Like someone in love (A. Kiarostami)
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Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
Pour ce qui est de la durée des plans, le fait que le sens fonctionne plus en deça qu'à la surface des images, ça me renvoie à ce dont on parlait en ce qui concerne Béla Tarr. La table qui semble devenir "elle-même"... dans Le cheval de Turin. Bien qu'en fait le film de Béla Tarr soit lourd de sens et laisse peu l'asignifiant, des choses captées par la caméra, jouer dans la durée et le cadre. L'espace de ce film est avant tout un décor : La longueur des plans et la substance qu'elle donne aux objets dans le cadre, c'est l'idée d'un poids du temps dû au drame que vivent les personnages.
La durée chez Kiarostami, elle, a parfois quelque chose d'un "laché prise" (mais on est loin d'un cinéaste comme Hou Hsiao-hsien), bien qu'encore une fois c'est à nuancer, ce "laché prise" n'est pas une couleur dominante de Like someone in love. La première scène de ce film, au contraire, crée un espace-temps très artificiel, peut-être un peu à rapprocher des espaces de Ozu où tous les éléments du plan sont neutralisés par l'abstraction que crée une "chorégraphique" de tout ce qui peuple et se meut (ou non) dans l'univers du plan. Tout semble à sa place, bien que le décadrage choisit par Kiarostami crée un trouble dû au fait que l'audio et le visuel ne coïncident pas, ne s'illustrent pas.
On peut aussi avoir l'impression que cette scène, dont la neutralité des objets peut renvoyer à Ozu, est destructurée par la nature de ce qui la compose. Chez Ozu on a des personnages installés, stables, qui discutent; on passe d'une réplique à l'autre simplement, bien que le fait que le cinéaste ne respecte pas la régle des 180 degrés peut créer un trouble. Dans le AK ce n'est même plus la régle du 180 degrés qui est ignorée, c'est le point de vue des corps, du regard, l'emplacement de la caméra ne suit plus le dialogue, ne dépend pas des personnages, de leurs échanges. Mais ce n'est pas juste un choix arbitraire sans sens précis, on peut aussi le corréler au fait que le dialogue est très instable et qu'en plus il ne passe pas juste d'un personnage à un autre, l'un en face de l'autre, les personnages bougent beaucoup et il est difficile de prendre la voix dominante (celle de l'héroïne) comme émanant juste d'un point de vue subjectif. Elle s'adresse aussi à un moment à une personne hors de l'espace du bar, par conversation téléphonique... C'est comme si le point de vue dans cette scène était celui de l'espace lui-même, enfin, d'un point de l'espace déterminé par l'emplacement des personnages concernés par le drame à venir, mais qui ne se meut pas encore en accord avec leurs corps et axes regards.
Mais dans le sens neutralité et chorégraphie des objets et personnages peuplant l'espace-temps du plan, je crois que dans l'économie de ses plans Like someone in love est un bien meilleur hommage à Ozu que Café Lumière de HHH. HHH fait un peu le contraire de Ozu, ses espaces laissent le dehors, "le hasard", créer le rythme du film, là où Ozu décide de la place de chaque geste et objet qui composent la vie de ses personnages, leur drame.
La durée chez Kiarostami, elle, a parfois quelque chose d'un "laché prise" (mais on est loin d'un cinéaste comme Hou Hsiao-hsien), bien qu'encore une fois c'est à nuancer, ce "laché prise" n'est pas une couleur dominante de Like someone in love. La première scène de ce film, au contraire, crée un espace-temps très artificiel, peut-être un peu à rapprocher des espaces de Ozu où tous les éléments du plan sont neutralisés par l'abstraction que crée une "chorégraphique" de tout ce qui peuple et se meut (ou non) dans l'univers du plan. Tout semble à sa place, bien que le décadrage choisit par Kiarostami crée un trouble dû au fait que l'audio et le visuel ne coïncident pas, ne s'illustrent pas.
On peut aussi avoir l'impression que cette scène, dont la neutralité des objets peut renvoyer à Ozu, est destructurée par la nature de ce qui la compose. Chez Ozu on a des personnages installés, stables, qui discutent; on passe d'une réplique à l'autre simplement, bien que le fait que le cinéaste ne respecte pas la régle des 180 degrés peut créer un trouble. Dans le AK ce n'est même plus la régle du 180 degrés qui est ignorée, c'est le point de vue des corps, du regard, l'emplacement de la caméra ne suit plus le dialogue, ne dépend pas des personnages, de leurs échanges. Mais ce n'est pas juste un choix arbitraire sans sens précis, on peut aussi le corréler au fait que le dialogue est très instable et qu'en plus il ne passe pas juste d'un personnage à un autre, l'un en face de l'autre, les personnages bougent beaucoup et il est difficile de prendre la voix dominante (celle de l'héroïne) comme émanant juste d'un point de vue subjectif. Elle s'adresse aussi à un moment à une personne hors de l'espace du bar, par conversation téléphonique... C'est comme si le point de vue dans cette scène était celui de l'espace lui-même, enfin, d'un point de l'espace déterminé par l'emplacement des personnages concernés par le drame à venir, mais qui ne se meut pas encore en accord avec leurs corps et axes regards.
