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La prisonnière du désert

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Message par Invité Mar 8 Jan 2013 - 18:41

c'est sûr qu'avec une mexicaine les questions ne se posent plus et que l'ordre du monde fordien preneur autant que faiseur d'opinions, était préservé.
je ne vois pas, plus, d'arguments contraires. mais c'est moche : on voudrait que ce soit beau, puis, c'est laid !

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Message par Invité Mer 9 Jan 2013 - 22:12

Salut Borges,
pour te répondre point par point :

-"mes" questions sont déjà une réponse à "ta" question. Ça ne sert à rien de dire que la Mexicaine est mexicaine, c'est juste un truisme si on n'explique pas ce que veut dire mexicaine dans le film. En tous cas, si on veut essayer de comprendre le film, parce qu'on peut préférer le gloser, tout simplement, et c'est bien aussi, mais c'est autre chose et il importe de savoir ce qu'on essaie de faire. Comme tu l'as dit plus haut, le sens d'un énoncé est dépendant de son contexte. L'affirmation qu'elle est mexicaine n'a pas d'autre sens que celui que lui donne le contexte où elle est faite. Il faut la déplier en fonction, annoncer un référent, et s'y tenir. En l'occurrence, si on veut juger de la teneur politique interne au film, si on veut pouvoir dire que le film est puant politiquement, il faut déplier l'origine mexicaine selon ce qu'elle recouvre dans le film. Ce sont mes questions. Ou alors, on peut aussi se demander quel est le sens du film depuis sa réception à sa sortie, et il faut déplier mexicaine par rapport à l'idéologie dominante de l'époque, si tant est qu'il y ait eu une telle idéologie unifiée. On parle des effets du film dans une situation historique donnée, mais on ne dit rien sur son contenu ou la façon dont il fonctionne. Dire qu'elle est mexicaine et s'en tenir là, même sous la forme d'une question, ce n'est qu'une généralité qui n'amène rien du point de vue de la compréhension.


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Message par Invité Mer 9 Jan 2013 - 22:14

-la pensée majoritaire n'est la pensée de personne, c'est surtout une réponse à ce que tu écris plus haut :
"un film c'est pas un ensemble de personnages, d'opinions, un univers carnavalesque sans règle, ni centre; le film classique rassemble toujours la dispersion du monde autour d'un personnage, d'un point de vue légitime; comme dit deleuze le monde s'incurve autour d'un centre de perception, le fameux englobant...et ce centre de perception, c'est le point de vue majoritaire, le point de vue moralement dominant."
Seulement, Deleuze dit aussi que ce centre de perception est un centre vide. Par exemple dans Pourparlers, dans l'entretien avec Negri :
Les minorités et les majorités ne se distinguent pas par le nombre. Une minorité peut être plus nombreuse qu'une majorité. Ce qui définit une majorité, c'est un modèle auquel il faut être conforme : par exemple l'Européen moyen adulte mâle habitant des villes... Tandis qu'une minorité n'a pas de modèle, c'est un devenir, un processus. On peut dire que la majorité, ce n'est personne. Tout le monde, sous un aspect ou un autre, est pris dans un devenir minoritaire qui l'entraînerait dans des voies inconnues s'il se décidait à le suivre.
La majorité, ce n'est personne parce que c'est un modèle, une moyenne, et qu'il est impossible de se conformer tout à fait à un modèle, et que personne ne correspond véritablement à une moyenne. Le modèle, c'est l'idéal du moi freudien dévoilé comme production sociale et producteur d'Œdipe et de ses névroses (L'Anti-Œdipe). Face au modèle, il n'y a que des déviances et des déviants. En fait, il ne faudrait même pas parler de "pensée" majoritaire ou de "point de vue" majoritaire qui seraient ou ne seraient pas ceux des dominants. Il y a juste des modèles de pensée et des modèles de point de vue que jamais personne ne vient remplir. Ford pas plus qu'un autre.


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Message par Invité Mer 9 Jan 2013 - 22:15

