Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Il n'y a pratiquement qu'un seul mouvement de caméra dans "le Soulier de Satin" de de Oliveira, mais il est superbe, celui on suite en parallèle de l'extérieur le mari de Dona Prouhèze qui rentre du désert dans l'obscurité de la tente où apparaît ensuite l'ange gardien (Isabelle Weingarten, cella-là même de Garrel et Eustache).
Les trucages des visions de Dona Prouhèze sont aux aussi superbes.
En fait le film a une grande force esthétique, beaucoup de plan fixes, mais énormément de trucages sur les lumières, les arrières plans qui s’imbriquent, cela ramène à Méliès et en même temps à une austérité conceptuelle qui ancre le film dans l'après guerre.
Vision du monde imbitable dans la pièce de Claudel, mais le monologue où Dona Prouhèze (Patricia Barzyk, quand-même assez extraordinaire) explique son suicide a une grande force; même si c'est une absolutisation des problèmes privés de Claudel: on doit choisir entre les histoires de cul ou le service de l'état (dans une logique finalement qui est à la fois moderniste et impériale, l'état et la nation sont l'enjeu d'une sorte de sacrifice sceptique, on sent le lien avec De Oliveira) mais on ne peut pas échapper à la religion, qui dans le monde est la seule origine de la faiblesse, la seule vérité.
Les trucages des visions de Dona Prouhèze sont aux aussi superbes.
En fait le film a une grande force esthétique, beaucoup de plan fixes, mais énormément de trucages sur les lumières, les arrières plans qui s’imbriquent, cela ramène à Méliès et en même temps à une austérité conceptuelle qui ancre le film dans l'après guerre.
Vision du monde imbitable dans la pièce de Claudel, mais le monologue où Dona Prouhèze (Patricia Barzyk, quand-même assez extraordinaire) explique son suicide a une grande force; même si c'est une absolutisation des problèmes privés de Claudel: on doit choisir entre les histoires de cul ou le service de l'état (dans une logique finalement qui est à la fois moderniste et impériale, l'état et la nation sont l'enjeu d'une sorte de sacrifice sceptique, on sent le lien avec De Oliveira) mais on ne peut pas échapper à la religion, qui dans le monde est la seule origine de la faiblesse, la seule vérité.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Tiens sinon "la 5ème Victime" de Lang, c'est l'ancêtre de ces séries télé sur les flics qui font du "profiling" (prononcer: "profaöaïlingue"): cette méthodologie inspirée par la tombée du crépuscule sur les bureaux de fonctionnaires des villes du nord-est américain où la psychologie devient un instrument de prophylaxie sécuritaire qui consiste à mettre autour d'une machine à café une équipe de policiers et d'experts psycho-sociaux, beaux, puritains, aux fêlures secrètes et pris dans un rapport de séduction érotiques qui est la limite de leur parfaite complémentarité professionnelle, qui parviennent ensuite à retrouver l'identité du tueur en assument seuls (à la place de la société qui les paye pour cela) le fait de revivre ses pulsions (ou plus récemment: espionner ses traces électroniques), ce qui conduit à une réflexion individuelle et intériorisée sur le lien social comme contexte potentiellement monstrueux dont le développement est rendu facultatif par la fêlure secrète du policier ...
Mais bon chez Lang c'est juste les 3 dernières minutes du film, et c'est fort lucidement résumé dans le fait que le héros est quand-même obligé soit d'accepter ou soit de refuser une promotion, auparavant cette idée est montrée comme un turc fumeux aillant failli planter tout un groupe de presse genre CNN et qui a dilué le rôle de contre-pouvoir du journalisme.
La fêlure secrète est résumée dans un geste: Dana Andrews a la même technique que le meurtrier qu'il pourchasse pour forcer la porte de son amie.
Avec ce film, on sent que dans les années 50, c'est un peu le même genre de gens qui étudiaient le journalisme qu'à présent la médecine légale. finalement la charge sexuelle de ces métiers est assez proche.
L'enquête devient la même chose que l'écriture d'un scénario (ce qu'il n'y pas encore dans M ou Mabuse: c'est un univers déjà investi par la psychanalyse, mais où la figure de l'expert n'existe pas encore, où il faut encore choisir entre le récit et la visibilité sociale,; le film est alors le lieu de cette bifurcation, alors que les derniers Lang sont un regard mélancolique sur la possibilité de leur réconciliation).
Mais bon chez Lang c'est juste les 3 dernières minutes du film, et c'est fort lucidement résumé dans le fait que le héros est quand-même obligé soit d'accepter ou soit de refuser une promotion, auparavant cette idée est montrée comme un turc fumeux aillant failli planter tout un groupe de presse genre CNN et qui a dilué le rôle de contre-pouvoir du journalisme.
La fêlure secrète est résumée dans un geste: Dana Andrews a la même technique que le meurtrier qu'il pourchasse pour forcer la porte de son amie.
Avec ce film, on sent que dans les années 50, c'est un peu le même genre de gens qui étudiaient le journalisme qu'à présent la médecine légale. finalement la charge sexuelle de ces métiers est assez proche.
