The servante (Im Sang-soo, The Housemaid)
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The servante (Im Sang-soo, The Housemaid)
Je suis allé voir "The Housemaid" sur la foi d'un bon souvenir (celui d' "Une femme coréenne") et puis le film était allé à Cannes. Je m'étais dit : "Cannes, c'est comme le label bio : le plat a pas forcément meilleur goût, mais au moins, ce sera pas mauvais pour la santé".
Ah la la, eh bien détrompez-vous : je vous certifie que "The housemaid" m’a rendu patraque. Je ne sais pas quelle combinaison de focale, d'objectif et d’image en plongée Im Sang-soo a choisie, mais chaque gros plan déforme les perspectives, fait fuir les visages sur les côtés ou je ne sais quoi, mais légèrement, c'est à peine sensible, un effet indéfinissable ; en tout cas, je suis sorti de la salle avec un haut-le-coeur, comme si je m’étais amusé à porter pendant une heure des grosses lunettes de myope. Si j'étais aux Inrocks, je dirais que c'est un genre d'expérience sensorielle radicale. Mais bon, ça avait rien de plaisant ; encore heureux, c'était pas en 3D.
"Et le contenu alors ?", que vous me demandez ; "c'était quoi, le message du film ?" Ca tient sur un ticket de cinéma, ou alors j'ai pas tout compris, ce qui est toujours une hypothèse plausible, vu que tout du long, je m'accrochais au bastingage pour oublier mon mal au coeur. J'ai cru comprendre que ça parlait de rapports de classe : eh oui, c'est une servante qui débarque chez des grands bourgeois, où l'épouse fait des enfants et le mari des tonnes d'argent. L'épouse se consacre à un genre de yoga ; le mari joue du Beethoven en attendant son chauffeur, et le soir, il boit du vin dont vous avez pas idée du prix. Il y a aussi une belle-mère aussi belle que venimeuse, et une gouvernante assez raide pour faire passer Thatcher pour Mary Poppins. C'est dire le panier de crabes, et notre pauvre servante ne sait pas dans quel guêpier elle s'est fourrée. Mais bon, comme c'est une femme, elle est assez cruche, et ni une ni deux, elle se donne au patron, qui l'amadoue en rien de temps grâce à une seule gorgée de Saint-Emilion, et aussi parce que les femmes aiment le sexe, le luxe et être dominées. Evidemment, ça finit mal : ça commence par un accident d'escabeau, puis ça continue avec un empoisonnement, et ça se termine par une pendaison au lustre, avec immolation par le feu ; c'est un peu dommage que le cinéaste n'ait pas trouvé une astuce de scénario qui lui aurait permis de tout faire en même temps, dans un super finale combinant escabeau + pendaison + poison + immolation. Ca aurait été épatant. Mais en l'état, le dénouement vaut déjà le détour, comme on dit dans le guide Michelin, et on n'est pas déçu.
On est quand même un peu triste pour la servante et pour les femmes en général, qui passent trop de temps à travailler et pas assez à s’émanciper ; déjà qu’elle avait perdu sa mère, puis son enfant ; c’est une vie difficile quand on n'a pas eu la chance d’avoir un Vitalis et un Zerbino à ses côtés pour rendre la vie moins dure, comme à Rémi sans famille.
Mais bref.
Au cas où le spectateur aurait été distrait un moment, la fable nous assène en guise de moralité deux trois vérités sur ce monde pourri, grâce à deux personnages qui prennent conscience qu’il y a des injustices en ce monde. On est épaté par leur esprit de déduction qui leur fait saisir en un clin d’œil que quand une servante se pend au lustre et s’immole par le feu devant ses patrons, c’est le signe qu’il y a quelque chose qui va pas quelque part. « Ah ah !, exulte la vieille gouvernante dont les yeux s’ouvrent soudain sur cette famille, ah ! ah ! mais en fait, vous ne vous souciiez que des apparences ! En vérité, votre culture n’était que le vernis qui dissimulait votre soif de pouvoir ! Et vous croyiez pouvoir tout acheter dans ce monde où l’argent est roi ! »
La salle est transportée par ces accents inouïs ; même le critique du Monde est prêt à entrer dans la lutte armée.
J’ai trouvé ça un poil simplet, je le confesse. Et le cachet arty censé updater la chose et pousser le mélo jusqu’au grotesque pour l’empêcher d’être d’une naïveté simplement ridicule, j’ai trouvé que c’était ce qui rendait le film à peu près détestable.
Ah la la, eh bien détrompez-vous : je vous certifie que "The housemaid" m’a rendu patraque. Je ne sais pas quelle combinaison de focale, d'objectif et d’image en plongée Im Sang-soo a choisie, mais chaque gros plan déforme les perspectives, fait fuir les visages sur les côtés ou je ne sais quoi, mais légèrement, c'est à peine sensible, un effet indéfinissable ; en tout cas, je suis sorti de la salle avec un haut-le-coeur, comme si je m’étais amusé à porter pendant une heure des grosses lunettes de myope. Si j'étais aux Inrocks, je dirais que c'est un genre d'expérience sensorielle radicale. Mais bon, ça avait rien de plaisant ; encore heureux, c'était pas en 3D.
