Lost (2004- 2010)
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Sibelius
DB
wootsuibrick
Borges
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Lost (2004- 2010)
Terminé les deux premières saisons.
Je ne savais rien, mais alors rien du tout, de Lost. Avantage de ne pas lire les échos, les spoilers, les critiques, etc, pour une série (6 saisons, de 2004 à 2010), pourtant abondamment discutée, commentée, analysée, et ayant fait date.
J'espère pouvoir en dire quelque chose plus tard. Mais je demanderais, si on veut bien, que ne soit rien mentionné des saisons 3 à 6, du moins pour l'instant.
Vite dit: je commence à avoir désormais une certaine habitude des séries, mais ces deux premières saisons de Lost, je dois dire que je suis sur le cul.
Là encore, y a des tas de critiques possibles (sur le plan idéologico-politique, quelques trucs pas très heureux). Mais sur le plan de l'imagination, du déploiement d'un mystère de plus en plus opaque, de plus en plus surprenant, de l'égarement (lost) du spectateur dans une profusion d'hypothèses, auxquelles sont proposées au compte goutte des réponses toujours partielles, presque toujours trompeuses, et ne faisant qu'amplifier les questions qu'il se pose, c'est du très grand art, narratif, de sf-fantastique "spéculatifs". Une intrigue "in progress", envoûtante. Impossible de lâcher le bazar. A chaque fin d'épisode, le spectateur, interdit et perplexe, se dit "mais bordel, what's the fuck?", et je pense que c'est le principe conceptuel qui organise ce vaste récit tout en tores et spirales. Le terme Lost est exploré dans toutes les dimensions de significations possibles et imaginables de l'égarement et de la perte. Y a de la mat (24 épisodes de 40 minutes par saison). 18h, d'affilée, ça le fait pas mal. Dans cette mat, y a des trucs pas terribles, parfois. Mais c'est émotionnellement très fort, un mélodramatisme accusé - quand y faut - sans trop en abuser; un "sense of secret and mystery" très réussi (entre L'île mystérieuse de Jules Vernes, le Prisonnier, Cube, et autres constructions en énigmes parano-intra-psychiques - tout ça en plus "what's the fuck?"). Un art maitrisé de la "manipulation" du spectateur (au meilleur sens du terme: celui qui mobilise sans cesse l'imagination et la pensée), un plaisir de la narration, avec enchevêtrement de "flashback" (qui ont leur réelle justification dramaturgique: c'est rare - et d'habitude j'aime pas le recours à cette grammaire narrative) où l'on découvre, peu ou peu, que chacun des personnages a une histoire qui le relie aux autres: sous forme de pliures, renvois, échos, étranges emboîtements de "poupées russes", tout un réseau de correspondances de plus en plus préoccupant, et bien sûr "whatsthefuckesque". Sans parler de la série de chiffres, ah, la fameuse série de chiffres (c'est é-norme, lol), dont il ne faut rien dire ici.
Quelque chose de monadologique, je sais pas, osons-dire "leibnizien"? Ou plus modestement, k dickien? Un Jeu de pistes où on ne cesse de se perdre, de trouver des repères, à partir desquels on se perd encore plus, et tout ça a une réelle ampleur affective, de l'ordre d'une catharsis grandissante. Peut-être est-on mené de pied en cap par le bout de nez, peut-être n'est-ce cousu que de fils blancs (ce ne serait que ça, je dirais bravo, c'est déjà énorme: parce qu'on plonge, inexorablement), peut-être que tout cela c'est n'est qu'un vaste jeu rhétorique, génératif et formel, fondé sur des métonymies, des condensations, etc, un peu à la manière de Locus solus ou des Impressions d'Afrique de Roussel.
Difficile d'en dire plus, sauf à déflorer divers éléments de cette vertigineuse machinerie à fictions.
Mais dans l'ensemble, pour ce que j'ai vu jusqu'ici, je dois dire que quasiment c'est ma série préférée. J'ai presque envie de l'acheter.
La musique est très belle (pas celle du générique, qui est pas mal. Très économe, comme le générique lui-même, le plus court que j'ai jamais vu).
Des échos? Qui a pratiqué?
Je ne savais rien, mais alors rien du tout, de Lost. Avantage de ne pas lire les échos, les spoilers, les critiques, etc, pour une série (6 saisons, de 2004 à 2010), pourtant abondamment discutée, commentée, analysée, et ayant fait date.
J'espère pouvoir en dire quelque chose plus tard. Mais je demanderais, si on veut bien, que ne soit rien mentionné des saisons 3 à 6, du moins pour l'instant.
Vite dit: je commence à avoir désormais une certaine habitude des séries, mais ces deux premières saisons de Lost, je dois dire que je suis sur le cul.
Là encore, y a des tas de critiques possibles (sur le plan idéologico-politique, quelques trucs pas très heureux). Mais sur le plan de l'imagination, du déploiement d'un mystère de plus en plus opaque, de plus en plus surprenant, de l'égarement (lost) du spectateur dans une profusion d'hypothèses, auxquelles sont proposées au compte goutte des réponses toujours partielles, presque toujours trompeuses, et ne faisant qu'amplifier les questions qu'il se pose, c'est du très grand art, narratif, de sf-fantastique "spéculatifs". Une intrigue "in progress", envoûtante. Impossible de lâcher le bazar. A chaque fin d'épisode, le spectateur, interdit et perplexe, se dit "mais bordel, what's the fuck?", et je pense que c'est le principe conceptuel qui organise ce vaste récit tout en tores et spirales. Le terme Lost est exploré dans toutes les dimensions de significations possibles et imaginables de l'égarement et de la perte. Y a de la mat (24 épisodes de 40 minutes par saison). 18h, d'affilée, ça le fait pas mal. Dans cette mat, y a des trucs pas terribles, parfois. Mais c'est émotionnellement très fort, un mélodramatisme accusé - quand y faut - sans trop en abuser; un "sense of secret and mystery" très réussi (entre L'île mystérieuse de Jules Vernes, le Prisonnier, Cube, et autres constructions en énigmes parano-intra-psychiques - tout ça en plus "what's the fuck?"). Un art maitrisé de la "manipulation" du spectateur (au meilleur sens du terme: celui qui mobilise sans cesse l'imagination et la pensée), un plaisir de la narration, avec enchevêtrement de "flashback" (qui ont leur réelle justification dramaturgique: c'est rare - et d'habitude j'aime pas le recours à cette grammaire narrative) où l'on découvre, peu ou peu, que chacun des personnages a une histoire qui le relie aux autres: sous forme de pliures, renvois, échos, étranges emboîtements de "poupées russes", tout un réseau de correspondances de plus en plus préoccupant, et bien sûr "whatsthefuckesque". Sans parler de la série de chiffres, ah, la fameuse série de chiffres (c'est é-norme, lol), dont il ne faut rien dire ici.
Quelque chose de monadologique, je sais pas, osons-dire "leibnizien"? Ou plus modestement, k dickien? Un Jeu de pistes où on ne cesse de se perdre, de trouver des repères, à partir desquels on se perd encore plus, et tout ça a une réelle ampleur affective, de l'ordre d'une catharsis grandissante. Peut-être est-on mené de pied en cap par le bout de nez, peut-être n'est-ce cousu que de fils blancs (ce ne serait que ça, je dirais bravo, c'est déjà énorme: parce qu'on plonge, inexorablement), peut-être que tout cela c'est n'est qu'un vaste jeu rhétorique, génératif et formel, fondé sur des métonymies, des condensations, etc, un peu à la manière de Locus solus ou des Impressions d'Afrique de Roussel.
Difficile d'en dire plus, sauf à déflorer divers éléments de cette vertigineuse machinerie à fictions.
Mais dans l'ensemble, pour ce que j'ai vu jusqu'ici, je dois dire que quasiment c'est ma série préférée. J'ai presque envie de l'acheter.
La musique est très belle (pas celle du générique, qui est pas mal. Très économe, comme le générique lui-même, le plus court que j'ai jamais vu).
Des échos? Qui a pratiqué?
Dernière édition par Baudouin II de Barvaux le Ven 26 Juil 2013 - 0:26, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Hi Jerzy
je me demande si tu n'exagères pas un peu; après GOT, événement dans l'histoire de la télé et du cinéma, sans distinction, Lost, comme ta série favorite... lol
vu quelques moments à l'époque où ça passait à la tv; jamais été très intéressé, attiré, ou curieux... toutes les séries qui sont passées ou qui passent sur TF1 et RTL me laissent indifférent...
sinon, je crois que les séries en général sont faites pour être consommées et disparaître (comme les rencontres sportives) : série-événement à son époque (je crois que Obama avait déplacé une intervention tv ( le discours sur l'état de l'union?) pour ne pas entrer en concurrence avec un épisode de la série, le dernier? ) Lost est aujourd'hui classé au-delà de la centième place des Highest Rated TV Series sur IMDB : 119ème.
(Acheter, dommage, j'avais vu les coffrets, y a quelques années en solde, pour rien, à la fnac...)
je me demande si tu n'exagères pas un peu; après GOT, événement dans l'histoire de la télé et du cinéma, sans distinction, Lost, comme ta série favorite... lol
vu quelques moments à l'époque où ça passait à la tv; jamais été très intéressé, attiré, ou curieux... toutes les séries qui sont passées ou qui passent sur TF1 et RTL me laissent indifférent...
sinon, je crois que les séries en général sont faites pour être consommées et disparaître (comme les rencontres sportives) : série-événement à son époque (je crois que Obama avait déplacé une intervention tv ( le discours sur l'état de l'union?) pour ne pas entrer en concurrence avec un épisode de la série, le dernier? ) Lost est aujourd'hui classé au-delà de la centième place des Highest Rated TV Series sur IMDB : 119ème.
(Acheter, dommage, j'avais vu les coffrets, y a quelques années en solde, pour rien, à la fnac...)
Borges- Messages : 6044
Re: Lost (2004- 2010)
Salut Borges,
oui, je conçois bien que cet enthousiasme, aidé par un climat caniculaire, s'exprime de façon quelque peu hyperbolique. lol.
Moi aussi, je ne m'y étais jamais intéressé, et de la même façon je m'étais jamais intéressé (en tout cas pas "en profondeur") à quelque série que ce soit jusqu'à cette année, en gros. C'est bien simple, tu le sais: Columbo étant la seule série dont j'ai jamais été fan jusqu'il y a peu.
De même, je n'ai jamais cherché à louer des séries à la médiathèque. Sauf une: Taken (disparition), dont j'avais parlé à l'époque.
Pour Lost, pareillement, j'étais il y a des années tombé sur quelques "moments", comme tu dis, qui n'ont jamais mobilisé mon attention, mon intérêt ou ma curiosité.
Mon enthousiasme - certainement un brin excessif - pour les séries dont je fais ici l'éloge - est peut-être davantage lié, plus fondamentalement, à la découverte tardive de l'immersion dans des objets narratifs de très longue durée, pratique rendue possible notamment par le streaming.
Cela dit, en relativisant mon point de vue de diverses manières et par de nécessaires réserves, je maintiens cet enthousiasme. J'aurais presque envie de t'inciter à être curieux de cet objet, à surmonter tes premières impressions, tant il me semble évident qu'en effet qu'il est impossible de s'y intéresser sous la modalité de "moments" captés de ci de là: il faut entrer dans le continuum pour saisir l'intérêt en question, qui augmente et s'intensifie de façon graduelle.
Je ne pense pas, même en considérant divers classements comme celui de IMDB, que Lost s'apparente à un banal produit télévisuel consommable et jetable, à ranger dans le tiroir "série pour tf1 et rtl". Bon, les classements, ça fluctue et si ça donne des indications sur une certaine tendance, ça n'informe pas forcément de la valeur "réelle" ou "objective". Il faut aussi considérer que c'est une série terminée, qui en outre a fortement déçu sa "fanbase" pour sa dernière saison et surtout son dernier épisode. Les "fans" ont considéré que la série avait coulé elle-même son propre potentiel, d'abord en s'enlisant, ensuite en proposant trop d'explications, pour satisfaire la curiosité, la demande d'explication des spectateurs, demande de plus en plus forte, et qui traduisait elle-même une déception potentielle. Qui fut d'ailleurs massive pour le dernier épisode.
(je connaissais l'anecdote sur Obama, l'ayant lue à l'époque sous ta plume sur le topic "séries". Une autre anecdote, c'est que, pour le soir du dernier épisode était diffusé sur la fox un épisode des Simpsons où Homer écrivait sur un tableau: "La fin de Lost: c'était le rêve du chien").
J'ai lu, également, depuis, des tas d'échos critiques. Les appréciations sont contrastées, ce n'est pas douteux. Sur IMDB, puisque tu y fais référence, la cote générale est de 8,3, ce qui est quand-même notable.
Il est possible que Lost ne soit pas restée à la hauteur de ses 2 premières saisons, qu'elle n'ait pas accompli ses promesses, qu'elle reste inaboutie à plein d'égards, etc.
