Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
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Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Pas encore très au point, cette esquisse du roman de ma vie fruit d'une imagination sous influence et guère inspirée. De jolies références précieuses et érudites incrustées ça et là, pour salons littéraires de capilliculture, comme des dentelles fanées et naphtalinées. Quel ennui, seigneur, quel ennui. lol.
Et c'est avec cette chose laborieusement imitative que tu espères me foutre à poil, tout nu et tout grelottant, sur la place du village?
Ben mon colon, tu prends vraiment tout pour argent comptant, et ta vessie pour une ménora. Visiblement, tu m'espères, me fantasmes, me désires impuissant, enferré, prisonnier, piégé dans je ne sais quelle "structure", tu me voues, tragique, aux chimères, aux bagnes et tutti quanti, et ça te donne un petit élan lyrique pour tenter mon éloge funèbre.
C'est gentil, et créatif, de ta part, mais si tu veux saisir un peu plus adéquatement les arcanes de ma "pensée" - lumineuse - in progress, prière de consulter le plan général et le détail de mon premier ouvrage "achevé", avant d'ânonner des sornettes. Car là, tu pédales complètement in the gaze avec tes Rousseau, tes Sisyphe, et autres ventriloqueries un poil moisies comme un bonbon à la fraise resté un peu trop longtemps dans un broc d'antiquaire.
Pourquoi je réponds encore? lol
Et c'est avec cette chose laborieusement imitative que tu espères me foutre à poil, tout nu et tout grelottant, sur la place du village?
Ben mon colon, tu prends vraiment tout pour argent comptant, et ta vessie pour une ménora. Visiblement, tu m'espères, me fantasmes, me désires impuissant, enferré, prisonnier, piégé dans je ne sais quelle "structure", tu me voues, tragique, aux chimères, aux bagnes et tutti quanti, et ça te donne un petit élan lyrique pour tenter mon éloge funèbre.
C'est gentil, et créatif, de ta part, mais si tu veux saisir un peu plus adéquatement les arcanes de ma "pensée" - lumineuse - in progress, prière de consulter le plan général et le détail de mon premier ouvrage "achevé", avant d'ânonner des sornettes. Car là, tu pédales complètement in the gaze avec tes Rousseau, tes Sisyphe, et autres ventriloqueries un poil moisies comme un bonbon à la fraise resté un peu trop longtemps dans un broc d'antiquaire.
Pourquoi je réponds encore? lol
Invité- Invité
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
avec ce topic et celui d'inglorious on se croirait sur le site des cdc... il ya 2 ans, cool.
glj- Messages : 518
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Un petit air du village d'Asterix, au petit matin chez le poissonnier.
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Et avec brio.
Tiens, pour booster l'ambiance: je découvre, effaré, les annotations extra-lucides de notre fervent adepte de Rupert Sheldrake à son insu (le spécialiste des perroquets sous hypnose, donc), ainsi que ses réponses personnelles par lui-même au test proustien sur ses affinités électives. Elles n'avaient pas capté mon attention jusqu'à présent, c'est chose faite.
Et je dois dire que je suis pas déçu.
Faisons bref, enfin presque: la recherche de l'absolu a provisoirement conduit notre grand cador flamoutch droit au zéro, car pour réussir ses ptites dissertes tellement universito-constipatoires, c'est dans la direction des mânes de Deleuze qu'il a placé son prie-dieu. C'est extraordinairement ordinaire: tout l'art de l'imitation se trouve condensé dans la cocotte-minute incendiaire.
Nous avons l'imitateur taxinomiste, qui pense depuis, dans et à travers Deleuze, réifiant la pensée de ce dernier en une grammaire monomaniaque d'objets statiques. Jusqu'à réécrire ici même la lettre de Deleuze à un critique sévère, doublement mimétisée sur un haut-fait rhétorique d'un passé glorieux. Car B.C. n'a aucune imagination, en plus d'être fragile et influençable, faut qu’y copie sur les autres, c’est chez lui quasi une seconde nature, mais bon, il se rassure ainsi, d’avoir fait le bon choix, d’avoir trié le bon grain de l’ivraie, au terme d’une tempête sous un crâne qui lui eut coûté une méningite s’il n’y avait mis un terme avec toute la fermeté requise.
Deleuze psittacosé, aplati comme un jeu de structures propre à coder ou à décoder tout et n'importe quoi, ne méritait certes pas ça, cette pataphysique hénaurme. Le sel hypnotique sur la queue du perruchon étant d'observer chez l'autre sa propre position de bagnard enfermé dans une cellule de signifiants capitonnés.
Nous trouvons des p'tites cases, propres en ordre, pour penser-classer les divers genres de comiques: Chaplin l'humaniste qui lutte contre le machinisme, Keaton le moderne qui danse avec la machine pour expérimenter, aux bords de l'inhumain. Entre les deux, y a une sorte de vasouille proto-psychanalytique d'épicerie sous sédatif, multipliant des lapins hors de quantités de chapeaux lancés dans la géopolitique, comme autant de montres molles devenues tartes à la crème burlesques, tant on se marre dans ce slapstick mental à guichets fermés.
On peine à suivre les raisonnements, qui tiennent davantage du magnétisme stochastique que de la pensée, et on navigue sur des oeufs mi-mollets, entre métaphores plus ou moins absconses et formulations coruscantes imitant une modulation d'a-rythmie oxymoresque qui fait "genre".
Tout ça n'est pas à prendre très au sérieux: cruciverbisme en circuit hermétiquement fermé, avec des « anabases », des « fonctions minorantes », des « cross-over », des « diégèses », un raton-laveur, une tentative par l'amour de « traverser la machine d'état, de la subvertir, de lui accoler une machine désirante », mais attention, en forme de poire. Ah non, en forme de baudruche, pardon.
Y a aussi la passe – avec brio - d'un comique moralisant balthazarien proprement glaçant dont la « technique », nous l'avions intuitionné, ouida, est « l’outil de la disparition, son moyen et peut-être [c'est donc pas sûr] sa cause, étant animée d'une "volonté", d'une tendance à étendre son fonctionnement jusqu'à s'emparer de la matière vivante ». Et en effet, c'est d'un burlesque irrésistible, en même temps que tragique, quelque part, cette faculté claësienne à s'emparer de la matière vivante avec une phraséologie qui serait à la fois l'outil, le moyen et pitète la cause de sa propre disparition, va savoir.
En tout cas ça fait un bon 16/20 au contrôlé de pansémiotique tubulaire suivant la contrainte formelle imposée: "servez-vous de Gilles Deleuze comme de l'almanach Vermot".
Mais las, passons de la panoplie du parfait petit chimiste à la proclamation suave, non dénuée d'un certain dandysme élitaire, des quelques affinités électives: on découvre que le sieur claesien place au plus haut dans sa tératologie intime Knut Hamsun, en prenant soin d'y assortir une détestation de Céline: "nous", de toute façon, s'en fiche bien, on ne lit ni l'un ni l'autre, "on" préfère rigoler à Big Lebowski, mais c'est malchance, car le verdict d'un homme raffiné qui abhorre la beaufitude nous informera que dans sa fine taxinomie, cela relève d'un « sous-genre faiblard » prisé par la populace inculte, à savoir le film de glandeurs-losers-fumeurs de joints.
N'en jetons-plus, la cocotte-minute pourrait faire siffler le derrière en feu du pauvre, pauvre Simon, enfermé dans sa rhétorique en stuc.
Mais "nous" savons à quoi "nous" en tenir, désormais: « bâillement ». Dans le système linguistique sophistiqué de cet "irréductible" voué aux atermoiements illimités autant qu'aux mignardises salonnardes se tenant pour profondeurs, il fallait en effet décoder: « Le plus profond mépris" ; dans "mépris" il y a bâillement, indifférence, désaffection, dédain plutôt qu'hindignation ; indignation mais pas hindignation (c'est une allusion à la corres' de Flaubert, en fait) ; on est tombé en-dessous du niveau de la colère ; non ? "Mon pauvre Paul..." ; du dégoût mais silencieux, sans grands cris ; y'a plus rien à dire ».