-Dépli. Elena de la Madriaga, la Mexicaine, et Martha Purcell, la fiancée de Jim Gary (Widmarck) sont en reflets l'une de l'autre. Encore le régime spéculaire. Le destin de la seconde, dans le film, est de ne pas avoir de mère et de tomber amoureuse d'un Lieutenant de l'armée US. Le destin de la première, d'après son récit de ce qui s'est passé avant le film, est d'avoir perdu sa mère très jeune et d'être tombée amoureuse d'un Lieutenant de l'armée US. Toutes les deux apparaissent dans le film les cheveux nattés montées sur des chevaux appaloosa,, et habillées en Indienne pour l'une, à l'Indienne pour l'autre. La différence vestimentaire vient aussi de la différence de traumatismes : pour Purcell, l'enlèvement du frère qu'elle essaie de remplacer (c'est elle qui le dit dans le film) ; pour Madriaga, avoir été elle-même enlevée. On peut supposer également une différence religieuse. Madriaga se signe en évoquant la mort de sa mère, ce qui est une habitude catholique, et elle décrit sa famille selon la grande tradition mexicaine, donc aussi catholique. Alors que Purcell est plus probablement Réformée, même si ce n'est pas explicite – mais leur hésitation, à elle et à Gary, au moment de s'embrasser est quand même un topos puritain.
Le catholicisme de Madriaga est essentiel au moment où McCabe fait son speech pendant le bal. La question que tout le régiment se pose et à laquelle Madriaga ne parvient pas à répondre, ce n'est pas de savoir si elle a couché avec Stone Calf, ce qui est évident, mais de savoir ce que ça fait, si elle a eu du plaisir. C'est la question, très chrétienne depuis Saint Augustin, du viol de Lucrèce. Augustin affirmait que le suicide de Lucrèce était la preuve de son péché et qu'elle avait pris du plaisir à être violée par un autre que son mari – et que prendre du plaisir avec un autre que son légitime, c'est pas bien. Par contre, si on est violée par son mari... On n'a pas beaucoup évolué depuis, d'ailleurs. Bon, passons. De toute façon, on ne saura pas si elle a joui entre les bras de Stone Calf. Nous est épargnée la pénible discussion de savoir dans quelles conditions il est normal ou scandaleux qu'une femme jouisse, normal ou scandaleux de représenter la jouissance d'une femme (comme s'il y avait une norme à l'un ou à l'autre). On n'en saura rien parce qu'elle est interrompue par McCabe qui ramène tout sur la religion avec une phrase fascinante: "elle ne s'est pas suicidée parce que sa religion le lui interdit". Et il continue en parlant, non plus de sexe, mais des conditions de vie.
Ce que cette phrase a de remarquable, c'est qu'elle se situe juste à l'articulation des deux discours, celui sur le sexe et celui sur les conditions de vie. Du premier point de vue, si on le rapporte directement à Augustin, c'est une condamnation sans appel : elle a joui et l'issue par le suicide lui étant interdite, il lui reste à faire repentance pour cette jouissance. Mais sans même parler d'Augustin, la seule conclusion de cette phrase est que les relations sexuelles inter-raciales doivent conduire naturellement à la mort. Racisme de McCabe, dont le film nous a déjà prévenu et qui s'exprime dans le laïus qui suit. Mais ce qui fait que je n'y vois pas le discours du film, c'est qu'il y a un reste dans cette phrase, quand McCabe parle de "sa" religion. Ce qui veut dire que, en même temps, il dénonce les relations sexuelles entre étrangers et il la définit elle comme étrangère, avec une religion différente des autres présents, lui compris. Il dresse une barrière entre elle et lui. Et au moment où il dit ça, sa réaction à elle est révélatrice : elle sursaute, le regarde, puis s'éloigne vers le fond avec Martha Purcell et reste là à contempler une scène dont elle est l'objet sans plus pouvoir rien y faire.
On ne les retrouve ensuite ensemble que dans la dernière séquence, dans le bar dont la patronne se nomme Belle Aragon, malgré ses cheveux blonds, ses yeux bleus et sa peau blanche (en quoi ici le fait de porter le nom d'un territoire exotique est une forme de racisme?). Ce n'est pas non plus pour l'essentiel une prostituée, si se prostituer est le fait de coucher avec quelqu'un pour de l'argent : c'est elle qui paie McCabe et l'entretient – avec toute la ville de Tascosa. Si McCabe est un souteneur, alors c'est toute la ville, et pas uniquement Belle, qui se prostitue, sauf à la toute fin, quand McCabe lui lance l'argent pour ses repas, son logement et "pour le reste". Son rapport avec Madriaga est essentiellement antagonique : elle est une hispanicité de pacotille avec laquelle un homme sensé ne partagera pas plus de 10%. Espagne commerciale et affairiste sans grand rapport avec l'amour. Mais très consciente de son appartenance qui lui permet de se moquer de l'étrangeté de la Mexicaine enfuie de chez les Indiens.
Où Madriaga peut-elle ne plus être étrangère ? Loin, et plus loin, en se faisant encore plus étrangère. La Californie. Et dans la diligence, c'est en ouvrant son vanity case, dans le miroir du couvercle, qu'elle voit McCabe décidé à l'accompagner au pays des étrangers. Dans le miroir : je n'imagine quand même pas complètement ce régime spéculaire des images. Si les deux amoureux, ou les deux peuples, peuvent se rejoindre, ce n'est pas en traversant la frontière qui les sépare, en s'assimilant l'un à l'autre, ce qui ne marche pas vraiment car pour Ford, peut-être, et en tous cas dans ce film, seul le même peut rencontrer le même. C'est sa limite. Et il tente de la contourner avec une proposition alternative : franchir ensemble une autre frontière, devenir ensemble mêmement étrangers, devenir ainsi même sans jamais cessé d'être étrangers. Il faudrait approfondir, préciser, mais je crois que c'est l'essentiel du mouvement du film.


