manger, en paix, sans dévorer des yeux


Dernière édition par Borges le Dim 15 Jan 2012 - 11:52, édité 1 fois
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Message par Borges Dim 15 Jan 2012 - 11:52

NC a écrit:Crash, Cronenberg voyons...

ce topic doit bien entendu penser avec celui sur cronenberg : depuis l'Egypte; anubis, le dieu à tête de chacal et le sphinx, la machine infernale

(Tu n'es pas un Arabe, t'es un chacal) De Straub à Kafka : Canaan à l'instant de la mort  2Q==


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"
Freud possédait un morceau de carton, préparé pour la momie d'une femme, sur lequel Isis, Horus, Osiris et Anubis apparaissaient. Ce carton se trouvait à la droite du fauteuil dans lequel Freud était assis lorsqu'il recevait ses patients"


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Message par NC Dim 15 Jan 2012 - 12:18

Straub sensible à la cause animal, c'est comme Faurrisson sensible à la cause du prolétariat. C'est drôle, c'est la blague du siècle (le mauvais, celui de Badiou).
Si tu aimes les devenirs animaux, je te conseille Winnie L'ourson, John Lasseter en a refait un en 2011. Je ne sais pas si les spectres en ont parlé. Il y a aussi Kenneth Grahame, et le vent dans les saules. Tu as Taupe. Du genre de celle du terrier. Et puis Rat, Loutre et Crapaud. C'est tout un monde.
Pourtant je me suis fait cuire un poulet ce midi. Non Straub n'a rien à faire avec ce vieux monde d'Europe Centrale, ce n'est pas la même question, la sienne c'est une fausse question théorique. Le devenir animal c'est la pulsion de mort, au delà du principe de plaisir, c'est le retour à l'inanimé, l'avant la conscience, celle qui a été donné par Dieu à l'homme, sous la forme d'une névrose bien entendu. Il faut supprimer la perception, s'enterrer loin où s'enfermer dans une carapace.
"La tension revenant dans la substance jusque là inanimé cherche alors à se réduire ; ainsi était donnée la première pulsion, celle du retour à l'inanimé" Freud .
Il y a donc cette interrogation centrale chez Kafka, comme tu le soulignes, puisque le noeud du judaïsme est là, ce qu'on peut ou ne peut pas manger, sur ce qui a une parcelle divine ou n'en a pas, une névrose ou pas, il se tiens exactement sur ce lieu entre le passage de l'inanimé à l'animé, qui déjà veut retourner à l'inanimé. Straub lui est dans la mort, il a choisi déjà : les juifs, les moutons...

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Message par NC Dim 15 Jan 2012 - 12:33

Qui sont les vrais nazis ? C'est chez toi que ça se passe. A mettre en rapport.

Tu pourras supprimer

$$$$


SdC : Aucune accusation d’instrumentaliser la Shoah pour dénoncer le capitalisme ?

NK : Pas sérieusement. C’est une idée paresseuse, émise par des gens qui voulaient seulement empêcher les débats que le film ouvrait. La réalité c’est que la Shoah a déjà été instrumentalisée par tant de pouvoirs réactionnaires… surtout pour faire l’éloge du capitalisme, en affirmant par exemple, comme le fait Alain Finkielkraut dans Au nom de l’autre, que « l’Amérique démocratique et l’Europe démocratique ressourcent leurs principes communs dans la commémoration de la Shoah ».
Je ne suis pas militant d’extrême-gauche, ni un philosophe. Mais j’ai beaucoup étudié cette histoire à cause de mes origines juives polonaises et alsaciennes, de l’histoire de ma famille, des zones d’ombres qui la traversent, du silence de mon père dont le père a été déporté à Auschwitz. D’une certaine manière, c’est peut-être un film documentaire sur un sentiment qui m’habite depuis très longtemps et qui a fondé mon désir de cinéma. Il n’y a rien à faire, malgré la raison, les manuels d’histoire, les commémorations, les progrès de la technologie, j’ai le sentiment que la violence radicale qui a créé Auschwitz continuera encore à hanter notre époque. L’anéantissement est une technique trop efficace pour affirmer que si les circonstances le permettaient, une partie de l’humanité ne serait pas tentée d’en anéantir une autre. Au départ la « solution finale » était un processus médical pour « abréger les souffrances » des handicapés mentaux et les infirmes, programmé par Hitler comme un geste humanitaire. Ça s’est ensuite déplacé, s’est élargi à d’autres « catégories » d’êtres humains en incluant dans ce geste humanitaire l’éradication des juifs d’Europe. Le monde industriel s’est maudit lui-même en générant Auschwitz. Et nous vivons encore dans le monde industriel maintenant numérisé. Quand j’étais plus jeune, je me disais que si la télévision avait existé du temps de Hitler, Auschwitz n’aurait jamais pu exister. Aujourd’hui je me dis exactement le contraire, Hitler aurait gagné la guerre. Le capitalisme hype, avec toutes ses télévisions, sa révolution numérique, ses commémorations pathétiques, ses milliards de milliards de dollars qui circulent chaque seconde d’un bout du monde à l’autre, ne fera jamais rien pour mettre fin aux famines, aux épidémies, à la misère qui dévastent des centaines de millions d’hommes et de femmes en Afrique et dans les banlieues des grandes villes… Les massacres administratifs et financiers du capitalisme conquérant ont tué et tueront encore. C’est une évidence. Les alliés qui se sont partagé les ruines de l’Europe après l’extermination de six millions de juifs n’ont rien fait pour empêcher l’extermination, ils auraient pu bombarder les chemins de fer… Mais empêcher l’extermination n’a jamais fait partie de leurs buts de guerre.

