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Les Chants de Mandrin (RAZ - 2011)

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Message par adeline Dim 3 Avr 2011 - 14:35

Il semble que le prochain film de RAZ soit en train d'être commencé à être vu :

Vu une avant-projection des Chants de Mandrin, le quatrième film de Rabah-Ameur Zaïmeche, cinéaste toujours surprenant. Ici il traite divers thèmes politiques très actuels à travers la folle équipée des compagnons de Mandrin, contrebandier et rebelle du XVIIIe siècle. On pense à tous les révoltés du XXe et du XXIe siècle – y compris les plus récents. Le genre de film d'époque comme je les aime, c'est à dire qui privilégient la partie sur le tout, la vision partielle et parcellaire par rapport à la fresque. Une chronique simple et directe où le cinéaste a inséré une foule de discrets anachronismes (dont des textes de Rimbaud et Lautréamont) pour finir en beauté avec la chanson de l'étonnant duo Allen Ginsberg/The Clash… Cette manière de faire de l'histoire change des banalités habituelles. A suivre.
P.S. En prime Jacques Nolot, qui joue un piquant marquis pré-révolutionnaire.
http://regarddesmannequins.blogspot.com/2011/04/chants.html

Des informations sur Mandrin et le film sur ce site :
http://www.mandrin.org/les-chants-de-mandrin.html

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Message par Largo Dim 3 Avr 2011 - 15:25

Hâte de découvrir le film.

Le traitement d'un sujet historique pour parler aussi du présent... J'ai l'impression que Kechiche et RAZ suivent un cheminement parallèle.

J'aimerais beaucoup pouvoir un jour organiser une discussion entre les deux. Je suis certain qu'ils ont plein de choses à se dire.
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Message par Largo Dim 3 Avr 2011 - 15:26

Réalisation

Les chants de Mandrin est un long-métrage réalisé par Rabah Ameur-Zaïmeche et produit par Sarrazink Productions dont la sortie est prévue en 2011. Il va donc falloir encore patienter un peu. Des rumeurs le présentent comme un candidat potentiel de la sélection officielle du Festival de Cannes 2011. Tout au moins, il semblerait faire partie des films coups de coeur pour ce festival 2011.

Cette plongée dans le XVIIIème siècle devrait bénéficier du précieux regard de Rabah Ameur-Zaimeche, qui confiait au Festival de Cannes 2008 être arrivé au bout d'un cycle.

Après les films Wesh Wesh, qu'est-ce qui se passe ?, Bled number one et Dernier maquis, Rabah Ameur-Zaimeche s'attaque ici au film historique.

La distribution est assurée par MK2.
Tournage du film

Le film a été tourné du 25 octobre au 26 novembre 2010 autour du Lac du Salagou, dans la vallée de Brenas, sur le causse du Larzac et dans la vallée de la Buège (Hérault).

Soutenu par les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, Les Chants de Mandrin a été tourné à la fin de l’automne dans l’Aveyron et dans l’Hérault.
Acteurs

* Hippolyte Girardot
* Sylvain Roume
* Abel Jafri
* Jacques Nolot

A noter également la participation du philosophe Jean-Luc Nancy.

Résumé du film

Après l'exécution de Louis Mandrin, ses compagnons risquent l'aventure d'une nouvelle campagne de contrebande dans les provinces de France. Sous la protection de leurs armes, les contrebandiers organisent aux abords des villages des marchés sauvages où ils vendent tabac, étoffes et produits précieux. Ils écrivent des chants en l'honneur de Mandrin, les impriment et les distribuent aux paysans du royaume...

http://www.mandrin.org/les-chants-de-mandrin.html
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Message par Invité Lun 4 Avr 2011 - 10:09

perspective réjouissante.
je n'ai pas vu Dernier Maquis mais j'ai été séduit par Wesh Wesh et Bled number one. il faudrait étudié ça de plus près mais j'en ai gardé l'impression d'une façon de filmer du point de vue collectif d'une communauté restreinte. ni l'universalisme, ni son revers individualiste. je retrouve souvent ce sentiment face à des films nord-africains, avec plus ou moins de bonheur. est-ce le cas chez Kechiche, dont je n'ai pas vu un film ?

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Message par Borges Lun 4 Avr 2011 - 11:01

des films nord-africains

?

