Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
4 participants
Page 1 sur 2 • 1, 2
Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
On parle pas mal de la mort héroïque, propre, rêvée ou non dans les topics ces jours-ci. Je me suis dit qu'un peu de vie ferait du bien :
L'agneau enfin né vivant (mais je ne suis pas sûre qu'on puisse faire de lien avec les moines chrétiens de Tibéhirine ) au milieu de la steppe kazakh.
C'est un très beau film. Enthousiasmant.
Quelqu'un a vu des documentaires de Dvortsevoy ? Je vais essayer d'en voir.
Dans Tulpan, on se doute bien que tout est pensé, organisé, millimétré ; ça n'est pas souvent que la vie fait les choses si doucement, si âprement et si drôlement en même temps. Mais j'ai bien aimé croire tout le temps que c'était un documentaire. D'ailleurs, la naissance de l'agneau est bien là pour tout mélanger, la vie, la fiction. C'est l'inverse de la mort du lapin dans La Règle du jeu, mais c'est la même chose aussi.
On n'est pas loin de Kusturica, sans doute. Mais je ne connais pas bien Kusturica, alors je ne sais pas dire, peut-être qu'on en est très loin en fait.
Tout ça ne dit rien du film, je sais bien, mais je ne sais pas encore comment en parler...
L'agneau enfin né vivant (mais je ne suis pas sûre qu'on puisse faire de lien avec les moines chrétiens de Tibéhirine ) au milieu de la steppe kazakh.
C'est un très beau film. Enthousiasmant.
Quelqu'un a vu des documentaires de Dvortsevoy ? Je vais essayer d'en voir.
Dans Tulpan, on se doute bien que tout est pensé, organisé, millimétré ; ça n'est pas souvent que la vie fait les choses si doucement, si âprement et si drôlement en même temps. Mais j'ai bien aimé croire tout le temps que c'était un documentaire. D'ailleurs, la naissance de l'agneau est bien là pour tout mélanger, la vie, la fiction. C'est l'inverse de la mort du lapin dans La Règle du jeu, mais c'est la même chose aussi.
On n'est pas loin de Kusturica, sans doute. Mais je ne connais pas bien Kusturica, alors je ne sais pas dire, peut-être qu'on en est très loin en fait.
Tout ça ne dit rien du film, je sais bien, mais je ne sais pas encore comment en parler...
adeline- Messages : 3000
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
voilà un film dont on peut dire qu'il se passe presque totalement sur un plan d'immanence ; il semblerait presque que le sens de l'être y soit univoque, se dise en un seul sens ; être, c'est être ; faire des plans, des cadres pour qu'y surviennent la vie, et la mort, des rêves, des désirs (éternellement) ; à chacun le sien : partir, se marier, chanter, jouer... c'est un peu en attendant Godot aussi dans cette immense région de vent, déserte... avec la fiancée Tulpan dans le rôle de godot, ou dans celui de "la fiancée éternelle" ; on ne la voit jamais, sinon de dos, un moment ; à quoi elle ressemble, on ne le sait pas ; on ne le saura jamais, on ne la verra jamais, sinon dans les yeux amoureux de cet ancien marin qui la demande en mariage, et qui ne sait, pour la séduire, que raconter des histoires de poulpes ; mais lui-même l'a-t-il jamais vue ? Autre histoire de princesse et de poisson-chat ; mais là la princesse dit non au poisson-chat, à cause de ses oreilles trop grandes ; la force de ce film c'est que la question de la vie et de la mort y est posée à travers des moutons, un être-pour-la mort animal ; mystère absolu de cette mortalité, de cette naissance... c'est un de ces grands films dont la beauté grandit avec le souvenir ; Badiou dit que le cinéma, c'est l'idée dans son passage, l'idée qui passe ; dans certains films, l'idée ne passe pas, elle vient de l'être-passé même ; l'idée, c'est l'être-passé ; la mémoire, donc ; des films qui après la projection, continuent une manière d'introjection ;
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Voilà, exactement, il s'agit d'être, et d'être ce qu'on est.
La fille veut chanter. Elle chante de tout son cœur, et son chant ouvre peut-être même le film. Elle chante, mais son père n'aime pas trop qu'elle chante. Elle a le droit de chanter dehors, mais pas dans la yourte.
Sauf que ce jour-là est un jour de bonne nouvelle : ils ont enfin obtenu le droit de déménager la yourte. Alors, la mère obtient du père le droit pour sa fille de chanter à l'intérieur.
Le garçon, lui, écoute les nouvelles du monde à la radio. Puis il les raconte consciencieusement à son père le soir. Le tremblement de terre au Japon, par exemple.
Le tout petit fait du cheval. Tout le temps.
On pourrait penser que c'est idiot ; un personnage, une caractéristique burlesque. Mais c'est aussi un combat pour chacun. Être ce qu'il est, malgré le reste.
Cette chanson me transperce :
La fille veut chanter. Elle chante de tout son cœur, et son chant ouvre peut-être même le film. Elle chante, mais son père n'aime pas trop qu'elle chante. Elle a le droit de chanter dehors, mais pas dans la yourte.
Sauf que ce jour-là est un jour de bonne nouvelle : ils ont enfin obtenu le droit de déménager la yourte. Alors, la mère obtient du père le droit pour sa fille de chanter à l'intérieur.
Le garçon, lui, écoute les nouvelles du monde à la radio. Puis il les raconte consciencieusement à son père le soir. Le tremblement de terre au Japon, par exemple.
Le tout petit fait du cheval. Tout le temps.
On pourrait penser que c'est idiot ; un personnage, une caractéristique burlesque. Mais c'est aussi un combat pour chacun. Être ce qu'il est, malgré le reste.
Cette chanson me transperce :
adeline- Messages : 3000
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
dans cet article, quelques mots sur le cinéaste (l'importance de la radio) et ce passage où il explique pourquoi du "documentaire", il est passé à la "fiction" (une bonne manière de tenir le partage, et de le penser) : "Je ne devrais pas le dire dans un festival du film documentaire, mais parfois le documentaire est un peu absurde. Nous filmons les conflits, les drames, et nous en faisons de l’art. Mais c’est le sang des gens qu’on voit à l’écran. Il y a de grandes barrières morales que je n’arrive plus à franchir».
