"Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
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"Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
Lionel BaÏer, on ne le connait pas très bien ce cinéaste suisse par ici, son dernier film (Un autre homme) à dû être vu par 500 personnes au MK2 Beaubourg, mais dans son pays, il m'a tout l'air d'être une figure locale à en juger par sa biographie :
Bande à part...Comme la société de Tarantino...
Bref, je voulais dire deux mots de son dernier projet disponible en streaming ici : http://www.tsr.ch/fiction/2010/low-cost/
EDIT : il était apparemment disponible jusqu'à...hier !
Ce film, c'est pas n'importe quel film, on nous le présente comme "le premier long-métrage suisse tourné avec un téléphone portable". Autant dire, un événement !
Ca parle de quoi ? Ca parle d'un type qui pour une raison mystérieuse connaît la date de sa mort depuis des années. A l'approche de celle-ci, il va voir une dernière fois ceux qui ont compté pour lui : son amant, son frère, sa mère, ses copines...
Certaines s'adressent à lui comme à un revenant, comme s'il était déjà mort, c'est assez étrange parfois.
On est donc dans le registre de l'autofiction (la voix off pendant tout le film est celle de Baier), ça évoque Alain Cavalier et aussi son camarade Joseph Morder, qui avait fait ce film avec un téléphone portable :
(film que je n'ai pas vu, mais dans cette bande-annonce on sent un genre de sentimentalisme romantique légèrement grandiloquent, ça ressemble à une caricature pas très réussie de ce qu'a pu faire Cavalier avec Irène...)
J'essayais de me souvenir des films dont j'ai pu entendre parler faits avec des portables ou des petites DV, et grosso modo, il y a ces films-là, les films d'auteur intimistes, pour le dire vite. Et il y a les films de genre (Blair Witch, etc). Dans tous les cas, on joue sur l'effet de réel, de réalisme procurés par l'esthétique amateur de la prise de vue pour donner l'impression que le personnage a existé (comme les faux journaux intimes en littérature) "pour de vrai". C'est censé être plus émouvant ou faire plus peur, je suppose.
Là où Baier est assez malin c'est qu'il utilise un ressort "fantastique" au service d'une intrigue tout ce qu'il y a de plus intime. Et en fait, à l'image, la facture soit disant "réaliste" est trouée d'aberrations chromatiques qui font écho au fantastique du récit : les yeux du chat ressortent vert, la braise de la cigarette est bleu, le soleil rouge ocre... C'est très insignifiant et en même temps, je ne sais pas ça m'a surpris, c'était comme autant de piqures de rappel qui clignotaient : "même quand on veut faire vrai, on est encore complètement, définitivement au cinéma".
Sinon, l'horizon référentiel est une nouvelle fois proustien : il y a des madeleines partout, des voyages à Cabourg et des instantanés sur des souvenirs d'enfance qu'on brûle. J'ai pensé parfois aux films de Guy Gilles (voir Spectres #1 )... Il aurait sans doute fait ce type de films s'il vivait à notre époque.
En ce qui concerne le titre, j'avoue n'avoir pas bien compris, c'est un homme plus âgé que le héros, son oncle peut-être, je sais pas, qui parle de l'existence du personnage principale fondée sur la dévaluation de sa vie, qui serait "low cost" comme les vols qu'il prend régulièrement pour parcourir le monde. Il dit que Stendhal a peut-être fait que 3 ou 4 voyages dans sa vie, mais qu'il a tiré plus de choses, qu'il en a fait meilleur usage, un truc dans le genre. Ca me paraît pas mener très loin ce type de discours un peu "vieux con", c'était mieux avant, maintenant c'est la débauche et la frénésie de consommation, blabla...
LIONEL BAIER : BIOGRAPHIE
Lionel Baier naît en 1975 à Lausanne dans une famille suisse d’origine polonaise. Dès 1992, il programme et cogère le Cinéma Rex à Aubonne. Entre 1995 et 1999 il fait des études à la Faculté des Lettres de l’Université de Lausanne. Depuis 2002, Lionel Baier est responsable du département cinéma de l’école cantonale d’art de Lausanne (ECAL).
En 2000 il réalise son premier film, « Celui au pasteur (ma vision personnelle des choses) », un documentaire sur son père, pasteur en terre vaudoise.
