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Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir

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Message par Largo Mer 24 Nov 2010 - 23:24

Parmi les autres arts venant à la rescousse (théâtre, danse, vidéo, BD...), la musique occupe une place de choix : Quentin Dupieux est un fameux musicien électronique, sous le nom de Mr Oizo (...) Cette proximité désinhibe (Rob mêlant Johnny Halliday et John Carpenter), y compris dans une question cruciale, rarement posée : à qui s'adresse-t-on ? Si on s'adresse aux copains, aux commissions, aux critiques ou au public français art et essai, le risque est grand de retomber sur les mêmes clichés. Le succès international de la French Touch est ainsi désinhibant sur l'idée d'un autre public potentiel.
Le cas de Riad Sattouf est exemplaire : venu de la BD, il saute directement au long, avec un succès énorme (près d'1 million d'entrées), un César... (...)
C'est l'exemple type d'un réalisateur passant aisément d'un médium à l'autre et démontrant que cela peut être fait non dans la confidentialité mais avec succès. C'est tout le mal qu'on souhaite à cette génération émergente : trouver de nouvelles formes esthétiques et économiques afin de créer un cinéma qui corresponde à notre époque.

(Stéphane Delorme, Cahiers du Cinéma, Novembre 2010) (illustration Les Beaux Gosses)

Finalement, ce qu'on a trouvé de plus intéressant, ce serait encore Les Beaux Gosses de Riad Sattouf, tout droit venus avec leurs boutons et leurs chaussettes sales du monde de la bande dessinée et qui paraissent, par comparaison, beaucoup plus en prise avec les charmes ingrats de l'adolescence d'aujourd'hui, quand bien même le récit se situerait dans les années 90. Le charme, l'humour et la désinvolture de la jeunesse, c'est peut-être là qu'ils résident, dans une forme cinématographique généreuse et audacieuse, ouverte et populaire, qui rompt, un peu à la manière du Steak de Dupieux (venu de la musique, lui, tiens) avec un certain esprit de sérieux d'un cinéma d'auteur français toujours bien habillé mais qui devrait parfois songer à ôter le parapluie qu'il a dans le cul.

(moi, Spectres du Cinéma, 9 septembre 2010) (illustration Les Beaux Gosses)

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Message par Borges Jeu 25 Nov 2010 - 9:30

Parmi les autres arts venant à la rescousse (théâtre, littérature populaire, radio), la science fiction et la radio occupent une place de choix : le très jeune Orson Welles n'est pas seulement un fameux shakespearien c'est aussi un amateur de science fiction animateur radio

(moi, il y a bien bien longtemps)




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Message par Borges Jeu 25 Nov 2010 - 9:41

que voulez-vos dire par "populaire"? qui a du succès? qui parle du peuple (avec ses valeurs, son éthos... bien connus)? qui s'adresse au "peuple" (avec ses valeurs, son éthos... bien connus)?....


une grammaire des usages du terme s'impose;



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Message par vivresavie Lun 13 Déc 2010 - 1:59

Borges a écrit:Bonjour, Jean-Charles Villata


- Godard, ni dans À bout de souffle, ni dans le Mépris ni dans bien des films après ne s’est occupé du monde


?
J'aimerais une petite justification, car je pense que tout au contraire, Godard ne fait que s'occuper du monde, il a la msianthropie d'Alceste, il casse les règles pour en construire une collective, fondement de l'égalité pour Jean-Jacques Godard, d'ailleurs c'est un peu ce qu'il démontre dans Soigne ta droite


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Message par Le_comte Mer 22 Déc 2010 - 20:39

Pauvres Cahiers !

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Message par Largo Mar 11 Jan 2011 - 12:46

Après le numéro "meilleurs films de 2010" en décembre, voilà maintenant "Les films les plus attendus de 2011". A se demander ce qu'ils vont faire en février...

Enfin, depuis qu'il n'y a plus vraiment de textes critiques d'envergure, on trouve plus de documents de cinéastes (note d'intention du prochain Ameur-Zaïmèche + un texte de Bonello, un truc sur Ackerman qui adapte Conrad...) et des entretiens (Sokourov, Svankmajer, Floc'h et surtout Badiou pour ce numéro). Et puis, c'est évidemment Tesson qui s'occupe du JZK (critique/entretien).