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
des brouillons, sinon rien; écrire, sans trop se relire;
Curieuse expérience hier soir;
après tulpan, j’ai vu deux documentaires de Dvortsevoy ; "highway" et un autre, dont le titre me reviendra ; dès les premières images de « highway », un sentiment de jamais vu (ou de déjà vu; le déjà vu platonicien, si on se souvient de ses clichés philosophiques) le sentiment que le cinéma, c’est ça, et que cela ne peut pas être autre chose ; idée, et affect, heureux et un peu tristes, même imaginairement ; pour en dégager la valeur, faut peut-être se souvenir de ce que kant appelait « nécessité subjective » du jugement-plaisir esthétique : le sentiment éprouvé dans mon plaisir devant la beauté d’une chose (beauté qui n’est pas autre chose que ce plaisir, beauté qui est ce plaisir en un sens, mais pas absolument, il faut bien qu’il y quelque chose de plus que ce simple plaisir ) ; le sentiment disais-je donc, que cela ne peut pas ne pas plaire universellement ; je ne peux pas m’imaginer, penser, concevoir que l’on puisse ne pas aimer, ne pas éprouver de plaisir là où j’en éprouve, devant la chose qui me fait plaisir ; sentiment d’impossibilité, qui me fait dire « tu ne peux pas ne pas aimer, c’est impossible » ; pas seulement « tu », au fond, mais l’humanité ;
ce sentiment, on peut aussi l’éprouver de la manière suivante : on ne peut pas faire autrement, créer autrement, on ne peut pas peindre autrement, faire du sentiment autrement ; il y a pas de place pour le possible, d’autres possibilités ; c'est le pure plan de la nécessité, quelque chose de proche de spinoza (mais alors, il faut se dire que dieu peut éprouver des sentiments esthétiques, ce qui n'est pas évident; mais dieu aurait-il pu faire le monde autrement? j'en parle parce que Dvortsevoy le fait et parce que certains qualifient ses documentaires de "documentaires transcendantaux"; confondant peut-être le transcendant et le transcendantal; mais on verra; ) et bien, c’est le sentiment que j’ai éprouvé devant quelques plans de « highway », devant certains mouvements de caméra, très simples, et en même temps qui rendent quelque chose d’unique, non pas d’unique, mais… je ne sais pas… c’est heureux, et en même temps triste, parce que alors tout le reste perd de sa nécessité, de sa raison d’être ; c’est gratuit ; ça existe, sans être ; le seul « documentariste » à m’avoir fait éprouver pareil sentiment, c’était van der keuken ; quoi de comment entre les deux ? rien, sinon cette nécessité subjective, qu’on ne peut pas filmer autrement ;
Il faut continuer ;
Sur ces deux documentaires, mais je découvre Dvortsevoy, nous aurons le temps ; d’y revenir, de revenir à eux, et sur le malaise devant ces documentaires, une fois passé la nécessité subjective ;
Qui est Dvortsevoy ? comme dirait heidegger, une telle question vient trop tôt ; demandons-nous d’abord : qu’est-ce que Dvortsevoy ;
Pour répondre à cette question se souvenir que schubert est un adjectif qualificatif (wittgenstein)
Donc ;
après une coupe du monde qui nous a tous un peu dégoûté du foot, il est bon de relancer le débat autour du cinéma et du foot, celui que nous avions engagé avec godard, et le barça; on revient toujours au foot, d’une manière ou d’une autre et par les chemins les moins attendus, les plus imprévisibles : le foot, comme j'ai lu dans un article du guardian, a été le premier rêve d'accomplissement de Dvortsevoy, son premier grand amour; est-ce que cela se sent dans son cinéma, dans ses films ? je ne sais pas encore ; il faudrait avoir vu plus d’un film, plus que tulpan pour répondre à cette question ; ce qui est intéressant, ici, c’est, comme le disait godard, qu’il n’y a pratiquement que lelouche claude qui soit né cinéaste ; les autres le sont devenus, parfois par hasard, ce qui veut dire bien entendu par nécessité surréaliste, par accident essentiel ; comme les grands amours ; c’est je crois essentiel, parce ce que dans ce cas, le cinéma n’est pas le tout, ou tout, pour eux ; et pour nous qui voyons leur film ; en fait on peut même généraliser, pour un grand artiste, son art n’est rien ; son art n’est que le lieu de son combat avec le rien ; ) On est loin de la bêtise totalitaire des étudiants en cinéma ; et c’est parce que le cinéma n’est pas tout, qu’il est quelque chose, déterminé, fini ; on sent là comme une finitude sublime ; l’image ne peut contenir cela qui est à son origine, le rêve brisé, l’inaccompli ; la création est comme un second choix, une manière de consolation, comme une figue de ponge, mais dont on ne saurait pas si elle console matériellement ou spirituellement ; ce que j’écris ne veut peut-être rien dire ; mais on sent bien qu’il y a une différence, entre un type pour qui le cinéma est tout, je veux dire lelouche, et quelqu’un pour qui il ne peut être tout qu’en n’étant rien, par exemple tarkovsky ; bien entendu pour certains c’est plus complexe ; cette distribution ne marche pas, elle n’est pas aussi lumineuse ; elle n’est pas évidente, invincible ; si on pense à kubrick, on pourrait croire, on doit croire, tout d’abord, que le cinéma est tout pour lui, plus que les échecs, par exemple, mais en même temps, si on pousse plus loin, on se rend compte que non, le cinéma chez lui n’est pas tout, le tout c’est l’échec ; les plus grands cinéastes font des films où le cinéma n’est qu’une erreur, ou plutôt où le cinéma s’ouvre nécessairement à autre chose ; les plus grands metteurs en scène, les plus grands artistes sont souvent ceux qui n’ont pas pu réaliser leur rêve ; et leur art, leurs œuvres portent la trace de ce rêve brisé, pas atteint, impossible ; je pense bien entendu à fitzgerald ;
les seules choses vraiment intéressantes, ce sont les brouillons ; les essais ; il faut donc contrairement à carver, écrire sans chercher à mettre le point ; à faire le point ; la polémique (assez ancienne, j’ai découvert, puisqu’elle remonte au mois à 2007) autour de ses textes (des débuts) « achevés » par son éditeur, est assez simpliste, et même trompeuse, si on cherche à nous faire croire que son éthique de l’écriture aurait été plus débordante, plus baroque, ou je ne sais quoi ; le style de carver, c’est bien celui que nous connaissons, celui qui est lié à son nom ; il suffit de lire ses textes théoriques, comptes-rendus, préfaces, critiques, pour s’en rendre compte ; c’est le style qu’il a admiré (même si jeune il a écrit des trucs, des nouvelles, dans le style faulkner ; en ai commencé une dans ce ton, pas encore achevée ; par contre, je dois dire que ses poèmes, mêmes anciens, des débuts, sont vraiment touchants ) C’est le style qu’il cherché à atteindre, le style qu’il a défendu; bien entendu, c’est pas un truc de départ, c’est un résultat ; nous avons tous tendance à en faire trop, à écrire trop de mots, d’adjectifs, d’adverbes (la faiblesse des faibles, comme disait je sais plus qui) ; autrement dit nous cherchons à écrire, à nous faire croire que nous écrivons ; nous n’avons pas assez confiance, nous cherchons à donner des preuves ; comme le jeune footbaliste, dont on dit qu’il en fait trop ; pour atteindre à la forme définitive, carver écrivait et récrivait ; parfois plus de trente fois la même nouvelle ; il la cherchait en l’écrivant, et il allait toujours dans la sens de la simplicité ; faire court ; faire dense ; curieusement, contrairement à beaucoup, le bonheur de carver n’était pas dans l’invention, dans la recherche, mais dans la mise en forme, dans la correction, dans la simplification, dans l’achèvement ; affaire de gros sous alors ? sans doute ; on pourrait imaginer la veuve de carver publiant chacun des états des nouvelles de son mari ; et nous aurions trente version de la même nouvelle ;
avant de reprendre ; il faut considérer cette idée (empruntée à rothko) : "un film vit par l'amitié (cinéphilie, dit-on), en se dilatant et en se ranimant dans les yeux de l'observateur sensible";
il parlait bien entendu de peinture;
je n'aime pas l'expression "observateur sensible"; que dit le texte anglais?
