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Rohmer est mort : le reste est beauté

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Message par Borges Ven 15 Jan 2010 - 14:00

Eyquem a écrit:
le couple lui-même porte le nom de "joyce"
Pas seulement ça. Il y a une scène d'aveu, dans le Rossellini, manifestement inspirée par la fin de "The Dead", la nouvelle. On entend Ingrid Bergman raconter à Sanders exactement la même histoire, d'un garçon mort d'amour pour elle autrefois. Sauf que Sanders, lui, il se paie ensuite sa tête, si je me souviens bien (impossible de remettre la main sur mon DVD...)

Disons que la neige qui tombe, à la fin de "The Dead", ça rejoignait l'idée évoquée plus haut : de la mort qui rend toutes choses égales. La neige tombe, partout, s'amoncelle en tout endroit, "sur tous les vivants et les morts".

hello,eyquem; oui, bien entendu;je rajoutais juste cela à ce que tu avais dit, en plus de l'allusion à cette nouvelle, celle à ulysses...oui Sanders se moque d'elle, et elle ne semble pas très désireuse de défendre l'amant-poète mort, dont elle recite un poème... c'est ce que je disais, très condensé à la fin du message...


Dernière édition par Borges le Ven 15 Jan 2010 - 14:03, édité 1 fois
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Message par Borges Ven 15 Jan 2010 - 14:02

Les nuits de la pleine lune, revu, sur arte, c'est pas terrible, disons; juste après sur cette chaîne de merde y avait un truc sur un grand créateur, comme ils disent dans le monde de la mode...
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Message par Invité Ven 15 Jan 2010 - 19:00

Bien sûr que c'est pas terrible. C'était juste pour l'enchainement qui suit.

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Message par Borges Ven 15 Jan 2010 - 20:07

Simon Cussonaix a écrit:


le goff (jacques) à propos du choix de l'octosyllabe et de la traduction du poème de Chrétien de Troyes par rohmer : "je trouve qu'aujourd'hui ça fait, non pas authentique, mais ridicule".

le mot est bien choisi, parce qu'il nous rappelle que le but de rohmer, l'un de ses buts essentiels, a toujours été le sublime; franchissait-il parfois le pas? je pense; mais ce n'est pas une critique, quelque chose de plus intéressant à penser, un peu comme les rires que suscitent souvent les films de rohmer; la question est "comment un homme si obsédé par le naturel peut-il si souvent donner le sentiment de ne rendre que des artifices, l'artificiel... le ridicule du regard que les hommes posaient sur eux-mêmes ? on peut tenter de penser cela, dialectiquement...depuis Brecht, paradoxalement... ou alors depuis la théologie... tous les hommes sont ridicules s'ils ne sont pas touchés par la grâce, des pantins, des marionnettes...
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Message par Borges Lun 18 Jan 2010 - 13:32

Il faudrait penser le film de rohmer avec celui des MP, "sacré graal";comparer, et différencier, les choix éthiques, esthétiques, de reconstitution,

on sait que le but de Rohmer était d'atteindre le regard des gens de l'époque sur eux-mêmes, sur leur monde, la nature... il disait ne pas supporter dans un film médiéval la coexistence des hommes et des arbres, par exemple, pour une raison assez complexe à saisir, s'il voulait suggérer par là que les arbres n'étaient pas perçu de la même manière alors que de nos jours, c'est un peu court, parce qu'il aurait du employer le même principe pour son dernier film, où l'on voit des arbres d'aujourd'hui...

(c'est plus complexe)


mais ce n'est pas cela l'essentiel, ce qui m'importe, c'est la manière dont les MP substituent aux chevaux réels, les chevaux de nos jeux d'enfants; atteignant finalement quelque chose du désir de Rohmer, la poésie enfantine de l'époque, mais cette poésie chez eux, n'est pas séparé de la violence des temps...

les MP font disparaître les chevaux, Rohmer tout le décors pratiquement, naturel et culturel...pour ne garder que la langue (traduite) les chevaux, les armes, les costumes...
pq les arbres plutôt que les chevaux, la vision du cheval n'aurait pas changé depuis Chrétien de troyes...pourquoi les chevaux chez les MP?


l'idée, l'effet obtenu, est tout de même identique : le moyen âge c'est une certaine idée de l'enfance, à moins que cela ne soit la chevalerie...(l'être avant la sexualité?)


comparons:

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Message par Invité Lun 18 Jan 2010 - 14:40

et le point de vue, la mise en scène ?
on peut s'appeler le goff est ne rien n'y entendre. surtout d'ailleurs.