Voilà si jamais y'en a que ça intéresse. What a Face
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Message par Borges Mar 11 Jan 2011 - 15:29

Ce sera sa deuxième fois aux Cahiers; la première, c'était avec Burdeau dans le numéro spécial cinéma 68; en mai 1998...

avant ça, il avait écrit dans l'Imparnassien, en mai 1983:

"Dire que le cinéma est rare aujourd'hui, très rare même, est une vérité qui atteste que les Cahiers du cinéma mentent. Si nombrer au plus large l'existence du cinéma est dans la logique de la gestion obsessionnelle du nombre de ses lecteurs, c'est céder sur la vérité exceptionnelle de l'art, qu'il est toujours de l'exception."

(Badiou, cinéma, 107)

disent-ils la vérité, aujourd'hui?
sont-ils moins soucieux de la gestion obsessionnelle du nombre de leurs lecteurs?

et Badiou?

dans le précédent numéro, le texte de SD était assez badiousien;

ça va être la nouvelle "vulgate" de la critique branchée, quelques temps; à dégoûter de badiou, déjà...si la vérité est rare, comme l'événement, de l'ordre de l'exception, badiou est de moins en moins rare, et exceptionnel; un événement chasse l'autre, celui des médias, de la marchandise et des produits, celui des vérités; tout grand homme est menacé de devenir sa propre caricature...sa propre saturation, c'est pourquoi, il faut le réactiver, répéter, ou même ressusciter...



La règle, pour s’orienter dans l’être, est de savoir se gouverner sur ce qui inexiste : le guide n’est pas ce qui apparaît, mais ce qui in-apparaît ; et ceci est particulièrement vrai dans les moments de confusion
(badiou)

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Message par Eyquem Mer 20 Juil 2011 - 10:29

Le dernier numéro, sur JJ Abrams, est l'occasion d'une grande réhabilitation du premier Spielberg.
Super 8 ou le temps retrouvé : comment JJ Abrams retrouve la magie spielbergienne

Pour toute une génération d'enfants élevés dans les années 70-80, l'éblouissement de Super 8 est de retrouver mystérieusement intact le merveilleux dont ils ont fait leur quotidien et leurs rêves. On ne dira jamais assez combien le cinéma de Spielberg, alors méprisé par les adultes, a nourri nos rêves, et combien les enfants avaient raison d'aimer ce cinéma. Il suffit de revoir E.T, d'une splendeur visuelle rare, pour comprendre que ce que les enfants voyaient, c'étaient les aventures de la lumière, de ces torches braquées dans l'obscurité sur un petit monstre effrayé, de ces halos étincelants projetés par le vaisseau, de ce scintillement pointilliste qu'une petite banlieue paisible envoie dans la nuit. C'était un monde de lumière que nous aimions et qui venait visiter nos petites maisons recroquevillées et banales pour les transfigurer en vaisseaux irradiants.
...
Il faut être enfin redevable à JJ Abrams de donner aux enfants aujourd'hui un film pour eux. Dans les années 50, il y avait Moonfleet et La nuit du chasseur, et on sait quelle fortune la cinéphilie a donné à ces émotions de jeunesse, notamment sous la plume de Serge Daney. C'étaient des films qui donnaient à émerveiller en même temps qu'ils faisaient grandir. La nébuleuse spielbergienne a tenu ce rôle dans les années 80, entre E.T, Empire du soleil, les productions pour Joe Dante (Explorers et Gremlins) mais aussi les films auxquels Spielberg n'a pas participé (Stand by me), jusqu'à, à la limite, l'enfant-lumière de Shining. Hollywood réalisait un cinéma pour les enfants que nous étions. Aujourd'hui, à part l'industriel Harry Potter qui n'en finit pas de grandir, que reste-t-il ? Il est très beau que Spielberg, à lui seul, prenne en charge l'enfance dans le cinéma américain : après A.I, Super 8 ; après l'alliance avec Kubrick, l'alliance avec Abrams, comme si les scénarios ambitieux sur l'enfance devaient toujours passer par lui. Espérons que les enfants courront voir Super 8.