peut-on être l'ami d'un film?
peut-on avoir un film comme ami?
c'est la question de la cinéphilie;
de quels films pourrais-je dire ce sont mes amis?
la question peut sembler étrange, pourtant nous disons bien "j'aime ce film";
à l'évidence ce texte manque de points, en voici trois...
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
parler de cette scène; une longue image;
(paradise)
la comparer à celle-ci :
(highway)
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
question court et long ;
vu récemment la version longue de « shining » ; la version dite américaine ; elle dure une vingtaine de minutes de plus que celle que nous connaissons en europe ; voir la longue après la brève donne une étrange impression, le sentiment d’un brouillon, je crois, ou quelque chose comme ça ; je la connaissais, cette version, je savais les scènes qui « manquaient » dans l’européenne, mais les voir donne un étrange sentiment ; comme si la version américaine, plus longue pourtant, était moins complète, moins achevée, et moins belle (plastiquement, géométriquement, et en terme d’énigme, d’horreur ; ) moins kubrick ; pourtant, elle contient quelques scènes intéressantes, des plans forts, certains, mais aussi des trucs assez convenus, plus proche du genre (il y a plus d’ombres, de nuit, par exemple, des images de danny, possédé, assez exorciste) ; une vision de wendy est particulièrement grotesque ; on sait que l’hôtel distribue ses images selon les désirs de ses occupants ; hôtel, c’est le même mot que hospitalité ; l’hôtel est hospitalier, en un sens ; à chacun selon ses désirs : le petit garçon veut des compagnons de jeux, jack des images mégalos de grandeur ; wendy, je ne sais pas trop, mais elle voit des images très clichées de film d’horreur (des squelettes avec des tas de toiles d’araignées) assez grandguignolesques (on sait par jack qu’elle adore les films et autres histoires d’horreur) ; mais le tout est moins réussi, parce que moins lacunaire ; ce n’est peut-être pas ce qu’il faut dire ; il faut aussi dire que cette version longue, moins mystérieuse, est aussi plus sociale ; on sent plus, mieux, la misère des torrance ; tout ce dont nous avions parlé dans le forum des cahiers ; le travail et son absence ; l’absence de travail, et donc d’œuvre ; le désoeuvrement d’une communauté qui éclate, et se disperse ; ici, il faudrait songer à une histoire des hôtels au cinéma : jusqu’à hostel ; cette merde…
les raisons du passage du documentaire, à la fiction, pour Dvortsevoy, ne sont pas immédiatement cinématographiques (mais qu'est-ce qu'une raison cinématographique? ), mais humaine, et éthique, il s'agit de passer du statut de vampire se nourrissant du sang du réel à un autre statut (lequel?); c'est intriguant; on aurait presque le sentiment que le passage à la fiction, à tulpan, est la condition du salut, d'un salut, salut d'une âme; car, un vampire, c'est bien quelqu'un qui survit dans la mort, mais sans âme; un damné; la fiction rendrait l'âme, que le documentaire compromet, met en danger; on aurait pu penser le contraire.
je reprends l'idée, l'explication du cinéaste, après son dernier documentaire, il raconte :
"J’ai commencé à me sentir mal à vivre avec ces gens (les sujets de ses documentaires), utilisant leur vie pour en faire de l’art pour ensuite les abandonner à leur sort. "
c'est classique, nous avions parlé de ça;
"Vous ne pouvez pas entrer dans la vie des gens de la sorte et vous attendre à ce que cela n’ait aucune conséquence. « Paradise », par exemple (son film de fin d'études), cela semble un film assez innocent, mais il fut très mal reçu par quelques apparatchiks locaux, parce qu’il ne montrait pas une image assez positive du pays"
(ce qui est vrai)
"Ils s’en sont alors pris à mon héros ; sa vie est devenue pitoyable, il a même été arrêté. "
c'est le passage suivant qui m'intéresse (là, je pense au film sur capote, écrivant "de sang froid" ; c'est au fond le même problème; mais un problème, au fond, assez insoluble; )
"Travailler avec des gens réels, vous pousse à toujours aller plus à fond dans leur vie – dans quel but? Vous devenez un vampire. »
le documentariste est un vampire; mais tout documentariste est-il un vampire? la question n'a d'intérêt que vécue, que pensée à ce niveau existentiel d'une pratique réelle, sans quoi, bien entendu, on aura facilement les capacités de la résoudre dans des théories, des concepts; ce qui m'intéresse, c'est que ce mec se dise, pourquoi je fais ça, dans quel but, qu'est-ce que je cherche en faisant mes documentaires;
il vit sa pratique du documentaire comme une expérience de vampirisme ;
se trompe-t-il?; sent-on ce vampirisme dans ses documentaires?
c'est la question :
qu'est-ce qu'un vampire?