ça veut dire quoi?



politiquement, esthétiquement, scientifiquement... la taille d'une communauté ne détermine pas son universalité; une communauté peut être très restreinte (réduite même à une seule voix) et être universelle, ou comprendre la totalité de l'humanité et rester individualiste...





je vois pas trop de rapports entre AK et RAZ



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Message par Invité Lun 4 Avr 2011 - 11:52

salut Borges,
ce n'est pas quelque chose que j'ai vraiment réfléchi, c'était plus une remarque en passant.
mais s'il faut approfondir...
disons que l'universalisme comme résultat et l'universalisme comme point de vue "volontaire", ça ne me parait pas la même chose. je pense à D&G sur Kafka bien sur. Kafka universel parce que son point de vue est singulier à l'extrême : une singularité personnelle dans une singularité culturelle.
pour RAZ, je pense précisément à une scène, à la fin de la grande fête du village, où le personnage central se retrouve avec une jeune femme dans une scène d'amour très discrète et prude. il y a quelque chose dans la façon de filmer : le distance de la caméra et sa hauteur (très basse), le fait qu'elle soit positionnée dans la mosquée et que les attitudes des deux amoureux possibles, leur pudeur, paraissent conditionnée par un code culturel. comme si le point de vue était celui de la communauté, même si le résultat est la représentation d'un affect universel.
et c'est une impression que j'ai eu tout au long du film. qui est derrière la caméra ? qui filme ? on sait que c'est RAZ, au moins nominalement. et en même temps, ça ne me parait pas aussi évident à l'image. comme si la caméra était passée de main en main. et de même pour les personnages. chacun est bien une singularité mais sans épaisseur, au point qu'on pourrait croire qu'aucun n'est indispensable au film - alors qu'ils le sont tous mais comme collectif.
et cet effet, je le retrouve dans la plupart des films que j'ai pu voir (RAZ donc, Satin Rouge, quelques Chahine, L'arche du désert) dont les réalisateurs étaient proches de la culture nord-africaine (mais ici il y aurait beaucoup à préciser encore, pas vrai?).



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Message par Invité Mar 5 Avr 2011 - 8:51

Bled number one, où se trouve la séquence dont je parle au dessus, c'est un blues, ça a quelque chose d'un blues, il y a un pays où on revient, même fantasmatiquement, et qui n'est plus le même, qui est perdu pour toujours, et qui a toujours été perdu parce qu'on l'a toujours rêvé autrement qu'il n'est. principe de déterritorialisation, non ? cinéma mineur ? mais n'est-ce pas une situation d'ensemble en Tunisie ou en Algérie, du fait de la colonisation et du néo-colonialisme ? et en Egypte, le grand pays déterritorialisant depuis les LXX ?

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Message par Eyquem Lun 11 Avr 2011 - 11:00

Hello,

Une image d'Epinal (trouvée dans un ancien numéro de L'Histoire) :
Les Chants de Mandrin (RAZ - 2011) P1020110

Wink


Je suis impatient de voir ce que Ameur-Zaimeche va faire de ce "mythe" - puisque c'en est un, l'équivalent de Robin des Bois.
Au temps de la III République, on présentait Mandrin comme un pré-révolutionnaire, défiant l'absolutisme. Mais dans les faits, il semble qu'il ait plutôt été un de ces "bandits au grand coeur" dont parle Hobsbawm (dans "Les bandits"), un redresseur de torts qui s'opposait aux potentats locaux en faisant appel au roi, reconnu comme source de justice. Politiquement et socialement, ce genre de bandits était plutôt traditionnaliste et prenait pour modéle le "bon vieux temps", celui d'une société réglée et hiérarchisée, organisée autour du bon roi et des bons prêtres. Ce à quoi Mandrin s'opposait, c'était justement aux transformations de la société paysanne au moment de la transition capitaliste, aux financiers et aux bourgeois, bref, à ceux qui allaient porter la première Révolution.

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Message par adeline Sam 7 Mai 2011 - 18:55

Il a gagné le prix Jean Vigo hier soir !

http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18603890.html

et Straub a eu un prix spécial pour toute son œuvre.

Un article sur le site de libération bien intéressant. Jean-Luc Nancy joue dans le film !

http://next.liberation.fr/cinema/01012321567-la-revolte-qui-se-monte

Et sinon, on peut remarquer que RAZ et Straub on été récompensés un même soir et par le même prix. Je pense que les mecs du prix Jean Vigo nous lisent : qui c'est qui avait lié les deux à propos de l'article de Comolli ? C'était môaaa... Vous allez me dire, c'est un lien automatique, et en plus, c'était Comolli qui l'avait fait dans le titre de son article, aucune gloire à en tirer, et vous aurez raison.

