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Donner la parole, donner la mort : Tarantino, et le cinéma

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Donner la parole, donner la mort : Tarantino, et le cinéma Empty Donner la parole, donner la mort : Tarantino, et le cinéma

Message par Borges Mer 21 Oct 2009 - 13:11

Je voudrais bavarder ici, de Tarantino.




Au début du cinéma de Tarantino, il y a le logos ; la parole ; dès son premier film, Reservoir Dogs ; on entend une voix, la sienne, puis les images ; comme si la voix avait triomphé des ténèbres, comme la fameuse ritournelle de l’enfant dans le noir. Il s’agit de se construire un territoire, un espace pour se protéger, s’abriter du dehors, de la menace, de la peur. Cet espace est toujours virile, un espace de potes, entre potes, comme la fameuse prison de Hawks. Mais chez Tarantino, contrairement à Hawks, le traître est déjà là; le rat. La communauté virile est toujours déjà contaminée par le dehors, fissurée. Celui à qui on parle, ce n'est peut-être pas un ami, l'ami, ou alors l'amitié est toujours sous la menace de la trahison. Que serait un ami sans trahison possible?

Comme dans toute les éthiques de la virilité, cette parole s’appuie sur le néant. C’est pour quoi Tarantino à toujours rêvé de filmer la guerre, où l’on parle toujours en présence de la mort, comme possibilité de mort, comme mort possible, comme celui qui peut donner la mort, ou la recevoir. Parler comme si on devait donner la mort, parler comme si on devait la recevoir. En ce sens, rien de moins vides que les dialogues de Tarantino. Avec lui, en eux, on est toujours en présence du néant, donc de l’être, qui n’est rien d’étant ; et pourtant, dans le même temps, le plus difficile est de tenir cette contradiction, qui n'est pas seulement apparente, cette parole est la plus vide, celle dont la contenu semble le plus vain, le plus éloigné de toute substance. Paroles vides, et pourtant essentielles. Cela pourrait être la définition même de la littérature ; nous sommes dans les parages de Blanchot.

L’espace de Tarantino est un espace littéraire, l’espace où les mots portent la mort, l’espace où la mort rend vaine toute parole ; l'espace où il faut parler, en vain. Mais nous ne sommes pas dans Blanchot, nous sommes ailleurs, nous sommes autrement, quelque chose retient les mots, les phrases, en dehors de cet espace, même si la mort ne cesse de parler dans le vide des paroles superficielles des personnages de Tarantino.

La parole est entre potes. Il faut penser cet « entre », dans la pluralité de ses sens. La parole permet le passage, la communication, d’aller l’un à l’autre, mais elle est aussi entre eux, comme un mur, une barrière, comme ce qui les empêcher de trop se rapprocher, comme ce qui interdit une trop grande intimité ;

la parole entre ; les mots entre les personnages ; entre eux; entre nous et eux; comme si le personnage était aussi séparé de lui-même par les mots, ce qu'il dit, tous ces mots, qui ne disent rien, mais semblent bien plutôt dissimuler, mentir, tromper; comme si ces mots n’étaient pas les leurs ; et on souvent dit qu’ils n’étaient, ces mots, que l’effet d’une virtuosité un peu vaine du grand dialoguiste qu’est Tarantino ; les héros de Tarantino ne parlent pas, de leur propre voix, en leur nom, ils sont parlés ; quelques chose de la ventriloquie ; qu’est-ce que cela signifie du côté du sujet de la parole ; qui est le sujet de cette parole ; Tarantino, serait la réponse la plus immédiate, celle qui vient immédiatement ; c’est Tarantino qui parle, et fait parler ses personnages ; sans jamais leur laisser l’espace pour se dire, se révéler ; c’est possible ; c’est un danger qui guette ; le sentiment n’est pas faux ; mais il est incomplet.
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Donner la parole, donner la mort : Tarantino, et le cinéma Empty Re: Donner la parole, donner la mort : Tarantino, et le cinéma

Message par Borges Mer 21 Oct 2009 - 13:24

les personnages de tarantiono, parlent, mais ils ne parlent de rien, ils parlent pour parler ; on connaît le passage sur le sandwich, paroles vides sur du vide ; dans la vie ordinaire c’ est l’ordinaire, mais quand ce sont des tueurs qui parlent dans le vide, c’est le vide même alors qui prend la parole, c’est le néant même qui parle ; comme dans le « tombeau de Poe » de Mallarmé, c’est la mort qui triomphe dans ces voix étranges ; quelle mort ? c’est toute la question ;

mais en même temps, cette parole, est au plus proche de l’époque, de la parole critique, ou de la parole herméneutique ; elle cherche le sens, menacée de mort, par la mort ; et cette mort, comme souvent, s’appelle femme ; on n’entre dans la vérité que par la castration ; cette castration, fait peur aux personnages de Tarantino ; c’est pourquoi sans doute, il commence, son cinéma, avec l’image même de la virginité, par une discussion autour de la madone en pute, c’est pourquoi il commence avec Madonna ;
on se souvient donc de l’ouverture de « Reservoir dogs »… un réservoir de sens, mais aussi de dieux.

des types habillés de noirs, presque tous ; sont là ; le costume est ici important, qu’ils soient pareils, identiques, aussi ; pas seulement pour le coup qu’il faut monter, pas seulement parce qu’ils doivent rester anonymes, sans passé, sans relations, des pseudos, imposé violement, comme tout nom, tout prénom ; l’entrée dans le symbolique est toujours une violence ;

si ces mecs sont tous habillés pareillement et en noir, c’est pas seulement non plus une question de désir, d’image, et de captation ; l’identification dit Tarantino est essentielle, dans nos relations au héros, aux images, au cinéma, le personnage doit-être habillé de telle manière que je veuille lui ressembler, m’identifier à lui dans l’apparence, prendre son apparence, pas son être, mais juste la manière d’être ; la relation au personnage, passe par l’apparence, vestimentaire ; on ne désire ressembler qu’à un être habillé ; rien de moins naturaliste, donc ; on est déjà dans le péché, avec Tarantino ; on veut ressembler à un pécheur , dans cette histoire, il y a là quelque chose de dandy ; terme important, qui nous dirige du côté de Baudelaire, et vers son fameux texte sur la modernité de la peinture ; Tarantino et Baudelaire, c’est un lien important ; je ne pense pas qu’il le lise, et il est évident que Baudelaire n’a rien vu de Tarantino ; du moins je le suppose…mais en ces matières on n’est jamais sûr de rien…
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