« La Parade (notre histoire) » réalisé un an plus tard, suit la mise en place de la première parade homosexuelle dans le canton catholique du Valais. Ces deux films ont eu un bon succès dans les salles de cinéma helvétiques et dans de nombreux festivals de par le monde et ont contribué à faire connaître Lionel Baier du grand public.
Le cinéaste passe alors à la fiction en réalisant « Garçon Stupide », puis « Comme des voleurs (à l’est) ». Ces deux films ont bénéficié d’une large distribution internationale, en sortant sur les écrans de nombreux pays européens et aux États-Unis. «Garçon Stupide» et «Comme des voleurs (à l’est)» ont également escompté un très bon accueil critique et public dans de nombreux festivals. En 2006, « Garçon Stupide » était un des quatre films sélectionnés pour représenter le cinéma suisse au festival du film de Cannes dans la section « Tous les cinémas du monde ».
Son troisième long-métrage de fiction « Un autre homme» est sorti sur les écrans suisses en janvier 2009, en France en mai 2009, en Espagne et au Portugal en novembre 2009. Il sortira en Autriche, en Belgique et Canada durant l’hiver 2010.
En novembre 2009, Lionel Baier fonde Bande à part Films avec les cinéastes Ursula Meier, Frédéric Mermoud, Jean-Stéphane Bron ainsi que les producteurs Ruth Waldburger et Robert Boner. Il est également un des membres du conseil de fondation de la Cinémathèque suisse.
Bande à part...Comme la société de Tarantino...
Bref, je voulais dire deux mots de son dernier projet disponible en streaming ici : http://www.tsr.ch/fiction/2010/low-cost/
EDIT : il était apparemment disponible jusqu'à...hier !
Ce film, c'est pas n'importe quel film, on nous le présente comme "le premier long-métrage suisse tourné avec un téléphone portable". Autant dire, un événement !
Ca parle de quoi ? Ca parle d'un type qui pour une raison mystérieuse connaît la date de sa mort depuis des années. A l'approche de celle-ci, il va voir une dernière fois ceux qui ont compté pour lui : son amant, son frère, sa mère, ses copines...
Certaines s'adressent à lui comme à un revenant, comme s'il était déjà mort, c'est assez étrange parfois.
On est donc dans le registre de l'autofiction (la voix off pendant tout le film est celle de Baier), ça évoque Alain Cavalier et aussi son camarade Joseph Morder, qui avait fait ce film avec un téléphone portable :
(film que je n'ai pas vu, mais dans cette bande-annonce on sent un genre de sentimentalisme romantique légèrement grandiloquent, ça ressemble à une caricature pas très réussie de ce qu'a pu faire Cavalier avec Irène...)
J'essayais de me souvenir des films dont j'ai pu entendre parler faits avec des portables ou des petites DV, et grosso modo, il y a ces films-là, les films d'auteur intimistes, pour le dire vite. Et il y a les films de genre (Blair Witch, etc). Dans tous les cas, on joue sur l'effet de réel, de réalisme procurés par l'esthétique amateur de la prise de vue pour donner l'impression que le personnage a existé (comme les faux journaux intimes en littérature) "pour de vrai". C'est censé être plus émouvant ou faire plus peur, je suppose.
Là où Baier est assez malin c'est qu'il utilise un ressort "fantastique" au service d'une intrigue tout ce qu'il y a de plus intime. Et en fait, à l'image, la facture soit disant "réaliste" est trouée d'aberrations chromatiques qui font écho au fantastique du récit : les yeux du chat ressortent vert, la braise de la cigarette est bleu, le soleil rouge ocre... C'est très insignifiant et en même temps, je ne sais pas ça m'a surpris, c'était comme autant de piqures de rappel qui clignotaient : "même quand on veut faire vrai, on est encore complètement, définitivement au cinéma".
Sinon, l'horizon référentiel est une nouvelle fois proustien : il y a des madeleines partout, des voyages à Cabourg et des instantanés sur des souvenirs d'enfance qu'on brûle. J'ai pensé parfois aux films de Guy Gilles (voir Spectres #1 )... Il aurait sans doute fait ce type de films s'il vivait à notre époque.
