The Texans" ( James Hogan, 1938)
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The Texans" ( James Hogan, 1938)
Dr. Apfelgluck a écrit:"The Texans" de James Hogan, 1938
Le début du film fait faussement croire qu'il se positionne dans un angle "pro-sudiste". Le texte d'introduction, malgré le fait qu'il mentionne que la Sécession fut gagné grâce à un combat pour une "cause noble" précise que c'est actuellement la loi martiale, le gros bordel, que le Nord abuse de son pouvoir durant la reconstruction.
Les images ne tardent à venir, les premiers plans montrant des soldats de l'Union en train de saisir meubles, marchandises et denrées dans une ville du Texas. Des affiches sont placardées partout, dictant ce que l'on ose faire, ce qui est interdit. Des aigles de l'Union traînent un peu partout. On voit également des cartes, mais elles ne sont pas montrés dans leur intégralité. Symbole d'une nation encore déchirée. Des ex-soldats sudistes, amassés sur le port, ont piètres allures. Ils pataugent en guenilles dans la boue créée par les vas-et-viens incessants. Ils sont réquisitionnés par les troupes de l'Union pour décharger des bateaux, le tout sous l'oeil de soldats Noirs. "Tant que tu portes cet uniformes, tu es un ennemi, un traître. Tu ne mérite pas de droits" dit en substance un surveillant Yankee à un Johnny Reb qui se plaint de son sort. Ce dernier lui rétorque "Mais on a plus que cela à se mettre sur le dos !". Randolph Scott, témoin de la scène, comprend qu'il lui faut quitter très rapidement son uniforme pour endosser des habits civils. Ce qu'il arrive à faire évidemment. Contre quelques km2 de terrains (l'argent du Sud ne vaut évidemment plus que des clopinettes), il se procure un costume qui est trop petit pour lui. "J'ai pas d'autre tailles, désolé". Une fois dans la rue, il se fera vite moquer de lui par ses anciens compagnons d'armes. Joan Bennett, quand à elle, est au départ la Southern Belle typique. Femme du Sud qui ne manque pas de courage et qui est en contact avec un mystérieux fiancé qui espère mettre sur pied une nouvelle armée au Mexique avec l'aide de l'Empereur Maximillien afin de mettre les Yankees dehors. Elle l'aide d'ailleurs en lui fournissant des armes cachés dans des caisses de pièces détachées de machines agricoles. De la terre et des flingues, this is America.
Mais Scott est très vite anti-Tarantino, pour lui la vengeance c'est pas bien. Il faut se réconcilier avec le Nord, oublier les illusions perdues et reformer très vite une grande nation. Le parcourt initiatique sera de convoyer le bétail de la belle sudiste du Texas à Abilene, Kansas, pour échapper à la saisit du troupeau par l'armée. Le troupeau se veut le représentant de la "vraie Amérique", pas celle du Sud ou de la bureaucratie du Nord, mais celle des pionniers et de la guerre d'Indépendance. Le film y fait d'ailleurs plusieurs fois références lors du voyage. La grand-mère de Joan Bennett, sudiste acharnée au début du film, se rappelle de ses années de jeunesse (elle a accouchée dans un chariot, tout un symbole) dans une Amérique libre. Elle sera très vite "réconciliée". Il reste cependant quelques endurcit à la cause sudiste dans le convoi, mais ils sont montrés comme étant plutôt des baltringues. L'un d'eux est un vétéran unijambiste et assez âgé portant toujours sa casquette de "bon rebelle". Il la cache d'ailleurs a un moment dans son pantalon, de peur d'être surprit par une patrouille de cavalerie, et simulera un mal de ventre. Le Sud est devenu le mal qu'il faut purger, évacuer. Le vieux vétéran est d'ailleurs tout fou quand il s'agit de descendre des Indiens. Il s'écrit d'ailleurs "Waaaahouuu, ca me rappelle Gettysburg ! Youppie !" Ce qui est autant con que d'entendre un ancien de la guerre de 1870 hurler "Wouahhhhh ca me rappelle Sedan ! Le bon vieux temps !" De toute façon, comme c'était prévu, il ne survivra pas au voyage et sera tué par une flèche indiennes.