Et gniagniagni et gniagniagnia. On ne saurait être plus clair. Quelle noblesse, quelque part. Une véritable aristocratie du mépris qui se fomente là, intransigeante, non-réconciliée, radicale, toute en politesse chafouine, traquant la collusion des "bullies" sophistiqueurs de salons médiatiques, du pouvoir, et de la tartufferie intellectuelle. En ces matières, Môssieur Claës s'annonce d'ores et déjà comme un brillant cador. "Nous" lui décernons anticipativement la gidouille en or massif du cuistre pénétrant.
(je place la flatule ici, car la fonction du parasite est de parasiter, justement, et précisément pas à la place assignée à cet effet : « Il est certain que ce forum aurait bien besoin d'un troll hargneux et irréductible ». Qu’y dit. Mais vu qu’il affectionne « l’outrecuidance », ce téméraire. Sob)
Tiens, pour booster l'ambiance: je découvre, effaré, les annotations extra-lucides de notre fervent adepte de Rupert Sheldrake à son insu (le spécialiste des perroquets sous hypnose, donc), ainsi que ses réponses personnelles par lui-même au test proustien sur ses affinités électives. Elles n'avaient pas capté mon attention jusqu'à présent, c'est chose faite.
Et je dois dire que je suis pas déçu.
Faisons bref, enfin presque: la recherche de l'absolu a provisoirement conduit notre grand cador flamoutch droit au zéro, car pour réussir ses ptites dissertes tellement universito-constipatoires, c'est dans la direction des mânes de Deleuze qu'il a placé son prie-dieu. C'est extraordinairement ordinaire: tout l'art de l'imitation se trouve condensé dans la cocotte-minute incendiaire.
Nous avons l'imitateur taxinomiste, qui pense depuis, dans et à travers Deleuze, réifiant la pensée de ce dernier en une grammaire monomaniaque d'objets statiques. Jusqu'à réécrire ici même la lettre de Deleuze à un critique sévère, doublement mimétisée sur un haut-fait rhétorique d'un passé glorieux. Car B.C. n'a aucune imagination, en plus d'être fragile et influençable, faut qu’y copie sur les autres, c’est chez lui quasi une seconde nature, mais bon, il se rassure ainsi, d’avoir fait le bon choix, d’avoir trié le bon grain de l’ivraie, au terme d’une tempête sous un crâne qui lui eut coûté une méningite s’il n’y avait mis un terme avec toute la fermeté requise.
Deleuze psittacosé, aplati comme un jeu de structures propre à coder ou à décoder tout et n'importe quoi, ne méritait certes pas ça, cette pataphysique hénaurme. Le sel hypnotique sur la queue du perruchon étant d'observer chez l'autre sa propre position de bagnard enfermé dans une cellule de signifiants capitonnés.
Nous trouvons des p'tites cases, propres en ordre, pour penser-classer les divers genres de comiques: Chaplin l'humaniste qui lutte contre le machinisme, Keaton le moderne qui danse avec la machine pour expérimenter, aux bords de l'inhumain. Entre les deux, y a une sorte de vasouille proto-psychanalytique d'épicerie sous sédatif, multipliant des lapins hors de quantités de chapeaux lancés dans la géopolitique, comme autant de montres molles devenues tartes à la crème burlesques, tant on se marre dans ce slapstick mental à guichets fermés.
On peine à suivre les raisonnements, qui tiennent davantage du magnétisme stochastique que de la pensée, et on navigue sur des oeufs mi-mollets, entre métaphores plus ou moins absconses et formulations coruscantes imitant une modulation d'a-rythmie oxymoresque qui fait "genre".
Tout ça n'est pas à prendre très au sérieux: cruciverbisme en circuit hermétiquement fermé, avec des « anabases », des « fonctions minorantes », des « cross-over », des « diégèses », un raton-laveur, une tentative par l'amour de « traverser la machine d'état, de la subvertir, de lui accoler une machine désirante », mais attention, en forme de poire. Ah non, en forme de baudruche, pardon.
Y a aussi la passe – avec brio - d'un comique moralisant balthazarien proprement glaçant dont la « technique », nous l'avions intuitionné, ouida, est « l’outil de la disparition, son moyen et peut-être [c'est donc pas sûr] sa cause, étant animée d'une "volonté", d'une tendance à étendre son fonctionnement jusqu'à s'emparer de la matière vivante ». Et en effet, c'est d'un burlesque irrésistible, en même temps que tragique, quelque part, cette faculté claësienne à s'emparer de la matière vivante avec une phraséologie qui serait à la fois l'outil, le moyen et pitète la cause de sa propre disparition, va savoir.
En tout cas ça fait un bon 16/20 au contrôlé de pansémiotique tubulaire suivant la contrainte formelle imposée: "servez-vous de Gilles Deleuze comme de l'almanach Vermot".
Mais las, passons de la panoplie du parfait petit chimiste à la proclamation suave, non dénuée d'un certain dandysme élitaire, des quelques affinités électives: on découvre que le sieur claesien place au plus haut dans sa tératologie intime Knut Hamsun, en prenant soin d'y assortir une détestation de Céline: "nous", de toute façon, s'en fiche bien, on ne lit ni l'un ni l'autre, "on" préfère rigoler à Big Lebowski, mais c'est malchance, car le verdict d'un homme raffiné qui abhorre la beaufitude nous informera que dans sa fine taxinomie, cela relève d'un « sous-genre faiblard » prisé par la populace inculte, à savoir le film de glandeurs-losers-fumeurs de joints.
N'en jetons-plus, la cocotte-minute pourrait faire siffler le derrière en feu du pauvre, pauvre Simon, enfermé dans sa rhétorique en stuc.
Mais "nous" savons à quoi "nous" en tenir, désormais: « bâillement ». Dans le système linguistique sophistiqué de cet "irréductible" voué aux atermoiements illimités autant qu'aux mignardises salonnardes se tenant pour profondeurs, il fallait en effet décoder: « Le plus profond mépris" ; dans "mépris" il y a bâillement, indifférence, désaffection, dédain plutôt qu'hindignation ; indignation mais pas hindignation (c'est une allusion à la corres' de Flaubert, en fait) ; on est tombé en-dessous du niveau de la colère ; non ? "Mon pauvre Paul..." ; du dégoût mais silencieux, sans grands cris ; y'a plus rien à dire ».
Et gniagniagni et gniagniagnia. On ne saurait être plus clair. Quelle noblesse, quelque part. Une véritable aristocratie du mépris qui se fomente là, intransigeante, non-réconciliée, radicale, toute en politesse chafouine, traquant la collusion des "bullies" sophistiqueurs de salons médiatiques, du pouvoir, et de la tartufferie intellectuelle. En ces matières, Môssieur Claës s'annonce d'ores et déjà comme un brillant cador. "Nous" lui décernons anticipativement la gidouille en or massif du cuistre pénétrant.
(je place la flatule ici, car la fonction du parasite est de parasiter, justement, et précisément pas à la place assignée à cet effet : « Il est certain que ce forum aurait bien besoin d'un troll hargneux et irréductible ». Qu’y dit. Mais vu qu’il affectionne « l’outrecuidance », ce téméraire. Sob)
Dernière édition par Simon Cussonaix le Ven 28 Aoû 2009 - 2:16, édité 5 fois
Invité- Invité
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Tu ne m'apprends rien, Cussonaix. Je suis d'accord avec ton commentaire fielleux sur « Cocotte-minute », dans les grandes lignes. Sinon maintenant j'aime bien Céline, mets donc ça dans tes archives. L'allusion à Hansum est un peu miteuse, mais au point où nous en sommes je n'en attendais pas moins. Je suis globalement flatté que tu te sois fait suer à retrouver mes citations les plus bêtes, toute une nuit durant, comment ne pas y voir un hommage renversé. J'aimerais presque te demander de poursuivre ce petit travail, mais je n'ai plus trop de vannes en réserve pour te piquer la couenne, et puis ça devient indécent. Non, rien à faire, tu as gagné haut la main. Tu as été formidable, exquis, vraiment ; tu peux retourner en paix à ton dictionnaire, avec la conscience du devoir accompli. Et bravo pour le ruban blanc.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
La discussion sur les caméras et les vidéos de Woot se trouve dans un nouveau topic "Essence de la technique et applications wootesques", à la demande de Breaker. Sorry pour le temps mis à y répondre
adeline- Messages : 3000
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Je ne sais plus si on avait déjà parlé ici de la revue "Transfuge", où écrivent JPh.Tessé et V.Malausa. mais elle a pris une tournure intéressante (après s'être présentée, à sa création, comme une "revue de littérature étrangère", écrite par des gens "qui tentent d'être un peu plus libres" - édito du n°1)
Les couvertures et les sommaires parlent d'eux-mêmes.