L'enquête devient la même chose que l'écriture d'un scénario (ce qu'il n'y pas encore dans M ou Mabuse: c'est un univers déjà investi par la psychanalyse, mais où la figure de l'expert n'existe pas encore, où il faut encore choisir entre le récit et la visibilité sociale,; le film est alors le lieu de cette bifurcation, alors que les derniers Lang sont un regard mélancolique sur la possibilité de leur réconciliation).
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Dans "l'Invraisemblable Vérité", c'est le fait de transformer la lutte contre la peine de mort en scénario qui devient un crime
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
https://www.youtube.com/watch?v=NLwjIuZUBhQ
"Humain, trop Humain" de Malle sur YouTube
"Humain, trop Humain" de Malle sur YouTube
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
vu L'Argent de Bresson, revu. B. Jacquot avait dit de Pickpocket : "j'ai rarement vu la jouissance montrée comme ça" on peut le dire de l'Argent qui malgré l'âge de Bresson fait preuve d'une grande vitalité et virtuosité dans la façon de raconter. Ca traîne pas.
La grande qualité de Bresson est de ne rien laisser au hasard, malgré le sentiment que l'on peut avoir et de rattacher chaque plan, soit à un souvenir soit à quelque chose qui va arriver. L'Argent c'est une nasse tressée serré.
Son autre force, à la fin quand débute les meurtres ça n'est pas de raconter par des images qui montrent mais d'exprimer par des images qui signifient - les mais lavées au lavabo ou l'eau se colore de rouge etc. Ca c'est l'esthétique Bresson. tout ce qu'il montre est concret et à la fois rien de ce qu'il laisse entendre n'est plus abstrait.
Mais je préfère ses films en noir et blanc, comme Une femme douce la couleur ici fait un peu chromo-terne.
La grande qualité de Bresson est de ne rien laisser au hasard, malgré le sentiment que l'on peut avoir et de rattacher chaque plan, soit à un souvenir soit à quelque chose qui va arriver. L'Argent c'est une nasse tressée serré.
Son autre force, à la fin quand débute les meurtres ça n'est pas de raconter par des images qui montrent mais d'exprimer par des images qui signifient - les mais lavées au lavabo ou l'eau se colore de rouge etc. Ca c'est l'esthétique Bresson. tout ce qu'il montre est concret et à la fois rien de ce qu'il laisse entendre n'est plus abstrait.
Mais je préfère ses films en noir et blanc, comme Une femme douce la couleur ici fait un peu chromo-terne.
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Betty de Chabrol (sur YouTube, hum, on trouve là un grand nombre de Chabrol en qualité pourrie, mais pas Nada).
Très beau travail sur le son*, pas si courant dans le cinéma français: Betty entend à la fois ce qu'on lui dit, et ce qu'elle croit qu'on lui a dit et qui correspondrait à son désir: la vérité (fort bourgeoisement, elle reste mieux éduquée qu'elle ne le souhaite), mais entre la réalité et ce désir il y a tout un univers autonome d'apparences, de naissances infra-sociales, de pulsions et de rapports, de pertes, que le film fait exister par le son, les voix et les bruits plutôt que par l'image (belle scène où l'on entend distinctement que Betty remercie son mari en lui disant adieu, alors qu'ils sont éloignés aux extrémités d'un parc) . Marie Trintignant n'est pas mal mais le plus beau personnage est celui de Stéphane Audran qui finalement est au centre de l'histoire (et qui n'est pas écoutée), très belle chanson de Michel Jonasz. Les ellipses du récit font penser à une version noire mais sans tragédie de "Je t'aime je t'aime" de Resnais. Le début avec le personnage du médecin en Alfa-Romeo est très troublant, à la fois drôle et horrifique.
Il ya quelque chose d'un peu bergmanien dans les rapports entre les personnages, paradoxalement mais consciemment adouci par la fadeur d'une lumière de téléfilm. finalement cette fadeur est le contexte paradoxal d'une traversée du miroir vers la folie en partant la satire sociale .
Chabrol est un cinéaste du contrôle, pour lui la psychanalyse énonce une vérité consolante dans la mesure où c'est un discours sur le caché, mais qui ne s'échappe jamais à lui-même. Il place le spectateur et le cinéaste dans le personnage de l'amant intello, à la fois clone du Sartre et de Chabrol, que Betty uinvoque comem sur son surmoi, même après avoir qu'il ait été infâme avec elle. Ce n'est donc pas un film féministe, cela reste une histoire misanthrope des années 30/40, et un regard d'homme sr les femmes qui incarnent des choix entre des fatalités (blonde comme la mère incestueuse du mari ou le conformisme qui est conscient de son érotisation séductrice/brune comme la sensualité mal cachée/ châtain comme la solitude) mais porté aux extrêmes par la folie des personnages. Le film devient beau si on ne s'identifie à Betty ou Laure (voire au mari, parce que derrière l'outrance des situations, son comportement est profondément réaliste) plutôt qu'à la place qu'il nous laisse.
*le fait que la qualité d'image (DVD rippé il y a sans doute 6 ans puis converti en Flash) sur YouTube soit si mutilante amène peut-être à mieux discerner l'importance du son que ce ne serait le cas dans des conditions de projection dignes de ce nom (le son est moins perdu que l'image)...
