Avatar - James Cameron
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Re: Avatar - James Cameron
allant dans le sens d'Adeline, je dis que les critiques de VS sont particulièrement "ineptes", cinématographiquement, sans intérêt, politiquement très marquées...
-Comme dit Adeline, il faut distinguer "homme", et "humanité" (comme valeur éthique; c'est pour ça qu'on parle de conduite inhumaine, ou humaine... donc les plus humains dans le film ne sont pas ceux que l'on croit; et "l'identification" quand elle n'est pas seulement imaginaire, archaïque, mimétique se fait au bien, à la justice... pas à la forme du même, (je suis comme lui, je suis avec lui), qu'elle soit du côté des rouges ou des verts,
quelle triste conception du cinéma que de croire qu'il doit nous identifier à ce que nous croyons déjà être, qu'il soit un processus de fabrication des identités... );
les plus cultivés, se souviennent que kant étendait son impératif catégorique à tout être raisonnable, les idiots de l'époque se demandaient à qui kant pouvait bien penser, comme les bêtes ne sont pas raisonnables...aux anges?... mais non, tout simplement, le concept de moral et de raison n'a rien avoir avec la forme-homme...l'homme se définit comme raison mais il ne définit pas la raison...
-pensons au devenir-deleuzien, et à sa volonté d'échapper aussi à la norme homme, qui, bien entendu, équivaut à homme blanc, plutôt américain... (et l'ami VS ne se pose pas la moindre question quand il identifie les marines us à l'humanité, depuis le temps que dans la sf, ils nous représentent... on peut d'autant plus facilement s'identifier à la forme usienne de l'humanité qu'ils démolissent des aliens...)
-Notons aussi les efforts de derrida pour penser l'éthique à partir du vivant...
-On dirait que VS écrit depuis une époque antérieure à l'invention de la fiction; car, si la fiction existe, c'est pour nous permettre de nous identifier à ce que nous ne sommes pas, de sentir avec d'autres, autrement, de voir, .... bref... c'est pour élargir notre mentalité, dirait kant,
c'est du politique, et de l'esthétique, comme dirait Rancière,
on ne va pas au cinéma pour s'identifier mais pour se désidentifier... se trahir, trahir...
" Si la littérature témoigne de quelque chose qui importe à la communauté, c’est par ce dispositif qui introduit l’hétéronomie dans le je"
(rancière)
la science fiction, c'est une manière d'aller au-delà de la prudence de Spinoza... au-delà de son silence, de chercher quels sont ces autres attributs infinis de la nature?
(deleuze)
-Comme dit Adeline, il faut distinguer "homme", et "humanité" (comme valeur éthique; c'est pour ça qu'on parle de conduite inhumaine, ou humaine... donc les plus humains dans le film ne sont pas ceux que l'on croit; et "l'identification" quand elle n'est pas seulement imaginaire, archaïque, mimétique se fait au bien, à la justice... pas à la forme du même, (je suis comme lui, je suis avec lui), qu'elle soit du côté des rouges ou des verts,
quelle triste conception du cinéma que de croire qu'il doit nous identifier à ce que nous croyons déjà être, qu'il soit un processus de fabrication des identités... );
les plus cultivés, se souviennent que kant étendait son impératif catégorique à tout être raisonnable, les idiots de l'époque se demandaient à qui kant pouvait bien penser, comme les bêtes ne sont pas raisonnables...aux anges?... mais non, tout simplement, le concept de moral et de raison n'a rien avoir avec la forme-homme...l'homme se définit comme raison mais il ne définit pas la raison...
-pensons au devenir-deleuzien, et à sa volonté d'échapper aussi à la norme homme, qui, bien entendu, équivaut à homme blanc, plutôt américain... (et l'ami VS ne se pose pas la moindre question quand il identifie les marines us à l'humanité, depuis le temps que dans la sf, ils nous représentent... on peut d'autant plus facilement s'identifier à la forme usienne de l'humanité qu'ils démolissent des aliens...)
-Notons aussi les efforts de derrida pour penser l'éthique à partir du vivant...
-On dirait que VS écrit depuis une époque antérieure à l'invention de la fiction; car, si la fiction existe, c'est pour nous permettre de nous identifier à ce que nous ne sommes pas, de sentir avec d'autres, autrement, de voir, .... bref... c'est pour élargir notre mentalité, dirait kant,
c'est du politique, et de l'esthétique, comme dirait Rancière,
on ne va pas au cinéma pour s'identifier mais pour se désidentifier... se trahir, trahir...
" Si la littérature témoigne de quelque chose qui importe à la communauté, c’est par ce dispositif qui introduit l’hétéronomie dans le je"
(rancière)
la science fiction, c'est une manière d'aller au-delà de la prudence de Spinoza... au-delà de son silence, de chercher quels sont ces autres attributs infinis de la nature?
Eh bein, je suis fait à la manière suivante : Corps et âme, c’est à dire je suis à la fois un mode de l’étendue par mon corps et un mode de la pensée par mon âme, c’est à dire mon âme, c’est une manière de penser ; mon corps, c’est une manière d’étendre, d’être étendu. Alors, dans les attributs que je ne connais pas, dont je ne peux même pas dire le nom, puisqu’il y en a une infinité ; il y a d’autres manières d’être ; Là, il y a tout le domaine d’une large science fiction spinoziste : qu’est ce qui se passe dans les autres attributs qu’on ne connaît pas ? mais d’accord, il est très discret là-dessus. Il dit en dehors de ça, on ne peut rien dire.
(deleuze)
Borges- Messages : 6044
Re: Avatar - James Cameron
Non, mais moi je pensais qu'il s'agissait de définir au plus près un film : en l'occurence, Avatar, un film qui voudrait générer du mythe, il n'y a aucun doute sur cette ambition, mais qui à mon sens ne vaut pas les Schtroumpfs.
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
Quant à la jouissance de tuer des humains, lors de l'improbable bataille finale, je ne dis pas qu'il s'agit d'une interprétation absolue : tout au contraire, j'essaie simplement d'attirer votre attention sur l'une des nombreuses "impasses", formelles autant qu'idéologiques, du film. Justement, lors de cette scène finale, nous sommes évidemment (le plus souvent, avec la caméra) à la place des Navis : nous nous identifions aux Navis. Aucun doute là-dessus. Mais nous sommes d'abord spectateurs, et nous jouissons de cette vengeance, à l'exclusion de l'humain. Il me semble qu'il y a là une question non résolue. Mais elle est éminemment cinématographique. Où est l'humain alors ? Question que je ne me hasarderais pas à résoudre concernant ce film, qui ne tient pas la route : le problème est que Cameron l'a évitée, cette question. C'est l'une des nombreuses "aberrations" du film. Mais d'accord, j'y reviendrai.
J'insiste tout de même sur le fait que le problème majeur du film me semble justement être un problème d'identification. Au cinéma, le spectateur s'identifie plus qu'ailleurs, fût-ce, comme l'écrivait Daney dans un article sur Bazin (Bazin et les bêtes in La Rampe) à choisir entre un cachalot et un requin : "entre deux autres, il faut encore choisir".
Le choix d'Avatar n'est pas simplement trop vite fait, trop binaire, trop simpliste et trop vite réglé. C'est qu'il n'y a même pas choix : le moment où le personnage choisit de rejoindre définitivement les hommes bleus, outre que nous n'en avons que le résultat enregistré sur une petite caméra (processus du "confessionnal", et morale catho-maso, là encore) ce moment est soigneusement évité. En fait, Cameron évite toute question complexe : tout dilemme, tout ce qui fait l'humain en nous, la contradiction, et la liberté de choisir, Cameron se l'évite.