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Message par Borges Lun 18 Jan 2010 - 16:40

ccamille a écrit:et le point de vue, la mise en scène ?

je fais semblant de discuter avec toi, et je dis :

-Ah, parce que pour toi les actes de langage ne sont pas de la mise en scène? Pas même chez un type comme Rohmer, pas même dans perceval, où tout l'enjeu réside dans un dialogue avec le théâtre, et la volonté de rendre une langue simple, la clarté...la précision...et tout ce que nous avons perdu;



ici, tu trouveras un argument un peu sérieux à opposer à le goff;





ensuite les amateurs de la mise en scène, de ses relations aux actes de langage, qu'on appelle aussi parfois dialogues, pourront lire, relire, le texte consacré par Rohmer à un américain bien tranquille", de Mankiewicz... dont on croit la valeur essentiellement liée à la langue...


-" et la mise en scène donc? demandent ceux qui savent pas ce dont il s'agit...

rohmer :

-le travail d'adaptation n'est-il pas déjà mise en scène, qui signifie mise en film...la pire erreur de notre part serait de définir une notion qui nous est chère de manière trop simpliste (...) Gardons-nous des des définitions hâtives : aurions-nous cru, par exemple, que notre vieille compagne, "la mise en scène", pût se dissimuler sous le manteau d'un jeu de mots"?


mise en scène des mots, de la langue, des corps parlant...
mais aussi, on dira, les mots, surtout chez Rohmer, mettent en scène...(voir, par exemple le rôle de l'écrivain dans "le genou de claire"...)

quand le goff dit cela est ridicule, il parle de la mise en scène, car la scène mise en place par Rohmer est une scène parlante (doublement, au moins; elle parle du passé se parlant, se voyant, mais aussi de nous, qui avons perdu cette relation naïve au monde, à travers la langue, par exemple...)

ce qu'on peut reprocher à le goff ce n'est pas de ne pas tenir compte de la mise en scène (dans sa critique de l'adaptation du texte, de la traduction, du choix de l'octosyllabe, du mélange de la langue du 20ème, et de la médiévale) mais bien plutôt de penser que le but des usages de langue dans le film était d'atteindre à l'authenticité...

ce qui ne semble pas le cas, à écouter le passage en lien, il s'agit pas de réalisme, mais de magie...

donc, etc

merci de penser, et de lier ce qui se dit...
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Message par Invité Lun 18 Jan 2010 - 22:05

la critique par la mise en scène s'appliquait aux Monthy Python qui font un truc + ou - efficace, dans l'instant.
Chez Rohmer la dimension de la durée, de la place d'un film, dans un ensemble tient aussi lieu de mise en scéne.
Pour ma part il n'y a guère que chez Minelli que je n'aie rencontré ça.
C'était là remarque sur la mise en scène ( à ce propos le film le mieux mis en scène que j'aie vu est Sandpipper de Minnelli, et en scoop ).
Ce que je crois est qu'il y a eu de grands cinéastes avant Rohmer mais qu'il a par la suite éclipsés tous les autres.

Quand à Le Goff le spécialiste je le rapprocherai d'un autre spécialiste dont je me moque de la philosophie mais qui a montré par sa chronique régulière et régulièrement à côté dans les cahiers qu'elle ne lui était d'aucun secours pour voir les films.

Maintenant je vais écouter le message de l'au delà que tu envoies de Rohmer

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Message par Invité Mar 19 Jan 2010 - 2:02




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Message par Borges Mar 19 Jan 2010 - 12:51

Après avoir dit "chez Rohmer, y a pas pas ça, ni ça, ni ça...", il faut maintenant faire revenir certaines choses, autrement, par exemple, la mort, l'enfance...

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Message par Borges Mar 19 Jan 2010 - 12:58

-Quelle est l'idée de ton idée,
-l'idée de mon idée c'est que je n'ai pas d'idée


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Message par Invité Mer 20 Jan 2010 - 20:36

dès que j'ai un scan j'envoie quelques réflexions non sans intérêt du critique américain Tom Gunning sur le sujet.
Tu connais ?