http://www.transfuge.fr/anciens-no.php
J'ai juste lu le portrait de Finkielkraut par le rédacteur en chef (vous savez, celui qui tente d'être plus libre) : il mérite largement "La laisse d'or" du prochain "Plan B".*
http://www.transfuge.fr/entretien,jaury,212.php
*
Malheureusement pour lui, la Laisse d'Or d'octobre 2009 a déjà été décernée à Aude Lancelin (du Nouvel Obs') pour un portrait du philosophe qui fait lui-même le café aux journalistes. (Le Plan B n°20, en kiosque)
Pour ceux qui ne connaissent pas ce prix prestigieux, un exemple ici :
http://www.leplanb.org/La-laisse-d-or-Nicolas-Demorand.html
Les couvertures et les sommaires parlent d'eux-mêmes.
http://www.transfuge.fr/anciens-no.php
J'ai juste lu le portrait de Finkielkraut par le rédacteur en chef (vous savez, celui qui tente d'être plus libre) : il mérite largement "La laisse d'or" du prochain "Plan B".*
http://www.transfuge.fr/entretien,jaury,212.php
*
Malheureusement pour lui, la Laisse d'Or d'octobre 2009 a déjà été décernée à Aude Lancelin (du Nouvel Obs') pour un portrait du philosophe qui fait lui-même le café aux journalistes. (Le Plan B n°20, en kiosque)
Pour ceux qui ne connaissent pas ce prix prestigieux, un exemple ici :
http://www.leplanb.org/La-laisse-d-or-Nicolas-Demorand.html
Eyquem- Messages : 3126
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Eyquem a écrit:
J'ai juste lu le portrait de Finkielkraut par le rédacteur en chef (vous savez, celui qui tente d'être plus libre) : il mérite largement "La laisse d'or" du prochain "Plan B".*
http://www.transfuge.fr/entretien,jaury,212.php
Hum...
lorinlouis- Messages : 1691
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Eyquem a écrit:
Malheureusement pour lui, la Laisse d'Or d'octobre 2009 a déjà été décernée à Aude Lancelin (du Nouvel Obs') pour un portrait du philosophe qui fait lui-même le café aux journalistes. (Le Plan B n°20, en kiosque)
Pour ceux qui ne connaissent pas ce prix prestigieux, un exemple ici :
http://www.leplanb.org/La-laisse-d-or-Nicolas-Demorand.html
Hihihihih
DB- Messages : 1528
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
balthazar claes a écrit:Tu ne m'apprends rien, Cussonaix. Je suis d'accord avec ton commentaire fielleux sur « Cocotte-minute », dans les grandes lignes. Sinon maintenant j'aime bien Céline, mets donc ça dans tes archives. L'allusion à Hansum est un peu miteuse, mais au point où nous en sommes je n'en attendais pas moins. Je suis globalement flatté que tu te sois fait suer à retrouver mes citations les plus bêtes, toute une nuit durant, comment ne pas y voir un hommage renversé. J'aimerais presque te demander de poursuivre ce petit travail, mais je n'ai plus trop de vannes en réserve pour te piquer la couenne, et puis ça devient indécent. Non, rien à faire, tu as gagné haut la main. Tu as été formidable, exquis, vraiment ; tu peux retourner en paix à ton dictionnaire, avec la conscience du devoir accompli. Et bravo pour le ruban blanc.
Tiens, j'étais pas repassé pour consulter ta mignardise, l'érudit pelliculaire pour cyber-salons de coiffure.
Tu rigoles? ça m'a pris 15 minutes montre-en-main pour parcourir ta gymnopédie mentale. Et choisir quasi au hasard une perlouze de pseudo-sémantique au milieu d'une cataracte de rhétorique fumeuse - qui est à l'utilisation de Deleuze ce que TF1 vidéo-gag serait à Buster Keaton - ça m'avait pris 5 minutes à tout casser.
Ce qui m'a pris un peu plus de temps, c'est vrai, c'est de bichonner ta ventriloquie conceptualo-mondaine avec le minimum de style dont elle est dépourvue. En dehors de ça, n'imagine pas intéresser au delà du temps qu'on met à te répondre, et dans mon cas j'ai le clavier rapide.
Qu'est-ce que j'en ai à battre que tu préfères désormais Céline à Hamsun? Tes préférences et tes bâillements de cador naphtaliné m'intéressent autant que les échos de la bourse; et qu'est ce que tu me chantes avec ton histoire de "ruban blanc"? J'ai pas capté, choisis des métaphores un peu moins snobinardes, c'est au dessus de mon background socio-culturel, que tu surestimes.
Ah oui, je suis repassé voir ce que t'avais bien pu répondre, suite à la consultation de tes dernières mignardises cuistriques d'anthologie: ben mon vieux, voilà que tu t'abreuves à "Lacan" après t'en être pris à "Deleuze". Ta dernière mixture/mixtion pleine de "Signifiants" enfilés en boucle et en circuit fermé m'a bien fait marrer. C'est pas possible, tu utilises un générateur de combinaisons aléatoires... Et dire que c'est moi qui suis prisonnier du langage.
Bon, allez, je --->
Invité- Invité
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
-_______-
t'es bizarre un peu, Simon Cussonaix. mais on t'aime quand même (je crois, pas sûr pour les autres...), même si t'en a rien à faire (et t'as raison de n'en avoir rien à faire).
t'es bizarre un peu, Simon Cussonaix. mais on t'aime quand même (je crois, pas sûr pour les autres...), même si t'en a rien à faire (et t'as raison de n'en avoir rien à faire).
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Oué l'éditorialiste c'est celui qu'a une tête de premier de la classe du 16ème.
J'avais pas vu que Tessémalausa glosaient aussi là-bas, en revanche Bégaudeau. Je ne sais pas ce qui est le plus insupportable, le ton de sa prose (à la va comme je te pousse) ou le portrait plein d'arrogance inséré dans tous ses papiers.
J'avais pas vu que Tessémalausa glosaient aussi là-bas, en revanche Bégaudeau. Je ne sais pas ce qui est le plus insupportable, le ton de sa prose (à la va comme je te pousse) ou le portrait plein d'arrogance inséré dans tous ses papiers.
Eyquem a écrit:Je ne sais plus si on avait déjà parlé ici de la revue "Transfuge", où écrivent JPh.Tessé et V.Malausa. mais elle a pris une tournure intéressante (après s'être présentée, à sa création, comme une "revue de littérature étrangère", écrite par des gens "qui tentent d'être un peu plus libres" - édito du n°1)
Les couvertures et les sommaires parlent d'eux-mêmes.
http://www.transfuge.fr/anciens-no.php
J'ai juste lu le portrait de Finkielkraut par le rédacteur en chef (vous savez, celui qui tente d'être plus libre) : il mérite largement "La laisse d'or" du prochain "Plan B".*
http://www.transfuge.fr/entretien,jaury,212.php
*
Malheureusement pour lui, la Laisse d'Or d'octobre 2009 a déjà été décernée à Aude Lancelin (du Nouvel Obs') pour un portrait du philosophe qui fait lui-même le café aux journalistes. (Le Plan B n°20, en kiosque)
Pour ceux qui ne connaissent pas ce prix prestigieux, un exemple ici :
http://www.leplanb.org/La-laisse-d-or-Nicolas-Demorand.html
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Tiens, j'étais pas repassé pour consulter ta mignardise, l'érudit pelliculaire pour cyber-salons de coiffure.
lol
Oui, c'est ça Cussonaix, tu marques un point. Et n'oublie surtout pas de revenir, hein.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Au fait, saviez-vous que notre bon ami JMF tenait un blog ?
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Largo a écrit:Au fait, saviez-vous que notre bon ami JMF tenait un blog ?
Non !
Invité- Invité
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Clermont-Ferrand, le 4 septembre 2009.