Enfin, revenons à Ford (qui est le cinéaste convoqué ici par le film) : Ethan/Wayne (dans The Searchers/ La Prisonnière du désert) est un personnage raciste et défini exclusivement par la pulsion de mort. Pourtant, Ford fait le choix de le suivre, lui, et de nous renvoyer par tout un réseau de signes que c'est à lui que nous devons nous identifier. Dilemme, choix final, libre arbitre qui appartient en dernière instance au seul personnage, et qui viendra à l'instant crucial prendre de court le spectateur, et jusqu'au cinéaste, qui est obligé à une coupe de montage au milieu du geste d'Ethan soulevant sa nièce. Pour la dévorer ? Non, pour la prendre dans ses bras. C'est conservateur ? C'est d'abord du cinéma. Ce qui est admirable chez Ford n'est d'aucun parti. Le reste est anecdote.
J'insiste tout de même sur le fait que le problème majeur du film me semble justement être un problème d'identification. Au cinéma, le spectateur s'identifie plus qu'ailleurs, fût-ce, comme l'écrivait Daney dans un article sur Bazin (Bazin et les bêtes in La Rampe) à choisir entre un cachalot et un requin : "entre deux autres, il faut encore choisir".
Le choix d'Avatar n'est pas simplement trop vite fait, trop binaire, trop simpliste et trop vite réglé. C'est qu'il n'y a même pas choix : le moment où le personnage choisit de rejoindre définitivement les hommes bleus, outre que nous n'en avons que le résultat enregistré sur une petite caméra (processus du "confessionnal", et morale catho-maso, là encore) ce moment est soigneusement évité. En fait, Cameron évite toute question complexe : tout dilemme, tout ce qui fait l'humain en nous, la contradiction, et la liberté de choisir, Cameron se l'évite.
Enfin, revenons à Ford (qui est le cinéaste convoqué ici par le film) : Ethan/Wayne (dans The Searchers/ La Prisonnière du désert) est un personnage raciste et défini exclusivement par la pulsion de mort. Pourtant, Ford fait le choix de le suivre, lui, et de nous renvoyer par tout un réseau de signes que c'est à lui que nous devons nous identifier. Dilemme, choix final, libre arbitre qui appartient en dernière instance au seul personnage, et qui viendra à l'instant crucial prendre de court le spectateur, et jusqu'au cinéaste, qui est obligé à une coupe de montage au milieu du geste d'Ethan soulevant sa nièce. Pour la dévorer ? Non, pour la prendre dans ses bras. C'est conservateur ? C'est d'abord du cinéma. Ce qui est admirable chez Ford n'est d'aucun parti. Le reste est anecdote.
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
Tout cela c'est pas sérieux, VS, tu dois préciser, et hisser un peu le niveau; et que dire de la partie sur "The searchers", un film dont je crois être un spécialiste?
déjà dit :
C'est dans aliens que cameron dialogue avec le thème des mauvais indiens qui s'attaquent aux colons et enlèvent les petites filles...donc avec "the searchers"...
la question est : comment passe-t-il de ce thème essentiel de l'histoire, de l'imaginaire de l'ouest ( l'enlèvement par des indiens d'une fille blanche) à celui que l'on peut désigner par "pocahontas", aussi essentiel, dit-on..
je dis qu'il ne change pas trop...
déjà dit :
C'est dans aliens que cameron dialogue avec le thème des mauvais indiens qui s'attaquent aux colons et enlèvent les petites filles...donc avec "the searchers"...
la question est : comment passe-t-il de ce thème essentiel de l'histoire, de l'imaginaire de l'ouest ( l'enlèvement par des indiens d'une fille blanche) à celui que l'on peut désigner par "pocahontas", aussi essentiel, dit-on..
je dis qu'il ne change pas trop...
Borges- Messages : 6044
Re: Avatar - James Cameron
"Elever le niveau" ? Comprends pas.
"Pas sérieux ?"
Non, Cameron n'est pas sérieux, ne prend pas sa tâche au sérieux, et renvoie toute question complexe, humaine, tout dilemme, aux oubliettes, pour ne pas risquer de perdre son public (sa "cible") afin de satisfaire d'abord en lui le bon gestionnaire.
Si tu trouves simplement que je manque de rigueur, et que tu me demandes de critiquer Avatar de façon plus sérieuse, structurée et rigoureuse, alors j'accepte la remontrance, et je relève le défi.
Mais auparavant j'ai une question : considères-tu Cameron, d'après son passif, comme un grand cinéaste ? Moi pas.
Cameron a toujours été un cinéaste digne d'intérêt, une sorte de survivant de l'âge des "artisans" hollywoodiens : de bonnes séries B, comme Aliens ou True lies, malgré leurs gros effets de manche, sont là pour en témoigner. Mais un grand cinéaste ? Abyss ou Titanic sont-ils de grands films ? De gros films, certes, mais qui affrontent bille en tête leur sujet, et la question du cinéma ? Franchement...
En tout cas tous ces films sont intéressants, et jusqu'au dernier en date. Et il me semble, à la lecture de ce qui précède (tout de même déjà une quinzaine de pages !) que nous n'en avons pas fini avec ce film.
To be continued, donc...
"Pas sérieux ?"
Non, Cameron n'est pas sérieux, ne prend pas sa tâche au sérieux, et renvoie toute question complexe, humaine, tout dilemme, aux oubliettes, pour ne pas risquer de perdre son public (sa "cible") afin de satisfaire d'abord en lui le bon gestionnaire.
Si tu trouves simplement que je manque de rigueur, et que tu me demandes de critiquer Avatar de façon plus sérieuse, structurée et rigoureuse, alors j'accepte la remontrance, et je relève le défi.
Mais auparavant j'ai une question : considères-tu Cameron, d'après son passif, comme un grand cinéaste ? Moi pas.
Cameron a toujours été un cinéaste digne d'intérêt, une sorte de survivant de l'âge des "artisans" hollywoodiens : de bonnes séries B, comme Aliens ou True lies, malgré leurs gros effets de manche, sont là pour en témoigner. Mais un grand cinéaste ? Abyss ou Titanic sont-ils de grands films ? De gros films, certes, mais qui affrontent bille en tête leur sujet, et la question du cinéma ? Franchement...
En tout cas tous ces films sont intéressants, et jusqu'au dernier en date. Et il me semble, à la lecture de ce qui précède (tout de même déjà une quinzaine de pages !) que nous n'en avons pas fini avec ce film.
To be continued, donc...
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
Hello Adeline,
Pour faire bref, il me semble que ce débat illustre on ne peut mieux ce que Borges disait ailleurs, sur l'étant qu'on ne perçoit qu'en vertu d'une précompréhension de son être (si j'ai bien compris).
Van Stratten ne voit pas un Na'vi, un homme (en dépit de tous les signes que tu donnes) ; il voit du bleu généré par ordinateur.
Le scénario d'Avatar, c'est du pain béni pour sa théodicée sur les images (lol) puisque le film ne raconte alors rien d'autre que cette victoire du simulacre, du digital, de la machine, sur l'humain, l'image photographique, le corps réel, la lumière naturelle (dont un de ses messages sur Wang Bing rappelait à quel point elle était importante pour lui, et quelles contrariétés les petites caméras numériques lui causaient, avec leur changement de diaphragme - messages où se laissait lire le fantasme d'une espèce de machine d'enregistrement transparente à elle-même, qui trouve plus vraie et naturelle une image artificiellement surexposée qu'une image automatiquement corrigée - alors qu'il n'y a rien de naturel ni de vrai dans l'une et dans l'autre, il me semble).
Enfin, le débat est intéressant. Il rejoue sans doute de très vieilles querelles, et donne une idée de ce qu'ont pu être celles qui ont accueilli l'arrivée de la photographie ou celle du cinéma, justement. Mais cela aussi, Borges l'avait dit.
Van Stratten me corrigera si je me trompe, mais je crois que s'il met les Na'vis du côté du non-humain, ce n'est pas en vertu de leur ressemblance/dissemblance, mais du seul fait que ce sont des images de synthèse.Adeline a écrit:Les Na'vis, si on oublie qu'ils sont grands, bleus et habitent sur une autre planète, ont tous les attributs qui font des hommes des hommes
Pour faire bref, il me semble que ce débat illustre on ne peut mieux ce que Borges disait ailleurs, sur l'étant qu'on ne perçoit qu'en vertu d'une précompréhension de son être (si j'ai bien compris).