Mais à ce stade de ma vision "marathon", en considérant ces seules 2 saisons, je maintiens mon enthousiasme: pour les choses que j'ai relevées plus haut. Cette série reste culte pour bcp, ce qui ne veut pas dire grand chose me diras-tu, et c'est vrai que ça veut pas dire grand chose. Un peu comme les quotations, quoi. lol. Les quotations, c'est bien, ça permet de prendre le pouls de tendances, de se "diriger" parmi les objets sur lesquels un certain consensus, d'un certain ordre, dépendant de certaines conditions, règne, quant à leur valeur. Mais si je prise les listes et les quotations, bien sûr, je ne me sens pas tenu d'y adhérer comme à une critériologie objective. D'autant que les critiques dites professionnelles ou institutionnelles recensées par IMDB, par exemple, à côté des critiques des "spectateurs", je ne leur accorde pas spécialement une valeur en elles-mêmes.
C'est, à mon sens, une série très brillante, ambitieuse (artistiquement, et par son propos - et qui n'en est pas moins susceptible d'être critiquée, évidemment), qui mérite plus que sa relative dépréciation depuis quelques années, le fait qu'elle soit un peu oubliée, etc. Une série dont les qualités intrinsèques (de mise en scène, de conception, d'interprétation, de storyboard, d'imagination, mais aussi de profondeur, au sens de densité) en font, à l'instar de jadis Le prisonnier (qui par contre n'a jamais réussi à m'intéresser) une proposition de "fiction longue" originale et singulière.
J'en dirai plus dans la suite, en fonction de la suite, et sans préjuger d'une possible déception de ma part également.
Par contre, je ne te suivrai pas dans ton jugement général, ici, selon lequel "les séries en général sont faites pour être consommées et disparaître (comme les rencontres sportives)".
Sans me prononcer ici sur les rencontres sportives (peut-être que je vais là aussi en devenir fan, qui sait...), je ne vois pas tellement pourquoi les séries "en général" * seraient cet objet amoindri, dégradé, sans valeur pérenne, voué la jouissance éphémère de l'instant, une sorte de sous-art qui ne laisserait pas de traces, etc etc. Enfin, bref, autant de caractéristiques qui rejoignent une certaine vision dichotomique, fondée sur une certaine idée de l'art et du consumérisme, y compris celle d'un Daney (la différence fameuse entre le "visuel" et le "cinématographique", par exemple), distinctions qui ont déjà été débattues ici. Distinctions susceptibles d'être "déconstruites", si on veut, et toi-même as stimulé cette "déconstruction" à plusieurs reprises, en révélant des enjeux à repenser (notamment sur le lien film-spectateur, la modification de l'horizon de réception, d'une certaine conception et pratique de la "communauté" des spectateurs, par le net notamment).
[(*) Correctif: si par "en général", tu entends la majorité des séries proposées: là, je te rejoindrais tout à fait. Donc, oui, je parle bien de quelques séries (6 ou 7, jusqu'à présent) qui sont parvenues à susciter mon intérêt. Pour une bonne série, il doit certainement y en avoir 20 mauvaises, propices à l'usage que tu évoques. Force est quand-même de constater que le domaine des séries a été investi, depuis une bonne décennie, par des projets, scénaristes et concepteurs ayant des ambitions "qualitatives" (pour faire court: de contenu, de densité, de forme, d'interprétation), alors que, peut-être, le domaine des longs-métrages pâtit, lui, d'un certain appauvrissement ou essoufflement, d'une certaine frilosité et d'un certain "formatage" ...]
Autre chose aussi: peut-être, certainement même, que dans leur pratique de spectateur, bcp suivent les séries dans cet esprit, cette disposition: comme quelque chose qu'on suit, comme une rencontre sportive, comme une coupe du monde, un tournoi de tennis, c'est possible (- et ça se défend), puis qu'on oublie après. Pour d'autres, c'est une sorte d'habitude, de routine que l'on met en place, et qui permet de "tuer le temps", etc etc. Il y a mille approches et pratiques possibles. En ce qui me concerne, je ne pratique pas les séries (cad ici Lost, ou GOT) avec un esprit ou une disposition de cet ordre. Je m'y implique autant que pour un objet réputé "noble", je n'y donne pas moins d'attention, je n'y consacre pas moins d'effort, ou d'insistance (même: si je devais ne pas insister ou y donner de l'effort, je crois bien que je laisserais tomber très rapidement. Les premiers épisodes étant souvent pour moi une purge tant je les trouve mauvais, décourageants). Et surtout: je n'y trouve pas moins matière à penser. Peut-être même plus. En raison peut-être de la durée, qui entraine chez moi une forme de méditation. Et encore: je m'y intéresse aussi parce que ça stimule un intérêt personnel pour la conception/écriture feuilletonnesque, ou de "saga". En termes d'écriture: je suis admiratif, j'aimerais pouvoir créer ce genre de chose. Je sais, ça peut prêter à rire, ricaner même... Disons que cet enthousiasme est peut-être davantage lié à un désir de création, d'écriture, d'élaboration et de construction de fictions.
Toujours est-il que cet investissement, pour en revenir aux quelques séries en question, est justement une pratique, voire l'objet d'une "discipline", pour les passionnés de ces séries en question: qui construisent une communauté là dessus - de partage, de commentaire, d'analyse, d'interprétation, etc. Et c'est un phénomène qui perdure dans le temps. Les sites communautaires de fans de Lost sont toujours en activité, drainent de nouveaux mordus. Et chacun y va de son exégèse, parfois très érudite. Il y a une passion partagée de l'imaginaire, de la fiction, du récit, du processus de développement. Les "anciens" ne renient pas leur amour passée, bien au contraire: c'est un intérêt qui se poursuit dans le temps. Et comme on le sait, les sites de passionnés de certaines séries sont aussi lieu de recherche très documentée, sur tous les aspects de la production, de la conception, etc: c'est pas du tout passif comme intérêt. C'est un amour de la série qui n'est pas moins fort que l'amour d'un cinéphile fétichiste pour Citizen Kane, et qui ne déploie pas moins de désirs de recherche et d'approfondissement. Le même phénomène peut être observé pour la "fanbase" de GOT.
Donc, je ne vois pas tellement que ce type d'objet cinématographique que sont certaines séries (on ne voit pas tellement se développer, dans le temps, un phénomène analogue pour Julie Lescaut, Louis la Brocante ou Les experts à Miami, à Los Angeles, à Triffouilli-les-oies, que sais-je encore), est par "nature" voué à être consommé puis à disparaître assez rapidement de la mémoire.
Pour ma part, je continue à remettre en cause ce partage trop aisément établi, qui les années passant me semble de moins en moins pertinent, si tant est qu'il l'a jamais été.
Je pense, à tort ou à raison bien sûr, que certaines séries ont été conçues, pensées, mises en scène, etc, avec bcp de soin et d'intelligence, et que leurs qualités ne déméritent pas par rapport à cet étalon qu'on s'efforce à tout prix de maintenir comme mesure de qualité et de jugement de ce qui "reste", à travers le temps, non dégradé. Il me semble que ce qui déchoit, actuellement, et là aussi en exagérant un peu, c'est un certain privilège "artistocratique" de la cinéphilie du "cinématographe". Et ce n'est pas forcément un mal, une chute, un déclin, le signe alarmant d'une régression, etc...
Attention, pour autant, je ne verse pas du tout dans la tendance "cultural studies", qui prétend faire de Star-Trek ou autres (Twin peaks, pour un Pacôme Thiellement - une série qui, bizarrement dira-t-on peut-être, ne m'a jamais tenté jusqu'ici) un objet de (pseudo-)réflexion aussi riche que Ulysse de Joyce, etc. Je ne dis pas ces choses là. Mais je ne les dis pas non plus au sujet de ce qu'on appelle les "grands films" de l'histoire du cinéma... Je ne sombre pas non plus dans ce que certains nomment, pour de bonnes et surtout mauvaises raisons, un "relativisme". Mais comme tu sais, je ne considère pas qu'en "nature" ou "essence", une sonate de Beethoven a une valeur intrinsèque nécessairement plus élevée qu'une chanson de John Martyn, etc. Quand j'aime, quand je suis affecté je ne hiérachise pas. C'est sans doute un problème. Il faudrait encore distinguer, sans doute, les différents degrés de puissance selon lesquels on peut être affecté. Mais sans hiérarchiser, je tiens compte des différences, de conception, de construction, de "savoir" mis en jeu, de condition de possibilité: je ne dis pas que "tout se vaut" dans une "indifférence" généralisée de tout avec tout, ni qu'il faudrait refuser de différencier les "objets esthétiques" (aussi bien dans leur condition de production que de réception). Néanmoins, je ne crois pas, non, ni à la "défaite de la culture" (au sens d'un Finkielkraut), ni à "l'industrie culturelle" (au sens d'un Adorno), ni à la "société du spectacle" (au sens d'un Debord), ni à la "société de consommation" (au sens d'un Baudrillard), etc, etc. On va pas ici reprendre le débat. lol. Mais non, je ne céderai pas là-dessus.
Comme tu sais, je conteste donc aussi, de l'autre côté, là encore à tort ou à raison, ce quasi-dogme selon lequel les films "en général" ou "par essence", seraient forcément dotés des attributs nobles de l'art qui feraient défaut, "en général" ou "par essence", aux séries. J'y ai longtemps cru, et j'ai longtemps méprisé les "séries tv", j'en ai longtemps causé de façon aussi virulente même que certains ici, croyant même en les lisant m'entendre en causer il y a des années. Parce que je n'en pratiquais aucune et avais une idée très "pure" de ce que pouvait ou devait être le "Cinéma".
Un tel débat n'est pas clos, du moins je le pense, lol.
Mon enthousiasme pour Lost ainsi que GOT semblera certainement exagéré, je le conçois, mais il est non feint. C'est peut-être l'été, c'était peut-être l'hiver, ce sera peut-être le printemps, qui en sont la cause; peut-être changerai-je d'avis d'ici quelques temps.
Mais en l'état actuel, oui, je dois bien le dire, quitte à décevoir lourdement la sphère des "cinéphiles" puristes: je trouve plus de richesse et d'implication, comme spectateur, actuellement dans "certaines séries" que dans bcp de films, portés très haut, qu'on crédite d'une grande richesse (thématique ou réflexive) et qui moi n'ennuient terriblement (euphémisme), parce qu'à l'inverse je ne trouve pas du tout qu'ils ont cette richesse qu'on leur prête. Je ne citerai pas de titres ni de cinéastes, pour ne pas indisposer (plus que de raison, et plus encore qu'il ne sied, je veux dire, lol) les participants à ce forum...
Là encore: c'est peut-être parce que je me passionne, actuellement, au delà des "séries" elles-mêmes, au delà du "cinéma" lui-même (qui - peut-être -m'intéresse de moins en moins ) pour le phénomène du "feuilleton" considéré comme "roman-fleuve", ce qu'il suscite comme type d'immersion, et que ce qui m'intéresse plus particulièrement encore, c'est, comme je le disais plus haut, que ça soulève pour moi des questions d'écriture, de technique d'écriture, de narration, de construction, qui aujourd'hui m'intéressent davantage que le fait de regarder des films, fussent-ils de très grande valeur. Et des films, j'en ai vu, bcp. Et j'en vois encore bcp, bien sûr. Mais j'ai de moins en moins envie d'écrire sur les films. D'ailleurs, j'écris très peu, comme tu sais, et finalement, encore moins sur les films. Écrire sur les films, ou à propos de films, c'est ou ça a été essentiellement "circonstanciel", pour ainsi dire: parce qu'il y a un lieu où on peut écrire et partager des textes, des avis, des analyses. ça aurait pu être un forum sur la musique: j'ai essayé un temps, mais ça marchait pas, ça n'encourageait pas un certain type de scription. Les participants de forums sur la musique veulent qu'on parle de musique avant toute chose, le discours, les commentaires, doivent avoir cet objet précis qu'est "la musique".
Par contre, sur un forum sur le "cinéma", on est susceptible de parler d'autre chose que juste "les films". On peut même participer à un forum sur le "cinéma" en parlant très peu de films et de cinéma, parce que c'est un objet foncièrement mixte, qui offre un "sujet de discussion" moins sacralisé - espère-t-on, moins rivé à un fantasme de pureté de l'objet -, et davantage susceptible d'être débordé par un commentaire extra ou péri-cinématographique. C'est ça qui me plait. Aah, le "hors-sujet": le seul sujet qui importe vraiment, dans tous les sens du mot "importer". (lol)
Toujours est-il que oui, Lost est pour l'instant ma série préférée. En règle générale, mes enthousiasmes fondamentaux perdurent. Mais certes il ne faut préjuger de rien: il y a tant de films que j'ai portés bien haut, qui aujourd'hui pour moi n'ont plus grande valeur.
[(J'écris au fur et à mesure, en me corrigeant, donc je réédite bcp).
Addendum: Je me suis longtemps étonné, et je m'étonne, comme plusieurs, de ce retour (en ciné, littérature, tv) - qui dure, qui n'est pas qu'un "effet de mode" - des fictions de longue haleine, des sagas, de ce besoin de s'immerger dans des récits complexes et sans fin, ou à la fin très lointaine. Au delà du phénomène des "séries tv", il y a une forme de Zeitgeist qui donne à penser. Le méta-filmique, le méta-discursif, le méta-littéraire, etc (termes un peu bateau, mais pour simplifier ici au max), semblent provisoirement en berne, autant comme pratiques d'écriture, de conception, de ce que "peut le langage", que pratiques de lecture et de regard... On est apparemment loin de toute une tradition, essentiellement destinée à un public "d'intellectuels" me semble-t-il, dans laquelle le langage travaille à s'interroger lui-même, et qui a un peu vécu, si l'on peut dire: Beckett, Sarraute, en cinéma, Godard, etc. Ce type de préoccupation "méta" (même si Beckett, Sarraute, Godard, ça ne se réduit pas à du "méta", bien sûr) ne semble, je dis bien ne semble, plus à l'ordre du jour. C'est une pratique passée, qui ne semble plus intéresser grand-monde, y compris les "intellectuels".