Propositions pour une contre-politique des auteurs.
Chers Cahiers,
M’adressant à une revue dont le nom, comme autrefois l’esprit, s’obstine à demeurer promesse de lutte, je voudrais éviter toute parole sarcastique. Mais que vous dirai-je ?
Que vous dirai-je que vous voudrez entendre ? Rompus à l’art de justifier les images les plus chimériques, comment recevrez-vous une parole sincère ? Quand bien même vous liriez cette lettre : l’idolâtrie est-elle en rien accessible à la raison ?
À quoi même me servira d’argumenter ? Que vous dirai-je dont vous ne soyez déjà, au fond de vous-mêmes, et malgré vous, intimement persuadés ? Un exemple ? À l’heure où votre combat devrait être l’invention d’une contre-politique des auteurs, vous choisissez de ménager l’orgueil d’un Jacques Audiard : ce choix est-il naïf ? Quand on participe à une revue qui s’est toujours méfiée, historiquement et instinctivement, des scénaristes et de leurs films à thèse, est-il innocent de consacrer plusieurs pages à un film calibré de part en part, parfaitement écrit, thématisé, interprété et mis en scène, mais qui ne propose pas l’ombre d’une idée de cinéma ? Un prophète, c’est une galerie de scénettes bravaches, un cinéma mort-né (dans les années ’70), tout juste réchauffé, noyé dans un bouillon de signifiants pour académicien. De cela il me semble que, dans le fond, vous conviendrez sans peine, avec un peu de sincérité (Stéphane Delorme le confesse à demi-mot dans son premier éditorial).
Alors dites-moi : pouvez-vous faire mine de rien, lorsque vous ajoutez votre signature à la suite de générations de critiques qui, d’ « Une certaine tendance… » (François Truffaut) jusqu’au « Scénar-roi » (Thierry Jousse) ont toujours défendu au cinéma l’invention formelle contre le programme scénarisé, et choisi la liberté plutôt que les grandes idées ? Non, après avoir lu assidument les Bazin et Douchet, les Moullet, les Daney, Bonitzer, et Bergala, après ces heures de studieuse lecture solitaire et fétichiste, vous ne pouvez feindre d’ignorer que, dans la vie, le hasard fait mieux les choses que le storyboard… Le cinéma est-il à ce point moribond, que vous prétendiez ne plus distinguer entre les films déjà embaumés, et ceux qui respirent encore ?
Alors, puisque ce premier pas est franchi, passons à l’essentiel : quels combats pour aujourd’hui ? D’abord, et pour partir du bon pied, peut-être faudrait-il commencer par proscrire l’éditorial : qu’en pensez-vous ? Sporadique dans les années quatre-vingt dix, apparu avec Thierry Jousse (personne n’est parfait), il reparaît de manière définitive sous Charles Tesson, pour symboliser de façon magnifique la nouvelle ère dans laquelle entre alors la revue. Depuis, on sait emballer son papier, on fait tellement ronfler le discours que le verbe tourne à vide, justifiant toutes les postures, capable de tous les retournements, de toutes les mystifications. C’est bien simple : depuis quand n’a-t-on pas lu une critique tant soit peu pertinente, une critique qui analyse un film, qui en dévoile les enjeux intimes (formels au sens plein, et non seulement visuels ou thématiques) après en avoir examiné la structure ? Depuis combien d’années le verbiage bien enrobé a-t-il supplanté la parole critique dans les pages des Cahiers ? Pourquoi se risque-t-on désormais si peu à faire des hypothèses, à lancer des idées neuves ─ sinon par obligation éditoriale ? Les films sont devenus rares, qui se livrent encore à l’invention, mais plus rares encore sont les critiques qui en parlent vraiment.
Une fois supprimé l’éditorial, il resterait l’essentiel : des textes. Mais des textes singuliers. Des textes amoureux. Des textes bancals, maladroits, hésitants ou péremptoires, mais des textes libres, affranchis de tout pré-requis, n’ayant pour horizon que les films aimés. Des textes francs du collier, insolents, furieux ou transis d’émoi, mais des textes irréductibles, uniques. Surtout, ce qui serait beau : des textes avec du style. Parce qu’alors vous deviendriez, redeviendriez, non pas des écrivains, ce qui me semble hors de propos (n’en déplaise à Desplechin) mais de vrais écrivants de cinéma, avec une verve. Avec un style. Et dans la diversité des plumes, dans la variété des mots et des tours de langue, dans le foisonnement des singularités, dans cette liberté enfin retrouvée des tons et des registres, le lecteur saurait qu’il n’a pas entre les mains n’importe quelle revue. Je vais trop loin ? Et pourquoi serait-il trop tard ?
Pour une contre-politique des auteurs. Soient deux films de Gus Van Sant, Last Days et Harvey Milk. Deux films dans lesquels il serait d’abord question de personnage. D’un côté, Blake, entité rebelle, corps sauvage qui ne s’adresse à personne, sinon à une instance supérieure (Dieu, la folie ?), et qui se tient, tantôt debout, tantôt rampant, dans le champ à peine amorcé d’une caméra distante, forcément distante, mais qui ne cherche pas à nier sa présence. Last Days est de ces œuvres qui ont l’évidence du mythe, et qui proposent d’emblée au spectateur de s’y laisser prendre. Suivre Blake le temps du film, c’est accepter que son voyage est sans retour, c’est être tétanisé par un personnage à l’identité flottante, indécise, mais d’autant plus redoutable. Blake nous fait rejoindre le mythe, mais non pas en théorie : son parcours est physique autant que métaphysique, et l’on peut douter s’il rejoint seulement les cieux, ou s’il ne tend pas simplement à redevenir fœtus. Sa logorrhée est en deçà du discours, sa démarche est confuse, son corps est voûté, mais dans le même temps ce corps, cette voix, semblent d’une détermination que rien ne peut arrêter. La liberté de ce corps, l’affranchissement de cette âme sont sidérantes.
Si Last Days est une œuvre d’une telle liberté, c’est peut-être parce qu’il renferme d’abord une lucidité sans précédent sur le cinéma, sur cet art, sur ses moyens et sur ses fins. Chaque image du film semble née de cette lucidité : dans le plan d’ouverture, Blake avance avec obstination, du corps et de la voix, figure ininterprétable, à travers une nature amie, et ce que le film réussit alors est ce que recherchent tous les grands artistes : proposer une forme à la fois unique et indéterminée. La caméra se refuse à comprendre, se repositionnant sans cesse à distance de son sujet, amoureuse et résignée. Et là sous nos yeux, existe un personnage de cinéma. Mythe tangible et puissant. Mythe à jamais inexpliqué. Ainsi, Blake est Blake. Il est un rêve de Kurt Cobain. Il n’est pas tout à fait, pas encore le chanteur d’un mythique groupe de rock, mais pour cette raison il le contient, puisqu’il en est l’origine. On ne peut rien affirmer sur lui, sinon qu’il existe bel et bien, en chair et en voix, avant de disparaître, s’échappant par le haut du cadre de sa prison dorée, quittant enfin l’écran cinématographique. Bien sûr ce départ est une redite, puisque Blake n’a cessé de partir, de s’évader, de nous échapper, tout au long du film.
C’est dans sa lucidité que réside la beauté de cette œuvre : dans le renoncement à suivre le personnage, dans le « dernier adieu » que constitue chaque plan, dans la retenue de la caméra qui se refuse à enfermer le personnage, mais qui lui offre en même temps un espace à la fois paisible, parce que clos, et libre, parce qu’échappant sans cesse au regard (les hors-champs du film pourraient d’ailleurs faire l’objet d’une longue étude). Un espace qui bientôt d’ailleurs n’est même plus contigu au temps (la linéarité du parcours se trouvant bousculée dans le repli d’un raccord, un peu comme le saphir d’un phonographe sur un disque à peine rayé). Enfin, en dernière instance, c’est l’acceptation d’une indétermination tangible, parce que s’inscrivant dans la durée, qui fait de Last Days une œuvre majeure de notre temps. Tant que nous ne savons pas vraiment où nous sommes, tant que nous ne savons pas ce que font les personnages, ni même qui ils sont, tant que nous conservons intact le plaisir de les suivre sans chercher à comprendre, alors nous sommes sûr d’être au cinéma.