Très beau travail sur le son*, pas si courant dans le cinéma français: Betty entend à la fois ce qu'on lui dit, et ce qu'elle croit qu'on lui a dit et qui correspondrait à son désir: la vérité (fort bourgeoisement, elle reste mieux éduquée qu'elle ne le souhaite), mais entre la réalité et ce désir il y a tout un univers autonome d'apparences, de naissances infra-sociales, de pulsions et de rapports, de pertes, que le film fait exister par le son, les voix et les bruits plutôt que par l'image (belle scène où l'on entend distinctement que Betty remercie son mari en lui disant adieu, alors qu'ils sont éloignés aux extrémités d'un parc) . Marie Trintignant n'est pas mal mais le plus beau personnage est celui de Stéphane Audran qui finalement est au centre de l'histoire (et qui n'est pas écoutée), très belle chanson de Michel Jonasz. Les ellipses du récit font penser à une version noire mais sans tragédie de "Je t'aime je t'aime" de Resnais. Le début avec le personnage du médecin en Alfa-Romeo est très troublant, à la fois drôle et horrifique.
Il ya quelque chose d'un peu bergmanien dans les rapports entre les personnages, paradoxalement mais consciemment adouci par la fadeur d'une lumière de téléfilm. finalement cette fadeur est le contexte paradoxal d'une traversée du miroir vers la folie en partant la satire sociale .
Chabrol est un cinéaste du contrôle, pour lui la psychanalyse énonce une vérité consolante dans la mesure où c'est un discours sur le caché, mais qui ne s'échappe jamais à lui-même. Il place le spectateur et le cinéaste dans le personnage de l'amant intello, à la fois clone du Sartre et de Chabrol, que Betty uinvoque comem sur son surmoi, même après avoir qu'il ait été infâme avec elle. Ce n'est donc pas un film féministe, cela reste une histoire misanthrope des années 30/40, et un regard d'homme sr les femmes qui incarnent des choix entre des fatalités (blonde comme la mère incestueuse du mari ou le conformisme qui est conscient de son érotisation séductrice/brune comme la sensualité mal cachée/ châtain comme la solitude) mais porté aux extrêmes par la folie des personnages. Le film devient beau si on ne s'identifie à Betty ou Laure (voire au mari, parce que derrière l'outrance des situations, son comportement est profondément réaliste) plutôt qu'à la place qu'il nous laisse.
*le fait que la qualité d'image (DVD rippé il y a sans doute 6 ans puis converti en Flash) sur YouTube soit si mutilante amène peut-être à mieux discerner l'importance du son que ce ne serait le cas dans des conditions de projection dignes de ce nom (le son est moins perdu que l'image)...
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Underword USA/Les bas fond new-yorkais 1960, un bon Fuller qui montre la violence et la haine pour mieux la dénoncer. Fuller est un moraliste. C'est mené tambour battant.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"Alice ou la Dernière Fugue".
Sylvia Kristel pas mal, mais:
Je ne sais pas si Télé 7 Jours était toujours dans sa période mao en 1976, mais c'est une appréciation ma foi assez exacte, pondérée et concise.
Les 5 premières minutes (la scène de rupture "réaliste" qui part sur un truc psychologiquement monstrueux mais où l'on sent quelque chose de presque surnaturel dans le fait que la gentillesse du mari s’accroît au fur et à mesure qu'Alice lui parle de ses raisons -comme dans Betty d'ailleurs- ) sont bien, un peu l'équivalent d'une nouvelle de Jacques Sternberg.
Pas contre film dédié à Friz Lang pas trop compris pourquoi (le rouge à lèvre avec lequel Alice écrit "merci" dans la scène du thé qui indique que le film est "la 5ème Victime" vue du côté de la vie intérieure des victimes? belle idée mais ratée)
Sylvia Kristel pas mal, mais:
wikipédia a écrit:
Pour le magazine Télé 7 jours, Alice ou la Dernière Fugue est « une plongée dans l'étrange, mais un film qui manque singulièrement de conviction et de suspense ».
Je ne sais pas si Télé 7 Jours était toujours dans sa période mao en 1976, mais c'est une appréciation ma foi assez exacte, pondérée et concise.
Les 5 premières minutes (la scène de rupture "réaliste" qui part sur un truc psychologiquement monstrueux mais où l'on sent quelque chose de presque surnaturel dans le fait que la gentillesse du mari s’accroît au fur et à mesure qu'Alice lui parle de ses raisons -comme dans Betty d'ailleurs- ) sont bien, un peu l'équivalent d'une nouvelle de Jacques Sternberg.
Pas contre film dédié à Friz Lang pas trop compris pourquoi (le rouge à lèvre avec lequel Alice écrit "merci" dans la scène du thé qui indique que le film est "la 5ème Victime" vue du côté de la vie intérieure des victimes? belle idée mais ratée)
Dernière édition par Tony le Mort le Dim 27 Jan 2013 - 14:35, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Ha ben oui: dans les deux films il y a l’histoire d'un petit garçon habillé en fille par sa mère, et les deux scènes sont brèves comme des flash qui renferment le domaine du récit, l'isolent progressivement du reste du monde réel et socilogiquement "typé: le film de Chabrol est sur l'enfance du tueur de la 5ème Victime, que le tueur n'habite pas lui-même. La mort existe déjà du temps de son innocence, mais sa psychose veut en faire une chose privée qui ne tient que par lui (que Lang explique et traque, mais que Chabrol essaye maladroitement d'habiter). Ils se répondent discrètement.