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Message par Borges Jeu 21 Jan 2010 - 11:36

hello ccamille, merci : ce serait bien pour relancer la discussion; sinon TG (cinema of attractions) juste rencontré son nom dans des textes sur le net; rien lu; de mon côté, je suis en train de lire, relire, le texte de Cavell sur "conte d'hiver"
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Message par Invité Ven 22 Jan 2010 - 16:11

dans un article paru dans le livre collectif, Rohmer et les autres, Gunning part du postulat que peu de théoriciens se sont montrés aussi disposés que Rohmer à reconnaître qu'il poursuivaient ( en l'occurrence dans les écrits et dans les films ) le travail d'un théoricien plus ancien, i.e. la relation du film au réalisme chez Bazin.

Il pointe ensuite des différences notamment, notamment en ce qui concerne l'objectivité cinématographique : pour Rohmer la réalité à laquelle l'image cinématographique ne peut renoncer est celle du temps lui même alors que Bazin prétend à l'indexicalité de la relation de la photographie à une réalité originelle prééxistante - ce qui serait plus simple et moins dialectique.

Il se demande ensuite comment il a pu faire des films comme Perceval le Gallois , aux antipodes du réalisme et La marquise d'O , modèle d'adaptation littéraire , lui qui pensait que le cinéma ne devait rien aux autres arts.

Et voila comment il termine son article :

"Bien que ces 2 films soient peut être ceux de Rohmer que je préfère, une objection légitime s'impose ; en effet, ce sont des aberrations par rapport au style habituel du cinéaste " - et de la nouvelle vague ! [... ].

Mais nous passerions à côté de la nature unique de son cinéma si nous y voyons un héritage du réalisme traditionnel. Car s'il nous faut considérer que Rohmer prêche la vérité du réalisme cinématographique de Bazin, aller jusqu'à décrire ses propres films comme réalistes exige une compréhension dialectique du terme [...].

Même un observateur amateur est conscient du conflit entre les aspects réalistes de son style visuel ( tournage en extérieur, évitement des procédés de langage cinématographique, absence manifeste de dramatisation ...) et la nature abstraite, presque schématique de ses scénarios. Dans le film rohmérien, les dialogues, l'intrigue et les situations s'articulent autour de symétries, de coïncidences, de paradoxes et de moments d'identification particuliers - à la fois pour les personnages et pour le public. Le plaisir qui en résulte réside exactement dans l'exécution d'un scénario précis à l'intérieur d'un univers contingent.

Même lorsque Rohmer écrit ses propres scénarios - le plus souvent - la rencontre entre son écriture et le cinéma reste donc dialectique.

S'il a tellement confiance en une nature radicale du cinéma, c'est en partie parce qu'il le croit si unique qu'il peut tout absorber et néanmoins conserver sa nature - tant qu'il ne cherche pas à utiliser les méthodes d'une autre forme d'art. Qu'il s'agisse de films contemporains ou d'adaptations, la continuité de la pratique de Rohmer est remarquable : déjà dans un essai de 1948, Pour un cinéma parlant il proclame l'avenir d'un cinéma qui n'aurait pas honte de donner toute sa place au dialogue ; qui ne laisserait pas le langage dicter le style cinématographique, et pas davantage s'y soumettre.

Rohmer : " Le commentaire et les dialogues sont choses que je filme, au même titre que les paysages, les démarches, les gestes " ( le goût de le beauté, p 70).

Loin de véhiculer le sens, le langage fait partie intégrante du monde dans les films de Rohmer ; une partie qu'il ne souhaite pas réduire et dont il ne rougit pas. De même, s'il observe une fidélité scrupuleuse à l'égard de la langue de Kleist ou de Chrétien de Troyes dans ses adaptations, c'est parce qu'il voit le langage comme un matériau à préserver - plutôt que comme un simple vecteur de signification qui pourrait être traduite en une autre forme d'expression.

C'est dans cette approche radicale de la nature du cinéma, élaborée à partir des principes de Bazin que réside l'essence du réalisme défendu par Rohmer. Le cinéma n'est pas un langage ; comme le répète souvent Rohmer, non un moyen de dire, mais de montrer. C'est un médium qui peut exprimer les divers corps existants - y compris les objets, les gens, les arbres, les rochers, les océans, les membres et les organes, aussi bien que les contes, les conversations, les philosophies et même les oeuvres d'art -, tout en préservant leur intégrité individuelle, voire étrangère.