Que dire alors d’un film aussi convenu et discursif qu’Harvey Milk ? La différence entre Blake et Milk n’est-elle pas insurmontable ? Sean Penn est un acteur très talentueux, mais dont le cabotinage endiablé, ici, ne cache pas le moindre mystère : inlassablement, y consacrant toute son énergie, il ne s’emploie qu’à incarner. Est-ce qu’il y parvient ? Je n’en sais rien, je n’ai pas connu Harvey Milk personnellement. Mais le résultat de l’opération m’indiffère. J’attends autre chose d’un acteur que l’imitation. J’espère autre chose du cinéma que le lifting de ses acteurs. La reconstitution béate d’une époque passée n’a rien à voir avec le cinéma. Le personnage de cinéma n’a pas plus à voir avec la personne historique, qu’avec le personnage de roman. L’invention et la beauté d’un film, fût-il d’époque, ne résident pas dans la perfection de la reconstitution. Dans Harvey Milk, Sean Penn est un mannequin très séduisant. Le film, lui, est une longue page de pub.
Le personnage ─ les personnages ─ de Last Days trouvent leur salut dans l’oscillation d’une précieuse indétermination. Blake existe parce qu’il n’est pas Kurt Cobain. Harvey Milk n’existe pas, parce que Sean Penn s’obstine à être Harvey Milk. Qui peut le croire ? Je crois à Blake comme je crois aux mythes. Mais qui peut croire à Harvey Milk ? Hypothèse : la mise en scène de cinéma ne devra-t-elle pas désormais, si elle entend rester pertinente, se défaire de sa toute puissance ? Se défier, toujours et encore, du simulacre ?
Un bref détour chez GVS, afin de rendre tangible cette idée : la politique des auteurs est dépassée. Ne voit-on pas assez clairement quel mur infranchissable sépare ces deux œuvres ? Une anecdote : à la fin d’un entretien avec John Ford (Cahiers n°45, p. 9), Jean Mitry pose au cinéaste une question sous forme de boutade, afin d’apprendre implicitement, et sans le brusquer, si, oui ou non, l’Auteur s’est aperçu que son dernier film en date était raté. ─ Et Mogambo, alors, c’est raté ou c’est réussi ? ─ « Je n’en sais rien, répond Ford. Je ne l’ai même pas vu… » ─ Pas vu mon œil ! Simple détour élégant : oui, il est au courant, son film n’est pas bon.
Qu’en serait-il aujourd’hui si quelqu’un avait le courage de poser la même question à Gus Van Sant au sujet d’Harvey Milk ? Ou, plutôt, que penserait Ford d’Harvey Milk ? Ne trouverait-il pas le film de bonne facture ? Certes, l’hypothèse n’est pas très solide : ce qui, en revanche, est avéré, c’est qu’un bon film comme Harvey Milk peut être dans le même temps un film exécrable. Et cela, c’est nouveau. Contre les Auteurs eux-mêmes, il me semble urgent de parler en toute liberté de leurs œuvres, et de considérer ces dernières dans leur plus entière singularité. Il me semble plus pertinent de les rapprocher de leur époque, que de la filmographie de leur instigateur : GVS est un grand artiste, mais ça ne l’immunise pas pour autant contre les tics et autres virus de son siècle. Ça ne le préserve pas, par exemple, du triomphe du Biopic et du retour morbide du film d’époque. Ça ne l’empêche pas de se livrer à la reconstitution maniaque, et au dialogue sur-signifiant. La réponse : aimer les films contre leurs auteurs. Aimer Last Days, et détester Harvey Milk, malgré toute sa force de séduction, ou bien plutôt, à cause de cette séduction du simulacre. Il est plus urgent que jamais de se mouiller, de crier franchement Haro ! sur certains films, pour mieux porter aux nues les rares films qui en vaillent encore la peine. Je vous fais cette prière : osez dire qu’Un prophète est un film détestable. Le cinéma en a sacrément besoin.
Qu’en pensez-vous ?
Bien à vous,
Propositions pour une contre-politique des auteurs.
Chers Cahiers,
M’adressant à une revue dont le nom, comme autrefois l’esprit, s’obstine à demeurer promesse de lutte, je voudrais éviter toute parole sarcastique. Mais que vous dirai-je ?
Que vous dirai-je que vous voudrez entendre ? Rompus à l’art de justifier les images les plus chimériques, comment recevrez-vous une parole sincère ? Quand bien même vous liriez cette lettre : l’idolâtrie est-elle en rien accessible à la raison ?
À quoi même me servira d’argumenter ? Que vous dirai-je dont vous ne soyez déjà, au fond de vous-mêmes, et malgré vous, intimement persuadés ? Un exemple ? À l’heure où votre combat devrait être l’invention d’une contre-politique des auteurs, vous choisissez de ménager l’orgueil d’un Jacques Audiard : ce choix est-il naïf ? Quand on participe à une revue qui s’est toujours méfiée, historiquement et instinctivement, des scénaristes et de leurs films à thèse, est-il innocent de consacrer plusieurs pages à un film calibré de part en part, parfaitement écrit, thématisé, interprété et mis en scène, mais qui ne propose pas l’ombre d’une idée de cinéma ? Un prophète, c’est une galerie de scénettes bravaches, un cinéma mort-né (dans les années ’70), tout juste réchauffé, noyé dans un bouillon de signifiants pour académicien. De cela il me semble que, dans le fond, vous conviendrez sans peine, avec un peu de sincérité (Stéphane Delorme le confesse à demi-mot dans son premier éditorial).
Alors dites-moi : pouvez-vous faire mine de rien, lorsque vous ajoutez votre signature à la suite de générations de critiques qui, d’ « Une certaine tendance… » (François Truffaut) jusqu’au « Scénar-roi » (Thierry Jousse) ont toujours défendu au cinéma l’invention formelle contre le programme scénarisé, et choisi la liberté plutôt que les grandes idées ? Non, après avoir lu assidument les Bazin et Douchet, les Moullet, les Daney, Bonitzer, et Bergala, après ces heures de studieuse lecture solitaire et fétichiste, vous ne pouvez feindre d’ignorer que, dans la vie, le hasard fait mieux les choses que le storyboard… Le cinéma est-il à ce point moribond, que vous prétendiez ne plus distinguer entre les films déjà embaumés, et ceux qui respirent encore ?
Alors, puisque ce premier pas est franchi, passons à l’essentiel : quels combats pour aujourd’hui ? D’abord, et pour partir du bon pied, peut-être faudrait-il commencer par proscrire l’éditorial : qu’en pensez-vous ? Sporadique dans les années quatre-vingt dix, apparu avec Thierry Jousse (personne n’est parfait), il reparaît de manière définitive sous Charles Tesson, pour symboliser de façon magnifique la nouvelle ère dans laquelle entre alors la revue. Depuis, on sait emballer son papier, on fait tellement ronfler le discours que le verbe tourne à vide, justifiant toutes les postures, capable de tous les retournements, de toutes les mystifications. C’est bien simple : depuis quand n’a-t-on pas lu une critique tant soit peu pertinente, une critique qui analyse un film, qui en dévoile les enjeux intimes (formels au sens plein, et non seulement visuels ou thématiques) après en avoir examiné la structure ? Depuis combien d’années le verbiage bien enrobé a-t-il supplanté la parole critique dans les pages des Cahiers ? Pourquoi se risque-t-on désormais si peu à faire des hypothèses, à lancer des idées neuves ─ sinon par obligation éditoriale ? Les films sont devenus rares, qui se livrent encore à l’invention, mais plus rares encore sont les critiques qui en parlent vraiment.
Une fois supprimé l’éditorial, il resterait l’essentiel : des textes. Mais des textes singuliers. Des textes amoureux. Des textes bancals, maladroits, hésitants ou péremptoires, mais des textes libres, affranchis de tout pré-requis, n’ayant pour horizon que les films aimés. Des textes francs du collier, insolents, furieux ou transis d’émoi, mais des textes irréductibles, uniques. Surtout, ce qui serait beau : des textes avec du style. Parce qu’alors vous deviendriez, redeviendriez, non pas des écrivains, ce qui me semble hors de propos (n’en déplaise à Desplechin) mais de vrais écrivants de cinéma, avec une verve. Avec un style. Et dans la diversité des plumes, dans la variété des mots et des tours de langue, dans le foisonnement des singularités, dans cette liberté enfin retrouvée des tons et des registres, le lecteur saurait qu’il n’a pas entre les mains n’importe quelle revue. Je vais trop loin ? Et pourquoi serait-il trop tard ?