Est-ce un bien, est-ce un mal? Une "régression", une "progression", une phase dans un mouvement de balancier? Est-ce par exemple l'indice (ce que certains soutiennent) que les "gens" ne veulent plus "réfléchir", notamment sur les médiums, les dispositifs; préférant "s'étourdir", "s'oublier", dans les "histoires"? Je ne le crois pas vraiment, je ne le crois même pas du tout.
Il me semble, mais il faudrait déployer une réflexion de fond, que c'est l'indice au contraire que les "gens" (aussi bien "concepteurs" que "consommateurs") reviennent aux grandes fictions sur le mode d'une vaste herméneutique active, se rapportent aux fictions sur un mode lui-même réflexif, méta-narratif, et que cette réflexivité est notamment, mais pas seulement, liée à la pratique de durées longues: immersion et réflexion n'étant plus forcément contradictoires (comme on l'a longtemps soutenu - dans une certaine approche post-structuraliste, pour simplifier, de la littérature comme "dispositif").
Au contraire, sous un certain angle, c'est la "machinerie" ou "machination" littéraire, narrative, qui passionne pour elle-même, et de façon pas du tout naïve: comme matière permettant de se relier activement au monde, de convertir des affects, d'élaborer un rapport critique à ce qu'on nomme "le réel" - une fois entériné que le "mot" n'est pas "la chose", que "l'image" n'est pas le "donné", ce que veulent à tout prix nous rappeler ceux qui craignent que les récits, histoires, fictions, nous aliènent fondamentalement (selon le principe "immersion=oubli de soi"/"distance=prise de conscience").
Je suis donc tenté de penser que ce regain d'intérêt pour ce type de fictions tient plutôt à un enchevêtrement du "narratif" et du "méta-narratif".
Et c'est fort sensible pour moi dans Lost, précisément.
Il y a énormément de "mise en abyme", là-dedans, de dimensions convoquées, de "savoirs", mis en jeu. La "religion" par exemple, la "spiritualité", dans Lost, devient un motif de réflexion sur le religieux lui-même envisagé comme fiction narrative, élaboration. La "foi" est constamment interrogée, mise en abyme, dans Lost. C'est l'enjeu et le centre même de la mise en scène du récit. Foi dans le récit, l'histoire, la fiction eux-mêmes.
- attention, spoilers (non sur l'intrigue, mais le processus) :
Lost réclame du spectateur un acte de foi dans l'histoire abracadabrante qu'on lui raconte, histoire qui ne cesse de lui proposer autant de motifs de mettre constamment en doute que cette histoire en est bien une (difficile d'en dire plus, faut le voir, lol), et en même temps l'amènent à faire l'expérience que la possibilité même du récit dépend de sa foi active, paradoxalement attisée par le doute qu'il n'est peut-être qu'illusion, jeu formel, manipulation, fantasme, simulacre, fabulation. Et qui évolue selon un trajet fait de pistes auxquelles le spectateur croit, puis qui sont contestées par une nouvelle révélation, à partir de laquelle il se retrouve complètement perdu. Révélation qui se développe progressivement, puis qui se trouve contestée par une nouvelle, qui l'égare à son tour.
Cette procédure crée une "addiction" chez le spectateur, car bien sûr il s'attend, au bout d'un moment, à une sorte de retournement, ou d'élargissement de perception, qui replace, inclut ou déplace la pièce, l'élément, tel personnage donnés, dans une configuration plus vaste, qui tout en lui livrant une clef le perd plus encore. Se développe ainsi chez le spectateur une sorte de complicité excitante pour le jeu narratif lui-même: il suit le développement tout en s'attendant à ce que les cartes soient distribuées selon une donne encore plus zarbi, indécidable, et goûte à la fois le fait de se sentir de plus en plus roulé dans la farine, et conduit à une perception de plus en plus déroutante de l'enjeu du récit, ainsi que de la nature de l'univers concerné par ce récit. Côté personnages, c'est le même principe d'incertitude exponentielle: on croyait quel tel était "gentil", tel autre "méchant", et on vient à se demander si le "gentil" n'était pas le "méchant" et inversement. Mais comme le processus de développement est subtil et pas mécanique: même de ces renversements, il doute. Mais dire cela, c'est déjà trop, et trop réducteur parce que c'est à la fois plus compliqué, plus riche et plus subtil que ça....
Parce qu'à tout ça, attention, faut encore ajouter qu'il y a deux (au minimum, lol) temporalités dans la série: ce qui arrive dans le "présent" (de l'île) et l'histoire passée de chacun des personnages (sous forme de flashback), histoires qui comme je le disais, tissent un réseau progressif de correspondances les reliant les uns aux autres, et, s'enchevêtrant, se nouant au récit du "présent" sous la forme d'un tore spiralé (si j'puis dire), redoublent et relancent à la fois la série d'événements du Passé et la série d'événements du Présent, dans une 3è série temporelle, virtuelle, qui serait: "ce qui ne s'est pas encore passé, mais qui va (peut-être) avoir lieu". Sans qu'on sache très bien quel est le "lieu", mais dont on devine (à ce stade en tout cas de ma compréhension des deux premières saisons) qu'il sera "dévoilé" au moment où les deux séries, Présent de l'ile et Passé des personnages, se rejoindront en quelque manière. Ah oui. Nolan peut aller se rhabiller, hein. Et c'est mieux que du Philip K Dick, parce que c'est du Philip K Dick au carré: deux barils pour le prix d'un, et pour le prix d'un, c'est pas cher. (J'hyperbolise encore) Et ce sont aussi, en pluche, oserais-je le dire, si, j'ose le dire, de "très belles histoires d'amours" (perdus). lol.
Il faudrait demander à Lost Photographer de revenir parmi nous, pour nous éclairer un peu sur tout ça
Pour le dire encore autrement, et pour égarer davantage: il y a bien une histoire, il y a bien une unité profonde de sens, mais qui n'a pas forcément lieu dans ce que cette histoire raconte. C'est bien une histoire, pas un jeu "post-moderne" de l'ordre du commentaire: elle est prise au sérieux, attention, et réclame de l'être, elle est complexe et très élaborée, mais elle semble raconter elle-même une autre histoire, plus intime, plus secrète, plus affective, comportant de multiples facettes se répondant "en miroir", qui la débordent - en direction du spectateur (émotionnelles, c'est pas du tout abstrait, contrairement à ce que laisserait penser ma description très vague). C'est véritablement un "récit ouvert".
Le récit long devient alors pour le spectateur le lieu d'une pratique pour ainsi dire "analytique", "anamnétique", lieu privilégié autorisant le déploiement d'une méditation, d'une réflexion, y compris sur l'enjeu de toute fiction en général, comme telle. Le réel (personne, sujet, collectivité, champ social, champ politique, etc) comme élaboration d'une fiction, fiction narrative et générative. Le spectateur/lecteur collabore lui-même activement, et réflexivement, à cette élaboration de sens, à cette élaboration qui est collective. Ce ne serait plus ici le rapport strictement privé, intime, avec une "Œuvre" close sur elle-même, en surplomb, à laquelle devrait s'élever ou se hisser le lecteur/spectateur. Dans Lost, en l'occurrence, le spectateur apporte bcp de lui-même, activement: il apporte son interprétation, son "vécu", sa lecture, son analyse, de telle sorte qu'on peut presque dire que la fiction proposée comme matériau repose essentiellement sur sa capacité à investir activement (ou dans une passivité active) ce qu'il voit, se l'approprier dans un jeu d'interprétation actif - qui ne se clôt pas dans les seules limites spatio-temporelles de la "série", qui se (ou le) poursuit ailleurs, et après.
["fin du spoiler sur le "processus"]
C'est sensible pour moi, aussi bien dans la conception que dans l'expérience que fait le spectateur/lecteur de ces grands récits fictionnels, qui n'ont pas grand chose à voir avec ce qu'un Lyotard, par ex, nommait les "grands récits" (fondateurs, téléologiques) dans la faillite desquelles il prétendait voir le régime de la "post-modernité". Et en quoi il s'est complètement trompé, ce me semble.
Il me semble donc, c'est l'intuition qui me travaille, que tout ça est bcp plus complexe que ne laissent à penser ces distributions théoriques qui ont peut-être fait leur temps, elles aussi, à titre de "grands récits" (téléologiques eux-mêmes) qui étaient censés révéler ou dévoiler une fois pour toutes la nature de qu'on définit comme les "grands récits". ]
PS: j'ai été assez refroidi par la suite de la saison 3 de the walkind dead. J'ai eu l'impression d'une nette baisse de qualité, qu'elle déclinait pour le coup dans ce qu'on pourrait nommer le "sérial" standard: intrigue convenue et mal torchée, personnages de plus en plus falots et stéréotypés. Je ne sais pas si c'est dû à la longue césure entre les épisodes précédents et la reprise, mais je n'ai pas accroché du tout. Tu as ressenti ça aussi?
PS2: rhoôô, je bisque, avec cette affaire soldée à un prix défiant toute concurrence... Pfff
oui, je conçois bien que cet enthousiasme, aidé par un climat caniculaire, s'exprime de façon quelque peu hyperbolique. lol.
Moi aussi, je ne m'y étais jamais intéressé, et de la même façon je m'étais jamais intéressé (en tout cas pas "en profondeur") à quelque série que ce soit jusqu'à cette année, en gros. C'est bien simple, tu le sais: Columbo étant la seule série dont j'ai jamais été fan jusqu'il y a peu.
De même, je n'ai jamais cherché à louer des séries à la médiathèque. Sauf une: Taken (disparition), dont j'avais parlé à l'époque.
Pour Lost, pareillement, j'étais il y a des années tombé sur quelques "moments", comme tu dis, qui n'ont jamais mobilisé mon attention, mon intérêt ou ma curiosité.
Mon enthousiasme - certainement un brin excessif - pour les séries dont je fais ici l'éloge - est peut-être davantage lié, plus fondamentalement, à la découverte tardive de l'immersion dans des objets narratifs de très longue durée, pratique rendue possible notamment par le streaming.
Cela dit, en relativisant mon point de vue de diverses manières et par de nécessaires réserves, je maintiens cet enthousiasme. J'aurais presque envie de t'inciter à être curieux de cet objet, à surmonter tes premières impressions, tant il me semble évident qu'en effet qu'il est impossible de s'y intéresser sous la modalité de "moments" captés de ci de là: il faut entrer dans le continuum pour saisir l'intérêt en question, qui augmente et s'intensifie de façon graduelle.
Je ne pense pas, même en considérant divers classements comme celui de IMDB, que Lost s'apparente à un banal produit télévisuel consommable et jetable, à ranger dans le tiroir "série pour tf1 et rtl". Bon, les classements, ça fluctue et si ça donne des indications sur une certaine tendance, ça n'informe pas forcément de la valeur "réelle" ou "objective". Il faut aussi considérer que c'est une série terminée, qui en outre a fortement déçu sa "fanbase" pour sa dernière saison et surtout son dernier épisode. Les "fans" ont considéré que la série avait coulé elle-même son propre potentiel, d'abord en s'enlisant, ensuite en proposant trop d'explications, pour satisfaire la curiosité, la demande d'explication des spectateurs, demande de plus en plus forte, et qui traduisait elle-même une déception potentielle. Qui fut d'ailleurs massive pour le dernier épisode.
(je connaissais l'anecdote sur Obama, l'ayant lue à l'époque sous ta plume sur le topic "séries". Une autre anecdote, c'est que, pour le soir du dernier épisode était diffusé sur la fox un épisode des Simpsons où Homer écrivait sur un tableau: "La fin de Lost: c'était le rêve du chien").
J'ai lu, également, depuis, des tas d'échos critiques. Les appréciations sont contrastées, ce n'est pas douteux. Sur IMDB, puisque tu y fais référence, la cote générale est de 8,3, ce qui est quand-même notable.
Il est possible que Lost ne soit pas restée à la hauteur de ses 2 premières saisons, qu'elle n'ait pas accompli ses promesses, qu'elle reste inaboutie à plein d'égards, etc.
Mais à ce stade de ma vision "marathon", en considérant ces seules 2 saisons, je maintiens mon enthousiasme: pour les choses que j'ai relevées plus haut. Cette série reste culte pour bcp, ce qui ne veut pas dire grand chose me diras-tu, et c'est vrai que ça veut pas dire grand chose. Un peu comme les quotations, quoi. lol. Les quotations, c'est bien, ça permet de prendre le pouls de tendances, de se "diriger" parmi les objets sur lesquels un certain consensus, d'un certain ordre, dépendant de certaines conditions, règne, quant à leur valeur. Mais si je prise les listes et les quotations, bien sûr, je ne me sens pas tenu d'y adhérer comme à une critériologie objective. D'autant que les critiques dites professionnelles ou institutionnelles recensées par IMDB, par exemple, à côté des critiques des "spectateurs", je ne leur accorde pas spécialement une valeur en elles-mêmes.