la question doit se poser depuis cette image;depuis cette image de "paradise" (étrange ironie)
vu récemment la version longue de « shining » ; la version dite américaine ; elle dure une vingtaine de minutes de plus que celle que nous connaissons en europe ; voir la longue après la brève donne une étrange impression, le sentiment d’un brouillon, je crois, ou quelque chose comme ça ; je la connaissais, cette version, je savais les scènes qui « manquaient » dans l’européenne, mais les voir donne un étrange sentiment ; comme si la version américaine, plus longue pourtant, était moins complète, moins achevée, et moins belle (plastiquement, géométriquement, et en terme d’énigme, d’horreur ; ) moins kubrick ; pourtant, elle contient quelques scènes intéressantes, des plans forts, certains, mais aussi des trucs assez convenus, plus proche du genre (il y a plus d’ombres, de nuit, par exemple, des images de danny, possédé, assez exorciste) ; une vision de wendy est particulièrement grotesque ; on sait que l’hôtel distribue ses images selon les désirs de ses occupants ; hôtel, c’est le même mot que hospitalité ; l’hôtel est hospitalier, en un sens ; à chacun selon ses désirs : le petit garçon veut des compagnons de jeux, jack des images mégalos de grandeur ; wendy, je ne sais pas trop, mais elle voit des images très clichées de film d’horreur (des squelettes avec des tas de toiles d’araignées) assez grandguignolesques (on sait par jack qu’elle adore les films et autres histoires d’horreur) ; mais le tout est moins réussi, parce que moins lacunaire ; ce n’est peut-être pas ce qu’il faut dire ; il faut aussi dire que cette version longue, moins mystérieuse, est aussi plus sociale ; on sent plus, mieux, la misère des torrance ; tout ce dont nous avions parlé dans le forum des cahiers ; le travail et son absence ; l’absence de travail, et donc d’œuvre ; le désoeuvrement d’une communauté qui éclate, et se disperse ; ici, il faudrait songer à une histoire des hôtels au cinéma : jusqu’à hostel ; cette merde…
les raisons du passage du documentaire, à la fiction, pour Dvortsevoy, ne sont pas immédiatement cinématographiques (mais qu'est-ce qu'une raison cinématographique? ), mais humaine, et éthique, il s'agit de passer du statut de vampire se nourrissant du sang du réel à un autre statut (lequel?); c'est intriguant; on aurait presque le sentiment que le passage à la fiction, à tulpan, est la condition du salut, d'un salut, salut d'une âme; car, un vampire, c'est bien quelqu'un qui survit dans la mort, mais sans âme; un damné; la fiction rendrait l'âme, que le documentaire compromet, met en danger; on aurait pu penser le contraire.
je reprends l'idée, l'explication du cinéaste, après son dernier documentaire, il raconte :
"J’ai commencé à me sentir mal à vivre avec ces gens (les sujets de ses documentaires), utilisant leur vie pour en faire de l’art pour ensuite les abandonner à leur sort. "
c'est classique, nous avions parlé de ça;
"Vous ne pouvez pas entrer dans la vie des gens de la sorte et vous attendre à ce que cela n’ait aucune conséquence. « Paradise », par exemple (son film de fin d'études), cela semble un film assez innocent, mais il fut très mal reçu par quelques apparatchiks locaux, parce qu’il ne montrait pas une image assez positive du pays"
(ce qui est vrai)
"Ils s’en sont alors pris à mon héros ; sa vie est devenue pitoyable, il a même été arrêté. "
c'est le passage suivant qui m'intéresse (là, je pense au film sur capote, écrivant "de sang froid" ; c'est au fond le même problème; mais un problème, au fond, assez insoluble; )
"Travailler avec des gens réels, vous pousse à toujours aller plus à fond dans leur vie – dans quel but? Vous devenez un vampire. »
le documentariste est un vampire; mais tout documentariste est-il un vampire? la question n'a d'intérêt que vécue, que pensée à ce niveau existentiel d'une pratique réelle, sans quoi, bien entendu, on aura facilement les capacités de la résoudre dans des théories, des concepts; ce qui m'intéresse, c'est que ce mec se dise, pourquoi je fais ça, dans quel but, qu'est-ce que je cherche en faisant mes documentaires;
il vit sa pratique du documentaire comme une expérience de vampirisme ;
se trompe-t-il?; sent-on ce vampirisme dans ses documentaires?
c'est la question :
qu'est-ce qu'un vampire?
la question doit se poser depuis cette image;depuis cette image de "paradise" (étrange ironie)
Dernière édition par Borges le Ven 1 Oct 2010 - 14:05, édité 1 fois
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Cela rappelle les apories rencontrées par Kieslowski au cours de sa vie de cinéaste et évoquées par Zizek, non ?
Le premier passage du documentaire à la fiction, suite à la prise de conscience d'une certaine obscénité, voire d'une pornographie à filmer la vie des gens aussi près que possible (dans cette recherche, cette traque, absolue de la réalité cachée derrière le masque de la société).
Le deuxième et dernier mouvement, chez le cinéaste polonais, est un dégoût de la fiction même, suivi d'un arrêt définitif de filmer : il prend conscience que "la fiction s'introduit et blesse les rêves eux-mêmes, les fantasmes secrets qui forment le noyau inavoué de nos vies."
D'autres cinéastes dont nous parlons pas mal ici sont sans doute pris dans les mêmes tourment : Costa, JZK, Cavalier, HSS.. où en sont-ils avec ces questions ?
J'espère pouvoir découvrir prochainement les films de Dvortsevoy !
Le premier passage du documentaire à la fiction, suite à la prise de conscience d'une certaine obscénité, voire d'une pornographie à filmer la vie des gens aussi près que possible (dans cette recherche, cette traque, absolue de la réalité cachée derrière le masque de la société).
Le deuxième et dernier mouvement, chez le cinéaste polonais, est un dégoût de la fiction même, suivi d'un arrêt définitif de filmer : il prend conscience que "la fiction s'introduit et blesse les rêves eux-mêmes, les fantasmes secrets qui forment le noyau inavoué de nos vies."
D'autres cinéastes dont nous parlons pas mal ici sont sans doute pris dans les mêmes tourment : Costa, JZK, Cavalier, HSS.. où en sont-ils avec ces questions ?
J'espère pouvoir découvrir prochainement les films de Dvortsevoy !
Invité- Invité
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
C'est des questions qui sont apparues en 68, non?