Van Stratten ne voit pas un Na'vi, un homme (en dépit de tous les signes que tu donnes) ; il voit du bleu généré par ordinateur.
Le scénario d'Avatar, c'est du pain béni pour sa théodicée sur les images (lol) puisque le film ne raconte alors rien d'autre que cette victoire du simulacre, du digital, de la machine, sur l'humain, l'image photographique, le corps réel, la lumière naturelle (dont un de ses messages sur Wang Bing rappelait à quel point elle était importante pour lui, et quelles contrariétés les petites caméras numériques lui causaient, avec leur changement de diaphragme - messages où se laissait lire le fantasme d'une espèce de machine d'enregistrement transparente à elle-même, qui trouve plus vraie et naturelle une image artificiellement surexposée qu'une image automatiquement corrigée - alors qu'il n'y a rien de naturel ni de vrai dans l'une et dans l'autre, il me semble).
Enfin, le débat est intéressant. Il rejoue sans doute de très vieilles querelles, et donne une idée de ce qu'ont pu être celles qui ont accueilli l'arrivée de la photographie ou celle du cinéma, justement. Mais cela aussi, Borges l'avait dit.
Eyquem- Messages : 3126
Re: Avatar - James Cameron
Hello Eyquem,
nous passons notre temps à nous répéter les uns les autres : apprendre, c'est se souvenir, ou encore, cent fois sur le métier tu remettras, etc. Tu as raison dans ce que tu expliques, et tu résumes mieux que je ne l'avais compris les différentes positions du topic, donc, redisons ce que dit Borges, qui redit lui-même ce que d'autres ont dit, qui eux-mêmes redisent. L'important est de savoir que l'on redit et qu'on n'invente pas la pluie...
Je suis d'accord avec Bazin, mais je suis aussi capable de bander sur une image de synthèse, les deux sont-ils vraiment incompatibles VS ?
nous passons notre temps à nous répéter les uns les autres : apprendre, c'est se souvenir, ou encore, cent fois sur le métier tu remettras, etc. Tu as raison dans ce que tu expliques, et tu résumes mieux que je ne l'avais compris les différentes positions du topic, donc, redisons ce que dit Borges, qui redit lui-même ce que d'autres ont dit, qui eux-mêmes redisent. L'important est de savoir que l'on redit et qu'on n'invente pas la pluie...
Je suis d'accord avec Bazin, mais je suis aussi capable de bander sur une image de synthèse, les deux sont-ils vraiment incompatibles VS ?
adeline- Messages : 3000
Re: Avatar - James Cameron
Adeline a écrit :
Je suis d'accord avec Bazin, mais je suis aussi capable de bander sur une image de synthèse, les deux sont-ils vraiment incompatibles VS ?
je ne suis pas VS mais j'affirme à sa place que oui.
Invité- Invité
Re: Avatar - James Cameron
Bazin était contre le dessin animé?
J'avoue avoir un peu de mal à voir où y a différence essentielle entre dessin animé, et image de synthèse.
J'avoue avoir un peu de mal à voir où y a différence essentielle entre dessin animé, et image de synthèse.
Re: Avatar - James Cameron
Bazin ne compte pas c'est autre chose qui est en jeu derrière cette défense acharnée du cinéma américain, tsoin, tsoin
Invité- Invité
Re: Avatar - James Cameron
Bon, écoutez, il me semble que s'accumulent une tonne de malentendus.
Je ne sais par où commencer. Déroulons la pelote.
Disons pour commencer que je n'ai rien contre le dessin animé ni contre les images de synthèse, même s'il est vrai qu'elles ne m'attirent pas beaucoup, a priori. J'aime beaucoup Chuck Jones et Toy Story II, mais là je m'égare.
Les propos de Bazin, que je rappporte tels que les retranscrit déjà Daney, ne concernent ni ne contestent les images de synthèse, et à mon avis l'affirmation reste pleinement valable pour Avatar : tout comme, entre "un cachalot et un requin", le spectateur, faute de mieux, choisira de s'identifier au cachalot, entre un Navi et un humain, il choisit de s'identifier au Navi. C'est le choix qu'est censé faire pour nous Cameron. Sauf que ça pose problème ici. Non pas, aucunement, jamais, du fait que les Navis sont en images de synthèse : là n'est pas le problème. Le problème, je le répète, c'est que Jake Sully abandonne bien lestement son humaine enveloppe. C'est là que le film aurait pu (aurait dû ?) puiser sa force : dans l'impossibilité même de ce renoncement, dans le dilemme passionnant qu'il offrait, problème d'identité qui symboliquement renvoie évidemment à la question de l'identité des images : identité du cinéma, destin des images, des images de synthèse comme des autres. Question de l'analogie des images numériques. Bien sûr que c'est bougrement passionnant. C'est pourquoi, pour ma part, j'ai tout de suite écrit sur Avatar, dès le lendemain de cette projection en 3D, sans trop encore savoir ce qui me travaillait (je n'en suis toujours pas bien sûr).
Non, Eyquem, désolé de te contredire, mais je ne résous absolument pas la question d'un revers de la manche, et nulle part tu ne me verras affirmer que le film tranche franchement la question du simulacre. Là n'est pas tout à fait la question. Je ne sais pas. Je ne l'affirmerai pas.
En tout cas je ne pense pas que le problème actuel des images réside dans la question de la "substance" : image de synthèse ou non, de nature chimique ou numérique, toutes à mon sens peuvent renvoyer aussi violemment au cinéma en tant que tel (parce que c'est le cinéma qui personnellement m'intéresse, même en dehors de la salle).
Alors le problème d'Avatar, à mon sens, n'est pas seulement idéologique, ni même intellectuel : même si Cameron fait preuve d'une naïveté proche de la sénilité, son film aurait pourtant pu toucher (il le fait presque) à la question qu'il évite pourtant gaillardement : dans ce renoncement, dans cette "métamorphose" (Cameron a dû au moins survoler Ovide), que gagne le personnage, et que perd-il ? Bref est-ce que ça vaut le coup ? Pourquoi prendre le risque ? Bien sûr la réponse finale aurait très certainement été peu ou prou la même : l'amour, une histoire d'amour. Mais le parcours, le trajet eût été bougrement plus intéressant. Et du coup, l'histoire d'amour aussi, aurait mieux "pris".
En lieu et place de ce parcours initiatique, on trouve une accumulation de scènes de bravoure ineptes, qui empruntent surtout au jeu vidéo, et de très mauvaises scènes d'action (on est loin de Terminator).
En niant que la jouissance du spectateur devant la mort des humains posait problème (mais je le redis, un problème passionnant), Cameron passe à côté de son sujet. Mais la question reste ouverte.
Bon maintenant, au sujet de l'aspect charnel de l'image de synthèse : non, moi, je suis désolé, ça me laisse de marbre. Sylvestre et le Coyote m'ont fait mourir de rire. Buzz Lightyear m'a fait prendre conscience que les images de synthèse savent penser. Mais rien à faire : le charnel, la lumière, ne sont pas là. Mais rassurez-vous : il ne s'agit pas que de bandaison. J'aime passionnément le cinéma, c'est tout.
Cela dit, Eyquem, ne me prends pas pour un demeuré, je te prie : ce n'est pas parce que j'aime passionnément la lumière que je ne puis pas être conscient de l'artifice qui permet de la projeter sur un écran après l'avoir emprisonnée sur celluloïd ou transformée en données chiffrées. C'est d'ailleurs ce que je suggérais à JM, en précisant que j'apprécie tout particulièrement l'opération d'étalonnage numérique, photogramme par photogramme, à laquelle je me suis contraint pour, autant que possible, rectifier les interventions intempestives du diaph automatique pendant la prise : cela permet de garder constamment à l'esprit quel artifice, et quelle pulsion de mort, donnent naissance aux image animées.
Sinon, évidemment, je plaide coupable pour toutes les conneries que j'ai pu écrire, ainsi que pour celles que j'écrirai encore.
Bien à vous, Spectres. Répondez, svp.
Je ne sais par où commencer. Déroulons la pelote.