C'est, à mon sens, une série très brillante, ambitieuse (artistiquement, et par son propos - et qui n'en est pas moins susceptible d'être critiquée, évidemment), qui mérite plus que sa relative dépréciation depuis quelques années, le fait qu'elle soit un peu oubliée, etc. Une série dont les qualités intrinsèques (de mise en scène, de conception, d'interprétation, de storyboard, d'imagination, mais aussi de profondeur, au sens de densité) en font, à l'instar de jadis Le prisonnier (qui par contre n'a jamais réussi à m'intéresser) une proposition de "fiction longue" originale et singulière.
J'en dirai plus dans la suite, en fonction de la suite, et sans préjuger d'une possible déception de ma part également.
Par contre, je ne te suivrai pas dans ton jugement général, ici, selon lequel "les séries en général sont faites pour être consommées et disparaître (comme les rencontres sportives)".
Sans me prononcer ici sur les rencontres sportives (peut-être que je vais là aussi en devenir fan, qui sait...), je ne vois pas tellement pourquoi les séries "en général" * seraient cet objet amoindri, dégradé, sans valeur pérenne, voué la jouissance éphémère de l'instant, une sorte de sous-art qui ne laisserait pas de traces, etc etc. Enfin, bref, autant de caractéristiques qui rejoignent une certaine vision dichotomique, fondée sur une certaine idée de l'art et du consumérisme, y compris celle d'un Daney (la différence fameuse entre le "visuel" et le "cinématographique", par exemple), distinctions qui ont déjà été débattues ici. Distinctions susceptibles d'être "déconstruites", si on veut, et toi-même as stimulé cette "déconstruction" à plusieurs reprises, en révélant des enjeux à repenser (notamment sur le lien film-spectateur, la modification de l'horizon de réception, d'une certaine conception et pratique de la "communauté" des spectateurs, par le net notamment).
[(*) Correctif: si par "en général", tu entends la majorité des séries proposées: là, je te rejoindrais tout à fait. Donc, oui, je parle bien de quelques séries (6 ou 7, jusqu'à présent) qui sont parvenues à susciter mon intérêt. Pour une bonne série, il doit certainement y en avoir 20 mauvaises, propices à l'usage que tu évoques. Force est quand-même de constater que le domaine des séries a été investi, depuis une bonne décennie, par des projets, scénaristes et concepteurs ayant des ambitions "qualitatives" (pour faire court: de contenu, de densité, de forme, d'interprétation), alors que, peut-être, le domaine des longs-métrages pâtit, lui, d'un certain appauvrissement ou essoufflement, d'une certaine frilosité et d'un certain "formatage" ...]
Autre chose aussi: peut-être, certainement même, que dans leur pratique de spectateur, bcp suivent les séries dans cet esprit, cette disposition: comme quelque chose qu'on suit, comme une rencontre sportive, comme une coupe du monde, un tournoi de tennis, c'est possible (- et ça se défend), puis qu'on oublie après. Pour d'autres, c'est une sorte d'habitude, de routine que l'on met en place, et qui permet de "tuer le temps", etc etc. Il y a mille approches et pratiques possibles. En ce qui me concerne, je ne pratique pas les séries (cad ici Lost, ou GOT) avec un esprit ou une disposition de cet ordre. Je m'y implique autant que pour un objet réputé "noble", je n'y donne pas moins d'attention, je n'y consacre pas moins d'effort, ou d'insistance (même: si je devais ne pas insister ou y donner de l'effort, je crois bien que je laisserais tomber très rapidement. Les premiers épisodes étant souvent pour moi une purge tant je les trouve mauvais, décourageants). Et surtout: je n'y trouve pas moins matière à penser. Peut-être même plus. En raison peut-être de la durée, qui entraine chez moi une forme de méditation. Et encore: je m'y intéresse aussi parce que ça stimule un intérêt personnel pour la conception/écriture feuilletonnesque, ou de "saga". En termes d'écriture: je suis admiratif, j'aimerais pouvoir créer ce genre de chose. Je sais, ça peut prêter à rire, ricaner même... Disons que cet enthousiasme est peut-être davantage lié à un désir de création, d'écriture, d'élaboration et de construction de fictions.
Toujours est-il que cet investissement, pour en revenir aux quelques séries en question, est justement une pratique, voire l'objet d'une "discipline", pour les passionnés de ces séries en question: qui construisent une communauté là dessus - de partage, de commentaire, d'analyse, d'interprétation, etc. Et c'est un phénomène qui perdure dans le temps. Les sites communautaires de fans de Lost sont toujours en activité, drainent de nouveaux mordus. Et chacun y va de son exégèse, parfois très érudite. Il y a une passion partagée de l'imaginaire, de la fiction, du récit, du processus de développement. Les "anciens" ne renient pas leur amour passée, bien au contraire: c'est un intérêt qui se poursuit dans le temps. Et comme on le sait, les sites de passionnés de certaines séries sont aussi lieu de recherche très documentée, sur tous les aspects de la production, de la conception, etc: c'est pas du tout passif comme intérêt. C'est un amour de la série qui n'est pas moins fort que l'amour d'un cinéphile fétichiste pour Citizen Kane, et qui ne déploie pas moins de désirs de recherche et d'approfondissement. Le même phénomène peut être observé pour la "fanbase" de GOT.
Donc, je ne vois pas tellement que ce type d'objet cinématographique que sont certaines séries (on ne voit pas tellement se développer, dans le temps, un phénomène analogue pour Julie Lescaut, Louis la Brocante ou Les experts à Miami, à Los Angeles, à Triffouilli-les-oies, que sais-je encore), est par "nature" voué à être consommé puis à disparaître assez rapidement de la mémoire.
Pour ma part, je continue à remettre en cause ce partage trop aisément établi, qui les années passant me semble de moins en moins pertinent, si tant est qu'il l'a jamais été.
Je pense, à tort ou à raison bien sûr, que certaines séries ont été conçues, pensées, mises en scène, etc, avec bcp de soin et d'intelligence, et que leurs qualités ne déméritent pas par rapport à cet étalon qu'on s'efforce à tout prix de maintenir comme mesure de qualité et de jugement de ce qui "reste", à travers le temps, non dégradé. Il me semble que ce qui déchoit, actuellement, et là aussi en exagérant un peu, c'est un certain privilège "artistocratique" de la cinéphilie du "cinématographe". Et ce n'est pas forcément un mal, une chute, un déclin, le signe alarmant d'une régression, etc...
Attention, pour autant, je ne verse pas du tout dans la tendance "cultural studies", qui prétend faire de Star-Trek ou autres (Twin peaks, pour un Pacôme Thiellement - une série qui, bizarrement dira-t-on peut-être, ne m'a jamais tenté jusqu'ici) un objet de (pseudo-)réflexion aussi riche que Ulysse de Joyce, etc. Je ne dis pas ces choses là. Mais je ne les dis pas non plus au sujet de ce qu'on appelle les "grands films" de l'histoire du cinéma... Je ne sombre pas non plus dans ce que certains nomment, pour de bonnes et surtout mauvaises raisons, un "relativisme". Mais comme tu sais, je ne considère pas qu'en "nature" ou "essence", une sonate de Beethoven a une valeur intrinsèque nécessairement plus élevée qu'une chanson de John Martyn, etc. Quand j'aime, quand je suis affecté je ne hiérachise pas. C'est sans doute un problème. Il faudrait encore distinguer, sans doute, les différents degrés de puissance selon lesquels on peut être affecté. Mais sans hiérarchiser, je tiens compte des différences, de conception, de construction, de "savoir" mis en jeu, de condition de possibilité: je ne dis pas que "tout se vaut" dans une "indifférence" généralisée de tout avec tout, ni qu'il faudrait refuser de différencier les "objets esthétiques" (aussi bien dans leur condition de production que de réception). Néanmoins, je ne crois pas, non, ni à la "défaite de la culture" (au sens d'un Finkielkraut), ni à "l'industrie culturelle" (au sens d'un Adorno), ni à la "société du spectacle" (au sens d'un Debord), ni à la "société de consommation" (au sens d'un Baudrillard), etc, etc. On va pas ici reprendre le débat. lol. Mais non, je ne céderai pas là-dessus.
Comme tu sais, je conteste donc aussi, de l'autre côté, là encore à tort ou à raison, ce quasi-dogme selon lequel les films "en général" ou "par essence", seraient forcément dotés des attributs nobles de l'art qui feraient défaut, "en général" ou "par essence", aux séries. J'y ai longtemps cru, et j'ai longtemps méprisé les "séries tv", j'en ai longtemps causé de façon aussi virulente même que certains ici, croyant même en les lisant m'entendre en causer il y a des années. Parce que je n'en pratiquais aucune et avais une idée très "pure" de ce que pouvait ou devait être le "Cinéma".
Un tel débat n'est pas clos, du moins je le pense, lol.
Mon enthousiasme pour Lost ainsi que GOT semblera certainement exagéré, je le conçois, mais il est non feint. C'est peut-être l'été, c'était peut-être l'hiver, ce sera peut-être le printemps, qui en sont la cause; peut-être changerai-je d'avis d'ici quelques temps.
Mais en l'état actuel, oui, je dois bien le dire, quitte à décevoir lourdement la sphère des "cinéphiles" puristes: je trouve plus de richesse et d'implication, comme spectateur, actuellement dans "certaines séries" que dans bcp de films, portés très haut, qu'on crédite d'une grande richesse (thématique ou réflexive) et qui moi n'ennuient terriblement (euphémisme), parce qu'à l'inverse je ne trouve pas du tout qu'ils ont cette richesse qu'on leur prête. Je ne citerai pas de titres ni de cinéastes, pour ne pas indisposer (plus que de raison, et plus encore qu'il ne sied, je veux dire, lol) les participants à ce forum...
Là encore: c'est peut-être parce que je me passionne, actuellement, au delà des "séries" elles-mêmes, au delà du "cinéma" lui-même (qui - peut-être -m'intéresse de moins en moins ) pour le phénomène du "feuilleton" considéré comme "roman-fleuve", ce qu'il suscite comme type d'immersion, et que ce qui m'intéresse plus particulièrement encore, c'est, comme je le disais plus haut, que ça soulève pour moi des questions d'écriture, de technique d'écriture, de narration, de construction, qui aujourd'hui m'intéressent davantage que le fait de regarder des films, fussent-ils de très grande valeur. Et des films, j'en ai vu, bcp. Et j'en vois encore bcp, bien sûr. Mais j'ai de moins en moins envie d'écrire sur les films. D'ailleurs, j'écris très peu, comme tu sais, et finalement, encore moins sur les films. Écrire sur les films, ou à propos de films, c'est ou ça a été essentiellement "circonstanciel", pour ainsi dire: parce qu'il y a un lieu où on peut écrire et partager des textes, des avis, des analyses. ça aurait pu être un forum sur la musique: j'ai essayé un temps, mais ça marchait pas, ça n'encourageait pas un certain type de scription. Les participants de forums sur la musique veulent qu'on parle de musique avant toute chose, le discours, les commentaires, doivent avoir cet objet précis qu'est "la musique".
Par contre, sur un forum sur le "cinéma", on est susceptible de parler d'autre chose que juste "les films". On peut même participer à un forum sur le "cinéma" en parlant très peu de films et de cinéma, parce que c'est un objet foncièrement mixte, qui offre un "sujet de discussion" moins sacralisé - espère-t-on, moins rivé à un fantasme de pureté de l'objet -, et davantage susceptible d'être débordé par un commentaire extra ou péri-cinématographique. C'est ça qui me plait. Aah, le "hors-sujet": le seul sujet qui importe vraiment, dans tous les sens du mot "importer". (lol)
Toujours est-il que oui, Lost est pour l'instant ma série préférée. En règle générale, mes enthousiasmes fondamentaux perdurent. Mais certes il ne faut préjuger de rien: il y a tant de films que j'ai portés bien haut, qui aujourd'hui pour moi n'ont plus grande valeur.
[(J'écris au fur et à mesure, en me corrigeant, donc je réédite bcp).
Addendum: Je me suis longtemps étonné, et je m'étonne, comme plusieurs, de ce retour (en ciné, littérature, tv) - qui dure, qui n'est pas qu'un "effet de mode" - des fictions de longue haleine, des sagas, de ce besoin de s'immerger dans des récits complexes et sans fin, ou à la fin très lointaine. Au delà du phénomène des "séries tv", il y a une forme de Zeitgeist qui donne à penser. Le méta-filmique, le méta-discursif, le méta-littéraire, etc (termes un peu bateau, mais pour simplifier ici au max), semblent provisoirement en berne, autant comme pratiques d'écriture, de conception, de ce que "peut le langage", que pratiques de lecture et de regard... On est apparemment loin de toute une tradition, essentiellement destinée à un public "d'intellectuels" me semble-t-il, dans laquelle le langage travaille à s'interroger lui-même, et qui a un peu vécu, si l'on peut dire: Beckett, Sarraute, en cinéma, Godard, etc. Ce type de préoccupation "méta" (même si Beckett, Sarraute, Godard, ça ne se réduit pas à du "méta", bien sûr) ne semble, je dis bien ne semble, plus à l'ordre du jour. C'est une pratique passée, qui ne semble plus intéresser grand-monde, y compris les "intellectuels".
Est-ce un bien, est-ce un mal? Une "régression", une "progression", une phase dans un mouvement de balancier? Est-ce par exemple l'indice (ce que certains soutiennent) que les "gens" ne veulent plus "réfléchir", notamment sur les médiums, les dispositifs; préférant "s'étourdir", "s'oublier", dans les "histoires"? Je ne le crois pas vraiment, je ne le crois même pas du tout.