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Message par Invité Mer 9 Jan 2013 - 22:15

Encore le régime spéculaire : McCabe/Gary et Stone Calf/Parker. Quand McCabe a pour mission de ramener les Blancs, Stone Calf vient exiger que Parker lui donne les Blancs. Parker répond que c'est lui qui donne les ordres quelques minutes après que Gary se voit entendu reprocher de donner les ordres.
C'est juste un exemple, je n'en tire rien dans l'immédiat pour le film. Mais la mise en crise de l'image par Ford, ce n'est pas seulement un délire de ma part. Au delà de toute interprétation des films en termes de racisme ou de racialisme, ou d'anti-racisme comme mouvement qui essaie de s'extraire du racisme sans forcément y arriver, la déconstruction de l'image est au fondement du cinéma fordien au moins depuis Young Mister Lincoln, et là explicitement, puisque c'est sur cette déconstruction que s'opère toute la manipulation du spectateur dans la séquence du meurtre de Scrub White : la façon dont le coup de feu hors champ éclairant le visage de la mère écrase ensuite toutes les significations alternatives à la culpabilité des frères Clay, même l'image de Palmer Cass atterré et tenant le couteau dans sa main.


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Message par Invité Mer 9 Jan 2013 - 22:16

slimfast a écrit:mais c'est moche : on voudrait que ce soit beau, puis, c'est laid !
et finalement je trouve ça assez beau. Wink


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Message par Invité Sam 12 Jan 2013 - 15:06

Le cinéma, art impur produit des idées impures, si impures qu'on les assignent parfois au hasard plutôt qu'à l'intention de l'auteur. Badiou parle de visitation à propos du mode d'existence des idées-cinéma, fugaces, qu'on tient parfois pour fortuites.
Qu'on pense par exemple à Ethan et la mesure où il est antipathique, et bien cette idée insistante est sans cesse contrebalancée par le préjugé qu'il s'agit du héros du film - préjugé entretenu par l'équivocité de la présentation du personnage et de l'acteur derrière - et que par conséquent le film adopterait entièrement son point de vue : à négliger cette dimension du personnage on finit par imputer à Ford le racisme anti-indien, alors que le point de vue du film est beaucoup plus proche de celui de Martin (Ford a sa responsabilité car si les scènes d'Ethan impriment notre conscience, celles avec Martin, le coup de pied de l'âne à sa conquête indienne, la dispute dans le bain avec sa fiancée et la bagarre avec son autre prétendant, il faut l'avouer ne sont pas du même tonneau).

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Message par Borges Sam 12 Jan 2013 - 19:15

Peut-être, mais il faut aussi voir que de l'autre côté, les indiens n'existent pas, il n'y a pas de multiplicité de points de vue indiens... y a juste les indiens, et après tout, ils sont loin d'être sympas, ils ont bien massacré des colons...et quand on dit que Scar est l'alter ego, le double de ethan, son inconscient maléfique, faut tenter après d'expliquer pourquoi le négatif d'un blanc doit-il être indien; on retrouve donc la question du racisme...

chez ford, pas une seule jolie indienne; si je me trompe pas.


Badiou parle aussi de l'impureté du cinéma, en deux sens, celui de bazin, et celui qui amène le cinéma à se confronter à l'impureté empirique du monde, la violence, le sexe, le bruit, le fric... et à tenter de la purifier...



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Message par Invité Sam 12 Jan 2013 - 19:50

oui on peut ajouter que Scar est joué par un blanc, que les blanches prisonnières des indiens parmi lesquelles Ethan recherche sa nièce sont d'une hébétude caricaturale et qu'Ethan est diffracté dans tous ces personnages là, Clayton, Scar, Mose - encore un personnage à côté de la plaque. On a aussi l'impression que Ford se désinvestit tour à tour de tous ses personnages, qu'il les désavoue où s'en moque carrément comme lors de l'échange de la femme avec les indiens, comme s'il venait de jouer un bon tour.
Maintenant y'a Ford et y'a le système des studios qui marchait comme un seul homme pour imposer une identité américaine à travers les films.

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Message par Borges Sam 12 Jan 2013 - 20:10

slimfast a écrit:
Maintenant y'a Ford et y'a le système des studios qui marchait comme un seul homme pour imposer une identité américaine à travers les films.

oui, alors se pose la question de l'auteur? de qui, de quoi "Ford" est-il le nom, si ce n'est pas juste le nom d'un auteur, ou celui d'un gars empirique, avec sa bio? De la pensée majoritaire us? alors on retrouve toutes nos questions; où est ford, en tant qu'auteur, dans le style, la mise en scène, l'idéologie étant à mettre sur le compte d'un gars appelé ford qui n'avait rien de particulièrement différent d'une citoyen américain ordinaire...

on retrouve le partage de la forme et du fond...la forme étant pure idéologiquement?
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Message par Invité Sam 12 Jan 2013 - 20:32

cf jean mitry, la forme c'est le film en temps que tel comme il se présente à nous scénario et mise en scène confondus dans un grand nombre d'opérations cinématographique au rang desquelles les techniques.
ces opérations elles produisent des idées-cinéma des idées que seuls les moyens du cinéma suscitent. si c'est pas le cas c'est des idées qui préexistaient au film.
mais pour qu'un film soit intéressant il faut aussi un sujet, un truc qui en fait l'unité en l'ancrant dans le monde. parler d'auteur c'est comme s'il n'y avait pas de spectateur.