La victime chez Chabrol écrit elle-même la part inconsciente mais produite de sa mort avec son rouge à lèvre que le tueur de Lang lui vole: le surnaturel chez Chabrol montre tout de la mort, sauf le crime.
C'est une très belle situation qui revient dans Betty: Marie Trintignant et l'amant de Laure se séduisent en 2 minutes presque dans deux pièces différentes, comme si le temps n'existait pas pour eux, leur sexualité représente l'ellipse du récit qui détaille morbidement celle des autres. Et juste après sa rivale Laure dont Betty a prévu la mort meurt hors-champs, dans une ellipse temporelle ahurissante.
La victime chez Chabrol écrit elle-même la part inconsciente mais produite de sa mort avec son rouge à lèvre que le tueur de Lang lui vole: le surnaturel chez Chabrol montre tout de la mort, sauf le crime.
C'est une très belle situation qui revient dans Betty: Marie Trintignant et l'amant de Laure se séduisent en 2 minutes presque dans deux pièces différentes, comme si le temps n'existait pas pour eux, leur sexualité représente l'ellipse du récit qui détaille morbidement celle des autres. Et juste après sa rivale Laure dont Betty a prévu la mort meurt hors-champs, dans une ellipse temporelle ahurissante.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Les bourreaux meurent aussi 47 de Fritz Lang et Brecht qui s'engueulaient, Brecht étant plus radical. Des 4 films anti-nazis de Lang c'est le plus indépendant (producteur) et le moins convaincant. C'est vrai quelques petites péripéties limites mais quand le film se resserre autour de son sujet, la vengeance et le complot ça devient une ligne droite très convaincante. A noter l'utilisation systématique des manchettes de journeaux et des voix à distance, la radio, l'enregistrement sonore etc qui passionnaient Lang.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
j'ai revu Le Conte d'Eté de Rohmer. Rien à faire Rohmer ne me déçoit jamais. C'est MON cinéaste de prédilection ! Une grande partie du film se passe entre Gaspar et alternativement une de ses trois copines à flâner sur la plage, le rivage, les champs : dites moi un peu quel meilleure dispositif pour marivauder. C'est un film aux sentiments complexes et d'un réalisme saisissant comme toujours chez Rohmer : j'ai appris que ça n'est pas un mais deux pseudonymes qu'il avait pour mieux semer sa famille qui l'aurait mieux vu prof : celui du cinéaste et du critique, celui du romancier.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
"The Texans" de James Hogan, 1938
Le début du film fait faussement croire qu'il se positionne dans un angle "pro-sudiste". Le texte d'introduction, malgré le fait qu'il mentionne que la Sécession fut gagné grâce à un combat pour une "cause noble" précise que c'est actuellement la loi martiale, le gros bordel, que le Nord abuse de son pouvoir durant la reconstruction.
Les images ne tardent à venir, les premiers plans montrant des soldats de l'Union en train de saisir meubles, marchandises et denrées dans une ville du Texas. Des affiches sont placardées partout, dictant ce que l'on ose faire, ce qui est interdit. Des aigles de l'Union traînent un peu partout. On voit également des cartes, mais elles ne sont pas montrés dans leur intégralité. Symbole d'une nation encore déchirée. Des ex-soldats sudistes, amassés sur le port, ont piètres allures. Ils pataugent en guenilles dans la boue créée par les vas-et-viens incessants. Ils sont réquisitionnés par les troupes de l'Union pour décharger des bateaux, le tout sous l'oeil de soldats Noirs. "Tant que tu portes cet uniformes, tu es un ennemi, un traître. Tu ne mérite pas de droits" dit en substance un surveillant Yankee à un Johnny Reb qui se plaint de son sort. Ce dernier lui rétorque "Mais on a plus que cela à se mettre sur le dos !". Randolph Scott, témoin de la scène, comprend qu'il lui faut quitter très rapidement son uniforme pour endosser des habits civils. Ce qu'il arrive à faire évidemment. Contre quelques km2 de terrains (l'argent du Sud ne vaut évidemment plus que des clopinettes), il se procure un costume qui est trop petit pour lui. "J'ai pas d'autre tailles, désolé". Une fois dans la rue, il se fera vite moquer de lui par ses anciens compagnons d'armes. Joan Bennett, quand à elle, est au départ la Southern Belle typique. Femme du Sud qui ne manque pas de courage et qui est en contact avec un mystérieux fiancé qui espère mettre sur pied une nouvelle armée au Mexique avec l'aide de l'Empereur Maximillien afin de mettre les Yankees dehors. Elle l'aide d'ailleurs en lui fournissant des armes cachés dans des caisses de pièces détachées de machines agricoles. De la terre et des flingues, this is America.