Le réalisme n'est pas en adéquation absolue avec le vraisemblable, et il ne consiste pas non plus à rendre les choses plus vivantes ou plus dramatiques ; il s'attache plutôt à respecter le poids et la résistance de langage et des choses.

Davantage que comme un médium où tout se mêlerait pour produire un effet unique prédéterminé, Rohmer envisage le cinéma comme un art où les choses persistent, côte à côte, exprimant le poids et la présence matérielle du monde à travers ses multiples apparences. "


C'est une approche un peu textuelle à l'américaine et en cela peut être plus séduisante que convaincante. Enfin, la lecture de Gunning est incisive.
Je suis plongé dans l'histoire des Cahiers de De Baecque pour saisir l'articulation de la discorde entre celui qu'ils appelaient "le vieux", et les autres.

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Message par Borges Ven 22 Jan 2010 - 18:41

hello, et merci
après une première lecture

Des choses intéressantes dans ce texte,

-mais reste tout de même bien des impensés, par exemple, tout se passe comme si le sens que donnait Bazin à "réalisme" allait de soi

-le livre de Rohmer, c'est "le goût de la beauté", pas "le goût du réalisme", je pense, que c'est plus un metteur en scène du beau, du naturel, comme il dit parfois que du "réalisme"; Macé, comprend le réalisme, à partir des res, faisant de rohmer un metteur en scène des choses, de leur immanence, dans leur égalité de surface réfléchissante, mais hélas reste un problème si chez Rohmer l'homme est avec les choses, l'homme est aussi cette chose qui parle, il ne se contente pas de réfléchir la lumière...

-Il faudrait séparer tous les réalismes que l'on peut trouver dans la pensée de Rohmer, par exemple celui de Hawks (qui filme ce qui est), et celui de RR, de Renoir... ou encore penser le refus chez rohmer du réalisme à la sartre, ou du roman américain, alors à la mode...à qui il reproche au fond de tout mettre sur un même plan, de ne pas hiérarchiser les choses...

-N'oublions pas que naturalisme, vient de nature, que la nature, traduit "natura", et que ce terme lui-même remonte à la physis, donc à l'être... mais là, on ne peut penser le naturalisme de rohmer, sans penser ce à quoi, la nature s'oppose dans la pensée chrétienne, la grâce...

-ainsi, on ne sait pas très bien ce que rohmer entend par nature, dans son dernier film le jeune beau con refuse de coucher avec la fille qui l'a recueilli par fidélité, il lui dit ne pas aimer agir comme les choses de la nature, comme les abeilles qui vont de fleur en fleurs; dans "conte d'hiver", l'héroïne, qui croit sans croire, dit ne pas avoir avorté parce qu'elle est contre ce qui est contraire à la nature...


-autre problème, celui des deux natures, la sublime, et la belle, problème du beau et du sublime...

donc


etc


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Message par Borges Ven 22 Jan 2010 - 18:54

"Conte d'hiver" est l'un des meilleurs Rohmer; la fille fait un lapsus (on discute un peu psychanalyse dans le film), en donnant son adresse à son grand amour, à la fin des vacances, elle dit habiter Courbevoie au lieu de Levallois.

Cavell se demande ce que signifie ce lapsus, si elle voulait ne pas être retrouvée, de quoi alors aurait-elle eu peur, alors qu'elle est folle de ce mec; à un moment elle se définit comme la fille introuvable, ce que Cavell comprend à partir de la pièce de shakespeare, où il y a une perdita... ne peut-on penser ce lapsus depuis les noms des lieux : courbevoie et levallois ?




le rôle de la photo (de l'aimée, aimé) dans les films de rohmer... comparer aux autres films de rohmer, par exemple "les nuits de ...", ou encore "le genou de claire"... dans "conte d'hiver" la photo s'anime, arrive dans le film, dans les deux autres films, pas...comme dans le dernier film...

différence entre le cinéma et la photo










Dernière édition par Borges le Ven 22 Jan 2010 - 18:58, édité 1 fois
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