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Message par Invité Jeu 17 Jan 2013 - 22:29

slimfast a écrit:Qu'on pense par exemple à Ethan et la mesure où il est antipathique, et bien cette idée insistante est sans cesse contrebalancée par le préjugé qu'il s'agit du héros du film - préjugé entretenu par l'équivocité de la présentation du personnage et de l'acteur derrière - et que par conséquent le film adopterait entièrement son point de vue.
on peut rapprocher ce que tu dis de ce passage du bouquin de mcBride :
When film historian Brian Huberman innocently praised Wayne's performance by telling him in 1974, « That was a great part you had as the villain », Wayne's face tokk on Ethan's fierceness. « He was no villain », Wayne said through clenched teeth. « He was a man living in his times. The Indian fucked his wife. What would you have done ? »
Question : doit-on voir le film avec les yeux de ce nigaud de Wayne ou avec l'innocence d'un historien ?


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Message par Invité Jeu 17 Jan 2013 - 22:29

Borges a écrit:Peut-être, mais il faut aussi voir que de l'autre côté, les indiens n'existent pas, il n'y a pas de multiplicité de points de vue indiens
De quel film parle-t-on ? Car c'est peut-être vrai dans The Searchers – encore que l'on ne sache pas si le Nayawki père de Look agit sur ordre ou de son propre chef. Mais si tu parles des films de Ford en général, c'est assez faux. Il y a des désaccords internes aux tribus dans She wore a Yellow Ribbon, entre va-t-en-guerre et pacifistes, et dans Two rode Together, où Quanah Parker et Stone Calf ont deux attitudes résolument différentes face aux Blancs et face aux superstitions du Buffalo Shield. Quant à Cheyenne Autumn, la tribu se sépare carrément en deux, ce qui est assez représentatif, pour ce que j'en sais, de la réaction des tribus des plaines en cas de divergences : une bande quitte le groupe et s'autonomise, reconstituant une unité jusqu'à ce qu'elle se divise elle-même ou qu'elle rejoigne une nouvelle tribu.
C'est vrai que l'étude des sociétés indiennes n'est pas très approfondie, ce qui est très scandaleux pour un ethnologue. Mais Ford n'était pas ethnologue, il n'avait pas à approfondir cette étude. Et il pouvait aussi considérer qu'il n'avait pas à prendre la parole à la place des Indiens. Et de toute façon, s'il l'avait fait, comme il était de toute manière raciste, ça aurait été, ça n'aurait pu être que par paternalisme. Position a priori et inattaquable. Enfin, je trouve qu'il a fait mieux qu de parler à leur place : il leur a laissé la parole, comme tu le sais, dans Cheyenne Autumn justement, où les Navajos disent très exactement ce qu'ils ont envie de dire, et pas mal de grossièreté pour ce que j'en ai entendu dire, avec l'assentiment du réalisateur qui connaissait un peu la langue, et probablement en particulier les injures puisque « he loved all the bad words » (Fonda, d'après McBride).


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Message par Invité Jeu 17 Jan 2013 - 22:30

chez ford, pas une seule jolie indienne; si je me trompe pas.
Là aussi, tu te trompes. Mais c'est surtout, encore, une question à déplier.
chez ford, pas une seule jolie indienne; si je me trompe pas.
On n'est en train de parler des termes des relations entre des cultures différentes. Alors, la joliesse, ce n'est ni simple, ni évident. Parce qu'il faut bien assumer que la joliesse n'est pas partout la même, ou en tous temps. Laquelle est jolie : la maigre ou la grasse. On m'a raconté cette histoire d'une Africaine élevée en Europe, selon les standard européens, et jolie selon ces standards, c'est à dire grande et élancée, diététicienne de profession, tombée amoureuse d'un Africain campagnard et s'étant soumise à un régime grossissant pour plaire à son mari. C'est bien d'être maigre et un peu souffreteuse chez les gavés ; mais chez les affamés, un peu de graisse et d'énergie sont mieux venues. Quel agencement de traits du visage est considéré comme joli ici ou là, chez les Blancs ou chez les Indiens, et quelle attitude face à la vie y correspond.
chez Ford, pas une seule jolie indienne; si je me trompe pas.
Problème de Look, dont j'ai déjà parlé. Look est-elle belle, a-t-elle été belle pour un Indien d'aujourd'hui, pour un Indien d'il y a cent ans, deux cents ans ? Je n'en sais rien. L'un dans l'autre, en considérant sa façon d'être et celle de Laurie, je préférerais de loin être marié à une Look souriante, sans fausse pudeur et gourmande, capable de me quitter sans se retourner, qu'aux gamineries de la femme blanche. Est-ce que cela a à voir avec la joliesse ? Probablement me diras-tu que non, la joliesse ne concerne qu'une beauté plastique. Alors on peut parler des voix, de la voix discordante et criarde de Laurie et de la jolie voix veloutée de Look. Qu'est-ce qui est joli ? Qui est joli ?
chez ford, pas une seule jolie indienne; si je me trompe pas.
Bon, je suppose que tu entends « jolie » selon les critères que, je pense, nous pouvons partager, et partager aussi avec Ford, qui font que nous dirons de Vera Miles qu'elle était une jolie fille. Dans ce cas, Chihuahua est jolie et Debbie est jolie, et elles sont toutes les deux Indiennes aux yeux de Wyatt et de Ethan. N'as-tu pas dit qu'il n'y a aucun écart entre les conceptions de Ford et celles de ses personnages les plus conservateurs et racistes ? Donc Ford pouvait concevoir qu'il y ait de jolies Indiennes puisque Chihuahua et Debbie indianisée sont jolies. Ou bien faut-il les prendre dans la blancheur de leurs actrices ? Mais alors les conceptions de Ford ne sont pas celles de ses personnages les plus conservateurs, il y a un écart. Comment cela ? Comment les conceptions de Ford peuvent-elles être à la fois celles des personnages et différentes de celles des personnages ? Par fonctionnalité peut être ? Mais quelles sont les conséquences morales de cette fonctionnalité ? Et si elles n'en ont pas, comment est-ce possible ? Comment négocies-tu l'écart impliqué dans ton affirmation ? Éclaire-moi car à mes yeux, dans le mouvement réel des films, Chihuahua ne sont ni Blanches ni Indiennes mais des apologies du métissage.
chez ford, pas une seule jolie indienne; si je me trompe pas.
Et c'est sensé prouver quoi ? La laideur des sauvages, la joliesse de leurs filles, c'est un vieux lieu commun qui justifie tous les racismes. De belles Indiennes, le Hollywood classique, unilatéralement raciste à t'entendre, n'en a pas manquer, et elle n'était pas des protestations d'anti-racisme. Plutôt des illustrations de la femme-territoire, bonne à conquérir, à prendre aux hommes Autres. Et il y en a une dans ce genre chez Ford, contrairement à ce que tu crois, au moins une, dans Cheyenne Autumn : la femme jeune d'un des deux chefs de la tribu mais qui tombe amoureuse du fils de l'autre chef et qui change de colonne au moment de la séparation des deux bandes. Et c'est cette amour qui provoque le dernier meurtre, que les pères tuent les fils.