Invité- Invité
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Une des marques de SD, c’est les animaux ; Il filme les animaux ; pas les mêmes que walt disney, ou que d’autres animaliers, il les égale, compare aux hommes, dans ses films, mais compare aussi ses acteurs à des animaux ; ils doivent être aussi bons que des animaux dit-il ; cela veut dire quoi ? un animal peut-il jouer ? certainement pas, dira-t-on; les animaux jouent, mais ils ne peuvent pas jouer au sens de l’acteur, jouer un rôle, jouer un autre vie que la leur, ils ne peuvent pas se mettre dans la peau d’un autre ;
donc, paradoxe, dans cette perspective, l’idéal pour l’acteur, c’est de jouer sans jouer, ne pas être seulement, et surtout pas jouer à être ;
un animal ne sait pas qu’il joue ? le sait-il ? là, bien entendu, il faut reprendre tout ce que derrida pense, déconstruit, à propos de ces questions, dans son séminaire sur la bête et le souverain, par exemple ; la bête et le souverain, deux figure qui se rencontrent ; être aussi fort qu’un animal, c’est quoi pour un acteur ? bien entendu, il ne s’agit pas de la fameuse présence animal, cliché de certains critiques (« brando quelle présence animal, dit-on » ; on le dit aussi de depardieu ; l’idée est qu’il faut un certain corps ; un certaine manière d’être non civilisée ; penser au brando du tramway nommé désir ; c’est pas un acteur très civilisé ; mais on retrouve très vite les partages idéologiques et sociaux, les prolos sont plus animaux que les autres, les civilisés ) ; être aussi fort qu’un animal, pour SD, c’est aussi être imprévisible ; les animaux alors sont comparés à des enfants ; ou plutôt le contraire, ce sont les enfants qui sont des animaux ;
citation de SD :
«Il est impossible de mettre en scène les animaux. Quant aux enfants, ce sont aussi des animaux. Le pire, c’est les chats. Ils sont absolument imprévisibles. Une chèvre est curieuse. Un chat est rusé comme un vieil homme. Il sait quand la caméra tourne. Il faut des kilomètres de pellicule pour filmer un chat»
Le chat sait quand la caméra tourne ; comment le sait-il ? cela signifie quoi pour lui, ce savoir ; il sait qu’on le filme ? qu'on tourne un film ? qu'on l'observe ? cela tous les animaux doivent le savoir, d'une manière ou d'une autre; comment comprendre le savoir de ce chat? c’est bien entendu, une question de science fiction, ou à la wittgenstein;
de ce que le chat sait, il faut donc tourner des heures pour le filmer ; tourner des heures pour qu'il oublie la caméra, pour oublier que la caméra tourne ; c'est aussi ce que SD fait avec les humains dans ses documentaires, les amener à oublier cette présence, par l'habitude...
on ne devrait donc pouvoir filmer que la steppe, que les phénomènes naturels, selon cet idéal du non-savoir...
si l'imprévisible, comme dit bergson est liberté, alors le chat est le plus libre :
pq les animaux?
leur rapport aux images?
"l'animal est une figure de transition entre l'humain et le non-humain, entre le sens et le non-sens, dit Rancière
(le partage est assez classique, même s'il ne dit pas que l'animal est non-sens, il est entre, un passage ; l'animal n'est ni non-humain, ni non-sens, mais il est la figure d'un passage, du passage de l'un à l'autre )
c'est une figure qui remplit les trois fonctions de l'image. Il prête à indice, à symbole, mais aussi à l'arrêt pur du sens."
indice
symbole
arrêt pur du sens
donc, paradoxe, dans cette perspective, l’idéal pour l’acteur, c’est de jouer sans jouer, ne pas être seulement, et surtout pas jouer à être ;
un animal ne sait pas qu’il joue ? le sait-il ? là, bien entendu, il faut reprendre tout ce que derrida pense, déconstruit, à propos de ces questions, dans son séminaire sur la bête et le souverain, par exemple ; la bête et le souverain, deux figure qui se rencontrent ; être aussi fort qu’un animal, c’est quoi pour un acteur ? bien entendu, il ne s’agit pas de la fameuse présence animal, cliché de certains critiques (« brando quelle présence animal, dit-on » ; on le dit aussi de depardieu ; l’idée est qu’il faut un certain corps ; un certaine manière d’être non civilisée ; penser au brando du tramway nommé désir ; c’est pas un acteur très civilisé ; mais on retrouve très vite les partages idéologiques et sociaux, les prolos sont plus animaux que les autres, les civilisés ) ; être aussi fort qu’un animal, pour SD, c’est aussi être imprévisible ; les animaux alors sont comparés à des enfants ; ou plutôt le contraire, ce sont les enfants qui sont des animaux ;
citation de SD :
«Il est impossible de mettre en scène les animaux. Quant aux enfants, ce sont aussi des animaux. Le pire, c’est les chats. Ils sont absolument imprévisibles. Une chèvre est curieuse. Un chat est rusé comme un vieil homme. Il sait quand la caméra tourne. Il faut des kilomètres de pellicule pour filmer un chat»
Le chat sait quand la caméra tourne ; comment le sait-il ? cela signifie quoi pour lui, ce savoir ; il sait qu’on le filme ? qu'on tourne un film ? qu'on l'observe ? cela tous les animaux doivent le savoir, d'une manière ou d'une autre; comment comprendre le savoir de ce chat? c’est bien entendu, une question de science fiction, ou à la wittgenstein;
de ce que le chat sait, il faut donc tourner des heures pour le filmer ; tourner des heures pour qu'il oublie la caméra, pour oublier que la caméra tourne ; c'est aussi ce que SD fait avec les humains dans ses documentaires, les amener à oublier cette présence, par l'habitude...
on ne devrait donc pouvoir filmer que la steppe, que les phénomènes naturels, selon cet idéal du non-savoir...
si l'imprévisible, comme dit bergson est liberté, alors le chat est le plus libre :
pq les animaux?
leur rapport aux images?
"l'animal est une figure de transition entre l'humain et le non-humain, entre le sens et le non-sens, dit Rancière
(le partage est assez classique, même s'il ne dit pas que l'animal est non-sens, il est entre, un passage ; l'animal n'est ni non-humain, ni non-sens, mais il est la figure d'un passage, du passage de l'un à l'autre )
c'est une figure qui remplit les trois fonctions de l'image. Il prête à indice, à symbole, mais aussi à l'arrêt pur du sens."
indice
symbole
arrêt pur du sens
Dernière édition par Borges le Ven 1 Oct 2010 - 16:35, édité 1 fois
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
JM a écrit:Cela rappelle les apories rencontrées par Kieslowski au cours de sa vie de cinéaste et évoquées par Zizek, non ?
Le premier passage du documentaire à la fiction, suite à la prise de conscience d'une certaine obscénité, voire d'une pornographie à filmer la vie des gens aussi près que possible (dans cette recherche, cette traque, absolue de la réalité cachée derrière le masque de la société).
Le deuxième et dernier mouvement, chez le cinéaste polonais, est un dégoût de la fiction même, suivi d'un arrêt définitif de filmer : il prend conscience que "la fiction s'introduit et blesse les rêves eux-mêmes, les fantasmes secrets qui forment le noyau inavoué de nos vies."
D'autres cinéastes dont nous parlons pas mal ici sont sans doute pris dans les mêmes tourment : Costa, JZK, Cavalier, HSS.. où en sont-ils avec ces questions ?
J'espère pouvoir découvrir prochainement les films de Dvortsevoy !
je trouve ce mouvement plus conséquent;
ah ce serait bien que tu les découvres, qu'on en discute;
mais le problème est en fait ancien, déjà joyce, et proust (on en avait parlé) s'étaient posé ce genre de questions...