Disons pour commencer que je n'ai rien contre le dessin animé ni contre les images de synthèse, même s'il est vrai qu'elles ne m'attirent pas beaucoup, a priori. J'aime beaucoup Chuck Jones et Toy Story II, mais là je m'égare.
Les propos de Bazin, que je rappporte tels que les retranscrit déjà Daney, ne concernent ni ne contestent les images de synthèse, et à mon avis l'affirmation reste pleinement valable pour Avatar : tout comme, entre "un cachalot et un requin", le spectateur, faute de mieux, choisira de s'identifier au cachalot, entre un Navi et un humain, il choisit de s'identifier au Navi. C'est le choix qu'est censé faire pour nous Cameron. Sauf que ça pose problème ici. Non pas, aucunement, jamais, du fait que les Navis sont en images de synthèse : là n'est pas le problème. Le problème, je le répète, c'est que Jake Sully abandonne bien lestement son humaine enveloppe. C'est là que le film aurait pu (aurait dû ?) puiser sa force : dans l'impossibilité même de ce renoncement, dans le dilemme passionnant qu'il offrait, problème d'identité qui symboliquement renvoie évidemment à la question de l'identité des images : identité du cinéma, destin des images, des images de synthèse comme des autres. Question de l'analogie des images numériques. Bien sûr que c'est bougrement passionnant. C'est pourquoi, pour ma part, j'ai tout de suite écrit sur Avatar, dès le lendemain de cette projection en 3D, sans trop encore savoir ce qui me travaillait (je n'en suis toujours pas bien sûr).
Non, Eyquem, désolé de te contredire, mais je ne résous absolument pas la question d'un revers de la manche, et nulle part tu ne me verras affirmer que le film tranche franchement la question du simulacre. Là n'est pas tout à fait la question. Je ne sais pas. Je ne l'affirmerai pas.
En tout cas je ne pense pas que le problème actuel des images réside dans la question de la "substance" : image de synthèse ou non, de nature chimique ou numérique, toutes à mon sens peuvent renvoyer aussi violemment au cinéma en tant que tel (parce que c'est le cinéma qui personnellement m'intéresse, même en dehors de la salle).
Alors le problème d'Avatar, à mon sens, n'est pas seulement idéologique, ni même intellectuel : même si Cameron fait preuve d'une naïveté proche de la sénilité, son film aurait pourtant pu toucher (il le fait presque) à la question qu'il évite pourtant gaillardement : dans ce renoncement, dans cette "métamorphose" (Cameron a dû au moins survoler Ovide), que gagne le personnage, et que perd-il ? Bref est-ce que ça vaut le coup ? Pourquoi prendre le risque ? Bien sûr la réponse finale aurait très certainement été peu ou prou la même : l'amour, une histoire d'amour. Mais le parcours, le trajet eût été bougrement plus intéressant. Et du coup, l'histoire d'amour aussi, aurait mieux "pris".
En lieu et place de ce parcours initiatique, on trouve une accumulation de scènes de bravoure ineptes, qui empruntent surtout au jeu vidéo, et de très mauvaises scènes d'action (on est loin de Terminator).
En niant que la jouissance du spectateur devant la mort des humains posait problème (mais je le redis, un problème passionnant), Cameron passe à côté de son sujet. Mais la question reste ouverte.
Bon maintenant, au sujet de l'aspect charnel de l'image de synthèse : non, moi, je suis désolé, ça me laisse de marbre. Sylvestre et le Coyote m'ont fait mourir de rire. Buzz Lightyear m'a fait prendre conscience que les images de synthèse savent penser. Mais rien à faire : le charnel, la lumière, ne sont pas là. Mais rassurez-vous : il ne s'agit pas que de bandaison. J'aime passionnément le cinéma, c'est tout.
Cela dit, Eyquem, ne me prends pas pour un demeuré, je te prie : ce n'est pas parce que j'aime passionnément la lumière que je ne puis pas être conscient de l'artifice qui permet de la projeter sur un écran après l'avoir emprisonnée sur celluloïd ou transformée en données chiffrées. C'est d'ailleurs ce que je suggérais à JM, en précisant que j'apprécie tout particulièrement l'opération d'étalonnage numérique, photogramme par photogramme, à laquelle je me suis contraint pour, autant que possible, rectifier les interventions intempestives du diaph automatique pendant la prise : cela permet de garder constamment à l'esprit quel artifice, et quelle pulsion de mort, donnent naissance aux image animées.
Sinon, évidemment, je plaide coupable pour toutes les conneries que j'ai pu écrire, ainsi que pour celles que j'écrirai encore.
Bien à vous, Spectres. Répondez, svp.
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
Donc si je comprend bien, il faut qu'un corps réel soit capturé par un appareil utilisant un procédé chimique, mécanique, numérique ou analogique pour te faire bander? Un roman ça n'y parviendrait pas? Ni un dessin? Ni une estampe? Ni une peinture?
Re: Avatar - James Cameron
Hello hello VS
-je crois que nous avons déjà discuté de toutes ces questions, le corps, l'image, l'identité, le destin des images... il faut nous lire autant que nous te lisons...au fond tu reproches à JC de n'avoir pas fait un film à la joseph conrad (et de son héros une espèce de lord jim)...
-Non, je l'ai dit et redit, je ne considère pas JC comme un grand metteur en scène, c'est juste un phénomène.. et pas non plus avatar comme un grand film, un bon film, c'est même pas même un film (mais l'annonce de l'avenir d'un certain cinéma); mais comme tous les phénomènes, ça donne à penser (peut-être que ça ne pense pas) plus que bien des films, et même des grands films de l'année...
-je trouve la navi dont le héros est amoureux très belle, et tout et tout...
-Comme disait Nelson Goodaman : l'image et la représentation ne se définissent pas par la référence... rappelons ce que l'on disait du CD quand il est venu remplacé le vinyle, pas de chaleur, pas d'humanité, c'est froid, pas de vie...(même rhétorique avec l'acteur de théâtre dans sa présence vivante et l'acteur au cinéma, on se souvient du texte de Bazin); oui, sans doute, mais c'est aussi et aussi sans doute le mouvement nécessaire que produit toute technique, susciter l'idée de quelque chose de perdu (la vie perdue évidemment) mais ce perdu n'a jamais été présent, donné, c'est comme le paradis, il ne l'est, que d'avoir été perdu...la présence c'est l'effet de la trace, mémoire et promesse...comme disait ou pas bazin si je photographie quelqu'un je me le donne, je le garde, mais en même temps il est passé, perdu, fini... c'est la même chose avec le numérique, à un autre niveau, dans un autre régime des images, des politiques, des mondes... on se pose la question : où est la vie, l'homme, où est le passé...? ce sont les question d'ethan dans la prisonnière du désert, celle de don quichotte, mais à l'envers, car lui son drame c'est pas la disparition du réel, mais bien plutôt celle du virtuel; au fond, citant un autre nom, celui de Bovary, on pourrait dire que nous vivons un renversement de leur douleur, tristesse, alors qu'elle voulait du rêve, se tirer de la vie, de sa vie médiocre (lecture simpliste et moyenne; pardon rancière) nous ne cessons face au numérique, de pleurer la perte du réel... hélas, il en a toujours été ainsi (en gros, car il ne faut pas manquer de penser aussi les discontinuité; le numérique, c'est pas seulement du dessin animé; je pense.) ?
autre chose :
Que penses-tu de ce passage de la « Lettre ouverte à M. Paul Claudel... » des surréalistes : « Peu nous importe la création. Nous souhaitons de toutes nos forces que les révolutions, les guerres et les insurrections coloniales viennent anéantir cette civilisation occidentale dont vous défendez jusqu’en Orient la vermine et nous appelons cette destruction comme l’état de choses le moins inacceptable pour l’esprit. »
(1925, durant la guerre du Rif, où bien entendu est engagée la France, qui n'en manque pas une)
Cela te semble traduire, exprimer un masochisme, ou je ne sais pas...?
Moi, ce que je reproche au film, c'est de rester colonialiste, de faire d'un humain (occidental, donc usien) le héros, le saveur... etc.