Parlons-en d'eux, d'ailleurs. Enfin parler... eux ne parlent pas. Ils ne communiquent que par langue des signes. Suite au refus de la Southern Belle de leur donner une de ses vaches, ils vont surgir de nulle part (un grand classique du Western, les Indiens sortent littéralement de la terre) et attaquer le convoi. Heureusement la cavalerie, qui est censé poursuivre Scott et Bennett, vient à la rescousse. Plus tard, suite à l'échec de l'attaque en question, les Indiens vont poursuivre le convoi et incendier leur propre terre. On assiste alors a une déferlante de plans montrant les vaches/symboles paniquées échapper aux flammes. La terre brûlée, stratégie utilisé par Sherman lors de sa descente sur Atlanta en 1864. Ca sera tout pour les Indiens, on ne les verra plus par la suite. J'ai oublié de mentionner que la ville du départ du convoi se nomme Indianola. Une ville où, selon la grand-mère du convoi, il fait mauvais et où tout est infesté de microbes.
Le convoi va braver les éléments, on a droit à toutes les tempêtes possibles et inimaginables : neige, sable etc...
Mais la volonté du "peuple" sera la plus forte et est inébranlable même faces aux éléments déchaînés. Le choix de faire arriver le convoi au Kansas, destination finale de la réconciliation, n'est pas anodin quand on sait l'importance qu'a eux cet Etat très divisé lors du conflit. Abilene est également une des premières villes proches de la "Frontière" a acueillir le cheval de fer. Une grande révolution pour Randolph Scott qui espère par ce biais vendre plus facilement les vaches au Nord. Quand ils arrivent, les travaux de la voie ferré sont en suspens. Il n'y a plus d'argent pour financer le ravitaillement en nourriture des ouvriers. Qu'à cela ne tienne, Scott et la Southern Belle (qui est devenu entre temps pro-réconciliation) leur offre des têtes du troupeau. Les vaches courent alors dans Abilene. Chemin de fer très important, car il va aider à l'unification totale et finale des USA ; du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest. La cartographie incomplète du début n'est plus qu'un vague souvenir.
Joan Bennett quittera finalement son prétendant fanatique sudiste (qui va rejoindre le KKK...) pour aller "chasser" avec Scott. Même l'officier de l'Union qui était en charge de les poursuivre va "les pardonner et fermer les yeux". Il est d'ailleurs, durant tout film, tiraillé entre son devoir envers l'Etat appareil de capture et ses convictions.
Le Mexique est présent tout le long du film : un mexican, ex-ouvrier agricole de Bennett et semble t-il un peu abruti/attardé, se fera tuer également par les Indiens lors du périple. Un vacher, dont un dirait qu'il est métisse blanc/Indiens, parle de la guerre hispano-américaine alors que le convoi se réfugie derrière le Rio Grande, le temps d'une nuit, pour échapper à la cavalerie. Et puis le film s'appelle The Texans quand même, les "braves" qui se sont combattus contre Santa Ana (Scott et son acolyte sont trappeurs à la base et s'habillent en Davy Crockett).
Borges- Messages : 6044
Re: The Texans" ( James Hogan, 1938)
erwan a écrit:beau texte Doc.
j'avais vu ce film il y a quelques mois, sans enthousiasme particulier si ce n'est pour voir Bennett ailleurs que chez Lang; tu en soulignes très bien l'écriture signifiante au niveau politique. J'ai appris plein de choses
Re: The Texans" ( James Hogan, 1938)
godard : "on dit un vieux film, mais pas un vieux livre..." On dira rarement parlant de "madame bovary", par exemple, "j'ai lu un vieux livre", mais on dira, parlant d'un film en noir et blanc des années 1930, même si c'est beaucoup moins vieux : "j'ai vu un vieux film".
Borges- Messages : 6044
Re: The Texans" ( James Hogan, 1938)
parce que le film reste associé à une époque, des vêtements, des coupes de cheveux, des téléphones des genres, des qualités technique comme la couleur, des ambiances et que la télé ne proposent pas grand chose de vieux ...en revanche on est parfois surpris le l'écriture moderne d'un livre écrit il y a longtemps.
à l'aveugle on doit pouvoir repérer l'époque d'un film, l'époque d'un livre pas toujours.