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Ah mais c'est passionnant Borges, ce que dit Dvortsevoy, et ce que tu dis à partir de lui. Je n'avais jamais formulé ainsi, "vampirisme" ce que peut paraître la démarche d'un réalisateur, mais je sens tout à fait ce qu'il veut dire. D'autant plus lorsque le film a une incidence directe sur la vie des gens filmés, dont le réalisateur est de fait responsable. On se dit, mais pourquoi ? J'ai d'autres exemples aussi tristes...
Est-ce que SD a cette impression d'être "vampire" car il n'a pas été content de l'échange mis en place lors de ses tournages ? Il y a toujours un échange, je pense. Dans la fiction, c'est très simple, un contrat, un salaire, l'échange est balisé. Tu me donnes ton image, je te paye. En documentaire, il y a mille formes d'échanges. Parfois le désir des gens d'être filmés est si fort que l'échange réside simplement dans le fait de filmer. C'est souvent le cas du film militant. Avec le risque que le réalisateur ne sache plus très bien comment être tout à fait libre de faire ce qu'il veut dans son film. Parfois, on paye les gens, dans le documentaire. Parfois, ça ne suffit pas du tout. Ce sont des questions de pratique fondamentales.
Je me pose très très souvent la question pour Keuken. Comment faisait-il avec ses personnages ? Les payait-il ?
Mais je m'éloigne de Dvortsevoy...
Tu parles de 68, JM. Le propos des groupes Medvedkine était justement de rendre responsables de leur image les ouvriers eux-mêmes. L'autre solution, à part la fiction, est évidemment de se filmer soi-même. Comme le fait Cavalier je crois (même si je n'ai vu pratiquement aucun film de lui).
Est-ce que SD a cette impression d'être "vampire" car il n'a pas été content de l'échange mis en place lors de ses tournages ? Il y a toujours un échange, je pense. Dans la fiction, c'est très simple, un contrat, un salaire, l'échange est balisé. Tu me donnes ton image, je te paye. En documentaire, il y a mille formes d'échanges. Parfois le désir des gens d'être filmés est si fort que l'échange réside simplement dans le fait de filmer. C'est souvent le cas du film militant. Avec le risque que le réalisateur ne sache plus très bien comment être tout à fait libre de faire ce qu'il veut dans son film. Parfois, on paye les gens, dans le documentaire. Parfois, ça ne suffit pas du tout. Ce sont des questions de pratique fondamentales.
Je me pose très très souvent la question pour Keuken. Comment faisait-il avec ses personnages ? Les payait-il ?
Mais je m'éloigne de Dvortsevoy...
Tu parles de 68, JM. Le propos des groupes Medvedkine était justement de rendre responsables de leur image les ouvriers eux-mêmes. L'autre solution, à part la fiction, est évidemment de se filmer soi-même. Comme le fait Cavalier je crois (même si je n'ai vu pratiquement aucun film de lui).
adeline- Messages : 3000
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
et en tout petit
ce sont les limites de l'échange, d'un point de vue économique :
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Oui, je me suis arrêtée en cours de route dans l'idée d'échange, il faut aller jusque là. C'est pour ça que je me dis qu'une des seules manières de ne pas être un vampire c'est de filmer des gens qui veulent être filmés, et de faire en sorte que tout le monde profite des retombées du film, s'il y en a. Mais c'est de la théorie comme tu dis, des résolutions d'idées. Dans la pratique, je pense que c'est impossible de ne pas se sentir toujours indu, en un sens. Ou plutôt, tout grand réalisateur de documentaire ne pourra tourner que dans l'espace de cette question justement. C'est inséparable.
adeline- Messages : 3000
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
adeline a écrit:
Tu parles de 68, JM. Le propos des groupes Medvedkine était justement de rendre responsables de leur image les ouvriers eux-mêmes. L'autre solution, à part la fiction, est évidemment de se filmer soi-même. Comme le fait Cavalier je crois (même si je n'ai vu pratiquement aucun film de lui).
on doit aussi interroger cette position, j'imagine pas un écrivain disant "écrivez-vous", ou un peintre "peignez-vous"; l'essentiel ce n'est pas d'être maître de son image, mais de lui échapper, de ne pas y correspondre, de ne pas lui répondre; comme dirait rancière, il s'agit de se désidentifier; et les meilleurs documentaristes ce sont ceux qui mettent de la fiction dans la vie, pas en un sens stupide, mais au sens du redoublement du réel; il faut doubler le réel, au double sens du mot; il ne faut pas le rendre, mais le libérer; pas de l'ontologie, donc;
c'est quoi un "ouvrier responsable de son image"?*
et pq pas un "bourgeois"?
un "noir"
donc un cinéma de l'apologie de soi par soi, narcissique?
je sais pas
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
adeline a écrit:
Tu parles de 68, JM. Le propos des groupes Medvedkine était justement de rendre responsables de leur image les ouvriers eux-mêmes. L'autre solution, à part la fiction, est évidemment de se filmer soi-même. Comme le fait Cavalier je crois (même si je n'ai vu pratiquement aucun film de lui).[/justify]
Oui, c'est à ce type de chose que je pensais Adeline même si nous parlons peut-être plutôt de la caméra qui enregistre du côté de ce qu'on appelle la "vie privée", donc le la lutte collective, le travail, le militantisme, ces choses "publiques" (même si elles occupent une place privée au niveau individuel de celle ou celui qui les pratiquent), c'est peut-être encore différent.
Pour Cavalier c'est aussi à ça que je pensais en le citant plus haut, il s'est, pour une raison que j'ignore, plutôt tourné sur lui-même pour ses documentaires. C'est effectivement peut-être une manière (bonne ou mauvaise) de résoudre ce genre de questions, même si je ne sais pas du tout si c'est de celles-ci que provient réellement son choix.
Bine sûr tout ce qu'a écrit Comolli aussi, sur son rapport à l'autre lors de ses tournages et préparations, mais tu connais..
Invité- Invité
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Borges a écrit:
on doit aussi interroger cette position, j'imagine pas un écrivain disant "écrivez-vous", ou un peintre "peignez-vous"; l'essentiel ce n'est pas d'être maître de son image, mais de lui échapper, de ne pas y correspondre, de ne pas lui répondre; comme dirait rancière, il s'agit de se désidentifier; et les meilleurs documentaristes ce sont ceux qui mettent de la fiction dans la vie, pas en un sens stupide, mais au sens du redoublement du réel; il faut doubler le réel, au double sens du mot; il ne faut pas le rendre, mais le libérer; pas de l'ontologie, donc;
Oui c'est vrai, et en plus on en avait déjà parlé, du fait que cette démarche n'était pas si convaincante que ça dans l'idée... Et du fait qu'à terme elle annule toute présence de l'autre et toute idée d'altérité.
adeline- Messages : 3000
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
ll faudrait arriver à parler de cette image (d'abord à savoir en quoi le mot image ne convient pas pour décrire, ou seulement désigner ce qui est là, présent; l'idole dit jlmarion, c'est ce qui se réduit au visible, ce qui fait spectacle; l'icône, c'est ce qui nous envisage; l'invisible qui depuis le visible nous envisage; au sens fort, une icône ne se regarde pas; elle s'adore, se prie; c'est une autre histoire; cette image, au sens faible, est-ce une idole, ou une icône? rien de ça, plus certainement...)