Il me semble, mais il faudrait déployer une réflexion de fond, que c'est l'indice au contraire que les "gens" (aussi bien "concepteurs" que "consommateurs") reviennent aux grandes fictions sur le mode d'une vaste herméneutique active, se rapportent aux fictions sur un mode lui-même réflexif, méta-narratif, et que cette réflexivité est notamment, mais pas seulement, liée à la pratique de durées longues: immersion et réflexion n'étant plus forcément contradictoires (comme on l'a longtemps soutenu - dans une certaine approche post-structuraliste, pour simplifier, de la littérature comme "dispositif").
Au contraire, sous un certain angle, c'est la "machinerie" ou "machination" littéraire, narrative, qui passionne pour elle-même, et de façon pas du tout naïve: comme matière permettant de se relier activement au monde, de convertir des affects, d'élaborer un rapport critique à ce qu'on nomme "le réel" - une fois entériné que le "mot" n'est pas "la chose", que "l'image" n'est pas le "donné", ce que veulent à tout prix nous rappeler ceux qui craignent que les récits, histoires, fictions, nous aliènent fondamentalement (selon le principe "immersion=oubli de soi"/"distance=prise de conscience").
Je suis donc tenté de penser que ce regain d'intérêt pour ce type de fictions tient plutôt à un enchevêtrement du "narratif" et du "méta-narratif".
Et c'est fort sensible pour moi dans Lost, précisément.
Il y a énormément de "mise en abyme", là-dedans, de dimensions convoquées, de "savoirs", mis en jeu. La "religion" par exemple, la "spiritualité", dans Lost, devient un motif de réflexion sur le religieux lui-même envisagé comme fiction narrative, élaboration. La "foi" est constamment interrogée, mise en abyme, dans Lost. C'est l'enjeu et le centre même de la mise en scène du récit. Foi dans le récit, l'histoire, la fiction eux-mêmes.
- attention, spoilers (non sur l'intrigue, mais le processus) :
Lost réclame du spectateur un acte de foi dans l'histoire abracadabrante qu'on lui raconte, histoire qui ne cesse de lui proposer autant de motifs de mettre constamment en doute que cette histoire en est bien une (difficile d'en dire plus, faut le voir, lol), et en même temps l'amènent à faire l'expérience que la possibilité même du récit dépend de sa foi active, paradoxalement attisée par le doute qu'il n'est peut-être qu'illusion, jeu formel, manipulation, fantasme, simulacre, fabulation. Et qui évolue selon un trajet fait de pistes auxquelles le spectateur croit, puis qui sont contestées par une nouvelle révélation, à partir de laquelle il se retrouve complètement perdu. Révélation qui se développe progressivement, puis qui se trouve contestée par une nouvelle, qui l'égare à son tour.
Cette procédure crée une "addiction" chez le spectateur, car bien sûr il s'attend, au bout d'un moment, à une sorte de retournement, ou d'élargissement de perception, qui replace, inclut ou déplace la pièce, l'élément, tel personnage donnés, dans une configuration plus vaste, qui tout en lui livrant une clef le perd plus encore. Se développe ainsi chez le spectateur une sorte de complicité excitante pour le jeu narratif lui-même: il suit le développement tout en s'attendant à ce que les cartes soient distribuées selon une donne encore plus zarbi, indécidable, et goûte à la fois le fait de se sentir de plus en plus roulé dans la farine, et conduit à une perception de plus en plus déroutante de l'enjeu du récit, ainsi que de la nature de l'univers concerné par ce récit. Côté personnages, c'est le même principe d'incertitude exponentielle: on croyait quel tel était "gentil", tel autre "méchant", et on vient à se demander si le "gentil" n'était pas le "méchant" et inversement. Mais comme le processus de développement est subtil et pas mécanique: même de ces renversements, il doute. Mais dire cela, c'est déjà trop, et trop réducteur parce que c'est à la fois plus compliqué, plus riche et plus subtil que ça....
Parce qu'à tout ça, attention, faut encore ajouter qu'il y a deux (au minimum, lol) temporalités dans la série: ce qui arrive dans le "présent" (de l'île) et l'histoire passée de chacun des personnages (sous forme de flashback), histoires qui comme je le disais, tissent un réseau progressif de correspondances les reliant les uns aux autres, et, s'enchevêtrant, se nouant au récit du "présent" sous la forme d'un tore spiralé (si j'puis dire), redoublent et relancent à la fois la série d'événements du Passé et la série d'événements du Présent, dans une 3è série temporelle, virtuelle, qui serait: "ce qui ne s'est pas encore passé, mais qui va (peut-être) avoir lieu". Sans qu'on sache très bien quel est le "lieu", mais dont on devine (à ce stade en tout cas de ma compréhension des deux premières saisons) qu'il sera "dévoilé" au moment où les deux séries, Présent de l'ile et Passé des personnages, se rejoindront en quelque manière. Ah oui. Nolan peut aller se rhabiller, hein. Et c'est mieux que du Philip K Dick, parce que c'est du Philip K Dick au carré: deux barils pour le prix d'un, et pour le prix d'un, c'est pas cher. (J'hyperbolise encore) Et ce sont aussi, en pluche, oserais-je le dire, si, j'ose le dire, de "très belles histoires d'amours" (perdus). lol.
Il faudrait demander à Lost Photographer de revenir parmi nous, pour nous éclairer un peu sur tout ça
Pour le dire encore autrement, et pour égarer davantage: il y a bien une histoire, il y a bien une unité profonde de sens, mais qui n'a pas forcément lieu dans ce que cette histoire raconte. C'est bien une histoire, pas un jeu "post-moderne" de l'ordre du commentaire: elle est prise au sérieux, attention, et réclame de l'être, elle est complexe et très élaborée, mais elle semble raconter elle-même une autre histoire, plus intime, plus secrète, plus affective, comportant de multiples facettes se répondant "en miroir", qui la débordent - en direction du spectateur (émotionnelles, c'est pas du tout abstrait, contrairement à ce que laisserait penser ma description très vague). C'est véritablement un "récit ouvert".
Le récit long devient alors pour le spectateur le lieu d'une pratique pour ainsi dire "analytique", "anamnétique", lieu privilégié autorisant le déploiement d'une méditation, d'une réflexion, y compris sur l'enjeu de toute fiction en général, comme telle. Le réel (personne, sujet, collectivité, champ social, champ politique, etc) comme élaboration d'une fiction, fiction narrative et générative. Le spectateur/lecteur collabore lui-même activement, et réflexivement, à cette élaboration de sens, à cette élaboration qui est collective. Ce ne serait plus ici le rapport strictement privé, intime, avec une "Œuvre" close sur elle-même, en surplomb, à laquelle devrait s'élever ou se hisser le lecteur/spectateur. Dans Lost, en l'occurrence, le spectateur apporte bcp de lui-même, activement: il apporte son interprétation, son "vécu", sa lecture, son analyse, de telle sorte qu'on peut presque dire que la fiction proposée comme matériau repose essentiellement sur sa capacité à investir activement (ou dans une passivité active) ce qu'il voit, se l'approprier dans un jeu d'interprétation actif - qui ne se clôt pas dans les seules limites spatio-temporelles de la "série", qui se (ou le) poursuit ailleurs, et après.
["fin du spoiler sur le "processus"]
C'est sensible pour moi, aussi bien dans la conception que dans l'expérience que fait le spectateur/lecteur de ces grands récits fictionnels, qui n'ont pas grand chose à voir avec ce qu'un Lyotard, par ex, nommait les "grands récits" (fondateurs, téléologiques) dans la faillite desquelles il prétendait voir le régime de la "post-modernité". Et en quoi il s'est complètement trompé, ce me semble.
Il me semble donc, c'est l'intuition qui me travaille, que tout ça est bcp plus complexe que ne laissent à penser ces distributions théoriques qui ont peut-être fait leur temps, elles aussi, à titre de "grands récits" (téléologiques eux-mêmes) qui étaient censés révéler ou dévoiler une fois pour toutes la nature de qu'on définit comme les "grands récits". ]
PS: j'ai été assez refroidi par la suite de la saison 3 de the walkind dead. J'ai eu l'impression d'une nette baisse de qualité, qu'elle déclinait pour le coup dans ce qu'on pourrait nommer le "sérial" standard: intrigue convenue et mal torchée, personnages de plus en plus falots et stéréotypés. Je ne sais pas si c'est dû à la longue césure entre les épisodes précédents et la reprise, mais je n'ai pas accroché du tout. Tu as ressenti ça aussi?
PS2: rhoôô, je bisque, avec cette affaire soldée à un prix défiant toute concurrence... Pfff
Dernière édition par Baudouin II de Barvaux le Sam 27 Juil 2013 - 10:53, édité 53 fois
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
j'ai bien lu attentivement ton message : tu défends la série, mineure, écrasée sous le poids du film, majeur.
et tu tresses des couronnes au phénomène de la durée : mais je n'ai pas perçu ce qu'il apportait. en d'autres termes en quoi importe une immersion totale dans une série ? cela tu ne l'expliques pas.
et tu tresses des couronnes au phénomène de la durée : mais je n'ai pas perçu ce qu'il apportait. en d'autres termes en quoi importe une immersion totale dans une série ? cela tu ne l'expliques pas.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Oui, mais j'ai pas encore fini de rédiger ma flatule. Patience. lol
Tu as peut-être lu bien attentivement, mais je ne défends absolument pas cela, mon propos ne se situe pas ici dans ce paradigme, dans la problématique mineur/majeur. Ou alors de façon incidente et très superficielle.
Je parle surtout d'autre chose: de processus de construction, d'écriture, etc, qui actuellement m'intéressent plus que de voir des "films".
Pour ce qui est de l'immersion, je ne suis pas tenu de t'expliquer ou de justifier pourquoi l'immersion dans une longue histoire est quelque chose d'intéressant. Me demander en quoi il importe de s'immerger dans une fiction de longue durée, c'est une question abyssale, qui demanderait un développement abyssal, un traité de philosophie en 5 volumes. Autant s'essayer ici à répondre à une question du type: "pourquoi s'intéresse-t-on aux fictions?"
Mais, dans les limites de mon propos: pourquoi ça devrait "importer"? C'est quoi, cet utilitarisme? Faut une raison, un principe de raison suffisante? Faut encore discuter ici, en vertu de ta rengaine, de "l'essence du cinéma" selon ta vision de ce qu'est ou doit être le cinéma?
Tu n'en vois pas l'intérêt, d'accord; les séries ne t'intéressent pas ("dieu merci", tu as autre chose à faire, tu préfères le "réel", qui te sied comme un gant, etc etc): ok. Je le conçois très aisément, d'autant que tu nous l'a bien expliqué, déjà.
Merci néanmoins pour cette remarque très pertinente, et qui contribue à la bonne tenue communicationnelle de ce débat constructif.
Bonne nuit.
Tu as peut-être lu bien attentivement, mais je ne défends absolument pas cela, mon propos ne se situe pas ici dans ce paradigme, dans la problématique mineur/majeur. Ou alors de façon incidente et très superficielle.
Je parle surtout d'autre chose: de processus de construction, d'écriture, etc, qui actuellement m'intéressent plus que de voir des "films".
Pour ce qui est de l'immersion, je ne suis pas tenu de t'expliquer ou de justifier pourquoi l'immersion dans une longue histoire est quelque chose d'intéressant. Me demander en quoi il importe de s'immerger dans une fiction de longue durée, c'est une question abyssale, qui demanderait un développement abyssal, un traité de philosophie en 5 volumes. Autant s'essayer ici à répondre à une question du type: "pourquoi s'intéresse-t-on aux fictions?"
Mais, dans les limites de mon propos: pourquoi ça devrait "importer"? C'est quoi, cet utilitarisme? Faut une raison, un principe de raison suffisante? Faut encore discuter ici, en vertu de ta rengaine, de "l'essence du cinéma" selon ta vision de ce qu'est ou doit être le cinéma?
Tu n'en vois pas l'intérêt, d'accord; les séries ne t'intéressent pas ("dieu merci", tu as autre chose à faire, tu préfères le "réel", qui te sied comme un gant, etc etc): ok. Je le conçois très aisément, d'autant que tu nous l'a bien expliqué, déjà.
Merci néanmoins pour cette remarque très pertinente, et qui contribue à la bonne tenue communicationnelle de ce débat constructif.
Bonne nuit.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
De mon côté je ne vois pas en quoi regarder "The Wire" en entier est une plus longue durée que "Guerre et paix"... Guerre et paix est il moins une oeuvre littéraire que La métamorphose? Je ne comprend donc pas pourquoi la question de la durée sépare la série du cinéma. Comme dit Jerzy une série est un film.
Il s'agit juste d'expériences différentes de cinéma. La chute des cerisiers en fleur n'est pas la comtemplation du Mont Fuji, et leur appréciation en terme de beauté ne se joue pas dans le fait que le Mont Fuji restera debout des millions d'années et que la fleur ne tombe que le temps de sa chute.