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Message par Invité Jeu 17 Jan 2013 - 22:31

Borges a écrit:
slimfast a écrit:
Maintenant y'a Ford et y'a le système des studios qui marchait comme un seul homme pour imposer une identité américaine à travers les films.

oui, alors se pose la question de l'auteur? de qui, de quoi "Ford" est-il le nom, si ce n'est pas juste le nom d'un auteur, ou celui d'un gars empirique, avec sa bio? De la pensée majoritaire us? alors on retrouve toutes nos questions; où est ford, en tant qu'auteur, dans le style, la mise en scène, l'idéologie étant à mettre sur le compte d'un gars appelé ford qui n'avait rien de particulièrement différent d'une citoyen américain ordinaire...

on retrouve le partage de la forme et du fond...la forme étant pure idéologiquement?
oui mais Ford est mort. Il n'existe plus. Et c'est comme si il n'avait jamais existé. Ce qui existe et sur quoi on peut faire fond, c'est une balise biographique (Sean Aloysius Feeney – voilà toujours un nom de Ford – né en 1894 ou 1895 et mort en 1972) et des déclarations qui lui sont associées : témoignages directs ou indirects à son sujet, déclarations verbales qui lui sont attribuées, déclarations filmiques aussi. Et puis c'est tout. Ce qu'était Ford, ses ressemblances et ses différences avec « un citoyen américain ordinaire », on n'en aura jamais la moindre idée. Faut simplement faire avec ce qu'on a. Et dans ce qu'on a, je ne vois pas de raison de tout égaliser sur les témoignages ou sur certaines déclarations, en négligeant le reste. Par exemple, pour ce qui est des déclarations attribuées à Ford, son appartenance au Parti républicain : déclarée publiquement trois fois entre 50 et 72, mais il lui arrivait aussi de se déclarer démocrate, et en fait il n'a jamais été membre ni de l'un ni de l'autre parti. Et comme je l'ai déjà dit, avant-guerre, il se déclarait socialiste. Où est la vérité ? Quel est le vrai Ford ? Et est-ce là la trajectoire d'un « citoyen américain ordinaire » ?
Pas de raison d'égaliser quoique ce soit sur quoique ce soit. Prendre chaque chose pour elle-même et en relation avec les autres. Quel était le regard des témoins, celui de Wayne ou celui de l'historien ? Et quelles étaient les circonstances des témoignages, et des déclarations attribuées à Ford ? Et quel est/son, les/le discours des films ? Et quels écarts de l'un à l'autre ? Quel dessin s'en dégage ? Quelles cohérences, quelles différences avec le discours dominant de/sur l'époque ? « Heuristiquement, il vaut mieux partir du détail des pratiques, de ce qui se faisait et se disait, et faire l'effort intellectuel d'en expliciter le discours ; c'est plus fécond (mais plus difficile pour l'historien et aussi pour ses lecteurs) que de partir d'une idée générale et bien connue, car on risque alors de s'en tenir à cette idée, sans apercevoir les différences ultimes et décisives qui la réduiraient à néant. » (Paul Veyne, Foucault)


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Message par Borges Ven 18 Jan 2013 - 11:53