Si on doit parler du cinéma de SD, on doit partir de quelques énoncés (encore un mot que je commence à ne plus supporter) de quelques intentions, de ses intentions ; il ne suffit pas de filmer dit-il, il faut savoir pourquoi on filme ; tout le monde peut aujourd’hui filmer, ça ne revient pas cher, mais c’est pas une raison pour le faire. Il faut savoir pourquoi on filme; ou alors le chercher en filmant. C’est un peu ce que dit godard : de bien des cinéastes, on ne sait pas pourquoi ils filment ; quel intérêt ça peut avoir, pas seulement pour le monde, le cinéma, les hommes, mais même pour eux.
Cette intention, ce pour quoi on film, cette fin, ne doit pas être trop vite comprise comme vouloir-dire, c’est pas non plus des motifs, des motivations, du psychologique, ou du sociologique, c’est pas une intention de sens ou de signification ; y a pas à vouloir-dire ; mais il doit bien y avoir du vouloir, et un dire. Il suffit de peu pour se retrouver avec Hegel ; ou Proust, réfléchissant sur les œuvres des Goncourt, c’est pas mauvais, mais ça manque de nécessité, dit-il ; nécessité de l’œuvre. Origine de l’œuvre. Origine essentielle ; bien entendu.
Quelle est la nécessité des films de SD ?
il dit chercher à rendre, à saisir l’imprévisible ; cet imprévisible, on peut aussi le nommer la liberté de l’événement ;
(il n’est pas le seul, dira-t-on ; c’est même une idée assez largement répandue, dans un certain cinéma ; mais en même temps, c’est aussi l’idée d’un certain cinéma ; imagine-t-on spielberg, ou un autre hollywoodien, dire qu’il cherche à rendre l’imprévisible ; il chercherait plutôt à l’éviter ; à tout programmer ; et kubrick ? idem ; c’est pas son truc, ce serait plutôt vaincre le hasard. Il a filmé pour vaincre le hasard ; sa peur ; son angoisse ; )
SD : ses méthodes, ses stratégies, il attend, guette le moment (on pense bien entendu à certaines idées de rohmer, à ce qu’il dit de hawks, ou de flaherty, à qui se réfère d’ailleurs SD ; animalité, et environnement âpre, condition de vie, comme des conditions de survie) ;
il utilise deux autres terme pour rendre l’essence de ce qu’il recherche ; quand un critique le compare à tarkovsky, à la donation du temps dans la durée du plan, il s’en distingue ; c’est pas le temps comme tarkovsky dit-il que je cherche, c’est l’énergie, et la respiration ; la respiration singulière, le rythme propre à chaque être ; c’est une jolie idée ; je pense.
on dit souvent de certains plans, de certaines séquences, ou de films qu’ils ne respirent pas, ou qu’ils manquent de force, d’énergie ; il est difficile de savoir ce qu’on entend par là ; comment savoir, qu’un plan ne respire pas, manque de force, d’énergie ? c’est pas simple ; mais on fait comme si c’était évident ; est-ce seulement une métaphore, une manière de dire que ça manque de vie, que ce n’est pas vivant ? ça peut aussi se dire d’un texte, d’une peinture, d’une pièce de musique ; c’est plus simple à comprendre, dans le cas de la musique ; la métaphore est moins sensible; on sait ce qu’est un morceau énergique.
Imprévisible
Energie
respiration
Donc, attendre, laisser venir, dans le plan, dans le cadre, ce qui arrive, et le rendre, rendre l’imprévisible;
Rendre l’imprévisible ; à quoi ? à qui ? (demanderait derrida ?)
Au spectateur ?
A lui-même ?
il faut souligner un paradoxe; si SD vise bien à rendre une certaine liberté du réel, de l’être, l’être de la liberté, (c’est cela l’imprévisible ; ce qui arrive sans qu’on puisse le programmer, l’anticiper, le calculer… ce qui arrive de soi, pour soi, et en soi ; ), sur le plan de la vie filmée, ou plus précisément encore, des gens filmés, on doit constater une absence terrible de liberté, d’imprévisible. Ils ne semblent pas vivre. On est dans le retour éternel des mêmes rituels, des mêmes gestes, des vies qui ne démarrent pas, qui se répètent, sans horizons.
devant cette image, pas seulement pour qui n'a pas vu le film : une question doit surgir, surgit : où ça se passe? où se passe un film en général? personne ne répondrait sur l'écran; dans la tête, dans l'imaginaire... ? c'est un peu la question de platon, en un sens; où se trouvent les idées? dans le ciel des idées; ce fut sa réponse; bien entendu c'est pas une réponse, c'est un mythe; des images du cinéma, on dira pas qu'elles ont lieu dans le ciel des images... cette idée, "où ça se passe?"; je crois l'avoir ressentie la première fois devant un tintin, mais formulée autrement : "où se trouve tintin?"; bien entendu, c'était pas sur le papier.
question d'enfant?
question phénoménologique?
situer l'espace de cet image; parler de celle-ci : c'est la même chose...
où sommes nous?
au Kazakhstan?
c'est trop facile comme réponse;
l'image en couleur vient de "highway" (il s'agit d'un numéro de cirque, un des plus triste pour moi, aussi triste que celui d'AQ dans la strada); celle de l'enfant, de "paradise"
elles viennent de; mais d'où viennent les films?
Décors, l’espace, le cadre ; où ça se passe ?
Van der Keuken. “Il s’agit de montrer, écrivait-il, comment c’est, comment c’est d’être dans un espace donné, comme c’est d’être un espace donné.”