En écho au "vivent les Rifains" de Breton, je dis "vivent les navis"
notons qu'aucun des surréalistes ne s'est métamorphosés en "Rifain" pour combattre les français et les espagnols
avec Nietzsche, on pourrait dire "pour nous l'homme est mort, nous voulons que vienne le na'vi"
-je crois que nous avons déjà discuté de toutes ces questions, le corps, l'image, l'identité, le destin des images... il faut nous lire autant que nous te lisons...au fond tu reproches à JC de n'avoir pas fait un film à la joseph conrad (et de son héros une espèce de lord jim)...
-Non, je l'ai dit et redit, je ne considère pas JC comme un grand metteur en scène, c'est juste un phénomène.. et pas non plus avatar comme un grand film, un bon film, c'est même pas même un film (mais l'annonce de l'avenir d'un certain cinéma); mais comme tous les phénomènes, ça donne à penser (peut-être que ça ne pense pas) plus que bien des films, et même des grands films de l'année...
-je trouve la navi dont le héros est amoureux très belle, et tout et tout...
-Comme disait Nelson Goodaman : l'image et la représentation ne se définissent pas par la référence... rappelons ce que l'on disait du CD quand il est venu remplacé le vinyle, pas de chaleur, pas d'humanité, c'est froid, pas de vie...(même rhétorique avec l'acteur de théâtre dans sa présence vivante et l'acteur au cinéma, on se souvient du texte de Bazin); oui, sans doute, mais c'est aussi et aussi sans doute le mouvement nécessaire que produit toute technique, susciter l'idée de quelque chose de perdu (la vie perdue évidemment) mais ce perdu n'a jamais été présent, donné, c'est comme le paradis, il ne l'est, que d'avoir été perdu...la présence c'est l'effet de la trace, mémoire et promesse...comme disait ou pas bazin si je photographie quelqu'un je me le donne, je le garde, mais en même temps il est passé, perdu, fini... c'est la même chose avec le numérique, à un autre niveau, dans un autre régime des images, des politiques, des mondes... on se pose la question : où est la vie, l'homme, où est le passé...? ce sont les question d'ethan dans la prisonnière du désert, celle de don quichotte, mais à l'envers, car lui son drame c'est pas la disparition du réel, mais bien plutôt celle du virtuel; au fond, citant un autre nom, celui de Bovary, on pourrait dire que nous vivons un renversement de leur douleur, tristesse, alors qu'elle voulait du rêve, se tirer de la vie, de sa vie médiocre (lecture simpliste et moyenne; pardon rancière) nous ne cessons face au numérique, de pleurer la perte du réel... hélas, il en a toujours été ainsi (en gros, car il ne faut pas manquer de penser aussi les discontinuité; le numérique, c'est pas seulement du dessin animé; je pense.) ?
autre chose :
Que penses-tu de ce passage de la « Lettre ouverte à M. Paul Claudel... » des surréalistes : « Peu nous importe la création. Nous souhaitons de toutes nos forces que les révolutions, les guerres et les insurrections coloniales viennent anéantir cette civilisation occidentale dont vous défendez jusqu’en Orient la vermine et nous appelons cette destruction comme l’état de choses le moins inacceptable pour l’esprit. »
(1925, durant la guerre du Rif, où bien entendu est engagée la France, qui n'en manque pas une)
Cela te semble traduire, exprimer un masochisme, ou je ne sais pas...?
Moi, ce que je reproche au film, c'est de rester colonialiste, de faire d'un humain (occidental, donc usien) le héros, le saveur... etc.
En écho au "vivent les Rifains" de Breton, je dis "vivent les navis"
notons qu'aucun des surréalistes ne s'est métamorphosés en "Rifain" pour combattre les français et les espagnols
avec Nietzsche, on pourrait dire "pour nous l'homme est mort, nous voulons que vienne le na'vi"
Borges- Messages : 6044
Re: Avatar - James Cameron
Hello Van Stratten,
Je m'interroge sur deux choses :
- je ne crois pas que tu aies répondu aux questions d'Adeline : pourquoi dire que les Na'vis ne sont pas humains ? Pourquoi dire que la bataille procure cette "jouissance de la mort des humains", et supposer que le spectateur prend son pied à faire la peau à la race humaine ? Il ne me semble pas du tout que ce soit l'enjeu.
- 2e point :
Changer ou non de corps, c'est effectivement tout sauf un dilemme ici, puisqu'affronter un dilemme, c'est avoir à choisir entre deux solutions également désastreuses.
Là, on se demande plutôt pourquoi Jake Sully hésite si longtemps à sauter le pas - précisément, parce qu'il a tout à gagner, rien à perdre, et que ce qu'il abandonne comme sa dépouille, ce n'est qu'un poids mort, qu'une simple "enveloppe", comme tu le dis justement (selon l'imaginaire machinique qui régit le film, où le corps ne détermine rien d'essentiel, et où on suppose que l'âme-pilote se transfère sans gain ni perte d'un navire à l'autre).
So, où est le problème de la métamorphose ? Mon hypothèse, c'est que ce n'est pas une métamorphose, et que Sully change de corps comme on change de voiture. Le problème du film n'est pas là.
Je m'interroge sur deux choses :
- je ne crois pas que tu aies répondu aux questions d'Adeline : pourquoi dire que les Na'vis ne sont pas humains ? Pourquoi dire que la bataille procure cette "jouissance de la mort des humains", et supposer que le spectateur prend son pied à faire la peau à la race humaine ? Il ne me semble pas du tout que ce soit l'enjeu.
- 2e point :
Pourquoi présupposer que c'est là que devrait être l'enjeu du film ? Ca, c'est l'enjeu de "Clones".Le problème, je le répète, c'est que Jake Sully abandonne bien lestement son humaine enveloppe. C'est là que le film aurait pu (aurait dû ?) puiser sa force : dans l'impossibilité même de ce renoncement, dans le dilemme passionnant qu'il offrait, problème d'identité qui symboliquement renvoie évidemment à la question de l'identité des images
...
son film aurait pourtant pu toucher (il le fait presque) à la question qu'il évite pourtant gaillardement : dans ce renoncement, dans cette "métamorphose" (Cameron a dû au moins survoler Ovide), que gagne le personnage, et que perd-il ?
Changer ou non de corps, c'est effectivement tout sauf un dilemme ici, puisqu'affronter un dilemme, c'est avoir à choisir entre deux solutions également désastreuses.
Là, on se demande plutôt pourquoi Jake Sully hésite si longtemps à sauter le pas - précisément, parce qu'il a tout à gagner, rien à perdre, et que ce qu'il abandonne comme sa dépouille, ce n'est qu'un poids mort, qu'une simple "enveloppe", comme tu le dis justement (selon l'imaginaire machinique qui régit le film, où le corps ne détermine rien d'essentiel, et où on suppose que l'âme-pilote se transfère sans gain ni perte d'un navire à l'autre).
So, où est le problème de la métamorphose ? Mon hypothèse, c'est que ce n'est pas une métamorphose, et que Sully change de corps comme on change de voiture. Le problème du film n'est pas là.
Eyquem- Messages : 3126
Re: Avatar - James Cameron
Bon, faisons une pause avec Howard Zinn :
Une histoire populaire, pages 67-68Généralement, les Indiens avaient été repoussés suffisamment loin. Un fait cependant pouvait inquiéter : des Blancs s'étaient enfuis pour rejoindre les Indiens ou avaient été capturés par les Indiens au cours de différents combats. Lorsque l'occasion se présentait de retourner chez eux, ils préféraient en général rester chez les Indiens. A l'inverse, les Indiens ne choisissaient jamais de demeurer avec les Blancs.
Crèvecoeur, un Français qui vécut en Amériquedurant presque 20 ans, raconte dans ses Lettres d'un cultivateur américain comment les enfants blancs capturés par les Indiens pendant la guerre de Sept Ans, puis retrouvés par leurs parents dans les tribus indiennes après quelques années, refusaient de quitter leurs nouvelles familles. "il doit y avoir dans leur organisation sociale, dit-il, quelque chose de particulièrement séduisant et de bien supérieur à tout ce qu'on pouvait mettre en avant chez nous. En effet, si un millier d'Européens sont aujourd'hui indiens, on ne trouve pas d'exemple d'un indigène ayant choisi de devenir européen".