Stéphane Pichelin a écrit:
Borges a écrit:Peut-être, mais il faut aussi voir que de l'autre côté, les indiens n'existent pas, il n'y a pas de multiplicité de points de vue indiens
De quel film parle-t-on ? Car c'est peut-être vrai dans The Searchers – encore que l'on ne sache pas si le Nayawki père de Look agit sur ordre ou de son propre chef. Mais si tu parles des films de Ford en général, c'est assez faux. Il y a des désaccords internes aux tribus dans She wore a Yellow Ribbon, entre va-t-en-guerre et pacifistes, et dans Two rode Together, où Quanah Parker et Stone Calf ont deux attitudes résolument différentes face aux Blancs et face aux superstitions du Buffalo Shield. Quant à Cheyenne Autumn, la tribu se sépare carrément en deux, ce qui est assez représentatif, pour ce que j'en sais, de la réaction des tribus des plaines en cas de divergences : une bande quitte le groupe et s'autonomise, reconstituant une unité jusqu'à ce qu'elle se divise elle-même ou qu'elle rejoigne une nouvelle tribu.
C'est vrai que l'étude des sociétés indiennes n'est pas très approfondie, ce qui est très scandaleux pour un ethnologue. Mais Ford n'était pas ethnologue, il n'avait pas à approfondir cette étude. Et il pouvait aussi considérer qu'il n'avait pas à prendre la parole à la place des Indiens. Et de toute façon, s'il l'avait fait, comme il était de toute manière raciste, ça aurait été, ça n'aurait pu être que par paternalisme. Position a priori et inattaquable. Enfin, je trouve qu'il a fait mieux qu de parler à leur place : il leur a laissé la parole, comme tu le sais, dans Cheyenne Autumn justement, où les Navajos disent très exactement ce qu'ils ont envie de dire, et pas mal de grossièreté pour ce que j'en ai entendu dire, avec l'assentiment du réalisateur qui connaissait un peu la langue, et probablement en particulier les injures puisque « he loved all the bad words » (Fonda, d'après McBride).


-hi; c'est pas sérieux, ce que tu dis là; je sais ces oppositions, c'est toujours la même; ce ne sont pas des points de vue, c'est l'opposition cliché entre le gentil indien, et le méchant indien; le vieux sage, et le jeune mec au sang chaud, plein de haine pour les Blancs; c'est toi qui parles de "superstitions", là encore c'est du classique, la raison, le réalisme, la bonne religion, contre des croyances débiles indiennes...(ça marche aussi avec les sauvages africains, et leurs sorciers ridiculisés par la science; c'est du niveau des bd pour enfants..tintin chez les incas )

-Pour ce qui est de "la parole donnée" aux indiens, pour dire des gros mots, faire des blagues, c'est plutôt comique que tu cites ça comme un point en faveur de John Ford; si le mec avait su ce qu'ils racontaient, ou s'il avait pensé que des gens dans les salles le comprendraient (les navajos ne vont pas au cinéma), je pense pas qu'il leur aurait donné carte blanche pour saboter les dialogues de son film; imaginons des sous-titres à cette prise de parole...

-qui parle d'ethnologie, quand il s'agit tout simplement d'histoire, dans les deux sens du mot, et de justice, de récit conduit par un sens de la justice?

-très sincèrement, on peut discuter de ford: pas de souci. Mais comme j'ai déjà dit, sur ce sujet, ma conviction est faite; aucun élément, aucun argument, rien ne peut la changer.



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Message par Invité Ven 18 Jan 2013 - 12:02

les navajos ne vont pas au cinéma

c'est quoi c'te blague ?

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Message par Borges Ven 18 Jan 2013 - 12:58

slimfast a écrit:les navajos ne vont pas au cinéma

c'est quoi c'te blague ?

hi
les navajos (les seuls susceptibles de comprendre ce que les indiens se disent réellement) ne vont pas au cinéma (dans l'esprit de ford)
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Message par Invité Ven 18 Jan 2013 - 14:56

(dans l'esprit de ford)
tu fais tourner les tables ? Wink
plus sérieusement, "l'esprit de ford", c'est ce qu'il faut démontrer. ça devrait être une conclusion et pas un argument. si tu sais d'avance ce qu'il est, par axiome (comme tu l'as dit), alors la messe est dite.


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Message par Invité Ven 18 Jan 2013 - 15:10