(Stéphane Delorme)
Pour commencer, je ne vois pas bien en quoi Shining appartiendrait à une "nébuleuse spielbergienne", même "à la limite". Je crois me souvenir que Spielberg avait détesté le film à sa sortie.
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Message par Borges Mer 20 Juil 2011 - 10:58

rhétorique tellement ringarde; SS n'a jamais été méprisé par les adultes; même godard trouve "ET" pas si nul que ça; le seul film, selon lui, où il réussit une image...

Le dernier numéro, sur JJ Abrams, est l'occasion d'une grande réhabilitation du premier Spielberg.



c'est surtout le début de la promotion de tintin; le super héros des enfants, des adultes, et des philosophes; je parie qu'on va parler de serres, de peeters (spécialiste de tintin et auteur d'un bio à vomir de derrida...)... de tous les tintinologues du monde... le génie, l'enfance....blablabla







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Message par Eyquem Mer 20 Juil 2011 - 10:59

On ne dira jamais assez combien le cinéma de Spielberg, alors méprisé par les adultes, a nourri nos rêves, et combien les enfants avaient raison d'aimer ce cinéma.
Quand même, cette phrase, faut l'écrire : les enfants qui aiment et qui rêvent ; les adultes qui méprisent. Simpliste, comme du Spielberg.
Et c'est assez retors de s'opposer aux "adultes" en début d'article pour rendre ensuite hommage à Daney en fin d'article, alors que Daney fait justement partie des "adultes" qui ont fait un sort à ce cinéma-là (son texte "On ne peut pas être et avoir E.T." dans Ciné journal).
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Message par Borges Mer 20 Juil 2011 - 11:05

il y a enfant et enfant, enfance et enfance; comme dirait deleuze; ce qui n'a pas empêché daney de radoter des âneries sur le cinéma et l'enfance, cinéfils et autres balivernes...
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Message par Borges Mer 20 Juil 2011 - 11:35

Eyquem a écrit:
Pour commencer, je ne vois pas bien en quoi Shining appartiendrait à une "nébuleuse spielbergienne", même "à la limite". Je crois me souvenir que Spielberg avait détesté le film à sa sortie.

"nébuleuse", sûrement parce qu'il y a un enfant, et que les enfants au cinéma, c'est spielberg; SS et SK se sont rencontrés pour la première fois à l'époque de shining à londres, je crois; SS tournait "les aventuriers"...ils sont devenus amis et tout, et ça a donné le remake de Pinocchio...

je crois qu'au début SK méprisait assez SS, qui a peut-être détesté shining à sa sortie (je sais pas) mais pas après, considérant le film comme le plus beau film de maison-hantée ever; les paths de la gloire, comme le meilleur antiwar ever; lolita, le meilleur film "about social mores in america", mieux : "the best film about kids and adults ever made"

(Steven Spielberg: interviews )

je sors du sujet, mais j'ai le plus grand mal au monde à m'intéresser à ce qui se raconte aux cahiers; ils n'offrent aucune résistance, ils ne provoquent rien, laissent complètement indifférents; loin est le temps de burdeau;



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Message par Eyquem Mer 20 Juil 2011 - 11:54

je crois qu'au début SK méprisait assez SS, qui a peut-être détesté shining à sa sortie (je sais pas) mais pas après, considérant le film comme le plus beau film de maison-hantée ever
Hello Borges,
J'ai retrouvé : c'est dans les bonus d'Eyes wide shut : en fait, il ne dit pas qu'il a détesté, il dit qu'il a "not love" le film la première fois, puis : "I didn't like it the first time i saw it" même si depuis c'est one of ses favorites et il l'a vu 25 times !
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Message par Borges Mer 20 Juil 2011 - 12:17

hello eyquem;


une fois qu'ils sont devenus potes; ça m'étonne pas;


dans ces mêmes entretiens : SS rapprochait Badlands et Barry lyndon.

"I think Badlands and Barry Lyndon are very similar films in terms of starring the period and mood of the film (...) I like Barry Lyndon, but for me it was like going through the Prado without lunch. "

(lunch, cela doit vouloir dire que c'est du style sans substance; des films vides...)