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Message par Borges Dim 8 Mai 2011 - 8:12

rancière les lie aussi dans son dernier recueil, avec costa, teguia...
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Message par Largo Dim 8 Mai 2011 - 11:33

Le prix Jean Vigo c'est pas pour des films déjà sortis ?
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Message par Invité Dim 8 Mai 2011 - 11:53

never mind


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Message par adeline Lun 25 Juil 2011 - 18:37

Le film est en compétition au festival de Locarno (qui a lieu du 3 au 8 août 2011).

Quelqu'un a-t-il lu le dernier numéro de Trafic ? Il y a dedans un texte de Jean-Luc Nancy "En tournage avec RAZ". Il y aura également un bouquin édité par Independencia.

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Message par Borges Mar 26 Juil 2011 - 9:47

je ne sais pas si on avait fait référence ou pas au feuilleton, avec sa fameuse chanson :
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Message par Borges Mar 26 Juil 2011 - 9:59

Les Chants de Mandrin (RAZ - 2011) Les-chants-de-mandrin-31-40




RAZ : «Je découvert Mandrin à l’école primaire à Montfermeil, à 9 ans, par la Complainte de Mandrin que nous a appris notre instituteur, un vieux monsieur à lunettes qui portait encore la blouse. Il fallait l’apprendre par cœur comme nous apprenions les Fables de La Fontaine. Moi qui venais d’Algérie, je crois que c’est la première fois où, découvrant ce type qui se dresse contre les exploiteurs, j’ai eu envie d’être français. Et d’ailleurs, quand on a tourné en Aveyron, on a retrouvé ce côté farouche, rebelle et accueillant, qui correspond à une certaine identité française, sa meilleure part du moins…»




du lien déjà donné par largo, plus haut
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Message par Largo Mar 18 Oct 2011 - 9:16

http://www.accreds.fr/2011/10/17/les-chants-de-mandrin-de-rabah-ameur-zaimeche.html?utm_medium=twitter&utm_source=accreds

Une critique négative qui évoque le texte de Daney sur Uranus...
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Message par Invité Mar 18 Oct 2011 - 10:17

ça me donne plutôt envie de voir le film.


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Message par balthazar claes Mar 18 Oct 2011 - 10:21

C'est assez hilarant comme sophisme : c'est le contraire, donc la conséquence est la même.

Et quelle conséquence :

"Dans les deux cas, la même impression : celle d’avoir affaire, non pas à un film, mais à un documentaire sur son tournage"

Mais tout film est un documentaire sur son tournage, c'est l'une des choses les plus sues chez les "doctenseignants en ciné" (Rolling Eyes...). Il y a des films qui font l'autruche face à cette donnée (Uranus, par exemple), d'autres qui la prennent en considération : c'est bien l'une des caractéristiques les plus notables de ceux de RAZ. Les tours de palettes peintes en rouge de DM criaient leur mode de production.

En voilà un Beney.

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Message par Largo Mer 25 Jan 2012 - 18:23

Le film sort aujourd'hui, voici un entretien avec RAZ que j'ai réalisé.

"...et pour la beauté de nos rêves : feu !" cheers

Les Chants de Mandrin (RAZ - 2011) ?modified_at=1327475546&width=460
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Message par Invité Mer 25 Jan 2012 - 19:03

ah oui Mandrin fait envie ...

je t'imaginais comme ça au fond : un chouïa narcissique et terriblement sympathique mais va donc savoir pourquoi je me représente Borges comme un rond de cuir et ses tampons ?

Suspect

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Message par Invité Mer 25 Jan 2012 - 19:59

ah, la machine à pensées, quand elle s'éteint, que la peau cesse son feu nourri et que nous baignons alors dans le grand tout, hhan ...
et toi jerzail tu prends ton pied ?