"Et le contenu alors ?", que vous me demandez ; "c'était quoi, le message du film ?" Ca tient sur un ticket de cinéma, ou alors j'ai pas tout compris, ce qui est toujours une hypothèse plausible, vu que tout du long, je m'accrochais au bastingage pour oublier mon mal au coeur. J'ai cru comprendre que ça parlait de rapports de classe : eh oui, c'est une servante qui débarque chez des grands bourgeois, où l'épouse fait des enfants et le mari des tonnes d'argent. L'épouse se consacre à un genre de yoga ; le mari joue du Beethoven en attendant son chauffeur, et le soir, il boit du vin dont vous avez pas idée du prix. Il y a aussi une belle-mère aussi belle que venimeuse, et une gouvernante assez raide pour faire passer Thatcher pour Mary Poppins. C'est dire le panier de crabes, et notre pauvre servante ne sait pas dans quel guêpier elle s'est fourrée. Mais bon, comme c'est une femme, elle est assez cruche, et ni une ni deux, elle se donne au patron, qui l'amadoue en rien de temps grâce à une seule gorgée de Saint-Emilion, et aussi parce que les femmes aiment le sexe, le luxe et être dominées. Evidemment, ça finit mal : ça commence par un accident d'escabeau, puis ça continue avec un empoisonnement, et ça se termine par une pendaison au lustre, avec immolation par le feu ; c'est un peu dommage que le cinéaste n'ait pas trouvé une astuce de scénario qui lui aurait permis de tout faire en même temps, dans un super finale combinant escabeau + pendaison + poison + immolation. Ca aurait été épatant. Mais en l'état, le dénouement vaut déjà le détour, comme on dit dans le guide Michelin, et on n'est pas déçu.
On est quand même un peu triste pour la servante et pour les femmes en général, qui passent trop de temps à travailler et pas assez à s’émanciper ; déjà qu’elle avait perdu sa mère, puis son enfant ; c’est une vie difficile quand on n'a pas eu la chance d’avoir un Vitalis et un Zerbino à ses côtés pour rendre la vie moins dure, comme à Rémi sans famille.
Mais bref.
Au cas où le spectateur aurait été distrait un moment, la fable nous assène en guise de moralité deux trois vérités sur ce monde pourri, grâce à deux personnages qui prennent conscience qu’il y a des injustices en ce monde. On est épaté par leur esprit de déduction qui leur fait saisir en un clin d’œil que quand une servante se pend au lustre et s’immole par le feu devant ses patrons, c’est le signe qu’il y a quelque chose qui va pas quelque part. « Ah ah !, exulte la vieille gouvernante dont les yeux s’ouvrent soudain sur cette famille, ah ! ah ! mais en fait, vous ne vous souciiez que des apparences ! En vérité, votre culture n’était que le vernis qui dissimulait votre soif de pouvoir ! Et vous croyiez pouvoir tout acheter dans ce monde où l’argent est roi ! »
La salle est transportée par ces accents inouïs ; même le critique du Monde est prêt à entrer dans la lutte armée.
J’ai trouvé ça un poil simplet, je le confesse. Et le cachet arty censé updater la chose et pousser le mélo jusqu’au grotesque pour l’empêcher d’être d’une naïveté simplement ridicule, j’ai trouvé que c’était ce qui rendait le film à peu près détestable.
Dernière édition par Eyquem le Mer 29 Sep 2010 - 10:20, édité 3 fois
Eyquem- Messages : 3126
Re: The servante (Im Sang-soo, The Housemaid)
C'est dire le panier de crabes
Tu n'as pas l'air très crabes.
Invité- Invité
Re: The servante (Im Sang-soo, The Housemaid)
...Mais alors ce film, c'est un genre de Cérémonie chabrolienne à l'envers, déformée, pervertie ?
(toujours assez drôle de te lire quand t'aimes pas les films dont tu parles)
(toujours assez drôle de te lire quand t'aimes pas les films dont tu parles)
Re: The servante (Im Sang-soo, The Housemaid)
J'en discutais avec des amies ; l'une me disait que ce film lui donnait juste envie de revoir "La Cérémonie", où la place du spectateur était quand même moins confortable et attendue qu'ici ; l'autre trouvait que l'image des femmes était tellement déplorable dans "The Housemaid" (leur complaisance à se soumettre jusqu'au sacrifice) qu'au fond, ça valait guère mieux que les pires boulevards qui racontaient sempiternellement les mêmes histoires égrillardes de maîtres qui s'envoient leurs domestiques, en dissimulant sous le beau prétexte d'une dénonciation des rapports de domination, de simples histoires de c*l propres à émoustiller le bourgeois.
Eyquem- Messages : 3126
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