A la fin du film de malick, il s'est senti vieux, les cheveux gris, couvert de poussière; il a eu envie de prendre une douche; il se sent à l'opposé de cette manière de faire des films; il s'intéresse dit-il, curieusement, plus au contenu qu'au style; jaws n'a pas de style. "Jaws is all content, the simplest movie i had ever seen in my life"


(la même opposition débile, qu'on retrouve partout, toujours quand il s'agit de SS : les adultes, le sérieux, l'art, l'intellect vs l'enfance et la simplicité)



SS : Lunch not Prado.

ou prado with lunch







Dernière édition par Borges le Mer 20 Juil 2011 - 12:43, édité 1 fois
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Message par Eyquem Mer 20 Juil 2011 - 12:38

Je tombe sur cette anecdote :
During a reception following the tribute, Spielberg said he often sent Kubrick the first cuts of his movies, even before the studios had seen them, but that Kubrick did not reciprocate. "How come?'' Spielberg asked him around the time of Full Metal Jacket.'
``'Because that's who I am, and that's who you are,''' Kubrick replied.

http://www.visual-memory.co.uk/sk/page19.htm
Ca ne sonne pas comme une amitié à la Montaigne/La Boétie...



Borges a écrit:c'est surtout le début de la promotion de tintin
Il y a aussi "War Horse" qui doit sortir dans la foulée : un enfant, un cheval, et la Première Guerre mondiale.
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Message par Invité Mer 20 Juil 2011 - 17:02

a propos des cahiers je trouve qu'il reprennent sacrément du poil de la bête depuis qu'il ont passé par perte et profit les spectres, en fait plus exactement depuis à peu près le début de l'année. je ne les achète toujours pas mais je les lis, parfois plus sérieusement que le forum ...

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Message par Largo Ven 19 Aoû 2011 - 13:00

Following the conversation :

«Super 8» : on ne peut pas être et ravoir «E.T.»

04 août 2011 | Par Emmanuel Burdeau

Le premier plan de Super 8, en salles depuis mercredi, est superbe : une grue recadre avec amour un panneau surplombant une fonderie, sur lequel il est dit qu'ici la sécurité est une priorité. Sur ce panneau est affiché le nombre de jours depuis lequel aucun accident n'est survenu. Monté sur une échelle, un ouvrier remplace le chiffre de 750 par 0 ou 1 – je cite de mémoire. Un accident vient d'avoir lieu, la mère du petit héros vient de mourir, l'histoire peut commencer, c'est-à-dire recommencer.

Du deuil et des grues, le rêve à la fois noir et brillant de tout reprendre à zéro, tout cela est dans le troisième long métrage de J. J. Abrams, plus célèbre sans doute pour les séries qu'il a créées, Alias, Lost, Fringe, que pour son beau Mission : Impossible 3 ou son récent Star Trek. Abrams emprunte ici plus d'un de ses tours à la narration des séries, et d'abord l'idée, présente dans toutes ou presque, que la catastrophe a eu lieu, que tout débute avec elle. Notre temps sera celui du deuil, d'un zéro dont rien ne dit qu'il puisse être l'amorce d'un nouveau compte : le redépart pourrait n'être rien d'autre qu'un ressassement infini de la fin.

C'est ainsi que les séries, notamment grâce à Abrams, ont acquis une aura désormais égale à celui des films : en habitant des limbes, un temps entre vie et mort, interminable, pouvant aller jusqu'à dix saisons, cent épisodes... parce que sorti de ses gonds. C'est ainsi, également, que le cinéma des années 2000 a, aura inventé une manière de se survivre : en substituant au problème de son avenir celui de son passé. Mieux : en pensant ensemble, et comme une même question, l'avenir et l'origine des images.

Triple origine



L'origine de Super 8 est triple, au moins triple. C'est le retour à zéro sur le panneau des jours sans accident, au-dessus d'étincelles qui disent aussi que rien n'arrête le compte, que rien n'arrête les contes. C'est le retour au début d'une passion cinématographique ancrée dans l'enfance via quelques bambins casse-cou, 13 ans plus ou moins, tournant un film en super 8 quand tout à coup déraille un train de l'armée américaine, sous leurs yeux et devant l'objectif de leur caméra. C'est enfin le retour aux toutes premières années de la décennie 1980 – 1979, pour être exact –, aux talkies-walkies, aux sacs à dos, aux vélos qui foncent dans les banlieues d'une Amérique qui sera bientôt, est déjà celle de Steven Spielberg – ici producteur.