Pour une contre-politique des auteurs. Soient deux films de Gus Van Sant, Last Days et Harvey Milk. Deux films dans lesquels il serait d’abord question de personnage. D’un côté, Blake, entité rebelle, corps sauvage qui ne s’adresse à personne, sinon à une instance supérieure (Dieu, la folie ?), et qui se tient, tantôt debout, tantôt rampant, dans le champ à peine amorcé d’une caméra distante, forcément distante, mais qui ne cherche pas à nier sa présence. Last Days est de ces œuvres qui ont l’évidence du mythe, et qui proposent d’emblée au spectateur de s’y laisser prendre. Suivre Blake le temps du film, c’est accepter que son voyage est sans retour, c’est être tétanisé par un personnage à l’identité flottante, indécise, mais d’autant plus redoutable. Blake nous fait rejoindre le mythe, mais non pas en théorie : son parcours est physique autant que métaphysique, et l’on peut douter s’il rejoint seulement les cieux, ou s’il ne tend pas simplement à redevenir fœtus. Sa logorrhée est en deçà du discours, sa démarche est confuse, son corps est voûté, mais dans le même temps ce corps, cette voix, semblent d’une détermination que rien ne peut arrêter. La liberté de ce corps, l’affranchissement de cette âme sont sidérantes.
Si Last Days est une œuvre d’une telle liberté, c’est peut-être parce qu’il renferme d’abord une lucidité sans précédent sur le cinéma, sur cet art, sur ses moyens et sur ses fins. Chaque image du film semble née de cette lucidité : dans le plan d’ouverture, Blake avance avec obstination, du corps et de la voix, figure ininterprétable, à travers une nature amie, et ce que le film réussit alors est ce que recherchent tous les grands artistes : proposer une forme à la fois unique et indéterminée. La caméra se refuse à comprendre, se repositionnant sans cesse à distance de son sujet, amoureuse et résignée. Et là sous nos yeux, existe un personnage de cinéma. Mythe tangible et puissant. Mythe à jamais inexpliqué. Ainsi, Blake est Blake. Il est un rêve de Kurt Cobain. Il n’est pas tout à fait, pas encore le chanteur d’un mythique groupe de rock, mais pour cette raison il le contient, puisqu’il en est l’origine. On ne peut rien affirmer sur lui, sinon qu’il existe bel et bien, en chair et en voix, avant de disparaître, s’échappant par le haut du cadre de sa prison dorée, quittant enfin l’écran cinématographique. Bien sûr ce départ est une redite, puisque Blake n’a cessé de partir, de s’évader, de nous échapper, tout au long du film.
C’est dans sa lucidité que réside la beauté de cette œuvre : dans le renoncement à suivre le personnage, dans le « dernier adieu » que constitue chaque plan, dans la retenue de la caméra qui se refuse à enfermer le personnage, mais qui lui offre en même temps un espace à la fois paisible, parce que clos, et libre, parce qu’échappant sans cesse au regard (les hors-champs du film pourraient d’ailleurs faire l’objet d’une longue étude). Un espace qui bientôt d’ailleurs n’est même plus contigu au temps (la linéarité du parcours se trouvant bousculée dans le repli d’un raccord, un peu comme le saphir d’un phonographe sur un disque à peine rayé). Enfin, en dernière instance, c’est l’acceptation d’une indétermination tangible, parce que s’inscrivant dans la durée, qui fait de Last Days une œuvre majeure de notre temps. Tant que nous ne savons pas vraiment où nous sommes, tant que nous ne savons pas ce que font les personnages, ni même qui ils sont, tant que nous conservons intact le plaisir de les suivre sans chercher à comprendre, alors nous sommes sûr d’être au cinéma.
Que dire alors d’un film aussi convenu et discursif qu’Harvey Milk ? La différence entre Blake et Milk n’est-elle pas insurmontable ? Sean Penn est un acteur très talentueux, mais dont le cabotinage endiablé, ici, ne cache pas le moindre mystère : inlassablement, y consacrant toute son énergie, il ne s’emploie qu’à incarner. Est-ce qu’il y parvient ? Je n’en sais rien, je n’ai pas connu Harvey Milk personnellement. Mais le résultat de l’opération m’indiffère. J’attends autre chose d’un acteur que l’imitation. J’espère autre chose du cinéma que le lifting de ses acteurs. La reconstitution béate d’une époque passée n’a rien à voir avec le cinéma. Le personnage de cinéma n’a pas plus à voir avec la personne historique, qu’avec le personnage de roman. L’invention et la beauté d’un film, fût-il d’époque, ne résident pas dans la perfection de la reconstitution. Dans Harvey Milk, Sean Penn est un mannequin très séduisant. Le film, lui, est une longue page de pub.
Le personnage ─ les personnages ─ de Last Days trouvent leur salut dans l’oscillation d’une précieuse indétermination. Blake existe parce qu’il n’est pas Kurt Cobain. Harvey Milk n’existe pas, parce que Sean Penn s’obstine à être Harvey Milk. Qui peut le croire ? Je crois à Blake comme je crois aux mythes. Mais qui peut croire à Harvey Milk ? Hypothèse : la mise en scène de cinéma ne devra-t-elle pas désormais, si elle entend rester pertinente, se défaire de sa toute puissance ? Se défier, toujours et encore, du simulacre ?
Un bref détour chez GVS, afin de rendre tangible cette idée : la politique des auteurs est dépassée. Ne voit-on pas assez clairement quel mur infranchissable sépare ces deux œuvres ? Une anecdote : à la fin d’un entretien avec John Ford (Cahiers n°45, p. 9), Jean Mitry pose au cinéaste une question sous forme de boutade, afin d’apprendre implicitement, et sans le brusquer, si, oui ou non, l’Auteur s’est aperçu que son dernier film en date était raté. ─ Et Mogambo, alors, c’est raté ou c’est réussi ? ─ « Je n’en sais rien, répond Ford. Je ne l’ai même pas vu… » ─ Pas vu mon œil ! Simple détour élégant : oui, il est au courant, son film n’est pas bon.
Qu’en serait-il aujourd’hui si quelqu’un avait le courage de poser la même question à Gus Van Sant au sujet d’Harvey Milk ? Ou, plutôt, que penserait Ford d’Harvey Milk ? Ne trouverait-il pas le film de bonne facture ? Certes, l’hypothèse n’est pas très solide : ce qui, en revanche, est avéré, c’est qu’un bon film comme Harvey Milk peut être dans le même temps un film exécrable. Et cela, c’est nouveau. Contre les Auteurs eux-mêmes, il me semble urgent de parler en toute liberté de leurs œuvres, et de considérer ces dernières dans leur plus entière singularité. Il me semble plus pertinent de les rapprocher de leur époque, que de la filmographie de leur instigateur : GVS est un grand artiste, mais ça ne l’immunise pas pour autant contre les tics et autres virus de son siècle. Ça ne le préserve pas, par exemple, du triomphe du Biopic et du retour morbide du film d’époque. Ça ne l’empêche pas de se livrer à la reconstitution maniaque, et au dialogue sur-signifiant. La réponse : aimer les films contre leurs auteurs. Aimer Last Days, et détester Harvey Milk, malgré toute sa force de séduction, ou bien plutôt, à cause de cette séduction du simulacre. Il est plus urgent que jamais de se mouiller, de crier franchement Haro ! sur certains films, pour mieux porter aux nues les rares films qui en vaillent encore la peine. Je vous fais cette prière : osez dire qu’Un prophète est un film détestable. Le cinéma en a sacrément besoin.
Qu’en pensez-vous ?
Bien à vous,
Van Stratten- Messages : 165
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Voilà une lettre qui a le mérite d'être claire et décidée.
Mogambo n'est pas un mauvais film, c'est une merde; même chose pour Hatari.