Borges a écrit:
Stéphane Pichelin a écrit:
Borges a écrit:Peut-être, mais il faut aussi voir que de l'autre côté, les indiens n'existent pas, il n'y a pas de multiplicité de points de vue indiens
De quel film parle-t-on ? Car c'est peut-être vrai dans The Searchers – encore que l'on ne sache pas si le Nayawki père de Look agit sur ordre ou de son propre chef. Mais si tu parles des films de Ford en général, c'est assez faux. Il y a des désaccords internes aux tribus dans She wore a Yellow Ribbon, entre va-t-en-guerre et pacifistes, et dans Two rode Together, où Quanah Parker et Stone Calf ont deux attitudes résolument différentes face aux Blancs et face aux superstitions du Buffalo Shield. Quant à Cheyenne Autumn, la tribu se sépare carrément en deux, ce qui est assez représentatif, pour ce que j'en sais, de la réaction des tribus des plaines en cas de divergences : une bande quitte le groupe et s'autonomise, reconstituant une unité jusqu'à ce qu'elle se divise elle-même ou qu'elle rejoigne une nouvelle tribu.
C'est vrai que l'étude des sociétés indiennes n'est pas très approfondie, ce qui est très scandaleux pour un ethnologue. Mais Ford n'était pas ethnologue, il n'avait pas à approfondir cette étude. Et il pouvait aussi considérer qu'il n'avait pas à prendre la parole à la place des Indiens. Et de toute façon, s'il l'avait fait, comme il était de toute manière raciste, ça aurait été, ça n'aurait pu être que par paternalisme. Position a priori et inattaquable. Enfin, je trouve qu'il a fait mieux qu de parler à leur place : il leur a laissé la parole, comme tu le sais, dans Cheyenne Autumn justement, où les Navajos disent très exactement ce qu'ils ont envie de dire, et pas mal de grossièreté pour ce que j'en ai entendu dire, avec l'assentiment du réalisateur qui connaissait un peu la langue, et probablement en particulier les injures puisque « he loved all the bad words » (Fonda, d'après McBride).


-hi; c'est pas sérieux, ce que tu dis là; je sais ces oppositions, c'est toujours la même; ce ne sont pas des points de vue, c'est l'opposition cliché entre le gentil indien, et le méchant indien; le vieux sage, et le jeune mec au sang chaud, plein de haine pour les Blancs; c'est toi qui parles de "superstitions", là encore c'est du classique, la raison, le réalisme, la bonne religion, contre des croyances débiles indiennes...

tu me dis d'abord qu'il n'y a pas plusieurs points de vue dans la représentation des Indiens. non, en fait tu parles de multiplicité, mais on pourrait facilement montrer qu'il n'y a pas non plus de multiplicité dans la représentation des Blancs. je te montre que si, il peut y avoir plusieurs points de vue, alors tu répliques que celle dont je parle est hors du coup parce que c'est toujours la même, etc...
-primo : même si c'était effectivement toujours la même, elle n'en resterait pas moins la marque de plusieurs points de vue chez les Indiens - en fait, autant que chez les Blancs dans ces films ;
-secundo : ce ne sont pas les mêmes oppositions dans chacun des films, et ce ne sont pas forcément des oppositions entre bon et méchant Indien.

en 1938, Ford a été le premier réalisateur Blanc à demander pour les figurants Indiens un salaire égal à celui des Blancs. en 1946, il fait un film dont le perso principal, Wyatt Earp, commence par chasser un Indien de la ville. en 1948, dans Fort Apache, il dépeint les Indiens nobles, braves, injustement traités (un des premiers à le faire, là encore), tout autant de traits qui vont devenir la vulgate du paternalisme ultérieur ; mais il les présente également fin tacticien, égalant les modèles établis par les stratèges de West Point : donc intelligents et calculateurs au besoin, ce qui ne cadre pas avec l'image du sauvage, bon ou mauvais. et puis, avec The Searchers (56), on a à nouveau un raciste comme supposé héros. et enfin, en 64, il déciderait de rendre un peu justice aux Indiens. en résumé : anti-raciste en 38, raciste en 46, anti-raciste en 48, raciste en 56, anti-raciste en 64. m'expliqueras-tu la cohérence historique de tout ça ?



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Message par Invité Ven 18 Jan 2013 - 15:19

En même temps le problème est posé peut-être à l'envers. Dans le cinéma il y a (ou il y a eu Crying or Very sad ) l'idée que c'est l'image qui peut juger une idéologie, mais là (sur les "Searchers") on se résigne à faire l'inverse.
L'idée que le cinéma (et dans ce moment là, la critique sur le cinéma fait partie du cinéma) puisse juger le racisme est bien plus fructueuse que celle de l'antiracisme de la critique jugeant un cinéma.

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Message par Borges Ven 18 Jan 2013 - 15:44

Stéphane Pichelin a écrit:



tu me dis d'abord qu'il n'y a pas plusieurs points de vue dans la représentation des Indiens. non, en fait tu parles de multiplicité, mais on pourrait facilement montrer qu'il n'y a pas non plus de multiplicité dans la représentation des Blancs. je te montre que si, il peut y avoir plusieurs points de vue, alors tu répliques que celle dont je parle est hors du coup parce que c'est toujours la même, etc...
-primo : même si c'était effectivement toujours la même, elle n'en resterait pas moins la marque de plusieurs points de vue chez les Indiens - en fait, autant que chez les Blancs dans ces films ;
-secundo : ce ne sont pas les mêmes oppositions dans chacun des films, et ce ne sont pas forcément des oppositions entre bon et méchant Indien.

en 1938, Ford a été le premier réalisateur Blanc à demander pour les figurants Indiens un salaire égal à celui des Blancs. en 1946, il fait un film dont le perso principal, Wyatt Earp, commence par chasser un Indien de la ville. en 1948, dans Fort Apache, il dépeint les Indiens nobles, braves, injustement traités (un des premiers à le faire, là encore), tout autant de traits qui vont devenir la vulgate du paternalisme ultérieur ; mais il les présente également fin tacticien, égalant les modèles établis par les stratèges de West Point : donc intelligents et calculateurs au besoin, ce qui ne cadre pas avec l'image du sauvage, bon ou mauvais. et puis, avec The Searchers (56), on a à nouveau un raciste comme supposé héros. et enfin, en 64, il déciderait de rendre un peu justice aux Indiens. en résumé : anti-raciste en 38, raciste en 46, anti-raciste en 48, raciste en 56, anti-raciste en 64. m'expliqueras-tu la cohérence historique de tout ça ?