Mais dans le sens neutralité et chorégraphie des objets et personnages peuplant l'espace-temps du plan, je crois que dans l'économie de ses plans Like someone in love est un bien meilleur hommage à Ozu que Café Lumière de HHH. HHH fait un peu le contraire de Ozu, ses espaces laissent le dehors, "le hasard", créer le rythme du film, là où Ozu décide de la place de chaque geste et objet qui composent la vie de ses personnages, leur drame.
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
j'ai adoré ce film de Kiarostami dont il y a des photogrammes plus haut, Et la vie continue. Le dispositif qu'il adopte et sa patte font du film pourtant tourné dans un paysage de ruines, à la manière de Rossellini, un film qui interroge le monde et le cinéma avec une infinie douceur et un grand optimisme. La relation du père au fils, du cinéaste à l'enfant comédien, redoublée par cette recherche des interprètes de Où est la maison de mon ami résonne d'une grande profondeur.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
miniature persane du 14 °. On peut y trouver une origine du goût de Kiarostami pour les routes en forme de Z qui serpentent sur les collines.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
Le goût de la cerise, c'est bien, pas de souci.
Cependant à une question que je me suis posée : pourquoi le lettré oisif aux 4*4 ne se suicide-t'il pas seul, pourquoi a t'il besoin de quelqu'un ? à tort j'en conviens car c'est justement là le motif cinématographique avéré, la mort, la terre, l'ensevelissement etc.
Mais à cette question qu'on lui a posée Kiarostami a répondu d'une pirouette : "le personnage ne m'a rien dit" donc il n'a pas de comptes à rendre (Kiarostami non plus). A côté ou en face les tacherons que sont le militaire, le religieux et le travailleur, le fils, le frère, le père, semblent ployer sous les contraintes de jeu, de texte à débiter au pied de la lettre.
Ca m'a gêné, je trouve qu'il y a un peu de duplicité à cet endroit.
Cependant à une question que je me suis posée : pourquoi le lettré oisif aux 4*4 ne se suicide-t'il pas seul, pourquoi a t'il besoin de quelqu'un ? à tort j'en conviens car c'est justement là le motif cinématographique avéré, la mort, la terre, l'ensevelissement etc.
Mais à cette question qu'on lui a posée Kiarostami a répondu d'une pirouette : "le personnage ne m'a rien dit" donc il n'a pas de comptes à rendre (Kiarostami non plus). A côté ou en face les tacherons que sont le militaire, le religieux et le travailleur, le fils, le frère, le père, semblent ployer sous les contraintes de jeu, de texte à débiter au pied de la lettre.
Ca m'a gêné, je trouve qu'il y a un peu de duplicité à cet endroit.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
a part ça l'autre jour j'ai vu Close up et l'exploitation de la confusion de ce pauvre type m'a fait froid dans le dos.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
je pense au procès ou il est filmé, où il doit se défendre et en même temps faire bonne figure devant la caméra : j'ai vécu ça comme une torture pour lui. Ca m'a glacé.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
ce que je pense, je crois, relativement au cinéma de Kiarostami est que d'un film à l'autre, soit, d'une manière ou d'une autre il a une position surplombante, sur laquelle je focalise, et j'en reste là.
Ca peut être des trucs complètement idiots : dans le Passager dont tu avais parlé Bidibule, je trouve au gosse du début à la fin une tête à claque, aussi son périple m'indiffère.
Ca peut être des trucs complètement idiots : dans le Passager dont tu avais parlé Bidibule, je trouve au gosse du début à la fin une tête à claque, aussi son périple m'indiffère.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
A ce moment-là, ce n'est pas que la scène du procès, c'est tout le film qui le montre dans une situation où il doit s'expliquer et faire bonne figure, non ?slimfast a écrit:je pense au procès ou il est filmé, où il doit se défendre et en même temps faire bonne figure devant la caméra : j'ai vécu ça comme une torture pour lui. Ca m'a glacé.
C'est pas un film qui met Sabzian à la torture et "exploite" son malheur. C'est un film qui lui donne la parole face à ceux qui ne voyaient en lui qu'un escroc, et qui l'accompagne à la fin jusqu'à la "maison de l'ami".
C'est triste.dans le Passager dont tu avais parlé Bidibule, je trouve au gosse du début à la fin une tête à claque, aussi son périple m'indiffère
Eyquem- Messages : 3126
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
mais pas inquiétant, l'offre au cinéma est grande.
Invité- Invité
Re: Like someone in love (A. Kiarostami)
"I’ve said before that fortunately or unfortunately, I’m unable to be a real storyteller. I’m sure that we can never be the witness of a story from its beginning to its end. I would say that this film doesn’t have an adequate opening and it doesn’t have a real ending either, but it also proves my idea that all films start before we get into them and they end after we leave them."
Abbas Kiarostami on storytelling
DB- Messages : 1528
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