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Message par Borges Lun 16 Jan 2012 - 8:56

(Tu n'es pas un Arabe, t'es un chacal) De Straub à Kafka : Canaan à l'instant de la mort  Shakale%20600

un homme qui marche, seul, quelconque; nous croyons le saisir, le tirer de cette solitude quelconque en le nommant... mais est-ce bien cet homme que nous atteignons en croyant le saisir dans l'unité, presque glorieuse, d'un nom, d'un nom d'auteur? il y a là, quelque chose de peut-être gênant, une manque de tact.



Nous voyons des films, nous les commentons, nous en parlons. C'est devenu comme une règle, une loi pour nous. La perception des oeuvres laisse de moins en moins silencieux, même ceux qui sont attachés à dire leur unicité, leur solitude et leur silence ne peuvent s'empêcher d'en parler, d'en écrire. C'est ainsi qu'ils existent, et qu'ils appauvrissent l'intensité d'être des oeuvres.

Dans le cas du cinéma, ce rapport semble encore plus tragique.

Ne dit-on pas que le visible ne peut se loger dans le dire?

On le dit, mais il serait difficile d'en rester là; l'écriture, quand on y parvient, n'est peut-être pas un dire, une parole. Elle ne vise peut-être pas à rivaliser avec le visible, à en réduire l'essence.

Peut-être.

Le rapport d'existence au film, passe par l'écriture. C'est ainsi; mais on ne peut ignorer
que le commentaire, ce qu'on appelle la critique, même à son degré d'intensité le plus haut, n'est qu'un bavardage, une indélicatesse où le commentateur tente de superposer à l'énigme de l'oeuvre son propre bavardage.

il faut le déplorer, à moins de saisir dans le film ce qui fait de lui aussi un commentaire (une vaine répétition). Dans ce cas notre propre commentaire ne serait pas étranger à son mouvement, au silence qu'il veut nous imposer pour s'imposer dans la visible, pour nous imposer le visible de ce que nous ne voyons pas... que nous ne voyons pas.

Pensons à l'importance de la cécité chez H/S.

Par le commentaire, il s'agit de répéter l'oeuvre, dans l'entente de ce qui en elle se répète, et la fonde comme oeuvre unique; saisir donc ce qu'il faut entendre dans la différence qui unit straub et kafka, dans le désert, espace de l'errance de l'oeuvre et du sens.

la différence, déjà : le cinéma H/S est la moins errant qui soit, le moins proche du fragment. Tout en elle en lui est composé, uni, semble d'une continuité, sans ruptures, sans hétérogénéités. Un Bloc. Oui, sans doute, mais c'est peu dire, c'est même ne rien dire.


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Message par Borges Lun 16 Jan 2012 - 9:03

"pourquoi est-il absurde de poser des questions? Se plaindre signifie : poser des questions et attendre que la réponse arrive. Mais les questions qui ne donnent pas elles-mêmes de réponse en naissant n'obtiennent jamais de réponse. Il n'y a pas de distance entre celui qui interroge et celui qui répond. Il n'y a aucune distance à franchir. C'est pourquoi les questions et l'attente sont absurdes."

(kafka, journal, 444,biblio-poche)




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Message par Borges Lun 16 Jan 2012 - 9:07

De nouveau, de nouveau, banni
au loin, banni au loin.
Montagnes, déserts, il faut
marcher à travers un grand
espace.


(Tu n'es pas un Arabe, t'es un chacal) De Straub à Kafka : Canaan à l'instant de la mort  Shakale%20600

mais cet espace à parcourir, pour le banni, est peut-être aussi la chance d'une réponse quand existe une distance entre celui qui interroge et celui qui répond...la question et l'attente alors ne sont pas absurdes...



"pourquoi est-il absurde de poser des questions? Se plaindre signifie : poser des questions et attendre que la réponse arrive. Mais les questions qui ne donnent pas elles-mêmes de réponse en naissant n'obtiennent jamais de réponse. Il n'y a pas de distance entre celui qui interroge et celui qui répond. Il n'y a aucune distance à franchir. C'est pourquoi les questions et l'attente sont absurdes."

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