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André Bazin, les Cahiers et la question de l’être (du cinéma)

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André Bazin, les Cahiers et la question de l’être (du cinéma)  Empty André Bazin, les Cahiers et la question de l’être (du cinéma)

Message par Borges Mer 12 Fév 2014 - 13:44

Après Grémillon, les Cahiers s'intéressent à Bazin. On peut saluer l'événement. On le doit, on le fait; et on salue avec plus d'enthousiasme encore la bonne nouvelle, et avec quelle impatience : une intégrale des écrits de Bazin par les Cahiers, en 2015. En attendant, si on n'a pas le temps de lire les quelque livres que discutent SD et CB, dans leur dossier (bibliographie sur commande), on peut lire les textes de SD (Stéphane Delorme) et CB (Cyril Béghin), si on a du temps et des illusions à perdre sur la critique. Bien entendu, ceux qui ont lu, un peu, Bazin, peuvent s'en passer. Et les autres ? Et bien, si vous voulez mon avis, qui n'a rien d'humble, les autres aussi, je leur conseillerais plutôt de lire "Qu'est-ce que le cinéma ?", lire et relire même, parce que c'est formidable de sens, de beauté, d'amour du cinéma, de la vie, d'écriture, donc de problématisation. Y a que les idiots comme SD et CB qui croient ajouter à la force de ces textes, en cherchant à les moderniser, par des rapprochements avec des auteurs plus "in", plus "glamour", Barthes, Sarraute, Deleuze, bien entendu, toujours Deleuze (enfin, je devrais dire deleuzisme) et même Hegel; devrais-je dire hégélianisme ? Le hégélianisme d'un seul mot : "dialectique". Mon dieu, que ce mot commence à me les casser; à croire que les critiques, les blogueurs et autre amateurs de clichés et de lieux communs viennent de le découvrir. A croire qu'une grande partie de la pensée française, Deleuze, Derrida, Foucault, n'a pas passé une grande partie de son temps à le penser, relever, déconstruire, c'est-à-dire affirmer. Les  textes de Bazin, ses grands textes, théoriques et critiques, tiennent par eux-mêmes. Bazin n'a besoin de personne pour exister, et certainement pas de la défense, ambigüe, voire ambivalente de nos deux critiques (depuis le film de Polanski, je sais plus la différence entre les deux termes) parce que sa pensée du cinéma, comme dirait un amateur de Heidegger, se situe dans l'horizon d'une question essentielle : la question de l’être. C'est dans cet horizon qu'elle doit donc être lue, interprétée activement, déconstruite, "généalogée", et tout ce que l'on veut. Le sens d'un retour à Bazin est un retour aux sens de Bazin, dans une répétition de la question : "Qu'est-ce que le cinéma ?"


C'est mon intro, la suite après; certainement.
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Message par Borges Mer 12 Fév 2014 - 17:18

Tony, mon pote, cette réponse, juste pour te dire :  les règles ont changé, soit tu as quelque chose à dire, même mal, même d'illisible, soit tu n'as rien à dire, dans ce cas ton message sera tout simplement supprimé. Tu ne vas tout de même pas essayer de me faire croire que tu connais quoi que ce soit à Heidegger, ou tenter de me faire oublier que j'en suis pour ainsi dire un super super spécialiste... sois sérieux, mon gamin.

Ce n'est pas de la censure, mon gamin, mais une invitation à penser (la chose à penser, ou en commun) ou à te taire, et lire ceux qui essayent de penser, car que nous en soyons capable rien encore ne le montre...
Borges
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Message par Borges Ven 14 Fév 2014 - 8:11

Qu'est-ce que le cinéma?
Qu'est-ce que?






Borges
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Message par dreampeace Ven 14 Fév 2014 - 11:09

Oui, le première question. Pas chronologiquement, mais bel et bien la première question.
La deuxième c'est peut être: Comment y répondre ?
dreampeace
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Message par Borges Ven 14 Fév 2014 - 11:32

dreampeace a écrit:Oui, le première question. Pas chronologiquement, mais bel et bien la première question.
La deuxième c'est peut être: Comment y répondre ?

Hi;

Ce sera l'oeuvre de notre patience, y répondre, si nous en avons assez...

mais répondre à une question, pour en revenir à notre ami Tony, cela suppose un appel; on répond à ce qui appelle; c'est pourquoi Heidegger avait transformé la question "qu'appelle-t-on penser" en "Qu'est-ce qui nous appelle à penser?"

Qu'est-ce qui nous appelle à la question de l’être du cinéma...?