Le problème de Super 8 est dans la conjonction de ces trois origines. De la première, réactualisation de la catastrophe, origine commune au cinéma et à la télévision d'aujourd'hui, on a déjà dit quelques mots. Ajoutons qu'Abrams, ici également auteur du scénario, a un peu trop tendance à vouloir accumuler autant de péripéties qu'il en suffirait à cinq épisodes de cinquante minutes dans un film de 1h52. De nombreuses idées auraient mérité d'être mieux développées, ou développées, tout simplement : le stupéfiant talent d'actrice de la jeune héroïne – Elle Fanning ; le mélange troublant, pour le moins, des uniformes de l'armée et de celui que passe Joe pour interpréter un vétéran du Viêtnam ; l'existence, à la fois centrale et étrangement peu exploitée, d'une bande Super 8 sur laquelle apparaît, dans le fracas du métal, le monstre, la bête, l'alien, l'ET autour duquel la fiction va progressivement se resserrer.

Généaologie

Ce qui nous amène à la deuxième origine : le cinéma et l'enfance, le film amateur que tournent les enfants et d'où tout part. Seuls les grands étourdis, ou ceux qui croient encore que la tâche de la critique est de dénoncer le mensonge de l'image, l'écran fatal, n'auront pas vu que la question des pratiques amateur est devenue centrale ces dernières années. Pour le documentaire, pour ce qu'on nomme les films d'artistes, pour l'autoproduction, pour le cinéma fait à la main, avec les pieds, au téléphone portable, mais pas seulement. Pour les blockbusters eux-mêmes : un Nokia y traîne toujours, une DV, une HD offerte pour Noël, une caméra Super 8...

La position d'Abrams à cet égard est étrange : la dimension d'hommage à l'amour du cinéma bricolé est d'abord patente, et assez belle, mais elle s'efface progressivement pour disparaître tout à fait. L'apprenti cinéaste prend peur, ne tient plus à son petit film, et l'autre, le grand, ne cesse de grossir pour s'achever dans une démonstration d'effets spéciaux qui n'a plus rien d'enfantin, d'originel ou d'amateur.

Spielberg et Abrams Spielberg et Abrams
C'est peut-être que la troisième origine domine, en dernière instance : l'origine Spielberg, l'ET qui est toujours parmi nous. Il faudrait relire les merveilleuses critiques de Serge Daney et de Jean Narboni – auxquelles le titre de cet article rend directement hommage – pour réaliser avec quel mélange d'admiration et d'ironie E.T., précisément, fut accueilli à sa sortie.

Trente plus tard, ou en est-on ? Après une traversée du désert critique, Spielberg est devenu une valeur sûre. Il y eut bien sûr l'incroyable première heure de La Guerre des mondes, les beautés de Minority Report, les bizarreries d'A.I. (Artificial Intelligence), mais enfin, restons sérieux : un monde où Spielberg est devenu une référence, voire la référence, est un monde qui régresse. Restons sérieux, ou soyons conséquents : si le cinéma toujours brillant, épais, toujours lourd et mièvre de Spielberg est bien le modèle d'Abrams, alors il faut reconnaître qu'il s'agit moins, ici, de saluer le bel amateurisme des enfants que de le recouvrir progressivement sous un professionnalisme à la fois brouillon et irréprochable.

Résurrection

Il y eut ces dernières années de grands films s'articulant autour d'images tournées au hasard, puis retrouvées, soit réellement, soit comme argument d'une fiction : Grizzly Man de Werner Herzog, Redacted de Brian De Palma, Tarnation puis Walk Away Renée de Jonathan Caouette. Il y eut de beaux films jouant ou se jouant de l'archive, d'Internet, d'images tournées par un quidam : District 9 de Neil Blomkamp, les récents épisodes ajoutés par George A. Romero – cité ici – à sa série des morts-vivants, Soyez sympas, rembobinez de Michel Gondry. Il y a un parfum posthume, un parfum de snuff dans The Dark Knight de Christopher Nolan ou dans Inglourious Bastards de Quentin Tarantino. Et je ne compte pas la pléthorique et souvent fabuleuse production documentaire en la matière.