Mais Scott est très vite anti-Tarantino, pour lui la vengeance c'est pas bien. Il faut se réconcilier avec le Nord, oublier les illusions perdues et reformer très vite une grande nation. Le parcourt initiatique sera de convoyer le bétail de la belle sudiste du Texas à Abilene, Kansas, pour échapper à la saisit du troupeau par l'armée. Le troupeau se veut le représentant de la "vraie Amérique", pas celle du Sud ou de la bureaucratie du Nord, mais celle des pionniers et de la guerre d'Indépendance. Le film y fait d'ailleurs plusieurs fois références lors du voyage. La grand-mère de Joan Bennett, sudiste acharnée au début du film, se rappelle de ses années de jeunesse (elle a accouchée dans un chariot, tout un symbole) dans une Amérique libre. Elle sera très vite "réconciliée". Il reste cependant quelques endurcit à la cause sudiste dans le convoi, mais ils sont montrés comme étant plutôt des baltringues. L'un d'eux est un vétéran unijambiste et assez âgé portant toujours sa casquette de "bon rebelle". Il la cache d'ailleurs a un moment dans son pantalon, de peur d'être surprit par une patrouille de cavalerie, et simulera un mal de ventre. Le Sud est devenu le mal qu'il faut purger, évacuer. Le vieux vétéran est d'ailleurs tout fou quand il s'agit de descendre des Indiens. Il s'écrit d'ailleurs "Waaaahouuu, ca me rappelle Gettysburg ! Youppie !" Ce qui est autant con que d'entendre un ancien de la guerre de 1870 hurler "Wouahhhhh ca me rappelle Sedan ! Le bon vieux temps !" De toute façon, comme c'était prévu, il ne survivra pas au voyage et sera tué par une flèche indiennes.
Parlons-en d'eux, d'ailleurs. Enfin parler... eux ne parlent pas. Ils ne communiquent que par langue des signes. Suite au refus de la Southern Belle de leur donner une de ses vaches, ils vont surgir de nulle part (un grand classique du Western, les Indiens sortent littéralement de la terre) et attaquer le convoi. Heureusement la cavalerie, qui est censé poursuivre Scott et Bennett, vient à la rescousse. Plus tard, suite à l'échec de l'attaque en question, les Indiens vont poursuivre le convoi et incendier leur propre terre. On assiste alors a une déferlante de plans montrant les vaches/symboles paniquées échapper aux flammes. La terre brûlée, stratégie utilisé par Sherman lors de sa descente sur Atlanta en 1864. Ca sera tout pour les Indiens, on ne les verra plus par la suite. J'ai oublié de mentionner que la ville du départ du convoi se nomme Indianola. Une ville où, selon la grand-mère du convoi, il fait mauvais et où tout est infesté de microbes.
Le convoi va braver les éléments, on a droit à toutes les tempêtes possibles et inimaginables : neige, sable etc...
Mais la volonté du "peuple" sera la plus forte et est inébranlable même faces aux éléments déchaînés. Le choix de faire arriver le convoi au Kansas, destination finale de la réconciliation, n'est pas anodin quand on sait l'importance qu'a eux cet Etat très divisé lors du conflit. Abilene est également une des premières villes proches de la "Frontière" a acueillir le cheval de fer. Une grande révolution pour Randolph Scott qui espère par ce biais vendre plus facilement les vaches au Nord. Quand ils arrivent, les travaux de la voie ferré sont en suspens. Il n'y a plus d'argent pour financer le ravitaillement en nourriture des ouvriers. Qu'à cela ne tienne, Scott et la Southern Belle (qui est devenu entre temps pro-réconciliation) leur offre des têtes du troupeau. Les vaches courent alors dans Abilene. Chemin de fer très important, car il va aider à l'unification totale et finale des USA ; du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest. La cartographie incomplète du début n'est plus qu'un vague souvenir.
Joan Bennett quittera finalement son prétendant fanatique sudiste (qui va rejoindre le KKK...) pour aller "chasser" avec Scott. Même l'officier de l'Union qui était en charge de les poursuivre va "les pardonner et fermer les yeux". Il est d'ailleurs, durant tout film, tiraillé entre son devoir envers l'Etat appareil de capture et ses convictions.
Le Mexique est présent tout le long du film : un mexican, ex-ouvrier agricole de Bennett et semble t-il un peu abruti/attardé, se fera tuer également par les Indiens lors du périple. Un vacher, dont un dirait qu'il est métisse blanc/Indiens, parle de la guerre hispano-américaine alors que le convoi se réfugie derrière le Rio Grande, le temps d'une nuit, pour échapper à la cavalerie. Et puis le film s'appelle The Texans quand même, les "braves" qui se sont combattus contre Santa Ana (Scott et son acolyte sont trappeurs à la base et s'habillent en Davy Crockett).
Le début du film fait faussement croire qu'il se positionne dans un angle "pro-sudiste". Le texte d'introduction, malgré le fait qu'il mentionne que la Sécession fut gagné grâce à un combat pour une "cause noble" précise que c'est actuellement la loi martiale, le gros bordel, que le Nord abuse de son pouvoir durant la reconstruction.