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André Bazin, les Cahiers et la question de l’être (du cinéma)  Empty Re: André Bazin, les Cahiers et la question de l’être (du cinéma)

Message par Borges Ven 14 Fév 2014 - 16:04


Digressions et hasard; ce qui ne veut pas dire que je ne vais dire que des conneries; je vais surtout énormément me répéter, me cherchant.



Le moment Tonylemort

Avant de passer à la question de l’être, de l’être du cinéma, de l’être (du cinéma), ce qui n'est pas la même chose même si ces questions se situent dans l'espace du même ou d'une certaine compréhension du même : la réponse à la question "qu'est-ce que le cinéma ?" suppose une certaine interprétation de l’être de l’être, de l’être de l'étant, une réponse à la question : "qu'est-ce que (l')être-étant ?" Le problème de Bazin est de déterminer l'essence du cinéma depuis une certaine compréhension de l’être (qui reste implicite, d'où la difficulté de cerner son fameux réalisme) et de montrer que le cinéma de tous les arts est celui qui est le plus proche de cette compréhension.


Le cinéma, le proche de l’être; l'ami, l'aimant de l’être; l'aimance de l’être; écrivant cela, des souvenirs me reviennent du forums des cahiers, où je m'étais amusé à comprendre, déployer le sens de la cinéphilie depuis les analyses derridiennes de l'amitié. Pas de hasard sans nécessité, on se situe dans les mêmes parages. Le réalisme de Bazin est une pensée de l'amour. Le cinéma est un amour du réel; la tendresse du réel; c'est l'idée au cœur de son texte sur de Sica.

Ontologiquement, si on traduit sa position de manière assez libre, et pour la beauté de la formule, en termes parménidiens, on aurait quelque chose comme : "le cinéma et l’être c'est le même", c'est ça le fameux réalisme ontologique, ou comme il dit aussi le "réalisme phénoménologique"...

Le cinéma à la place de la pensée, le cinéma comme pensée, en un sens non théorique, j'y reviendrai (si ça me chante).

Aimance du cinéma (au double sens de l'expression, subjectif et objectif), aimance de la pensée, c'est le même, la même chose; reste à déterminer le sens de la chose, de quelle chose nous parlons, à quelle chose nous avons affaire. Pas de réalisme, sans choses, qu'on prenne leurs partis, ou pas.

Si on fait gaffe à cette histoire d'aimance, on ne peut que réaliser la nécessité de la rencontre de la philosophie et du cinéma; la cinéphilie.


"le cinéma, l’être : le même"

Ce qu'il faut marquer d'abord, c'est que cette formule ne peut pas réellement traduire la pensée du cinéma de Bazin, son idée du cinéma, même si elle en constitue le télos, l'idéal, la norme, parce qu'elle ne se situe pas dans un horizon présocratique; chez lui, le cinéma est bien plutôt un art onto-phénoméno-théologique. Détermination qui, c'est la beauté de la chose, entre en conflit avec l'autre définition du cinéma donnée par Bazin, ou liée au nom de Bazin : le cinéma comme "art impur"...

Rapporter ces deux déterminations l'une à l'autre permettrait de penser l'impureté de l’être (du cinéma), et la cruauté, "la chose de Bazin", disait Daney; on ne manquera pas l'allusion à Lacan, bien entendu. Le réalisme de Bazin a ses limites; le réel, comme impossible.


(Je me demande si j'ai été assez jargonnant, Tony)


Deuxième mouvement

Donc, avant de passer à la question de l'être (du cinéma), de manière posée, calme, en prenant tout le temps que je peux me donner, et toutes les facilités, je vais m'intéresser un peu aux textes de SD et CB, et à leur stratégie d'appropriation maladroite de l'héritage de Bazin.

Là, je sais que je vais me répéter, parce que je veux saisir au mieux ce qui m'agace tant dans cette affaire, dans les textes des deux critiques :

Pour le dire clairement, simplement, sans perte de temps : Bazin c'est le cadet de leurs soucis, ils visent avant tout à se présenter comme ses héritiers, contre les apparences, et à nous prouver que Bazin s'il était encore vivant aurait trouvé super cool et vachement réaliste (ontologiquement bien entendu) "Super 8", "Star Trek", qu'il aurait spring breaké avec Harmony Korine, et valsé avec Ari Folman...

Le but, les intentions de nos rédacteurs, ne sont pas tant de présenter la pensée de Bazin, dans sa complexité, dans la complexité de son écriture, que d'en dresser une image qui justifie leurs choix, comme ils disent; comme s'ils choisissaient quoi que ce soit, autre chose que ce qui n'a strictement aucunement besoin d'eux pour exister, pour s'imposer et exister médiatiquement, en termes d'entrées, de prestige, et de tout ce qu'on veut. Les films dont causent nos amis, qu'ils figurent ou pas dans leur top ten, n'ont aucunement besoin de la critique; c'est plutôt la critique qui a besoin d'eux; en parler, c'est se faire de la pub, et vendre.