Mogambo n'est pas un mauvais film, c'est une merde; même chose pour Hatari.
Comment fait-on pour distinguer le film de son scénario?
Existe-il un seul grand film sans grand scénario?
Borges- Messages : 6044
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Oui, tout cela est clair et intéressant, mais j'ai quand même du mal à te suivre VS, car je ne fais pas partie des adeptes de Debord, Comolli et cie, ainsi que d'une certaines période des cahiers (les rouges) dont les enjeux, pour être pertinents aujourd'hui, se doivent d'être reformulés à travers d'autres dispositifs, d'autres formes politiques.
Il ne sert pas à grand chose, selon moi, de crier sa haine du simulacre, des marchandises, si, d'un autre côté, on ne construit rien, on ne réfléchit pas aussi "avec", si on mène simplement ce combat pour lui-même. Il y a une grande impasse ici qu'a dénoncée admirablement Rancière, et avec laquelle "je me sens en accord". Maintenant, reste plus qu'à trouver quelque chose.
Les cahiers n'ont pas toujours été la revue que l'on s'imagine (rarement en fait). Il y a un grande part d'imaginaire, de mythe la-dedans. Il suffit de jeter un œil sur les cahiers jaunes. Je ne crois pas qu'il faille toujours pleurer la gloire du passé.
Un contre-politique des auteurs ? Oui, ce n'est pas nouveau, on nous en parle depuis longtemps je crois, mais il est certain que les cahiers ne l'ont pas encore abandonnée. Il suffit de voir le navrant numéro avec Hallyday en couverture, célébrant la gloire irraisonnée de la nouvelle vague et des Auteurs. Bref, rien à redire la-dessus, autant parler des films pour eux-mêmes que des auteurs, bien qu'il faille toujours, à un moment ou à un autre, tisser des liens entre les films, dégager des formes, avant tout. Règne du simulacre ou pas.
Cette lutte du simulacre, je ne la comprends pas vraiment, elle me pose problème. Elle est, de toute façon, liée, elle fait appel indirectement, à une politique de l'Auteur il me semble. Sinon, sur quoi déboucherait-elle ? Le cinéma culturel, composé des fictions de gauche dégouliantes, qu'on aimerait parce que ce n'est pas du simulacre. Du culturel pour du culturel, parce c'est différent quoi. Bref, il y a une certaine contradiction que je ne comprends pas chez toi, comme si tu cherchais un paradis qui n'existe pas.
Milk/Last days, je ne suis pas convaincu du tout par ton raisonnement. Il n'y a rien à dire sur ton argumentation, sur la question de l'auteur etc. Mais après ? Ne faut-il pas défendre ce film sous prétexte que c'est un mauvais Van Sant, sous le joug d'une contre-politique des auteurs ? Préféré Humpday, moins "simulacre", mais d'un niveau de bêtise rare ? Je crois que défendre Milk était plutôt une bonne chose, à condition de le séparer de son auteur, et de l'inscrire dans le tissu du monde. Qu'importe, peut-être, ces vieilles catégories de cinéma (le sur-jeu, la reconstitution (?) ).
Allez, je vais un peu faire le malin : Badiou proposait au critique de cinéma l'adoption du jugement axiomatique, contre le jugement indistinct (celui du "ça m'a plu", style Première) et diacritique (celui du "c'est supérieur", style Cahiers). La critique du simulacre, la contre-politique des auteurs que tu nous proposes, que tu n'affranchis pas, justement, de ses racines, c'est toujours du jugement diacritique. "Préférez", "trouver supérieur" Last days à Milk, c'est donc encore de la politique des auteurs, encore du diacritique. Personnellement, j'essaie de me plier à l'axiomatique (par exemple, en écrivant des choses contestables sur des films de simulacres : Richard Kelly, Terminator 4, et un tas d'autres). Maintenant, cette position compte ses défauts aussi, évidemment, qui sont précisément ceux qui étaient combattus par une politique des auteurs.
Alors, dans ce cas, ne faudrait-il pas l'alliance des deux positions ? Un mélange de jugement axiomatique ( note au passage : dont Erwan, que je salue ici, a fait sa marque de fabrique) et de politique des auteurs, de lutte contre les simulacre etc ? Si oui, quelle en serait sa définition et ses enjeux ? En sachant toujours qu'il faut se méfier des images, de la croyance de plus en plus naïve à laquelle nous sommes sujets, etc. Allier, donc, la méfiance, la critique et l'axiomatique. Et la passion, bien sûr.
Il ne sert pas à grand chose, selon moi, de crier sa haine du simulacre, des marchandises, si, d'un autre côté, on ne construit rien, on ne réfléchit pas aussi "avec", si on mène simplement ce combat pour lui-même. Il y a une grande impasse ici qu'a dénoncée admirablement Rancière, et avec laquelle "je me sens en accord". Maintenant, reste plus qu'à trouver quelque chose.
Les cahiers n'ont pas toujours été la revue que l'on s'imagine (rarement en fait). Il y a un grande part d'imaginaire, de mythe la-dedans. Il suffit de jeter un œil sur les cahiers jaunes. Je ne crois pas qu'il faille toujours pleurer la gloire du passé.
Un contre-politique des auteurs ? Oui, ce n'est pas nouveau, on nous en parle depuis longtemps je crois, mais il est certain que les cahiers ne l'ont pas encore abandonnée. Il suffit de voir le navrant numéro avec Hallyday en couverture, célébrant la gloire irraisonnée de la nouvelle vague et des Auteurs. Bref, rien à redire la-dessus, autant parler des films pour eux-mêmes que des auteurs, bien qu'il faille toujours, à un moment ou à un autre, tisser des liens entre les films, dégager des formes, avant tout. Règne du simulacre ou pas.
Cette lutte du simulacre, je ne la comprends pas vraiment, elle me pose problème. Elle est, de toute façon, liée, elle fait appel indirectement, à une politique de l'Auteur il me semble. Sinon, sur quoi déboucherait-elle ? Le cinéma culturel, composé des fictions de gauche dégouliantes, qu'on aimerait parce que ce n'est pas du simulacre. Du culturel pour du culturel, parce c'est différent quoi. Bref, il y a une certaine contradiction que je ne comprends pas chez toi, comme si tu cherchais un paradis qui n'existe pas.
Milk/Last days, je ne suis pas convaincu du tout par ton raisonnement. Il n'y a rien à dire sur ton argumentation, sur la question de l'auteur etc. Mais après ? Ne faut-il pas défendre ce film sous prétexte que c'est un mauvais Van Sant, sous le joug d'une contre-politique des auteurs ? Préféré Humpday, moins "simulacre", mais d'un niveau de bêtise rare ? Je crois que défendre Milk était plutôt une bonne chose, à condition de le séparer de son auteur, et de l'inscrire dans le tissu du monde. Qu'importe, peut-être, ces vieilles catégories de cinéma (le sur-jeu, la reconstitution (?) ).
Allez, je vais un peu faire le malin : Badiou proposait au critique de cinéma l'adoption du jugement axiomatique, contre le jugement indistinct (celui du "ça m'a plu", style Première) et diacritique (celui du "c'est supérieur", style Cahiers). La critique du simulacre, la contre-politique des auteurs que tu nous proposes, que tu n'affranchis pas, justement, de ses racines, c'est toujours du jugement diacritique. "Préférez", "trouver supérieur" Last days à Milk, c'est donc encore de la politique des auteurs, encore du diacritique. Personnellement, j'essaie de me plier à l'axiomatique (par exemple, en écrivant des choses contestables sur des films de simulacres : Richard Kelly, Terminator 4, et un tas d'autres). Maintenant, cette position compte ses défauts aussi, évidemment, qui sont précisément ceux qui étaient combattus par une politique des auteurs.
Alors, dans ce cas, ne faudrait-il pas l'alliance des deux positions ? Un mélange de jugement axiomatique ( note au passage : dont Erwan, que je salue ici, a fait sa marque de fabrique) et de politique des auteurs, de lutte contre les simulacre etc ? Si oui, quelle en serait sa définition et ses enjeux ? En sachant toujours qu'il faut se méfier des images, de la croyance de plus en plus naïve à laquelle nous sommes sujets, etc. Allier, donc, la méfiance, la critique et l'axiomatique. Et la passion, bien sûr.