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Message par Invité Sam 28 Jan 2012 - 18:48

critique flash : j'ai vraiment détésté les deux premiers tiers, le reste ça va, ça mange pas de pain

albino

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Message par Eyquem Dim 29 Jan 2012 - 17:39

La beauté du film n’est pas aussi évidente que celle de "Dernier maquis", mais c’est quand même un film très attachant, qui parvient à "capturer des moments magiques". Pas mal de spectateurs sont partis durant la séance : ils attendaient peut-être une nouvelle version de "Robin des bois", ce que le film n’est pas du tout. Il ne s’intéresse pas à la vie de Mandrin, à son histoire : il s’intéresse à sa mort, son testament, ce qui lui survit dans sa légende. Il s’intéresse à ce qui, dans cette histoire, ne meurt pas, mais qui doit être revivifié, réanimé, pour les temps présents. C’est peut-être pourquoi le premier geste du film, ce sera, justement, de redonner vie à un mourant. A l’autre bout du film, la vieille complainte d’Ancien Régime retrouvera elle aussi une force et une vigueur nouvelles, dans une sorte de happening à l’adresse des temps présents.
"Frères humains qui après nous vivez..." : ça pourrait être un des cartons du film, d'un autre bandit poétique...


Parce qu’il cherche à redonner vie à la légende, à en suivre les traces jusqu’aujourd’hui, le film ne craint pas les anachronismes (par exemple, une citation de Rimbaud dans le dialogue : "Million d'oiseaux d'or, ô future Vigueur ?") et donne presque le sentiment de donner une vue en coupe de l’histoire de la France rebelle : les paysages des Causses rappelleront immanquablement le maquis des Résistants ; la barricade improvisée éveillera le souvenir de toutes celles que les Révolutions du 19ème ont dressées dans les grandes villes, en 1830, 1848, ou pendant la Commune ; la vie des Mandrins fera encore penser aux expériences communautaires des années 60-70.

Quel idéal s’accomplit dans cette communauté à la fois ouverte et retranchée ? Elle est tout entière mue par une double passion : celle de l’égalité et celle de la poésie.

- c’est une communauté autosuffisante, sans chef, où chacun trouve sa complétude, d’avant la division des tâches et des savoirs : chacun doit savoir tout faire, connaître la médecine, les plantes, l’art des pièges, manier les armes, monter à cheval. Idéal d'un savoir qui ne serait pas séparé de la vie, qui trouverait son application immédiate.

(dans les faits, la bande de Mandrin fut sans moins doute moins égalitaire : on sait que Mandrin, fils de paysan, ne pouvait ambitionner une grande carrière dans l’armée : c’est en partie pour combler ce vœu qu’il a créé sa bande, où son autorité n’était pas discutée, et où il avait recréé toute une hiérarchie militaire.
De même, ses activités de brigandage n’étaient en rien une contestation de la société d’Ancien Régime : elle était uniquement orientée contre les Fermiers généraux, c’est-à-dire ceux qui étaient chargés de collecter les impôts pour le roi et qui prélevaient bien plus de taxes auprès de la population qu’ils n’en reversaient à l’Etat, d’où leur fortune colossale et la haine qu’ils s’étaient attirée parmi les paysans. C’est bien ainsi que Mandrin était perçu en son temps :
C’est un torrent, c’est une grêle qui ravage les moissons dorées de la ferme. Le peuple aime ce Mandrin à la fureur; il s’intéresse pour celui qui mange les mangeurs de gens
(lettre à Voltaire d’un de ses correspondants)
C’est pour des motifs d’abord personnels que Mandrin s’était fait contrebandier : la Ferme Générale l’avait ruiné et avait précipité le suicide de son frère. Il a essayé autant que possible de ne pas s’en prendre aux armées royales, que les Fermiers avaient lancées à ses trousses.
Par contre, c’est vrai que sa légende a tôt servi les luttes révolutionnaires : en 1789 une analyse de son Testament est publiée pour servir aux représentants des Etats Généraux : "Analyse du Testament politique de Mandrin, ouvrage dans lequel cet homme extraordinaire a prédit et prouvé que le système de la ferme-générale finiroit par appauvrir et ruiner l'État et le souverain".


- mais les plus beaux moments du film ont tous un rapport avec la poésie et les livres : le testament politique de Mandrin qu’on se transmet cérémonieusement, et les chants qu’on imprime (superbes scènes dans l’imprimerie) et pour finir, qu’on chante (grande scène finale). Le fil qui guide le film, c’est celui-ci : du livre fabriqué au livre chanté. Il faut enfermer les chants dans des livres pour les disperser, les disséminer, pour que leur parole se répande en tous lieux. Mais il faut dans un second temps que le livre soit chanté, pour qu’il libère l’énergie qui y est enfermée.