à l'aveugle on doit pouvoir repérer l'époque d'un film, l'époque d'un livre pas toujours.
Invité- Invité
Re: The Texans" ( James Hogan, 1938)
Plan très sarcastique. C'est un moment charnier du film. Bennett, malgré sa tonitruante déclaration, commence à se défaire de ses idéaux confédérés (elle a revêtue les habits d'homme pionner contre les belles robes du Sud à l'arrière-plan, elle retourne aux origines de l'Amérique que prônent sans cesse le film). C'est d'ailleurs à ce moment qu'elle décide de pousser jusqu'au Kansas plutôt que de rejoindre la mystérieuse armée sudiste planquée au Mexique.
Les robes servent également de symbole d'opposition de classe. Quand Bennett rencontre Scott pour la première fois, sur les docks de Indianola, elle porte une magnifique robe immaculée alors que ce dernier est en guenille et plein de boue. Opposition entre les "riches planqués" et les "pauvres soldats" auquel on a ponctionné quatre ans de vie (c'est Scott qui le dit). Image d'un Sud riche et aristocrate qui s'amuse pendant que les autres s'entretuent.
Patrick Alliot in "La belle vie durant la guerre civile"Même aux pires moments de la guerre et pendant le siège de Richmond, les bals en particuliers sont très répandus et remportent un immense succès, y compris auprès de nombreux officiers, et parfois soldats, en permission. Des centaines de jeunes hommes et de jeunes femmes tourbillonnent dans les salons : « Les plaisirs sociaux sont abondants » note Henry Kyd Douglas, assistant adjudant general de la brigade Stonewall « à un moment ou la vie est si incertaine, les divertissements, les danses, les mariages sont légions. Le son de la musique de danse se mêle au grondement des canons ennemis. Entrer dans un salon pour une valse avec son sabre au coté et ses éperons aux pieds, tandis que votre ordonnance au dehors, tient votre monture prête à la première alerte, n'est pas une chose rare. Passer la moitié de la nuit en selle et l'autre moitié à s'amuser n'a rien d'étrange. » A ceux qui s'offusquent de voir danser certains, le lieutenant Owen de la Washington Artillery, répond « qui peux dire combien d'entre nous rempliront bientôt une tombe ? ».
Même si c'est fugitif, Hogan semble montrer que c'est pas pareil chez les anciens combattants nordistes. Ils ont tous été dans le même panier : Noirs, riches manipulateurs, marchands, officier ambitieux, petits paysans etc... Certes il y a des véreux dans le lot, mais ils ont tous combattus pour "l'idéal", la "noble cause" dont parle le texte d'introduction du film. C'était l'argument majeur de la propagande de l'Union à l'époque, d'ailleurs : il y n'y pas de planqués au nord de la Mason-Dixon Line, c'est connu...
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: The Texans" ( James Hogan, 1938)
slimfast a écrit:parce que le film reste associé à une époque, des vêtements, des coupes de cheveux, des téléphones des genres, des qualités technique comme la couleur, des ambiances et que la télé ne proposent pas grand chose de vieux ...en revanche on est parfois surpris le l'écriture moderne d'un livre écrit il y a longtemps.
à l'aveugle on doit pouvoir repérer l'époque d'un film, l'époque d'un livre pas toujours.
c'est l'argument qui m'était venu en tête il y a quelques années en entendant, ou retrouvant les propos de Godard.
Re: The Texans" ( James Hogan, 1938)
oui mais voila la force de Godard est ne pas argumenter : il fait comme les films, il dit, il montre se justifiant rarement. C'est son côté fascinant.
Son autre côté fascinant est de prélever à droite et a gauche des images et d'en faire des rapprochements qui ne sont qu'à lui. Ou même des mots et des images : quand dans la salle de montage du Scénario de Passion il rapproche le mouvement de caméra et le mouvement de grève, ça prend un tour tellement audacieux que ça en devient une évidence.
Son autre côté fascinant est de prélever à droite et a gauche des images et d'en faire des rapprochements qui ne sont qu'à lui. Ou même des mots et des images : quand dans la salle de montage du Scénario de Passion il rapproche le mouvement de caméra et le mouvement de grève, ça prend un tour tellement audacieux que ça en devient une évidence.
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