Donc après Grémillon, Bazin.

Grémillon, on s'en souvient encore, c'était le gars que Delorme avait opposé à AK, et à "La vie d'Adèle", pour illustrer l'authentique esprit français. AK c'est pas assez esprit français, malgré son soutien à je ne sais plus quel con de politique très français. Bazin, c'est plutôt le gars qu'on oppose aux critiques des Cahiers, avec d'autres anciens légendaires, quand on veut leur signifier qu'ils sont nuls, qu'ils valent par grand-chose, ou qu'ils ont trahi les valeurs, la pensé, l'esprit, du père fondateur, oui, osons ce cliché. Ils pourraient dire : on s'en tape de Bazin, ça ne nous intéresse pas, ça date, c'est vieux, on a bien mieux que ça à proposer, faut aller de l'avant, mais ils ont pas ce courage, vous imaginez bien. Les gars veulent le beurre, l'argent du beurre, et mon sourire en plus (putain, ce qu'ils sont exigeants). Ils veulent radoter sur "Gravity" avec la bénédiction de Bazin.

Comment y arriver ? Très simplement, en distinguant deux Bazin, le bon, celui qui les aimerait, et le mauvais, celui qui les aime pas, et que les baziniens leur opposent sans rien y comprendre. Le vrai père, qui nous aime, et le faux, qui ne nous aime pas, et que nous n'aimons pas non plus. Le truc pour distinguer ces deux Bazin, le vrai et le faux, se résume à une banalité : Bazin c'est infiniment plus riche, dense, complexe, écrit, moderne, dialectique que les quelques formules basiques à quoi on le réduit, à quoi le réduit le bazinisme, à quoi le réduisent les baziniens, amateurs de documentaires chinois filmant la durée de la durée qui dure tant que le sucre en oublie de fondre. Bazin (dont nous sommes les héritiers) c'est plus que le bazinisme (qui nous critique). Bazin, c'est plus, et autre chose, que la défense dogmatique réaliste des voleurs de bicyclettes et l'interdiction des chaines de montage, presque le contraire en fait.

Bazin, c'est plus que le bazinisme. Vous êtes pas épatés par cette idée générale ? C'est vrai qu'il y a pas de quoi. Elle ne vaudra à personne d'entrer au  Hall of Fame de la critique : on pouvait le deviner, sans rien savoir de Bazin ou du bazinisme. Marx, c'est pas le marxisme, Kant, c'est pas le kantisme...

Ce qui surprend le plus dans ces textes, c'est le montage complètement idiot d'un tas de citations; un montage, qui, n'ayant rien de créatif, de productif, parce qu'il est extérieur au mouvement de la pensée de Bazin, et des auteurs à qui on le confronte pour le mettre dans le coup, la rend très étrangère  à elle-même. Non, ce n'est pas du tout ça; je me corrige, je dois me préciser : rendre une pensée étrangère à elle-même, découvrir son altérité, son hétérogénéité, la déplacer, en quelque sorte, du lieu où elle semble posséder son sens, où elle règne, domine, ce n'est pas quelque chose de négatif, et de facile encore moins : il faut la maîtriser, et l'aimer. On peut déplacer une pensée, la faire bouger, voyager, mais il faut le faire en s'appuyant sur elle, en travaillant ses manques, ses trous, ses hésitations, ses contingences, ses élans, ses fuites, et ses refus; comme pourrait le faire un Derrida; il faut la déconstruire, donc, jouer certains lieux contre d'autres, certains mots avec d'autres, opérer en séducteur, la draguer, pour employer un terme qu'aimait bien Barthes. Il ne s'agit pas du tout de ça chez nos critiques : pour le dire en termes baziniens, ils ne s'intéressent pas à l'événement, mais uniquement à leur programme, à leur scénario qu'ils veulent absolument coller sur ces textes. Au lieu de les lire, ils cherchent à les faire parler, à les convaincre d'apporter leur soutien à leurs conneries. Ils n'essaient pas de penser avec et contre Bazin, de s'expliquer avec Bazin, au sens de la polémique, mais aussi au sens de l'élucidation, de l'éclaircissement, mais de l'utiliser, de l'instrumentaliser, de légitimer les Cahiers actuels.



(je me suis relu, les fautes, de toute sorte, ne comptent pas)


Borges
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