Il y en a eu pour tous les goûts, dans tous les genres, avec toutes les économies, pour dire une seule chose : l'image est devenue une vérité irréfutable, une hantise qui colle à la peau, un miroir qui revient et revient encore. Une hypostase du vrai. Vous filmez, un monstre surgit, car filmer est, désormais, proprement monstrueux, puisque tout filme, tout le temps, sans arrêt. La caméra tourne en continu, le cinéma se fait sans cesse, le désastre arrive et se répète : la continuité d'un regard qui ne cille plus appelle la répétition d'un désastre qui ne cesse pas de recommencer.

Cela est aussi dans Super 8, mais bien vite recouvert par le métal enrobé de guimauve spielbergien. Abrams était bien placé pour s'avancer sur ce terrain, pourtant, puisqu'un de ses camarades d'adolescence – peut-être même a-t-il inspiré un des personnages – n'est autre que le réalisateur du plus grand film «retrouvé» de ces dernières années. Je veux parler de Matt Reeves. Je veux parler de Cloverfield – dont Abrams est d'ailleurs le producteur, et sans doute même un peu plus que cela. Je veux parler d'un film se donnant intégralement pour amateur et documentaire, d'un film faisant du monstre et de sa terreur une possibilité même du regard, d'un film disant que toute caméra, tout œil est mondial, terrestre, extra-terrestre.

Avec Super 8, on en est loin. C'est pourquoi il est à craindre que celui-ci, loin de couronner l'actuel «amateurisme hollywoodien», n'en marque plutôt le début de la fin, tout comme Abrams semble ne vouloir nous montrer pour finir The Case, le film réalisé par les enfants, que pour souligner, à coups de faux raccords et de maladresses flagrantes, combien il leur manque la maîtrise qu'il possède si bien à présent.

Le retour aux années 1980 est bien une nostalgie. Mais ce n'est pas celle de l'émerveillement. C'est celle d'un temps où vivaient encore bien séparés les amateurs et les professionnels de la profession.

Personne n'est allé voir le film ? Il est vrai que ça ne me disait trop rien...
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Message par Borges Ven 19 Aoû 2011 - 16:18

on peut avoir été et rester EB; plus ça change plus c'est la même chose; circulez y a rien à lire...à jj abrams on préférera Gigi L'amoroso



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Message par Largo Mer 28 Sep 2011 - 11:29

INDEPENDENCIAFR Independencia.fr
se demande toujours, en passant, comment une revue peut faire l'éloge du "do-it-yourself" quand elle se fait imposer une couverture hideuse.

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Message par Eyquem Mer 28 Sep 2011 - 11:50

'jour Largo,

Ca c'est sûr ; aucune revue de cinéma fait des couvertures aussi laides que les Cahiers depuis que Julia Hasting, la Design Director de Phaidon, a mis la main dessus.

Mises à bout à bout, ça fait une collec' horrible - la dernière étant la pire.

Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir  - Page 9 P1090214


Ca ressemble à rien, ça évoque rien.

Sinon, pour le contenu, je suis frappé par l'usage de plus en plus fréquent de formules gnangnans. Cf les extraits que j'avais cités au-dessus sur "Super 8" *. Et dans le dernier, des métaphores du type : "la joie de la victoire a ce goût étrange, de cendre et de miel, qui fait dire : au moins nous aurons vécu" (La Guerre est déclarée).

"de cendre et de miel" : franchement, on dirait du Télérama.



* faut dire que Super 8 s'y prête : ça ressemble à un épisode du Club des Cinq.
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Message par Largo Mer 28 Sep 2011 - 13:10

Ah, ah, ah. Cet assemblage de couvertures fait vraiment mal au coeur.
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Message par Eyquem Mer 28 Sep 2011 - 13:50

ps : pour ne pas dire tout le temps du mal des Cahiers, j'ajoute que j'aime bien les articles de Thierry Méranger et Nicolas Azalbert en général.
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Message par Largo Mer 28 Sep 2011 - 14:13

Globalement, je m'intéresse surtout aux nombreux entretiens dans les Cahiers de maintenant. Le dossier "cinéma new-yorkais" est pas mal pour ça. Ronald Bronstein est un type qui m'intrigue.
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Message par Borges Mer 28 Sep 2011 - 14:22

moi, j'aime bien les couvertures des cahiers, les entretiens, les dossiers, et les articles aussi...
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Message par Invité Jeu 29 Sep 2011 - 10:01

Pauvres Ruteboeufs! Wink


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