Les images ne tardent à venir, les premiers plans montrant des soldats de l'Union en train de saisir meubles, marchandises et denrées dans une ville du Texas. Des affiches sont placardées partout, dictant ce que l'on ose faire, ce qui est interdit. Des aigles de l'Union traînent un peu partout. On voit également des cartes, mais elles ne sont pas montrés dans leur intégralité. Symbole d'une nation encore déchirée. Des ex-soldats sudistes, amassés sur le port, ont piètres allures. Ils pataugent en guenilles dans la boue créée par les vas-et-viens incessants. Ils sont réquisitionnés par les troupes de l'Union pour décharger des bateaux, le tout sous l'oeil de soldats Noirs. "Tant que tu portes cet uniformes, tu es un ennemi, un traître. Tu ne mérite pas de droits" dit en substance un surveillant Yankee à un Johnny Reb qui se plaint de son sort. Ce dernier lui rétorque "Mais on a plus que cela à se mettre sur le dos !". Randolph Scott, témoin de la scène, comprend qu'il lui faut quitter très rapidement son uniforme pour endosser des habits civils. Ce qu'il arrive à faire évidemment. Contre quelques km2 de terrains (l'argent du Sud ne vaut évidemment plus que des clopinettes), il se procure un costume qui est trop petit pour lui. "J'ai pas d'autre tailles, désolé". Une fois dans la rue, il se fera vite moquer de lui par ses anciens compagnons d'armes. Joan Bennett, quand à elle, est au départ la Southern Belle typique. Femme du Sud qui ne manque pas de courage et qui est en contact avec un mystérieux fiancé qui espère mettre sur pied une nouvelle armée au Mexique avec l'aide de l'Empereur Maximillien afin de mettre les Yankees dehors. Elle l'aide d'ailleurs en lui fournissant des armes cachés dans des caisses de pièces détachées de machines agricoles. De la terre et des flingues, this is America.
Mais Scott est très vite anti-Tarantino, pour lui la vengeance c'est pas bien. Il faut se réconcilier avec le Nord, oublier les illusions perdues et reformer très vite une grande nation. Le parcourt initiatique sera de convoyer le bétail de la belle sudiste du Texas à Abilene, Kansas, pour échapper à la saisit du troupeau par l'armée. Le troupeau se veut le représentant de la "vraie Amérique", pas celle du Sud ou de la bureaucratie du Nord, mais celle des pionniers et de la guerre d'Indépendance. Le film y fait d'ailleurs plusieurs fois références lors du voyage. La grand-mère de Joan Bennett, sudiste acharnée au début du film, se rappelle de ses années de jeunesse (elle a accouchée dans un chariot, tout un symbole) dans une Amérique libre. Elle sera très vite "réconciliée". Il reste cependant quelques endurcit à la cause sudiste dans le convoi, mais ils sont montrés comme étant plutôt des baltringues. L'un d'eux est un vétéran unijambiste et assez âgé portant toujours sa casquette de "bon rebelle". Il la cache d'ailleurs a un moment dans son pantalon, de peur d'être surprit par une patrouille de cavalerie, et simulera un mal de ventre. Le Sud est devenu le mal qu'il faut purger, évacuer. Le vieux vétéran est d'ailleurs tout fou quand il s'agit de descendre des Indiens. Il s'écrit d'ailleurs "Waaaahouuu, ca me rappelle Gettysburg ! Youppie !" Ce qui est autant con que d'entendre un ancien de la guerre de 1870 hurler "Wouahhhhh ca me rappelle Sedan ! Le bon vieux temps !" De toute façon, comme c'était prévu, il ne survivra pas au voyage et sera tué par une flèche indiennes.
Parlons-en d'eux, d'ailleurs. Enfin parler... eux ne parlent pas. Ils ne communiquent que par langue des signes. Suite au refus de la Southern Belle de leur donner une de ses vaches, ils vont surgir de nulle part (un grand classique du Western, les Indiens sortent littéralement de la terre) et attaquer le convoi. Heureusement la cavalerie, qui est censé poursuivre Scott et Bennett, vient à la rescousse. Plus tard, suite à l'échec de l'attaque en question, les Indiens vont poursuivre le convoi et incendier leur propre terre. On assiste alors a une déferlante de plans montrant les vaches/symboles paniquées échapper aux flammes. La terre brûlée, stratégie utilisé par Sherman lors de sa descente sur Atlanta en 1864. Ca sera tout pour les Indiens, on ne les verra plus par la suite. J'ai oublié de mentionner que la ville du départ du convoi se nomme Indianola. Une ville où, selon la grand-mère du convoi, il fait mauvais et où tout est infesté de microbes.
Le convoi va braver les éléments, on a droit à toutes les tempêtes possibles et inimaginables : neige, sable etc...
Mais la volonté du "peuple" sera la plus forte et est inébranlable même faces aux éléments déchaînés. Le choix de faire arriver le convoi au Kansas, destination finale de la réconciliation, n'est pas anodin quand on sait l'importance qu'a eux cet Etat très divisé lors du conflit. Abilene est également une des premières villes proches de la "Frontière" a acueillir le cheval de fer. Une grande révolution pour Randolph Scott qui espère par ce biais vendre plus facilement les vaches au Nord. Quand ils arrivent, les travaux de la voie ferré sont en suspens. Il n'y a plus d'argent pour financer le ravitaillement en nourriture des ouvriers. Qu'à cela ne tienne, Scott et la Southern Belle (qui est devenu entre temps pro-réconciliation) leur offre des têtes du troupeau. Les vaches courent alors dans Abilene. Chemin de fer très important, car il va aider à l'unification totale et finale des USA ; du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest. La cartographie incomplète du début n'est plus qu'un vague souvenir.