Mais cela ne concernait que très peu d'individus...
Eyquem- Messages : 3126
Re: Avatar - James Cameron
Eyquem a écrit:Hello Van Stratten,
Je m'interroge sur deux choses :
- je ne crois pas que tu aies répondu aux questions d'Adeline : pourquoi dire que les Na'vis ne sont pas humains ? Pourquoi dire que la bataille procure cette "jouissance de la mort des humains", et supposer que le spectateur prend son pied à faire la peau à la race humaine ? Il ne me semble pas du tout que ce soit l'enjeu.
- 2e point :Pourquoi présupposer que c'est là que devrait être l'enjeu du film ? Ca, c'est l'enjeu de "Clones".Le problème, je le répète, c'est que Jake Sully abandonne bien lestement son humaine enveloppe. C'est là que le film aurait pu (aurait dû ?) puiser sa force : dans l'impossibilité même de ce renoncement, dans le dilemme passionnant qu'il offrait, problème d'identité qui symboliquement renvoie évidemment à la question de l'identité des images
...
son film aurait pourtant pu toucher (il le fait presque) à la question qu'il évite pourtant gaillardement : dans ce renoncement, dans cette "métamorphose" (Cameron a dû au moins survoler Ovide), que gagne le personnage, et que perd-il ?
Changer ou non de corps, c'est effectivement tout sauf un dilemme ici, puisqu'affronter un dilemme, c'est avoir à choisir entre deux solutions également désastreuses.
Là, on se demande plutôt pourquoi Jake Sully hésite si longtemps à sauter le pas - précisément, parce qu'il a tout à gagner, rien à perdre, et que ce qu'il abandonne comme sa dépouille, ce n'est qu'un poids mort, qu'une simple "enveloppe", comme tu le dis justement (selon l'imaginaire machinique qui régit le film, où le corps ne détermine rien d'essentiel, et où on suppose que l'âme-pilote se transfère sans gain ni perte d'un navire à l'autre).
So, où est le problème de la métamorphose ? Mon hypothèse, c'est que ce n'est pas une métamorphose, et que Sully change de corps comme on change de voiture. Le problème du film n'est pas là.
-N'oublions pas que le héros est d'abord là, pour retrouver ses jambes grâce au sous qu'il gagnerait...opération trop coûteuse qu'il ne pourrait pas se payer avec sa "retraite" d'ancien marine...
-il faut affiner le rapport "âme", "corps", "machine"...; on semble assez rétif à penser le double sens du mot "avatar; "l'âme", c'est une énergie qui s'incarne, meurt, transmigre, c'est dit dans le film...ce n'est donc pas la théorie de l'âme-pilote...bien que tout se passe, en effet, comme si “L’âme était dans le corps comme le pilote dans son navire”...
-pour Zinn (qui idéalise les choses, évidemment) on se souviendra que john ford dans la prisonnière du désert s'était inspiré d'une histoire dite vraie, changée sur bien des points, dont la fin, la vraie "Debbie" ne voulait pas revenir chez les Blancs; chez ford on voit aussi des blanches qui ne veulent pas revenir chez les Blancs (dans "les deux cavaliers") mais c'est par honte, d'être devenues indiennes, d'avoir couchées avec des indiens... bref de n'être plus des êtres vraiment humaines...
Borges- Messages : 6044
Re: Avatar - James Cameron
Borges a écrit:
autre chose :
Que penses-tu de ce passage de la « Lettre ouverte à M. Paul Claudel... » des surréalistes : « Peu nous importe la création. Nous souhaitons de toutes nos forces que les révolutions, les guerres et les insurrections coloniales viennent anéantir cette civilisation occidentale dont vous défendez jusqu’en Orient la vermine et nous appelons cette destruction comme l’état de choses le moins inacceptable pour l’esprit. »
(1925, durant la guerre du Rif, où bien entendu est engagée la France, qui n'en manque pas une)
Cela te semble traduire, exprimer un masochisme, ou je ne sais pas...?
Moi, ce que je reproche au film, c'est de rester colonialiste, de faire d'un humain (occidental, donc usien) le héros, le saveur... etc.
En écho au "vivent les Rifains" de Breton, je dis "vivent les navis"
notons qu'aucun des surréalistes ne s'est métamorphosés en "Rifain" pour combattre les français et les espagnols
avec Nietzsche, on pourrait dire "pour nous l'homme est mort, nous voulons que vienne le na'vi"
Si on s'éloigne un peu des grands fauves pour un moment, les surréalistes c'est aussi une certaine idée de la couleur, contre la (seconde) guerre..l'importance du rôle des yeux..
Invité- Invité
Re: Avatar - James Cameron
À la relecture (je suis tout de même repassé dans mes traces), tout de même, une idée qui surgit de ces lignes sans que je me sois vraiment aperçu que je l’y avais mise : idée que ce qui manquerait au film de Cameron, ce serait précisément de se confronter au processus de voration. Samedi matin un anthropologue invité par ce « bon français » de Finkielkraut rappelait au sujet du film que les Navis n’étaient pas anthropophages. Pour lui, la remarque justifiait de ne pas s’intéresser une seconde de plus au film : « Les Indiens de Cameron ne sont pas crédibles, puisqu’ils sont aussi inoffensifs que des Schtroumpfs. » Un film pas crédible, certes, et qui ne tient pas debout ; mais l’idée de voration est pourtant présente dans le film, dans son inconscient, comme dans celui de Cameron et dans celui de tout occidental, coupable d’une désormais mythique colonisation. Il est singulier que l’idée d’un être qui en dévore un autre ait surgi un peu plus haut à propos de John Ford : c’est comme si lui, tout au contraire, n’avait pas fait l’impasse sur cette violence fondatrice, tâchant de la prendre à bras le corps, et avant de la refuser, s’y mesurant, de toute la stature de John Wayne, et du cadre cinématographique (ici à l’envergure du VistaVision). À l’opposé, Avatar vise la pureté enfin reconquise de l’être. Le fait qu’il rêve un nouvel âge d’or est un autre problème : il est largement suffisant de constater d’abord que la « mue » du personnage, qui échange une enveloppe corporelle contre une autre, se passe dans une prétendue douceur, nimbée de mauve, de fuchsia et d’une luminosité toute céleste (encore et toujours, morale catho-maso comme unique horizon de ce film).
La jouissance de tuer les humains vient donc d’un acte primordial de voration : c’est cet acte que Cameron refoule absolument par tout son réseau de symboles de pureté et d’état de nature (de l’arbre-mère aux dinosaures, de la musique originelle qui ruine la bande-sonore, jusqu’au packaging esthétique du film qui en fait visuellement un marshmallow géant). C’est ce refoulement qui fait le gros manque, manque capital du film : refoulement tant du côté de « l’auteur » du film, que pour son spectateur, et la meilleure preuve en est la réaction des abonnés du forum des Spectres à la publication de mon propos, qui ne réagissent pas seulement de façon véhémente, mais qui s’abstiennent purement de répondre.
En même temps je commence à être persuadé que cet acte « anthropophage » (à prendre entre guillemets, puisque les Navis sont d’une espèce autre qu’humaine) est au fondement même du succès du film, et de la fascination qu’il exerce : dernier caprice écolo-catho-masochiste d’une culture occidentale devenue omniprésente, mais comme frappée de stupeur devant la contemplation de sa propre image. Au sens propre : par ce film, et dans ce film, l’humain se représente, se montre et se voit lui-même, et il se fait horreur. Dans Avatar, le spectateur se fait horreur à lui-même au point de préférer se dévorer. Non pas s’entre-dévorer, mais s’auto absorber : non plus l’anthropophagie, mais l’autophagie.