Le problème de mon côté se poserai plus sur ce qu'implique en terme de réalisation, de formatage, l'audimat, le temps de cerveau disponible pour la publicité, les pressions économiques etc. Mais au fond ce qui a peut-être empêché le cinéma de se développer sous forme de série c'est que comme, dans sa dimension marchande, il devait au départ être projeté dans une salle ouverte au public, il était plus simple de le vivre et faire vivre sous forme d'un spectacle d'une durée limitée par ce qu'un spectateur "moyen" peut physiologiquement supporté de voir d'une traite, enfermé dans le noir. Ce qui a mené à la durée moyenne des films de cinéma c'est ce formatage là. Un film au cinéma, on ne peut pas le suspendre en le fermant sans avoir oublié de marquer la page. Et le one shot semblait peut-être plus facile à faire rentrer dans une économie marchande basée sur le dispositif de la salle de cinéma, que le système de la série.
Mais on a aussi eu en salle Feuillade, Matrix, Le seigneur des anneaux, Harry Potter, Nemuri Kyoushiro, La pivoine rouge, James Bond etc. Matrix, Harry Potter ça fonctionne comme les longues narrations divisées en plusieurs épisodes, La pivoine rouge, James Bond, ça fonctionne comme Columbo.
Il s'agit juste d'expériences différentes de cinéma. La chute des cerisiers en fleur n'est pas la comtemplation du Mont Fuji, et leur appréciation en terme de beauté ne se joue pas dans le fait que le Mont Fuji restera debout des millions d'années et que la fleur ne tombe que le temps de sa chute.
Le problème de mon côté se poserai plus sur ce qu'implique en terme de réalisation, de formatage, l'audimat, le temps de cerveau disponible pour la publicité, les pressions économiques etc. Mais au fond ce qui a peut-être empêché le cinéma de se développer sous forme de série c'est que comme, dans sa dimension marchande, il devait au départ être projeté dans une salle ouverte au public, il était plus simple de le vivre et faire vivre sous forme d'un spectacle d'une durée limitée par ce qu'un spectateur "moyen" peut physiologiquement supporté de voir d'une traite, enfermé dans le noir. Ce qui a mené à la durée moyenne des films de cinéma c'est ce formatage là. Un film au cinéma, on ne peut pas le suspendre en le fermant sans avoir oublié de marquer la page. Et le one shot semblait peut-être plus facile à faire rentrer dans une économie marchande basée sur le dispositif de la salle de cinéma, que le système de la série.
Mais on a aussi eu en salle Feuillade, Matrix, Le seigneur des anneaux, Harry Potter, Nemuri Kyoushiro, La pivoine rouge, James Bond etc. Matrix, Harry Potter ça fonctionne comme les longues narrations divisées en plusieurs épisodes, La pivoine rouge, James Bond, ça fonctionne comme Columbo.
Re: Lost (2004- 2010)
rapidement : Woot, ne brouille pas le fil. nous avons compris de quelles séries parle Baudouin et l'analyse qu'il a de leur "pratique" : restons en à cela.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Salut tout le monde, content qu'on parle de Lost, j'ai fais partie des gros cinglés qui l'ont regardé en direct, ont spéculé, arrête sur images, regardé trente fois d'affilée, émis tout plein d'hypothèses.
(Je mets ça au passé parce que j'aimerai bien dans le near future regarder la série avec un oeil un peu vierge, un peu moins passionné par les mystères mystérieux.)
La grande force de Lost, du coup, à mon sens, elle s'est trouvée là. Dans ce que la série proposait, après une fois l'épisode fini. Tout l'inverse du consammable/jetable justement. Chaque épisode donne l'impression qu'il contient une myriade de clins d'oeil, de détails cachés, de secrets pour un happy few récompensé pour sa fidélité ou sa foi. Je crois que c'est pour ça qu'on ne peut pas accrocher en cours de route ou en commençant par un épisode au hasard, il y a un truc de grand marathon, il faut avoir couru pendant une bonne demi heure pour vraiment apprécier l'approche de la ligne finale. Avoir vécu des heures déjà au milieu de cette avalanche de réponses ouvrant des questions donnant lieu à des réponses ouvrant encore d'autres questions.
(d'ailleurs Baudoin, fais attention à l'inhalateur)
L'acte de foi qui implique un pacte implicite avec le spectateur (enfin pour Lost, ce serait plutôt très explicite) est ce qui rend la série si précieuse dans mon expérience de ce truc. Le sujet de la série (notamment mis en scène par les personnages de Jack et Locke) c'était aussi ça la croyance en quelque chose d'autre que ce qui nous est donné à voir. Lost est une bien meilleure série lorsqu'on l'investit et lui prête toute une série d'intentions et de délires propre à notre expérience du machin.
Ce qu'il est important de rappeler avec cette série aussi c'est qu'elle a été politiquement un outil très fort pour les séries à venir ensuite... en bon comme en mauvais. La série a commencé comme n'importe quel autre : un pilote au scénario chaotique qui n'a pas arrêté de changer avant son tournage, l'arrivée d'un réalisateur (JJ Abrams) qui voulait tourner ça comme n'importe quel film, une équipe de scénaristes qui naviguaient à vue.
Pendant longtemps, les scénaristes phares de la série Lindelof et Cuse se sont battus contre la chaine pour obtenir une date de fin afin de ne pas avoir à se battre contre le temps et pouvoir construire la fin qu'ils voulaient.
Cette idée des flashbacks par personnage qui vont dévoiler progressivement au spectateur des choses sur les personnages que les autres personnages ne connaitront peut être jamais c'est une idée brillante. Déjà, c'est une promesse que le monde de la série est large, qu'il englobe on-ne-sait-trop-quoi mais qu'on veut le découvrir à tout prix. C'est une série malle-au-trésor plus que mappe-monde (pour reprendre vite fait un truc évoqué plus loin). La carte de l'île d'ailleurs, on s'en fout un peu, on marche le long de la plage, on monte les montagnes parce que le récit le nécessite point barre. Pas un enjeu aussi fort que dans GoT par exemple.
Du coup les audaces en scénario ou en mise en scène de la série sont légion. La première idée de la série de détourner les archétypes des personnages de série pour en faire tous des portraits un peu plus compliqués qu'il ne semble au premier abord me semblait génial. Ça se délite un peu dans la saison 3 (il faut s'accrocher)
On ne loue pas assez leur folie scénaristique. Ils ont à peu près tout tenté dans cette série y compris de très mauvaises choses (sur le papier, la saison 5 WTF). Mais la trappe n'était ce pas quelque chose de génial. Visuellement, ce long plan séquence avec la musique de Giacchino (tin tin tin) me reste encore en tête. C'est une vraie expérience de cinéma, ça. Que contient cette trappe ? Qui s'y cache et pourquoi ? A-t-on vraiment envie de s'y plonger ?
The hatch quelle métaphore pour toute série : dans quoi va t'on se plonger pour telle quantité (parfois illimité quand la série est en court) de temps, qui sont les gens en dessous ? que sont les choses à découvrir ? Avec qui ?
En revanche, on the downside je ne suis pas hyper amateur du côté mélo de la saison 1, ralenti et mélodie racoleuse au piano. Ça me fatigue vite et heureusement la série évite ça malicieusement par la suite (et se montre parfois délicieusement cruelle).
De même, tout ce qui avait rapport à de l'action (et cela doit tenir aux réalisateurs de la série) est souvent raté, loin des Michelle McLaren de Breaking Bad ou Alan Taylor/Neil Marshall de Game of thrones.
J'attends que tu en es vu plus de la série pour que l'on puisse discuter des hardeurs de la série en son milieu (il faut s'accrocher un peu à un moment donné, les flashbacks deviennent assez redondants).
D'ailleurs il faut expliquer leibnizien parce que je vois pas ce que tu veux dire.
PS : d'ailleurs woot, je ne sais plus qui dans une critique du Seigneur des anneaux disait ce n'est pas une série de films c'est un gros film coupé en épisodes
(Je mets ça au passé parce que j'aimerai bien dans le near future regarder la série avec un oeil un peu vierge, un peu moins passionné par les mystères mystérieux.)
La grande force de Lost, du coup, à mon sens, elle s'est trouvée là. Dans ce que la série proposait, après une fois l'épisode fini. Tout l'inverse du consammable/jetable justement. Chaque épisode donne l'impression qu'il contient une myriade de clins d'oeil, de détails cachés, de secrets pour un happy few récompensé pour sa fidélité ou sa foi. Je crois que c'est pour ça qu'on ne peut pas accrocher en cours de route ou en commençant par un épisode au hasard, il y a un truc de grand marathon, il faut avoir couru pendant une bonne demi heure pour vraiment apprécier l'approche de la ligne finale. Avoir vécu des heures déjà au milieu de cette avalanche de réponses ouvrant des questions donnant lieu à des réponses ouvrant encore d'autres questions.
(d'ailleurs Baudoin, fais attention à l'inhalateur)
L'acte de foi qui implique un pacte implicite avec le spectateur (enfin pour Lost, ce serait plutôt très explicite) est ce qui rend la série si précieuse dans mon expérience de ce truc. Le sujet de la série (notamment mis en scène par les personnages de Jack et Locke) c'était aussi ça la croyance en quelque chose d'autre que ce qui nous est donné à voir. Lost est une bien meilleure série lorsqu'on l'investit et lui prête toute une série d'intentions et de délires propre à notre expérience du machin.
Ce qu'il est important de rappeler avec cette série aussi c'est qu'elle a été politiquement un outil très fort pour les séries à venir ensuite... en bon comme en mauvais. La série a commencé comme n'importe quel autre : un pilote au scénario chaotique qui n'a pas arrêté de changer avant son tournage, l'arrivée d'un réalisateur (JJ Abrams) qui voulait tourner ça comme n'importe quel film, une équipe de scénaristes qui naviguaient à vue.
Pendant longtemps, les scénaristes phares de la série Lindelof et Cuse se sont battus contre la chaine pour obtenir une date de fin afin de ne pas avoir à se battre contre le temps et pouvoir construire la fin qu'ils voulaient.
Cette idée des flashbacks par personnage qui vont dévoiler progressivement au spectateur des choses sur les personnages que les autres personnages ne connaitront peut être jamais c'est une idée brillante. Déjà, c'est une promesse que le monde de la série est large, qu'il englobe on-ne-sait-trop-quoi mais qu'on veut le découvrir à tout prix. C'est une série malle-au-trésor plus que mappe-monde (pour reprendre vite fait un truc évoqué plus loin). La carte de l'île d'ailleurs, on s'en fout un peu, on marche le long de la plage, on monte les montagnes parce que le récit le nécessite point barre. Pas un enjeu aussi fort que dans GoT par exemple.
Du coup les audaces en scénario ou en mise en scène de la série sont légion. La première idée de la série de détourner les archétypes des personnages de série pour en faire tous des portraits un peu plus compliqués qu'il ne semble au premier abord me semblait génial. Ça se délite un peu dans la saison 3 (il faut s'accrocher)
On ne loue pas assez leur folie scénaristique. Ils ont à peu près tout tenté dans cette série y compris de très mauvaises choses (sur le papier, la saison 5 WTF). Mais la trappe n'était ce pas quelque chose de génial. Visuellement, ce long plan séquence avec la musique de Giacchino (tin tin tin) me reste encore en tête. C'est une vraie expérience de cinéma, ça. Que contient cette trappe ? Qui s'y cache et pourquoi ? A-t-on vraiment envie de s'y plonger ?
The hatch quelle métaphore pour toute série : dans quoi va t'on se plonger pour telle quantité (parfois illimité quand la série est en court) de temps, qui sont les gens en dessous ? que sont les choses à découvrir ? Avec qui ?
En revanche, on the downside je ne suis pas hyper amateur du côté mélo de la saison 1, ralenti et mélodie racoleuse au piano. Ça me fatigue vite et heureusement la série évite ça malicieusement par la suite (et se montre parfois délicieusement cruelle).
De même, tout ce qui avait rapport à de l'action (et cela doit tenir aux réalisateurs de la série) est souvent raté, loin des Michelle McLaren de Breaking Bad ou Alan Taylor/Neil Marshall de Game of thrones.
J'attends que tu en es vu plus de la série pour que l'on puisse discuter des hardeurs de la série en son milieu (il faut s'accrocher un peu à un moment donné, les flashbacks deviennent assez redondants).
D'ailleurs il faut expliquer leibnizien parce que je vois pas ce que tu veux dire.