Joan Bennett quittera finalement son prétendant fanatique sudiste (qui va rejoindre le KKK...) pour aller "chasser" avec Scott. Même l'officier de l'Union qui était en charge de les poursuivre va "les pardonner et fermer les yeux". Il est d'ailleurs, durant tout film, tiraillé entre son devoir envers l'Etat appareil de capture et ses convictions.
Le Mexique est présent tout le long du film : un mexican, ex-ouvrier agricole de Bennett et semble t-il un peu abruti/attardé, se fera tuer également par les Indiens lors du périple. Un vacher, dont un dirait qu'il est métisse blanc/Indiens, parle de la guerre hispano-américaine alors que le convoi se réfugie derrière le Rio Grande, le temps d'une nuit, pour échapper à la cavalerie. Et puis le film s'appelle The Texans quand même, les "braves" qui se sont combattus contre Santa Ana (Scott et son acolyte sont trappeurs à la base et s'habillent en Davy Crockett).
Dernière édition par Dr. Apfelgluck le Lun 4 Fév 2013 - 19:37, édité 2 fois
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Mais mais....c'est un vieux film!
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
beau texte Doc.
j'avais vu ce film il y a quelques mois, sans enthousiasme particulier si ce n'est pour voir Bennett ailleurs que chez Lang; tu en soulignes très bien l'écriture signifiante au niveau politique. J'ai appris plein de choses
j'avais vu ce film il y a quelques mois, sans enthousiasme particulier si ce n'est pour voir Bennett ailleurs que chez Lang; tu en soulignes très bien l'écriture signifiante au niveau politique. J'ai appris plein de choses
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
The Outlaw, Le Banni sorti en 43 et qui est à la démesure de Hoxard Hugues, un film sans rythme où il ne se passe rien, où trois légende de l'ouest vont se jalouser comme des enfants, Doc Holliday se détourne de son vieux copain Pat Garret, l'autre veut le récupérer mais Doc fait cause commune avec Billy the Kid, avec qui il partage tout, son tabac, son cheval Red et sa femme Rio (un nom de mec ) le cheval est mieux traité que la femme, Jane Russel imposée par Hughes, dont la légende dit qu'il lui avait confectionné un soutien-gorge selon la technique du parachute et qui donne l'impression qu'elle n'en porte pas, on voit ça, c'est hallucinant comme les dialogues complètement surréalistes et l'amitié non dénuée d'une penchant homo qui lie le vieux doc au jeune Billy. Vraiment un ovni dans le ciel des westrens qui ne ressemble à rien. Le ton est toujours, ce qui s'appelle toujours ironique.
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
The Outlaw, Le Banni sorti en 43 et qui est à la démesure de Howard Hugues, un film sans rythme où il ne se passe rien, où trois légendes de l'ouest vont se jalouser comme des enfants, Doc Holliday se détourne de son vieux copain Pat Garret, l'autre veut le récupérer mais Doc fait cause commune avec Billy the Kid, avec qui il partage tout, son tabac, son cheval Red et sa femme Rio (un nom de mec ) le cheval est mieux traité que la femme, Jane Russel imposée par Hughes, dont la légende dit qu'il lui avait confectionné un soutien-gorge selon la technique du parachute et qui donne l'impression qu'elle n'en porte pas, on voit ça, c'est hallucinant comme les dialogues complètement surréalistes et l'amitié non dénuée d'un penchant homo qui lie le vieux doc au jeune Billy. Vraiment un ovni dans le ciel des westerns qui ne ressemble à rien. Le ton est toujours, ce qui s'appelle toujours ironique. C'est foutraque et attachant.
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
« On croit généralement que l’acte du suicide est un acte semblable aux autres, c’est-à-dire le dernier maillon d’une longue chaîne de réflexions ou du moins d’images, la conclusion d’un débat suprême entre l’instinct vital et un autre instinct, plus mystérieux, de renoncement, de refus...
Il n’en est pas ainsi, cependant. Si l’on excepte certaines formes d’obsessions qui ne relèvent que de l’aliéniste, le geste suicidaire reste un phénomène inexplicable, d’une soudaineté effrayante, qui fait penser à ces décompositions chimiques sur lesquelles la science à la mode, encore balbutiante, ne fournit que des hypothèses absurdes ou contradictoires.
Le « à quoi bon ? », la question terrible, inexorable, à laquelle nul homme réellement n’a pu répondre et qui a décidé du salut de quelques rares héros par un miracle de grâce, car elle se retourne d’ordinaire contre celui qui le prononce, symbole de l’antique serpent, ou peut-être ce serpent lui-même, n’arriva pas jusqu’à ses lèvres.
La même force de mort, issue de l’enfer, la haine vigilante et caressante qui prodigue aux riches et aux puissants les mille ressources de ses diaboliques séductions, ne peut guère s’emparer que par surprise du misérable, marqué du signe sacré de la misère. Il faut qu’elle se contente de l’épier, jour après jour, avec une attention effrayante, et sans doute une terreur secrète. Mais la brèche à peine ouverte du désespoir dans ces âmes simples, il n’est sans doute d’autre ressource à leur ignorance que le suicide, le suicide du misérable, si pareil à celui de l’enfant.