Le_comte- Messages : 336
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Le_comte a écrit:
Allez, je vais un peu faire le malin : Badiou proposait au critique de cinéma l'adoption du jugement axiomatique, contre le jugement indistinct (celui du "ça m'a plu", style Première) et diacritique (celui du "c'est supérieur", style Cahiers). La critique du simulacre, la contre-politique des auteurs que tu nous proposes, que tu n'affranchis pas, justement, de ses racines, c'est toujours du jugement diacritique. "Préférez", "trouver supérieur" Last days à Milk, c'est donc encore de la politique des auteurs, encore du diacritique. Personnellement, j'essaie de me plier à l'axiomatique (par exemple, en écrivant des choses contestables sur des films de simulacres : Richard Kelly, Terminator 4, et un tas d'autres). Maintenant, cette position compte ses défauts aussi, évidemment, qui sont précisément ceux qui étaient combattus par une politique des auteurs.
Alors, dans ce cas, ne faudrait-il pas l'alliance des deux positions ? Un mélange de jugement axiomatique ( note au passage : dont Erwan, que je salue ici, a fait sa marque de fabrique) et de politique des auteurs, de lutte contre les simulacre etc ? Si oui, quelle en serait sa définition et ses enjeux ? En sachant toujours qu'il faut se méfier des images, de la croyance de plus en plus naïve à laquelle nous sommes sujets, etc. Allier, donc, la méfiance, la critique et l'axiomatique. Et la passion, bien sûr.
Salut,
Le jugement axiomatique de Badiou ne rejette pas du tout les niveaux de "valeur". Il s'agit de faire apparaître les vérités des films, même pourquoi pas quand il y a quasiment rien, juste un petit frémissement. Ceci étant fait (c'est pas un truc facile), il n'est pas interdit d'affirmer que tel film, telle esthétique, rate telle vérité et pas tel autre, ou moins tel autre. On se souviens de sa réponse à Taddei à propos du film de Karmitz : "je préfèrerais qu'on parle du film de Godard". C'est d'ailleurs un peu ce que fait Godard dans son "Vrai-faux passeport", il part d'une vérité et compare comment elle apparait dans tel ou tel film, et après il attribue malus ou bonus.. Faut pas croire que le jugement axiomatique c'est juste un truc sympathique où on décrit les films qu'on a vu. Peut-être que Erwan écrit différemment maintenant mais je crois pas qu'il serait d'accord lui-même pour parler de "critique axiomatique" à propos de ses écrits totalement subjectivés.
Cependant, je crois pas que "Harvey Milk" et "Last days" partent de la même idée.
Invité- Invité
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
le jugement axiomatique (je relis le texte de Badiou en ce moment, pour d'autres raisons) :
Mais on voit le problème, les exemples littéraires que donne Badiou, sont déjà entrés dans le domaine des valeurs, de ce qui vaut et ne doit pas être défendu; si on ne doit pas se casser la tête à défendre mallarmé, sa valeur, sa supériorité, son style, c'est que le débat ne se pose plus; or pour la critique (situé dans le mouvement) qui défend l'auteur, son style, sa singularité, c'est pas acquis; c'est deux choses différentes, en fait...la critique (la politique de l'auteur), et l'approche axiomatique...mais il faut bien qu'à un moment ou l'autre je décide que Straub c'est supérieur à Oury; je le décide, mais j'en fais pas la tâche... c'est déjà décide; exemple, bien entendu trop facile; qu'on se souvienne de la période des Cahiers (Hawks c'était pas une valeur établie, qui ne fait pas polémique, pas plus que Hitch)....Il y a donc une hiérarchie des trois approches, l'indistinct (qui s'occupe de l'acteur, de l'histoire, de la scène...) le diacritique (le style, l'auteur, et sa singularité...) l'axiomatique (le film comme visitation impure de l'idée)...
Tout d’abord, le jugement l’indiffère. Car toute position défensive est abandonnée. Que le film soit bien, qu’il ait plu, qu’il ne soit pas commensurable aux objets du jugement indistinct, qu’il faille le distinguer : tout cela est silencieusement supposé dans le simple fait qu’on en parle, et n’est nullement le but à atteindre. N’est-ce pas la règle qu’on applique aux œuvres artistiques établies du passé ? S’avise-t-on de trouver significatif que l’Orestie d’Eschyle ou la Comédie Humaine de Balzac vous aient “bien plu” ? Qu’elles soient “franchement pas mal” ? Le jugement indistinct est alors ridicule. Mais tout autant le jugement diacritique. Il n’est pas non plus requis de s’échiner à prouver que le style de Mallarmé est supérieur à celui de Sully-Prudhomme, lequel, entre parenthèses, passait en son temps pour de la plus excellente qualité. On parlera donc du film dans l’engagement inconditionné d’une conviction d’art, non afin de l’établir, mais afin d’en tirer les conséquences. Disons que l’on passe du jugement normatif, indistinct (“c’est bien”) ou diacritique (“c’est supérieur”), à une attitude axiomatique, qui demande quels sont pour la pensée les effets de tel ou tel film.
Mais on voit le problème, les exemples littéraires que donne Badiou, sont déjà entrés dans le domaine des valeurs, de ce qui vaut et ne doit pas être défendu; si on ne doit pas se casser la tête à défendre mallarmé, sa valeur, sa supériorité, son style, c'est que le débat ne se pose plus; or pour la critique (situé dans le mouvement) qui défend l'auteur, son style, sa singularité, c'est pas acquis; c'est deux choses différentes, en fait...la critique (la politique de l'auteur), et l'approche axiomatique...mais il faut bien qu'à un moment ou l'autre je décide que Straub c'est supérieur à Oury; je le décide, mais j'en fais pas la tâche... c'est déjà décide; exemple, bien entendu trop facile; qu'on se souvienne de la période des Cahiers (Hawks c'était pas une valeur établie, qui ne fait pas polémique, pas plus que Hitch)....Il y a donc une hiérarchie des trois approches, l'indistinct (qui s'occupe de l'acteur, de l'histoire, de la scène...) le diacritique (le style, l'auteur, et sa singularité...) l'axiomatique (le film comme visitation impure de l'idée)...
Dernière édition par Borges le Dim 15 Nov 2009 - 13:09, édité 1 fois
Borges- Messages : 6044
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Ok, merci pour ces précisions. Je croyais que la part de jugement était réduite en fait, et que la subjectivité devait servir une "autre cause", se morfondre dans la recherche des vérités. Il est clair en effet que le jugement de valeur est présupposé, qu'on sait qu'un tel vaut "plus" qu'un autre. Évidemment, cette recherche de vérité est d'une tâche très complexe, réservée à quelques uns
Le_comte- Messages : 336
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Le_comte a écrit:Évidemment, cette recherche de vérité est d'une tâche très complexe, réservée à quelques uns
Pas nécessairement, c'est pas un truc simple, c'est tout, mais on peut dire aussi qu'il y a du jeu dans cette démarche, dès qu'il y a passion, il y a jeu n'importe comment . Et, justement, un travail sur les différents films de l'auteur peut aider à dégager quelque chose de tel de ses films en particulier.
Pour évoquer un film qui pose des problèmes à la rédaction, on y a pas mal parlé ces derniers temps du dernier Rivette, du fait que son scénario est écrit à 5, là ça devient difficile de savoir qui est véritablement l'"auteur" du film et d'ailleurs le film donne l'impression de ne pas offrir de prises nettes, de se dérober, même si les uns ou les autres on a tenté quelques approches.
Invité- Invité
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Si on pouvait me dire ce que ça veut dire "simulacre", ça m'aiderait beaucoup.
Merci.
Merci.
Borges- Messages : 6044
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
merci de poser la question Borges... j'ai beaucoup de mal à cerner ce mot.
Re: Les Cahiers du Cinéma depuis 2008 : petites histoires sans devenir
Oui, c'est quoi, pour finir, ce mot simulacre ? (j'avais déjà ennuyé JM l'autre jour avec ça.) (et c'est que je ne comprend pas chez VS)
Dernière édition par Le_comte le Dim 15 Nov 2009 - 13:45, édité 1 fois
Le_comte- Messages : 336
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