PS : d'ailleurs woot, je ne sais plus qui dans une critique du Seigneur des anneaux disait ce n'est pas une série de films c'est un gros film coupé en épisodes
DB- Messages : 1528
Re: Lost (2004- 2010)
si l'on conçoit le fait de se nourrir d'images comme un acte de consommation on peut déplacer notre attention du "produit" consommé vers l'acte lui même et ses motivations.
en ces termes là, rien n'est figé, on peut passer d'un "type" de consommation à un autre, je veux dire par exemple que rien ne m'oblige à continuer à ignorer les séries pour des films systématiquement, quand en plus toutes les conditions techniques comme tu le soulignes Baudouin, à commencer par le streaming, sont réunies pour en faciliter l'usage qui pourrait aussi être le mien.
mais aucun interdit philosophique, esthétique ou comportemental comme tu prétends - il faudrait que je sois bien stupide ou borné - n'est là pour m'écarter de la "consommation" de ce que par ailleurs tu aimes.
j'ai simplement eu jusqu'à présent un autre mode de relation aux images. Je le considère ni meilleur ni pire et encore moins définitif.
c'est en cela que le sujet de ce topic me concerne.
en ces termes là, rien n'est figé, on peut passer d'un "type" de consommation à un autre, je veux dire par exemple que rien ne m'oblige à continuer à ignorer les séries pour des films systématiquement, quand en plus toutes les conditions techniques comme tu le soulignes Baudouin, à commencer par le streaming, sont réunies pour en faciliter l'usage qui pourrait aussi être le mien.
mais aucun interdit philosophique, esthétique ou comportemental comme tu prétends - il faudrait que je sois bien stupide ou borné - n'est là pour m'écarter de la "consommation" de ce que par ailleurs tu aimes.
j'ai simplement eu jusqu'à présent un autre mode de relation aux images. Je le considère ni meilleur ni pire et encore moins définitif.
c'est en cela que le sujet de ce topic me concerne.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Avec une série, contrairement au cinéma, il est impossible de parler de la manière dont le public regarde, et comment ce regard est déterminé par la réalisation. A la limite une série n'est pas vue. Il y un très bel article de Daney sur les Visiteurs de Kazan, où il attaque le film en partant ce regard, et parvient à inverser l'idée énoncée par la critique ("la réalisation minimaliste permet de parler de manière modeste des séquelles de la Guerre du Viet -Nam sur l'Amérique elle-même") pour démontrer que le film est l'inverse (la survie d'un discours patriotique hollywoodien dans une forme non-hollywoodienne). C'est impossible de faire cela avec une série. Difficile aussi d'ancrer une série dans le présent: à la limite on peut concevoir un film égyptien pro-Morsi ou anti-Morsi qui témoigne à la fois d'une adhésion et d'un recul, d'une analyse, il sera un peu en retard sur les événements, plus ou moin sincère, mais si une série essaye de coller au présent, elle est d'émblée complètement un contenu de ce présent (dans les séries policère, surtout celels qui ont ll'air les plus innocentes comme Louis la Brocante ou l'Inspecteur Magellan , l'impératif sécuritaire devient un contenu socilogique, alors qu'il est au départ la phobie ou même la curiosité d'un seul personnage).
Un autre point est que dans une série tout est écrit et d'emblée interprêtable, il n'y pas de place pour l'inaperçu, accidentel ou non (tout le discours de Daney sur "les Visiteurs" s'appuie sur ce fait: la réalisation est là pour faire oublier que la femme du couple a envie de se faire violer, n'aime déjà plus son mari au moment où les soldats débarquent: Kazan se sert du "minimalisme" de la mise en scène pour faire oublier que le fait qu'une situation s'ouvre sur un désinvestissement n'est pas lui-même le réel, mais peut-être aussi une construction, il ne vide pas le romanesque hollywoodien, maisle cocnentre sur un seul élément). Mais une série ne permet pas ce démontage: difficle de laisser un acte manqué ou un lapsus dans 100h. Lost et GoT ne sont sans doute pas comme cela (quoique...), mais dans un truc comme Mad Men, on sent que la série fusionne ce qui l'histoire et ce qui est le récit: les années 60 et la réussite économique deviennent un récit..
Un truc que je comprends pas: les séries télévisuelles existent depuis la télévision, mais la critique française s'est mise à les percevoir comme un refuge de la poltique des auteurs au moment où l'arrivée d'Internet mettait en parallèle à la fois le cinéma et la télé en crise. Par ailleurs elle tendait dans le même temps à avoir un discours de plsu en plus historiciste sur le cinéma (les Cahiers où Minnelli ou Pasolini sont analysés comme s'ils étaient vivants, comem si l'oeuvre était en train de se faire...). YouTube et le sites de streaming reprennent quelque chose de la forme de la série en la radicalisant: ce qui est regardé devient un objet historique, même récent, ou peut-être même plutôt la facultéé ou le goût éveillé chez le spectateur que cette chose.
Sinon cela me fait marrer l'expression de Jerzy "Un Daney, un Adorno, un Baudrillard"...il veut nous faire compendre qu'il vaut 4 penseurs? Et l'idée de DB "ce qui est génial avec une série c'est que les archétypes des personnages de séries sont pris au départ puis deviennent plus compliqués"...mais développer un personnage, c'est le principe de la plupart des fictions depuis la nuit des temps!
Un autre point est que dans une série tout est écrit et d'emblée interprêtable, il n'y pas de place pour l'inaperçu, accidentel ou non (tout le discours de Daney sur "les Visiteurs" s'appuie sur ce fait: la réalisation est là pour faire oublier que la femme du couple a envie de se faire violer, n'aime déjà plus son mari au moment où les soldats débarquent: Kazan se sert du "minimalisme" de la mise en scène pour faire oublier que le fait qu'une situation s'ouvre sur un désinvestissement n'est pas lui-même le réel, mais peut-être aussi une construction, il ne vide pas le romanesque hollywoodien, maisle cocnentre sur un seul élément). Mais une série ne permet pas ce démontage: difficle de laisser un acte manqué ou un lapsus dans 100h. Lost et GoT ne sont sans doute pas comme cela (quoique...), mais dans un truc comme Mad Men, on sent que la série fusionne ce qui l'histoire et ce qui est le récit: les années 60 et la réussite économique deviennent un récit..
Un truc que je comprends pas: les séries télévisuelles existent depuis la télévision, mais la critique française s'est mise à les percevoir comme un refuge de la poltique des auteurs au moment où l'arrivée d'Internet mettait en parallèle à la fois le cinéma et la télé en crise. Par ailleurs elle tendait dans le même temps à avoir un discours de plsu en plus historiciste sur le cinéma (les Cahiers où Minnelli ou Pasolini sont analysés comme s'ils étaient vivants, comem si l'oeuvre était en train de se faire...). YouTube et le sites de streaming reprennent quelque chose de la forme de la série en la radicalisant: ce qui est regardé devient un objet historique, même récent, ou peut-être même plutôt la facultéé ou le goût éveillé chez le spectateur que cette chose.
Sinon cela me fait marrer l'expression de Jerzy "Un Daney, un Adorno, un Baudrillard"...il veut nous faire compendre qu'il vaut 4 penseurs? Et l'idée de DB "ce qui est génial avec une série c'est que les archétypes des personnages de séries sont pris au départ puis deviennent plus compliqués"...mais développer un personnage, c'est le principe de la plupart des fictions depuis la nuit des temps!
Dernière édition par Tony le Mort le Sam 27 Juil 2013 - 14:59, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Salut Tony, je pense que ce qui est d'emblée biaisé dans la discussion c'est que tu portes un préjugé ou présupposé sur l'objet "série" avant même d'essayer de comprendre ou de définir ce que l'on peut mettre dans cet objet.
En tant que tel, je ne vois pas où est le problème. Soit on définit comme le tente woot' de prendre la série comme quelque chose d'englobant : prendre le cinéma et y lier certaines pratiques à celles des séries ; soit on le prend comme quelque chose d'excluant : dans ce cas on essaye de comprendre ce qui fait du champ de la création des séries une telle (pour ma part, je ne pense pas qu'on crée une série comme un film mais que ce n'est pas une raison pour que l'on ne les traite pas d'un plan critique de la même façon - ce sont des histoires de cuisine).
Quant à l'impossibilité de lapsus ou d'acte manqué dans une série de 100h ? Qu'est ce que ça veut dire ?
Bien au contraire, la construction 'une série de part sa rapidité et son statut permet bien plus facilement cela !
Aussi : quand je dis "ce qui est génial" et qui a l'air mal formulé c'est que la série commence avec un postulat de base ressemblant à celui de mille séries : des gars sont crashés sur une île, il y a l'archétype du beau ténébreux héros, de la jeune rebelle pas farouche, de l'étranger dangereux (et en plus irakien), du gros méchant, du gros plein soupe trop rigolo, etc, etc,... et chaque épisode va se centrer sur l'un d'entre eux au présent de l'île (donc le récit post crash) et au passé de l'île (leur vie avant cet évenement).
Ce qui est génial à mon sens, c'est la façon dont les créateurs se sont joués des attentes des spectateurs pour les amener ailleurs. Le gros plein soupe est un fait un ancien patient sorti d'un hopital psychiatrique ; le héros est un control-freak avec de sacrés soucis oedipidiens etc etc... Chaque archétype est démonté, chacune de nos attentes est défaite pour constituer un puzzle bien plus complexe que ce que le début de la série semblait (à dessein) bien vouloir montrer.
Bien évidemment Tony que développer un personnage c'est le berceau de la fiction... Merci de me le rappeler. C'était important. Bref ce que j'écrivais c'est que c'est la façon dont ce développement nous est amené, donné et montré que je trouve intéressant dans la série !
En tant que tel, je ne vois pas où est le problème. Soit on définit comme le tente woot' de prendre la série comme quelque chose d'englobant : prendre le cinéma et y lier certaines pratiques à celles des séries ; soit on le prend comme quelque chose d'excluant : dans ce cas on essaye de comprendre ce qui fait du champ de la création des séries une telle (pour ma part, je ne pense pas qu'on crée une série comme un film mais que ce n'est pas une raison pour que l'on ne les traite pas d'un plan critique de la même façon - ce sont des histoires de cuisine).
Quant à l'impossibilité de lapsus ou d'acte manqué dans une série de 100h ? Qu'est ce que ça veut dire ?
Bien au contraire, la construction 'une série de part sa rapidité et son statut permet bien plus facilement cela !
Aussi : quand je dis "ce qui est génial" et qui a l'air mal formulé c'est que la série commence avec un postulat de base ressemblant à celui de mille séries : des gars sont crashés sur une île, il y a l'archétype du beau ténébreux héros, de la jeune rebelle pas farouche, de l'étranger dangereux (et en plus irakien), du gros méchant, du gros plein soupe trop rigolo, etc, etc,... et chaque épisode va se centrer sur l'un d'entre eux au présent de l'île (donc le récit post crash) et au passé de l'île (leur vie avant cet évenement).
Ce qui est génial à mon sens, c'est la façon dont les créateurs se sont joués des attentes des spectateurs pour les amener ailleurs. Le gros plein soupe est un fait un ancien patient sorti d'un hopital psychiatrique ; le héros est un control-freak avec de sacrés soucis oedipidiens etc etc... Chaque archétype est démonté, chacune de nos attentes est défaite pour constituer un puzzle bien plus complexe que ce que le début de la série semblait (à dessein) bien vouloir montrer.
Bien évidemment Tony que développer un personnage c'est le berceau de la fiction... Merci de me le rappeler. C'était important. Bref ce que j'écrivais c'est que c'est la façon dont ce développement nous est amené, donné et montré que je trouve intéressant dans la série !
DB- Messages : 1528
Re: Lost (2004- 2010)
Si tu as des pelletées d'actes manqués et d'incohérences, ils n'en sont plus justement.
Dans une série, tu peux plus facilement "colmater" une incohérence de scénario en développant un personnage, dans un film moins.
J'ai l"impression que depuis Urgences et l'arrivée d'HBO les séries avancent en développant une seule histoire, continue, alors que celles des années 60/70 ont partiellement une structure d'épisodes autonomes ("Colombo", "ma Sorcière bien Aimée"", "the Avengers", "le Prisonnier" , même si elle progresse vers le N°1, voire Derrick, Chips: on en sait pas si cela sera un accident de bus ou une voiture en panne, McGyver, Supercopter et la Croisère s'Amuse) où une même psychologie, un même rapport de groupe est confronté à des situations différentes, ce qui est vraiment l'idée de la série. chaque épisode est une sorte de mini film, en plus dense et avec moins de moyen. Mais cet aspect disparaît des séries actuelles: il faut que l'intrigue ait une résolution, sinon le spectateur a l'impression d'être volé. La dernière série à épisode autonome, c'est West Wing, après le 11 Septembre cela n'avait plus aucun sens de croire que le Président pouvait régler le problème de la guerre nucléaire entre le Pakistant et l'Inde comme une enquête où il suffiraiit d'être prgamatique et psychologue: on corrompt les deux ennemsi exactement de la même manière (pourtant les gens qui faisaient la série croyaient à fond dans cette idée)
Dans Urgence les personnages ne se contentent pas de placer des drain ou de tailler dans le morceaux: ils couchent entre eux, ont des mourants pour qui ils ont de l'affection et d'autres pas, des souvenir. Après tu as Dexter, qui n'est pas vulgaire tueur en série, mais un mec qui nous livre un message sur sa famille et lle apssage à l'age adulte en tuant les gens dans un certain ordre etc...
Dans une série, tu peux plus facilement "colmater" une incohérence de scénario en développant un personnage, dans un film moins.
J'ai l"impression que depuis Urgences et l'arrivée d'HBO les séries avancent en développant une seule histoire, continue, alors que celles des années 60/70 ont partiellement une structure d'épisodes autonomes ("Colombo", "ma Sorcière bien Aimée"", "the Avengers", "le Prisonnier" , même si elle progresse vers le N°1, voire Derrick, Chips: on en sait pas si cela sera un accident de bus ou une voiture en panne, McGyver, Supercopter et la Croisère s'Amuse) où une même psychologie, un même rapport de groupe est confronté à des situations différentes, ce qui est vraiment l'idée de la série. chaque épisode est une sorte de mini film, en plus dense et avec moins de moyen. Mais cet aspect disparaît des séries actuelles: il faut que l'intrigue ait une résolution, sinon le spectateur a l'impression d'être volé. La dernière série à épisode autonome, c'est West Wing, après le 11 Septembre cela n'avait plus aucun sens de croire que le Président pouvait régler le problème de la guerre nucléaire entre le Pakistant et l'Inde comme une enquête où il suffiraiit d'être prgamatique et psychologue: on corrompt les deux ennemsi exactement de la même manière (pourtant les gens qui faisaient la série croyaient à fond dans cette idée)
Dans Urgence les personnages ne se contentent pas de placer des drain ou de tailler dans le morceaux: ils couchent entre eux, ont des mourants pour qui ils ont de l'affection et d'autres pas, des souvenir. Après tu as Dexter, qui n'est pas vulgaire tueur en série, mais un mec qui nous livre un message sur sa famille et lle apssage à l'age adulte en tuant les gens dans un certain ordre etc...