En ce qui concerne le titre, j'avoue n'avoir pas bien compris, c'est un homme plus âgé que le héros, son oncle peut-être, je sais pas, qui parle de l'existence du personnage principale fondée sur la dévaluation de sa vie, qui serait "low cost" comme les vols qu'il prend régulièrement pour parcourir le monde. Il dit que Stendhal a peut-être fait que 3 ou 4 voyages dans sa vie, mais qu'il a tiré plus de choses, qu'il en a fait meilleur usage, un truc dans le genre. Ca me paraît pas mener très loin ce type de discours un peu "vieux con", c'était mieux avant, maintenant c'est la débauche et la frénésie de consommation, blabla...
nb : article des Inrocks sur le film
Re: "Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
J'ai l'impression qu'on peut à nouveau le voir, mais la nuit seulement, et jusqu'au six février seulement aussi :
http://www.tsr.ch/fiction/2010/low-cost/
http://www.tsr.ch/fiction/2010/low-cost/
adeline- Messages : 3000
Re: "Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
Tout à fait.
(Au passage, autre petit article d'Isabelle Regnier sur son blog)
(Au passage, autre petit article d'Isabelle Regnier sur son blog)
Re: "Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
un autre homme est donc sur dvd.
le film, plutôt pas mal, dans le genre film suisse fauché, décrit l'ascension d'un critique de cinéma qui recopie une revue pour ses articles, un imposteur donc, vers la reconnaissance marquée par une interview de bulle ogier.
baier dit s'être inspiré du roman, et de l'atmosphère noire du roman de felix vallotton, le peintre, la vie meurtrière.
le film, plutôt pas mal, dans le genre film suisse fauché, décrit l'ascension d'un critique de cinéma qui recopie une revue pour ses articles, un imposteur donc, vers la reconnaissance marquée par une interview de bulle ogier.
baier dit s'être inspiré du roman, et de l'atmosphère noire du roman de felix vallotton, le peintre, la vie meurtrière.
Invité- Invité
Re: "Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
celui ci est un beau film plus cher et ambitieux. l'affaire démarre dans une famille suisse puis embraye sur un recherche généalogique en pologne vers la réconciliation frère/soeur, et au passage mettra un coup de projecteur sur les mouvements migratoires et les sans papiers.
le tension et l'émotion grimpent au fur et a à mesure du film.
le tension et l'émotion grimpent au fur et a à mesure du film.
Invité- Invité
Re: "Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
A propos de Felix Vallotton, un tableau d'une remarquable construction et d'un remarquable chromatisme ( il est dans le top 10 de mes tableaux favoris ! )
Invité- Invité
Re: "Low Cost (Claude Jutra)" (Lionel Baïer)
c'est un beau film initiatique, le récit de la désaliénation du héros qui bosse et baise de façon compulsive sans jamais nul part y mettre de lui et c'est la caméra qui l'amènera à cela, se désinhiber, devenir lui, libre.
pour ça trois régimes d'images dans un entrelacs plutôt réussi :
d'abord le social dans lequel Loïc ne s'investit pas, tourné classiquement.
ensuite la drague et la sexualité, au début du film, spleet-screanée ce qui lui ôte son côté malsain et renforce au contraire son aliénation stakhanoviste.
et un troisième régime qui est le ciment de l'ensemble qui est peut être le régime de la fiction, où Loïc semble soit casté soit scruté par la caméra derrière laquelle se trouve Lionel, le prénom du réalisateur, que l'on ne voit pas mais qui dirige Loïc vers ce que doit advenir le personnage, dans un beau face à face finalement.
pour ça trois régimes d'images dans un entrelacs plutôt réussi :
d'abord le social dans lequel Loïc ne s'investit pas, tourné classiquement.
ensuite la drague et la sexualité, au début du film, spleet-screanée ce qui lui ôte son côté malsain et renforce au contraire son aliénation stakhanoviste.
et un troisième régime qui est le ciment de l'ensemble qui est peut être le régime de la fiction, où Loïc semble soit casté soit scruté par la caméra derrière laquelle se trouve Lionel, le prénom du réalisateur, que l'on ne voit pas mais qui dirige Loïc vers ce que doit advenir le personnage, dans un beau face à face finalement.
Invité- Invité
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