(c’est une longue tradition, d’opposer, schématiquement, l’écriture morte à la parole vive, de dénoncer les complicités de l’écriture avec la mort et de regretter le temps de l’oralité : soit qu’on s’effraie du caractère démocratique de l’écrit, qui met à disposition de n’importe qui une parole autrefois réservée ; soit, dans un autre sens, qu’on se lamente de la déperdition d’une culture populaire orale, qui ne se survit que dans des formes écrites qui la momifient, la muséifient, et la coupent de sa véritable énergie.

Le film ne reconduit pas ce partage. Il propose une forme plus hybride, une sorte de recyclage du livre dans une lecture collective et festive. Une manière de faire "jazzer" l’écrit, les traces de cette vieille histoire de bandit.)


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Message par Invité Dim 29 Jan 2012 - 18:48

déjà qu'dernier maquis n'était pas top, qu'est-ce que ça doit être et tu dis que des gens sortent What a Face je crois que je vais attendre l'avis d'Adeline. Bon boulot 'quem

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Message par Borges Dim 29 Jan 2012 - 19:30

(c’est une longue tradition, d’opposer, schématiquement, l’écriture morte à la parole vive, de dénoncer les complicités de l’écriture avec la mort et de regretter le temps de l’oralité : soit qu’on s’effraie du caractère démocratique de l’écrit, qui met à disposition de n’importe qui une parole autrefois réservée ; soit, dans un autre sens, qu’on se lamente de la déperdition d’une culture populaire orale, qui ne se survit que dans des formes écrites qui la momifient, la muséifient, et la coupent de sa véritable énergie.

hello eyquem

oui, mais ceux qui "dénoncent" ce lien de l'écriture avec la mort ne se trompent pas; dans cette dénonciation il y a une vérité... écrire c'est expérimenter la mort (blanchot, derrida, kafka, mallarmé...); très simplement : ce que j'écris ici, tu pourras le lire, même si je venais à mourir, maintenant, enfin pas maintenant, là, j'écris... alors que si c'étaient des paroles vives, si je te parlais, là, de vive voix, ce serait impossible; ce que j'écris me survit toujours, l'écriture est à la fois l'expérience de la survie et de la disparition; ce que j'écris me survivra, même si j'y survis aussi, version optimiste. La critique platonicienne de l'écriture, qui n'est pas une simple condamnation, met cela en évidence : l'écrit est comme un orphelin qui va par le monde sans son père (l'écrivain, séparé de son oeuvre, donc mort, réellement ou pas), risquant de tomber entre n'importe quelles mains, des volontés qui lui feraient dire n'importe quoi, sans l'assistance du père (du sens)...

bien entendu, c'est aussi une condamnation de la "démocratie" (rancière, derrida, vernant) : par l'écriture, le sens échappe au cercle de ceux à qui on le destine, les élus...






(il y a un très beau conte-film sur ce sujet, les aventures de Pinocchio; le père-auteur courant derrière les errances de son fils-oeuvre, un gosse naïf, que tous manipulent...
nous courons toujours derrière l'écrit, ici même sur ce forum, cherchant à en maîtriser le sens, à nous l'approprier, à lui faire signifier ce que nous voulons qu'il signifie, à mettre en évidence nos intentions, à les préciser; nous aidons ceux qui ne comprennent pas à comprendre et nous défendons "notre" texte de ceux qui veulent "le maltraiter", le détourner (comme un mineur)...
)

ce destin de l'écriture analysé par platon dans le phèdre, heidegger dans être et temps montre que c'est déjà la condition de toute parole, il me suffit de parler, d'énoncer au dehors le sens, de le proférer, pour que je sois dépossédé de mon vouloir-dire (déjà chez husserl, cf "la voix et le phénomène", l'un des plus grands textes de derrida)...

il faut donc distinguer deux voix, la voix empirique, qui tombe dans le monde, dont le destin n'est pas structurellement différent de celui de l'écriture, et la voix phénoménale, qui est proximité du sens à sa source, une présence à soi, sans différance, sans écart, sans altérité, sans signe... la mort triomphe dans toute voix, sauf dans la voix phénoménologique (chair spirituelle, monologue sans différance dans un présent vivant où je suis entièrement présent à moi-même, à mon vouloir-dire qui ne s'adresse qu'à moi; le grand drame de rousseau, être séparé de soi par les autres, la société, les mots, la culture, lui aussi rejetait l'écriture, comme nous tous.)







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