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Re: Lost (2004- 2010)
je me souviens maintenant avoir regardé Peyton Place, un serial qui avait la particularité d'être diffusé le matin et l'après midi quand je pouvais je regardais un épisode de la Croisière s'amuse. Comme dit Tony les épisodes étaient indépendants et tous bien, une gageure de trouver autant de variations toujours drôles et empathiques sur l'activité d'un groupe de membres du service sur un paquebot.
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Re: Lost (2004- 2010)
En fait, si je te comprends un tant soit peu, Baudouin, la raison que tu avances pour dire l'intérêt, voire la stimulation qu'exerce sur toi la série - disons la proximité du processus d'élaboration de la fiction - est énoncée par Gilles Lipovetsky dans son livre L'esthétisation du monde : "l'artiste désormais, ce n'est plus l'autre : dans mes rêves et un peu au quotidien, c'est moi".
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Hi Jerzy, lu ton message, je prépare une réponse, lentement, mais certainement...
Une remarque, en passant : je crois que l'on peut tomber sous la dépendance (c'est vraiment le mot) de n'importe quelle série; cela n'a rien à voir avec la qualité, la profondeur...c'est une affaire de réceptivité "paresseuse" ... Je n'avais vu aucun épisode de dallas à l'époque de son triomphe (les pseudos sociologues, critiques... parlaient déjà de Homère, et de tragédie...); y a quelques jours, désœuvré, en zappant, je suis tombé sur une rediffusion, plusieurs à la suite (c'est une super stratégie), je me suis laissé aller et j'ai été pris, au piège ("ah que c'est bien, profond, riche, amusant, sociologiquement intéressant, ironique...") deux ou trois épisodes, avant de lâcher...
Les séries se situent toutes ou presque au-delà du bon et du mauvais...
Une remarque, en passant : je crois que l'on peut tomber sous la dépendance (c'est vraiment le mot) de n'importe quelle série; cela n'a rien à voir avec la qualité, la profondeur...c'est une affaire de réceptivité "paresseuse" ... Je n'avais vu aucun épisode de dallas à l'époque de son triomphe (les pseudos sociologues, critiques... parlaient déjà de Homère, et de tragédie...); y a quelques jours, désœuvré, en zappant, je suis tombé sur une rediffusion, plusieurs à la suite (c'est une super stratégie), je me suis laissé aller et j'ai été pris, au piège ("ah que c'est bien, profond, riche, amusant, sociologiquement intéressant, ironique...") deux ou trois épisodes, avant de lâcher...
Les séries se situent toutes ou presque au-delà du bon et du mauvais...
Borges- Messages : 6044
Re: Lost (2004- 2010)
L'art des séries télé [Texte imprimé] / Vincent Colonna . - Paris : Payot. - 1 vol. (374 p.) : couv. ill. en coul. ; 24 cm.
La couv. porte en plus : "ou comment surpasser les Américains". Bibliogr. p. 337-359. Index.
ISBN 978-2-228-90528-2 (br.) : 20 EUR
* Auteurs :
Colonna, Vincent ; auteur
L'art des séries télé
Séries télévisées ** états-Unis ** 1990-.... ** Histoire et critique
Séries télévisées ** France ** 1990-.... ** Histoire et critique
* Résumé : Analyse des spécificités narratives et esthétiques qui depuis les années 1990 font le succès des séries populaires américaines en France. L'auteur démontre que leur force réside dans la préservation et la continuation aux Etats-Unis d'un art du récit venu d'Europe, qui depuis le XIXe siècle, en Europe, a été mis à mal par les avant-gardes et les théories formalistes de l'art.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Borges a écrit:
Les séries se situent toutes ou presque au-delà du bon et du mauvais...
quel monde paradoxal y-a-t'il au delà de cette circularité énantiodromique où quand la pointe le l'aiguille d'une montre est sur 3, sa base est sur 9 et réciproquement ? (tu peux remplacer 3 et 9 par bon et mauvais).
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
slimfast a écrit:
L'art des séries télé [Texte imprimé] / Vincent Colonna . - Paris : Payot. - 1 vol. (374 p.) : couv. ill. en coul. ; 24 cm.
La couv. porte en plus : "ou comment surpasser les Américains". Bibliogr. p. 337-359. Index.
ISBN 978-2-228-90528-2 (br.) : 20 EUR
* Auteurs :
Colonna, Vincent ; auteur
L'art des séries télé
Séries télévisées ** états-Unis ** 1990-.... ** Histoire et critique
Séries télévisées ** France ** 1990-.... ** Histoire et critique
* Résumé : Analyse des spécificités narratives et esthétiques qui depuis les années 1990 font le succès des séries populaires américaines en France. L'auteur démontre que leur force réside dans la préservation et la continuation aux Etats-Unis d'un art du récit venu d'Europe, qui depuis le XIXe siècle, en Europe, a été mis à mal par les avant-gardes et les théories formalistes de l'art.
l'auteur ne démontre rien, il fait dans le cliché; c'est une vieille rengaine réactionnaire; les avants-gardes, en musique, en peinture...ont tué l'Art... Flaubert, joyce, kafka, musil, beckett, faulkner, Proust... le nouveau roman, ont tué le Roman, art du récit... comme le dit Jerzy, les nouvelles séries (enfin certaines) sont très loin d'obéir à l'art traditionnel du récit, façon 19ème siècle...
un art du récit venu d'europe, comme si les américains avaient eu besoin des européens pour raconter une histoire...
(les nouvelles séries sont essentiellement des produits intellectuels, théoriques...c'est du calcul, et de la théorie, des produits universitaires )
C'est aussi malin tout ça que de dire welles, godard, resnais, rohmer, tarkovsky, ozu, cassavettes...ont mis à mal le cinéma
y a "toujours" eu des séries anglo-américaines, qui ont toujours eu immensément de succès...
Borges- Messages : 6044
Re: Lost (2004- 2010)
slimfast a écrit:Borges a écrit:
Les séries se situent toutes ou presque au-delà du bon et du mauvais...
quel monde paradoxal y-a-t'il au delà de cette circularité énantiodromique où quand la pointe le l'aiguille d'une montre est sur 3, sa base est sur 9 et réciproquement ? (tu peux remplacer 3 et 9 par bon et mauvais).
hi;
je comprends pas...
je dis juste que la dépendance à une série n'est pas nécessairement liée à sa valeur, ni à la valeur de celui qui la suit...autrement dit, comme dans proust, on peut tomber amoureux d'une série qui n'est pas notre genre, et perdre bien du temps à cause d'elle...
Borges- Messages : 6044
Re: Lost (2004- 2010)
tiens donc la série américaine n'a rien à voir avec l'écriture européenne fin de l'autre siècle mais tu t'empresses de la mettre en rapport avec Proust au passage.
je voulais simplement dire qu'au delà du bon et du mauvais il n'y a rien : c'est jungien, plus une position est extrême, que tu la rattaches à ce que tu veux et plus on peut en attendre une conversion en son contraire.
la déesse hindouiste Kali représente de façon très adéquate ce couple de contraires consubstantiels à tout ... et son contraire) : cette divinité seule crée et détruit à la fois. c'est un mode d'attachement aux choses qui me semblent plus conforme au réel.
je voulais simplement dire qu'au delà du bon et du mauvais il n'y a rien : c'est jungien, plus une position est extrême, que tu la rattaches à ce que tu veux et plus on peut en attendre une conversion en son contraire.
la déesse hindouiste Kali représente de façon très adéquate ce couple de contraires consubstantiels à tout ... et son contraire) : cette divinité seule crée et détruit à la fois. c'est un mode d'attachement aux choses qui me semblent plus conforme au réel.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
quant à ton argument contre les avant-gardes ; je ne le prends pas pour moi lol ; j'accepte en tout état de cause le monde tel qu'il est y compris que je ne suis à l'avant garde de rien.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Borges a écrit:slimfast a écrit:
L'art des séries télé [Texte imprimé] / Vincent Colonna . - Paris : Payot. - 1 vol. (374 p.) : couv. ill. en coul. ; 24 cm.
La couv. porte en plus : "ou comment surpasser les Américains". Bibliogr. p. 337-359. Index.
ISBN 978-2-228-90528-2 (br.) : 20 EUR
* Auteurs :
Colonna, Vincent ; auteur
L'art des séries télé
Séries télévisées ** états-Unis ** 1990-.... ** Histoire et critique
Séries télévisées ** France ** 1990-.... ** Histoire et critique
* Résumé : Analyse des spécificités narratives et esthétiques qui depuis les années 1990 font le succès des séries populaires américaines en France. L'auteur démontre que leur force réside dans la préservation et la continuation aux Etats-Unis d'un art du récit venu d'Europe, qui depuis le XIXe siècle, en Europe, a été mis à mal par les avant-gardes et les théories formalistes de l'art.
l'auteur ne démontre rien, il fait dans le cliché; c'est une vieille rengaine réactionnaire; les avants-gardes, en musique, en peinture...ont tué l'Art... Flaubert, joyce, kafka, musil, beckett, faulkner, Proust... le nouveau roman, ont tué le Roman, art du récit... comme le dit Jerzy, les nouvelles séries (enfin certaines) sont très loin d'obéir à l'art traditionnel du récit, façon 19ème siècle...
un art du récit venu d'europe, comme si les américains avaient eu besoin des européens pour raconter une histoire...
(les nouvelles séries sont essentiellement des produits intellectuels, théoriques...c'est du calcul, et de la théorie, des produits universitaires )
C'est aussi malin tout ça que de dire welles, godard, resnais, rohmer, tarkovsky, ozu, cassavettes...ont mis à mal le cinéma
y a "toujours" eu des séries anglo-américaines, qui ont toujours eu immensément de succès...
le cliché va finir par devenir de dire que c'est cliché ...
d'autre part le cinéma vient d'Europe (je ne sais plus qui disait que c'était le seul art dont on pouvait situer précisément la date de naissance) et le peuplement américain vient aussi d'Europe ... Borges cite Jerzy, Jerzy cite Borges et la boucle est bouclée, encore un exemple de la circularité des flux qui les ramènent perpétuellement à leur état initial. Perpétuellement n'étant évidemment pas le bon mot dans l'absolu, mais dans le relatif du forum, si, quand même.
Autre exemple les effets d'annonce : je vais répondre Jerzy, je vais développer ...à qui s'dressent-t-ils exactement ? Là, cf au dessus il y a un acte de création/destruction bien réel et qui déchire la tradition virtuelle du forum. C'est passionnant.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
On même dire que le forum s'écrit comme une série. certains se révèlent fort différents, d'autres s'éclipsent. il y a les montées d'adrénaline, puis du mou, de l'intérêt soudain voire de l'engouement pour un sujet qui d'un coup est abandonné. c'est un labo.
Invité- Invité
Re: Lost (2004- 2010)
Je n'ai pas rêvé, Borges :
Baudouin II de Barvaux a écrit:.../...
Mais c'est émotionnellement très fort, un mélodramatisme accusé - quand y faut - sans trop en abuser; un "sense of secret and mystery" très réussi (entre L'île mystérieuse de Jules Vernes, le Prisonnier, Cube, et autres constructions en énigmes parano-intra-psychiques - tout ça en plus "what's the fuck?").
.../...
Je me suis longtemps étonné, et je m'étonne, comme plusieurs, de ce retour (en ciné, littérature, tv) - qui dure, qui n'est pas qu'un "effet de mode" - des fictions de longue haleine, des sagas, de ce besoin de s'immerger dans des récits complexes et sans fin, ou à la fin très lointaine. Au delà du phénomène des "séries tv", il y a une forme de Zeitgeist qui donne à penser. Le méta-filmique, le méta-discursif, le méta-littéraire, etc (termes un peu bateau, mais pour simplifier ici au max), semblent provisoirement en berne, autant comme pratiques d'écriture, de conception, de ce que "peut le langage", que pratiques de lecture et de regard... On est apparemment loin de toute une tradition, essentiellement destinée à un public "d'intellectuels" me semble-t-il, dans laquelle le langage travaille à s'interroger lui-même, et qui a un peu vécu, si l'on peut dire: Beckett, Sarraute, en cinéma, Godard, etc. Ce type de préoccupation "méta" (même si Beckett, Sarraute, Godard, ça ne se réduit pas à du "méta", bien sûr) ne semble, je dis bien ne semble, plus à l'ordre du jour. C'est une pratique passée, qui ne semble plus intéresser grand-monde, y compris les "intellectuels".
Est-ce un bien, est-ce un mal? Une "régression", une "progression", une phase dans un mouvement de balancier? Est-ce par exemple l'indice (ce que certains soutiennent) que les "gens" ne veulent plus "réfléchir", notamment sur les médiums, les dispositifs; préférant "s'étourdir", "s'oublier", dans les "histoires"? Je ne le crois pas vraiment, je ne le crois même pas du tout.
.../...
Invité- Invité
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