Le problème est que la seule réponse que trouve Cameron ne tient pas une seconde : pour se racheter une âme, l’humain Jake Sully croit qu’il lui suffit de se racheter une image : comme si le problème était un pur problème d’image, comme si changer d’image était le seul souci. C’est le plus grand tort du film que de passer toute question morale sous silence.
Or l’Avatar, évidemment, n’est et ne saurait être autre chose qu’une énième représentation de l’homme par lui-même. Une image de l’homme : légèrement anamorphosée, légèrement grossie ou idéalisée, mais avant tout : une image de l’homme par lui-même. C’est tout. Mais c’est déjà pas mal. Ça aurait pu être un point de départ. Dans le film, c’est un point d’arrivée. Preuve que ce film est idiot.
Alors pourquoi tant écrire au sujet d’Avatar ? Parce qu’il dit où nous en sommes, nous grands occidentaux mondialisés, et désormais écolos, où nous en sommes de notre rapport à notre image, et partant, de notre rapport à l’image tout court. Donc, nous attendons tout de l’image. Nous attendons qu’elle rachète notre âme : l’image, dans Avatar, est la véritable religion, au-delà des croyances cucul-écolo-la-praline, l’image est la religion censée sauver l’âme errante et coupable de l’ex-colon qui se cache en chacun de nous : en devenant bleu, en s’élevant à trois mètres de haut, en voyant son menton s’allonger comme le nez Pinocchio, Jake Sully se refait une virginité, et croit se racheter une conscience. Bon, c’est toujours un peu court.
On m’objectera, si l’on veut, que Jake sully ne change pas seulement d’image, mais de corps : ainsi sa jouissance sensorielle à retrouver l’usage de ses jambes, mais aussi tout un monde sensoriel, olfactif (mais bizarrement asexué… passons) ne montre-t-elle pas qu’il gagne d’abord un corps dans l’opération ?
Oui mais quel corps ? Elles sont où, vos sensations, quand vous jouez à n’importe quel jeu en ligne, et que vous vous choisissez un avatar ? L’Avatar, sur les forums en réseau numérique, est-ce vraiment un corps, ou n’est pas justement une image, une autre image de soi-même ? Purement une image. Une nouvelle image derrière laquelle on croit pouvoir se racheter. Et chaque participant de ce forum d’y aller de sa petite "image perso", de sa petite « icône », pour mieux alléguer sa foi dans la nouvelle religion : celle de l’image.
Bon, à voir, à (re)voir, évidemment.
La jouissance de tuer les humains vient donc d’un acte primordial de voration : c’est cet acte que Cameron refoule absolument par tout son réseau de symboles de pureté et d’état de nature (de l’arbre-mère aux dinosaures, de la musique originelle qui ruine la bande-sonore, jusqu’au packaging esthétique du film qui en fait visuellement un marshmallow géant). C’est ce refoulement qui fait le gros manque, manque capital du film : refoulement tant du côté de « l’auteur » du film, que pour son spectateur, et la meilleure preuve en est la réaction des abonnés du forum des Spectres à la publication de mon propos, qui ne réagissent pas seulement de façon véhémente, mais qui s’abstiennent purement de répondre.
En même temps je commence à être persuadé que cet acte « anthropophage » (à prendre entre guillemets, puisque les Navis sont d’une espèce autre qu’humaine) est au fondement même du succès du film, et de la fascination qu’il exerce : dernier caprice écolo-catho-masochiste d’une culture occidentale devenue omniprésente, mais comme frappée de stupeur devant la contemplation de sa propre image. Au sens propre : par ce film, et dans ce film, l’humain se représente, se montre et se voit lui-même, et il se fait horreur. Dans Avatar, le spectateur se fait horreur à lui-même au point de préférer se dévorer. Non pas s’entre-dévorer, mais s’auto absorber : non plus l’anthropophagie, mais l’autophagie.
Le problème est que la seule réponse que trouve Cameron ne tient pas une seconde : pour se racheter une âme, l’humain Jake Sully croit qu’il lui suffit de se racheter une image : comme si le problème était un pur problème d’image, comme si changer d’image était le seul souci. C’est le plus grand tort du film que de passer toute question morale sous silence.
Or l’Avatar, évidemment, n’est et ne saurait être autre chose qu’une énième représentation de l’homme par lui-même. Une image de l’homme : légèrement anamorphosée, légèrement grossie ou idéalisée, mais avant tout : une image de l’homme par lui-même. C’est tout. Mais c’est déjà pas mal. Ça aurait pu être un point de départ. Dans le film, c’est un point d’arrivée. Preuve que ce film est idiot.
Alors pourquoi tant écrire au sujet d’Avatar ? Parce qu’il dit où nous en sommes, nous grands occidentaux mondialisés, et désormais écolos, où nous en sommes de notre rapport à notre image, et partant, de notre rapport à l’image tout court. Donc, nous attendons tout de l’image. Nous attendons qu’elle rachète notre âme : l’image, dans Avatar, est la véritable religion, au-delà des croyances cucul-écolo-la-praline, l’image est la religion censée sauver l’âme errante et coupable de l’ex-colon qui se cache en chacun de nous : en devenant bleu, en s’élevant à trois mètres de haut, en voyant son menton s’allonger comme le nez Pinocchio, Jake Sully se refait une virginité, et croit se racheter une conscience. Bon, c’est toujours un peu court.
On m’objectera, si l’on veut, que Jake sully ne change pas seulement d’image, mais de corps : ainsi sa jouissance sensorielle à retrouver l’usage de ses jambes, mais aussi tout un monde sensoriel, olfactif (mais bizarrement asexué… passons) ne montre-t-elle pas qu’il gagne d’abord un corps dans l’opération ?
Oui mais quel corps ? Elles sont où, vos sensations, quand vous jouez à n’importe quel jeu en ligne, et que vous vous choisissez un avatar ? L’Avatar, sur les forums en réseau numérique, est-ce vraiment un corps, ou n’est pas justement une image, une autre image de soi-même ? Purement une image. Une nouvelle image derrière laquelle on croit pouvoir se racheter. Et chaque participant de ce forum d’y aller de sa petite "image perso", de sa petite « icône », pour mieux alléguer sa foi dans la nouvelle religion : celle de l’image.
Bon, à voir, à (re)voir, évidemment.
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
mais quelle est ta question, au juste ?la meilleure preuve en est la réaction des abonnés du forum des Spectres à la publication de mon propos, qui ne réagissent pas seulement de façon véhémente, mais qui s’abstiennent purement de répondre.
Pour le reste, je suis plus que circonspect devant les catégories que tu utilises. En particulier, la critique sous-jacente que tu mènes contre la "repentance occidentale" vis-à-vis de son passé colonial n'est pas très bien engagée, pour dire le moins.
Un seul exemple :
La colonisation, c'est pas ce que j'appelle un mythe.coupable d’une désormais mythique colonisation
Par ailleurs, j'ai toujours pas compris ce que tu appelles "l'image".
Purement une image. Une nouvelle image derrière laquelle on croit pouvoir se racheter. Et chaque participant de ce forum d’y aller de sa petite "image perso", de sa petite « icône », pour mieux alléguer sa foi dans la nouvelle religion : celle de l’image.
Eyquem- Messages : 3126
Re: Avatar - James Cameron
Jean Baudrillard, Le Mal ventriloque, p. 48 :
Toute cette révolution électronique, cybernétique, n’est peut-être qu’une ruse animale que l’homme a trouvée pour échapper à lui-même, en même temps qu’à la responsabilité monstrueuse à laquelle il est désormais surexposé, dans un contexte devenu mondial.
p. 49 :
Disparition du sujet, par exemple, qui est un peu l’image en miroir de celle du Réel. En effet, le Sujet se perd ─ cette instance de volonté, de liberté, de représentation, le Sujet du pouvoir, du savoir, de l’histoire, celui-là disparaît, au profit d’une subjectivité diffuse, flottante et sans substance ─ immense surface de réverbération d’une conscience vide, désincarnée ─ toutes choses rayonnant d’une subjectivité sans objet ─ chaque monade, chaque molécule prise au piège d’un narcissisme définitif, d’un retour-image perpétuel. Telle est l’image d’une subjectivité de fin du monde, d’où le sujet en tant que tel a disparu ─ victime de cette péripétie fatale à laquelle, rien dans un sens, ne s’oppose plus, ni l’objet, ni le réel, ni l’Autre.