Le geste du suicide n’épouvante réellement que ceux qui ne sont point tentés de l’accomplir, ne le seront sans doute jamais, car le noir abîme n’accueille que les prédestinés. Celui qui déjà dispose de la volonté meurtrière l’ignore encore, ne s’en avisera qu’au dernier moment. La dernière lueur de conscience du suicidé, s’il n’est pas un dément, doit être celle de la stupeur, d’un étonnement désespéré. À l’exception des fous justiciables d’une autre loi plus obscure, personne ne tente deux fois de se tuer. »
Georges Bernanos - Nouvelle histoire de Mouchette
Naissance des peuvres : fin
« Mouchette se laissa glisser sur la côte jusqu’à ce qu’elle sentît le long de sa jambe et jusqu’à son flanc la douce morsure de l’eau froide. Le silence qui s’était fait soudain en elle était immense. C’était celui de la foule qui retient son haleine lorsque l’équilibriste atteint le dernier barreau de l’échelle vertigineuse. La volonté défaillante de Mouchette acheva de s’y perdre. Pour obéir, elle avança un peu plus, en rampant, une de ses mains posée contre la rive. La simple pression de sa paume suffisait à maintenir son corps à la surface de l’eau, pourtant peu profonde. Un moment, par une sorte de jeu sinistre, elle renversa la tête en arrière, fixant le point le plus haut du ciel. L’eau insidieuse glissa le long de sa nuque, remplit ses oreilles d’un joyeux murmure de fête. Et, pivotant doucement sur les reins, elle crut sentir la vie se dérober sous elle tandis que montait à ses narines l’odeur même de la tombe. »
Dernière édition par Mangeclous le Mar 5 Fév 2013 - 10:38, édité 1 fois
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Mangeclous
"On croit généralement que l’acte du suicide est un acte semblable aux autres, c’est-à-dire le dernier maillon d’une longue chaîne de réflexions ou du moins d’images, la conclusion d’un débat suprême entre l’instinct vital et un autre instinct, plus mystérieux, de renoncement, de refus...
Il n’en est pas ainsi, cependant. Si l’on excepte certaines formes d’obsessions qui ne relèvent que de l’aliéniste, le geste suicidaire reste un phénomène inexplicable, d’une soudaineté effrayante, qui fait penser à ces décompositions chimiques sur lesquelles la science à la mode, encore balbutiante, ne fournit que des hypothèses absurdes ou contradictoires.
Le « à quoi bon ? », la question terrible, inexorable, à laquelle nul homme réellement n’a pu répondre et qui a décidé du salut de quelques rares héros par un miracle de grâce, car elle se retourne d’ordinaire contre celui qui le prononce, symbole de l’antique serpent, ou peut-être ce serpent lui-même, n’arriva pas jusqu’à ses lèvres.
La même force de mort, issue de l’enfer, la haine vigilante et caressante qui prodigue aux riches et aux puissants les mille ressources de ses diaboliques séductions, ne peut guère s’emparer que par surprise du misérable, marqué du signe sacré de la misère. Il faut qu’elle se contente de l’épier, jour après jour, avec une attention effrayante, et sans doute une terreur secrète. Mais la brèche à peine ouverte du désespoir dans ces âmes simples, il n’est sans doute d’autre ressource à leur ignorance que le suicide, le suicide du misérable, si pareil à celui de l’enfant.
Le geste du suicide n’épouvante réellement que ceux qui ne sont point tentés de l’accomplir, ne le seront sans doute jamais, car le noir abîme n’accueille que les prédestinés. Celui qui déjà dispose de la volonté meurtrière l’ignore encore, ne s’en avisera qu’au dernier moment. La dernière lueur de conscience du suicidé, s’il n’est pas un dément, doit être celle de la stupeur, d’un étonnement désespéré. À l’exception des fous justiciables d’une autre loi plus obscure, personne ne tente deux fois de se tuer."
je trouve bien tout ce que tu as écrit, sauf la fin car il semble bien qu'une grande partie des suicidés avait déjà essayé auparavant.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
C'est pas de moi c'est de Bernanos
Je vais rajouter des guillemets et une citation.
Je vais rajouter des guillemets et une citation.
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Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Vu Sinister, qui ne m'a guère convaincu. Même si ça n'a pas grand chose à voir m'est immédiatement venue à l'esprit une comparaison avec Insidious, autre histoire de fantômes qui m'a semblée, elle, très réussie. C'est celui-là que j'avais mentionné y a quelques temps déjà... ça m'intéresserait de connaître ton appréciation sur l'un ou l'autre, Borges.
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Hi
"Sinister", oui, c'est pas terrible; ça se regarde, sans plus; "Insidious", pas vu (encore)
t'as vu "American Horror Story" (la série) ?
"Sinister", oui, c'est pas terrible; ça se regarde, sans plus; "Insidious", pas vu (encore)
t'as vu "American Horror Story" (la série) ?
Borges- Messages : 6044
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
C'est très précisément ce que j'avais l'intention d'entamer ce soir, en espérant tomber sur un streaming potable
Invité- Invité
Re: Vu (lu, entendu) où l'on parle de tout sauf de films
Baudouin II de Barvaux a écrit:C'est très précisément ce que j'avais l'intention d'entamer ce soir, en espérant tomber sur un streaming potable
c'est aussi téléchargeable
je crois pas l'avoir vue à la médiathèque...
Borges- Messages : 6044
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