-le double point de vue, du gentil indien-méchant indien, n'en est qu'un, si tu veux, et ce n'est pas un point de vue indien, c'est un point de vue blanc, sur les indiens...comment ils appellent ça encore guattari et deleuze...

-il y a multiplicité des points de vue chez les blancs, puisqu'il y a multiplicité de personnages, et pas seulement RW et JS, il y a les gens ordinaire, le peuple, des bons, des méchants...

-oui, dans "fort apache", les indiens foutent une raclée à un idiot d'aristocrate prétentieux, mais c'est pas seulement un ennemi des indiens, c'est aussi un ennemi du peuple, des braves gens, qui ne sont pas éduqués, qui ne sont pas allés dans les grandes écoles, c'est ce qu'on peut appeler du populisme, ou une haine de la culture, de l'éducation, démagogie (c'est eux qui remplissent les salles de cinéma); et ce ne sont pas les vainqueurs indiens de cet idiot qui sont les héros, mais les vaincus, les soldats ordinaires, les massacrés, les martyrs, qui vont justifier une réaction, une expédition punitive; les indiens ont gagné, mais les blancs n'ont pas perdus, ce sont des victimes de leur dirigeant (on connaît ce topos, celui, avec quelques différences de rambo); cochise, c'est le bon indien, derrière lui, y a le terrifiant Geronimo...

-qu'est-ce qui rendait cochise sympa? il acceptait de retourner dans la réserve, à condition qu'on en chasse le sale type? le bon indien c'est l'indien qui accepte la réserve?

-aucun film de ford ne va au-delà du paternalisme, aucun n'est tourné depuis un sentiment d'égalité, de justice... je ne vois pas en quoi "les Cheyennes" est anti raciste... on a déjà parlé; ça pue le mépris, et la pitié pour les vaincus...l'ignoble charité, disait l'autre, ou quelque chose comme ça...

c'est quoi ces histoires de salaires?







Dernière édition par Borges le Ven 18 Jan 2013 - 15:53, édité 1 fois
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Message par Borges Ven 18 Jan 2013 - 15:50

en général les américains font moins de déconstruction à l'envers quand ils abordent ce problème; ils disent clairement les choses comme Tag Gallagher, à propos de TRT : "the comanches are ignoble rabble, willing to sell a white boy who has become a warrior in their own tribe, subjecting their women dreadful slavery"


faut se pencher un peu sur ces marchés, look échangée dans "la prisonnière", pour je ne sais plus quoi....


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Message par Borges Ven 18 Jan 2013 - 15:54

Tony le Mort a écrit:En même temps le problème est posé peut-être à l'envers. Dans le cinéma il y a (ou il y a eu Crying or Very sad ) l'idée que c'est l'image qui peut juger une idéologie, mais là (sur les "Searchers") on se résigne à faire l'inverse.
L'idée que le cinéma (et dans ce moment là, la critique sur le cinéma fait partie du cinéma) puisse juger le racisme est bien plus fructueuse que celle de l'antiracisme de la critique jugeant un cinéma.

explique?
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Message par Invité Ven 18 Jan 2013 - 16:29

"the Searchers" est avant tout un récit de filiation œdipien, il crée une situation complètement invraisemblable qui ne se retrouve jamais dans la vie réelle, et que par ailleurs les conduites racistes réelles ne chercheront pas à expliciter, même en admettant qu'elles s'appuient sans doute elles-mêmes sur un complexe oedipien comme celui que motnre le film (chez Wayne et chez son fils adoptif).
Pour cette raison, de la manière dont tu procèdes, la critique que tu fais du racisme du film, même si elle est objective, ne quitte jamais le domaine du symbolique.

Tu as déjà fait le même procès (plus laipidairement) à Hawks, en disant que "Scarface" était raciste parce qu'il montre des Italiens qui sont des mafieux. Mais ta critique est soit complètement interne, soit complètement externe au film, il n'y a aucune "dialectique", aucune idée que le négatif exprime aussi le réel.

Seul le cinéma parvient à rompre avec le registre symbolique qui est propre au cinéma lui-même, dans lequel se joue la lutte contre le racisme, , mais certainement pas la critique qui souvent , quand elle veut le démonter, refait le travail de réduction du réel à un symole qui est déjà à l'ouvre dans le racisme. Dans les films qui parviennent à cette rupture, je pense à Klotz dans la Blessure, Godard période "Tout va Bien" ou Kramer, les Straub ou Lubitsch ("l'Homme que j'ai Tué" est une forme de film anti-raciste, avec un superbe titre qui a lui-seul épuise symboliquement la question) et d'autres encore (Oshima travaillait cela, Sembene aussi, peut-être les 2 Hanoun, Marcel et Saleh)...

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