Toute cette révolution électronique, cybernétique, n’est peut-être qu’une ruse animale que l’homme a trouvée pour échapper à lui-même, en même temps qu’à la responsabilité monstrueuse à laquelle il est désormais surexposé, dans un contexte devenu mondial.
p. 49 :
Disparition du sujet, par exemple, qui est un peu l’image en miroir de celle du Réel. En effet, le Sujet se perd ─ cette instance de volonté, de liberté, de représentation, le Sujet du pouvoir, du savoir, de l’histoire, celui-là disparaît, au profit d’une subjectivité diffuse, flottante et sans substance ─ immense surface de réverbération d’une conscience vide, désincarnée ─ toutes choses rayonnant d’une subjectivité sans objet ─ chaque monade, chaque molécule prise au piège d’un narcissisme définitif, d’un retour-image perpétuel. Telle est l’image d’une subjectivité de fin du monde, d’où le sujet en tant que tel a disparu ─ victime de cette péripétie fatale à laquelle, rien dans un sens, ne s’oppose plus, ni l’objet, ni le réel, ni l’Autre.
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
LES SPECTRES ET LE BOX OFFICE
Vu sur le site : Topic AVATAR, 6100 visites à cette heure, 246 réponses : sans aucun doute le sujet le plus consulté à ce jour. Nous sommes tous des bouffeurs de pop corns ! Qu'on se le dise !
Mais Avatar, sous certains aspects (à condition, bien sûr, d'aller au-delà des faiblesses du récit et des intentions), ce n'est pas le simulacre de Baudrillard, ni le pur spectacle et le règne de la transparence de Comolli. En tous cas, il n'est pas entièrement réductible sous la bannière de ces deux auteurs (c'est un film nouveau (?) sur le rapport au virtuel je crois, et la 3D n'y est pour rien)
Le_comte- Messages : 336
Re: Avatar - James Cameron
Trop (d’)humain, marre de l’humain ?
Mon écriture au sujet d’Avatar commençait déjà par là. Film qui n’a pas de sujet, peut-être, mais dont le sujet refoulé (et ô combien présent) est l’inhumain. Film inhumain : est inhumain, à première vue, ce culte de la nature, en d’autres termes cette dissolution de l’humain dans la nature, dans un vortex naturel tout à fait improbable, mais pourtant désiré (par les personnages, par le cinéaste, par le spectateur du film ?). Comme si l’on pouvait lutter contre l’inhumanité par l’inhumanité, lutter contre l’asservissement (d’un peuple à un autre) par l’asservissement (de l’individu à la nature).
Ne s’agit-il pas dans le fond, d’en finir avec l’humanisme, purement et simplement ? Les Nazis ne souhaitaient pas autre chose.
Absorption de l’autre : le héros est phagocyté par l’autre, il s’y fond, se niant lui-même, abandonnant son humaine condition, jugée périmée, obsolète, dépassée. Mais pour aller où ? Est-ce qu’on a le choix ? Est-ce que le suicide ne reste pas la seule véritable issue à notre humaine condition ? D’accord, il s’agit d’une utopie, mais que dit-elle, cette utopie ? Elle fonde un nouveau panthéisme new age, qui fait la symbiose entre technologie numérique et environnement naturel. Est-ce qu’on n’a pas suffisamment de religions comme ça, sans en ajouter une encore plus fumeuse que les autres ?
Finalement c’est ce qui distingue dans le film les humains des Navis : les uns ont perdu la foi (ils n’ont même plus de conscience morale), les autres non. La foi ne s’explique pas : elle n’a pas besoin de justification, ou d’assise rationnelle. L’immaculée conception, on y croit, ou on n’y croit pas. Dans le mythe grec comme dans la bible, le déluge est envoyé par un Dieu vengeur pour renouveler l’humanité, et la « purger » de ses mauvais penchants : après tout, c’est le même processus qui est à l’œuvre dans Avatar. Alors : qu’est-ce qui se joue ici de différent ? À partir de là, il faut chercher. Peut-être que la différence tient à un "amoralisme fatal" : "une ruse animale que l’homme a trouvée pour échapper à lui-même, en même temps qu’à la responsabilité monstrueuse à laquelle il est désormais surexposé."
Religion des images = religion amorale (dans laquelle les travellings ne sont plus, ne peuvent plus être, une affaire de morale ; dans laquelle la colonisation, notre responsabilité, n'est plus qu'un mythe comme un autre).
Mon écriture au sujet d’Avatar commençait déjà par là. Film qui n’a pas de sujet, peut-être, mais dont le sujet refoulé (et ô combien présent) est l’inhumain. Film inhumain : est inhumain, à première vue, ce culte de la nature, en d’autres termes cette dissolution de l’humain dans la nature, dans un vortex naturel tout à fait improbable, mais pourtant désiré (par les personnages, par le cinéaste, par le spectateur du film ?). Comme si l’on pouvait lutter contre l’inhumanité par l’inhumanité, lutter contre l’asservissement (d’un peuple à un autre) par l’asservissement (de l’individu à la nature).
Ne s’agit-il pas dans le fond, d’en finir avec l’humanisme, purement et simplement ? Les Nazis ne souhaitaient pas autre chose.
Absorption de l’autre : le héros est phagocyté par l’autre, il s’y fond, se niant lui-même, abandonnant son humaine condition, jugée périmée, obsolète, dépassée. Mais pour aller où ? Est-ce qu’on a le choix ? Est-ce que le suicide ne reste pas la seule véritable issue à notre humaine condition ? D’accord, il s’agit d’une utopie, mais que dit-elle, cette utopie ? Elle fonde un nouveau panthéisme new age, qui fait la symbiose entre technologie numérique et environnement naturel. Est-ce qu’on n’a pas suffisamment de religions comme ça, sans en ajouter une encore plus fumeuse que les autres ?
Finalement c’est ce qui distingue dans le film les humains des Navis : les uns ont perdu la foi (ils n’ont même plus de conscience morale), les autres non. La foi ne s’explique pas : elle n’a pas besoin de justification, ou d’assise rationnelle. L’immaculée conception, on y croit, ou on n’y croit pas. Dans le mythe grec comme dans la bible, le déluge est envoyé par un Dieu vengeur pour renouveler l’humanité, et la « purger » de ses mauvais penchants : après tout, c’est le même processus qui est à l’œuvre dans Avatar. Alors : qu’est-ce qui se joue ici de différent ? À partir de là, il faut chercher. Peut-être que la différence tient à un "amoralisme fatal" : "une ruse animale que l’homme a trouvée pour échapper à lui-même, en même temps qu’à la responsabilité monstrueuse à laquelle il est désormais surexposé."
Religion des images = religion amorale (dans laquelle les travellings ne sont plus, ne peuvent plus être, une affaire de morale ; dans laquelle la colonisation, notre responsabilité, n'est plus qu'un mythe comme un autre).
Van Stratten- Messages : 165
Re: Avatar - James Cameron
Salut Van Stratten,
Je me contente de citer ceci :Ne s’agit-il pas dans le fond, d’en finir avec l’humanisme, purement et simplement ? Les Nazis ne souhaitaient pas autre chose.
http://www.nonfiction.fr/article-888-entretien_avec_alain_badiou__3__la_subjectivite_du_sarkozysme.htmAlain Badiou : Il y a un énoncé extraordinaire de Philippe Lacoue-Labarthe, que j’ai plusieurs fois commenté, qui est : "Comprenons bien que le nazisme est un humanisme." On peut très légitimement appeler humanisme ce qui fonde une politique sur une définition rigoureuse de l’homme. Or le nazisme définit exactement ce qu’est l’homme, ce qu’est le surhomme, ce quest le sous-homme et en tire implacablement les conséquences.
Eyquem- Messages : 3126
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