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
suis tombé par hasard, dans blanchot sur cette citation de mallarmé :
« Tant, que je préfère selon mon goût, une page blanche, un dessin espacé de virgules ou de points et leurs combinaisons secondaires, imitant, nue, la mélodie - au texte, suggéré avantageusement si, même sublime, il n'était pas ponctué. »
blanchot "commente" :
un langage qui s'efface, le mouvement même de sa disparition (...) l'emblème matériel d'un silence qui, pour se laisser représenter, doit se faire chose et qui ainsi reste le scandale, son paradoxe insurmontable.
y penser; avec les trois fonctions de l'image, selon rancière
« Tant, que je préfère selon mon goût, une page blanche, un dessin espacé de virgules ou de points et leurs combinaisons secondaires, imitant, nue, la mélodie - au texte, suggéré avantageusement si, même sublime, il n'était pas ponctué. »
blanchot "commente" :
un langage qui s'efface, le mouvement même de sa disparition (...) l'emblème matériel d'un silence qui, pour se laisser représenter, doit se faire chose et qui ainsi reste le scandale, son paradoxe insurmontable.
y penser; avec les trois fonctions de l'image, selon rancière
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Dvortsevoy :
dans ces étendues désertes (celle qu'il filme) on sent nécessairement la présence de dieu (c'est juste un nom, pas une idole; donc le contraire même d'une présence;)
(paradise)
la légende pour cette femme (trop facile, et pathétique; sans doute) :
« Quand je considère la petite durée de ma vie, absorbée dans l'éternité précédente et suivante, le petit espace que je remplis, et même que je vois, abîmé dans l'infinie immensité des espaces que j'ignore et qui m'ignorent, je m'effraie et m'étonne de me voir ici plutôt que là, car il n'y a point de 'raison pourquoi... »
"ce que nous voyons d'un film ne se trouve pas pour les 9/10 sur la pellicule ou sur l'écran"
(rancière)
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
Dans un but qui sera peut-être éclairci
(ne désespérons pas de voir où tout ce qui s’écrit ici nous mènera)
citons avec georges didi-huberman
(c’est dans le livre sur fra angelico, dont je relis les premières pages depuis plusieurs jours ; pas en continuité évidemment ; je pense que j’irai pas très au-delà ; ça m’arrive très souvent, ce genre d’aventure ; ne pas écouter toute une œuvre musicale, parce que je répète sans cesse le début ; surtout dans ce qu’on appelle le « classique » ; le livre est cependant magnifique, mais en poche, lui manque naturellement la force des reproductions des œuvres de fra angelico ) ;
Dans un but qui sera sans doute éclairci à un moment ou un autre, référons nous, avec georges didi-huberman, au célèbre début de « introduction à l’étude de l’art de la renaissance » de panofsky ;
le discernement des figures consiste à dégager deux significations :
-la première dite « naturelle », ou « pré-iconographique » revient à identifier ce que panofsky nomme un MOTIF ; c’est-à-dire la représentation d’un objet naturel reconnaissable dans le monde des formes peintes
-la signification secondaire (pas naturelle donc, conventionnelle et iconographique) se révèle lorsque le motif devient « figure », réalise, à travers ce même « objet naturel », un « thème », personnifie un concept ou bien entre dans l’invention d’un système narratif ; à ce moment le motif pré-iconographique acquiert une nouvelle dignité de sens, qui est la dignité d’ « image », d’allégorie ou bien d’histoire
Le but de george didi-huberman est bien entendu de dépasser cette distinction, toute l’approche de panofsky : le sujet ne s’identifie pas à l’histoire, à ce que raconte le tableau ; mais avant de dépasser cette distinction, on peut se demander, en quoi elle peut nous aider, elle peut m’aider, à distinguer une image-documentaire, d’une image-fiction ;
Naturellement, tout ceci a autant de sérieux que n’importe quel jeu théorique ; la face du monde n’en sera pas changée, et encore moins le nez de cléopatre ;
appliquer cette distinction à cette image;
on dira, d'abord, c'est une bagnole (pas très en forme)
dans un deuxième temps, c'est la bagnole de columbo
le passage de la première description à la seconde, évidemment n'est absolument pas possible à partir de la seule image; c'est juste une bagnole ; qu'elle prenne sens, raconte une histoire, nécessite un savoir, qui n'est pas dans l'image, un savoir extérieur ; il faut "le texte" général d'où cette image est extraite...
à celle-ci,
c'est évidemment plus noble, mais le savoir nécessaire n'est pas plus complexe ;
comme dit gdh, on reconnaît sans peine (pour ceux qui connaissent, mais c'est pas très complexe) jésus et marie madeleine : les deux figures d'une histoire, d'un récit (on peut raconter cette histoire); les attributs, c'est les vêtements et leur couleur, la bêche ; la position des corps...
et finalement cette dernière;
j'aurais voulu poster plutôt une image de la bagnole-bus de "highway", pas trouvé sur le Net
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
j'ai arrêté cette image; et une fois arrêtée, comme disait l'autre, c'est à notre tour d'être arrêté par elle, suspendu; une image n'est pas un plan; et le plan lui-même n'est pas un plan; étant même par définition la négation de l'unité, de l'identité; un plan n'est pas; qu'est-ce qui arrête dans cette image, bien des choses; au fond, nous avons la chance que le cinéma soit récit en images, et donc mouvement, sans quoi nous resterions fixés à ses images; c'est comme avec la bd, à partir de quand doit-on cesser de regarder une case, quel est le temps de la contemplation d'un case; c'est pas le même que celui de la lecture de la bulle; mais là, c'est différent; nous faisons le mouvement, nous passons d'une case à l'autre, au cinéma, c'est mécanique; si bien que le mouvement nous interdit de voir; c'est comme dans la lecture, si on s'arrête au mot, plus de texte, de sens...
ce qui m'a arrêté dans cette image (une évidence, mais bête), le mystère de cette image, c'est qu'elle réunit en elle, la fiction et le documentaire; la bagnole de columbo n'a pas le même statut ontologique (son être est différent ; elle est un personnage, de la fiction, et pourtant rien ne la distingue des autres objets; matériellement, je veux dire) que la bagnole qui se trouve à côté d'elle, les arbres, la rue...
selon les films, les statuts ontologiques des objets présents à l'image, et leur mode de présence, varient (bien entendu)
ici, tout semble exister sur un même plan de fiction "lyrique" (l'englobant englobe tout); même si j'hésite un peu pour le cheval;
le problème c'est le décor naturel ou pas
ce passage de rancière : "le discours sur l'image fonctionne sur un effort d'objectivation, qui renvoie constamment à un processus de subjectivation, d'association, de dérivations multiples... l'image est écart et expansion; le discours sur elle est donc batard"
en associant ces images, il devient impossible de voir cette partie de 2001, sans penser à nosferatu, aux vampires (et donc à dvortsevoy, lol)
comme j'y suis, et que ça ne coûte pas plus cher : ne peut-on pas dire de jack torrance qu'il est aussi "le dernier des hommes";
le dernier des hommes
ce n'est pas le même plan, pas la même image; mais l'image de la même déchéance, et le même salut miraculeux; comique dans murnau et étrange plus qu'étrange dans shining (je pense bien entendu à la photo finale qui introduit jack torrance, le raté, dans le cercle des grands, dans la lumière des riches à la fitzgerald)... murnau avait procédé au même renversement...
lisons ce qu'écrit badiou, et méditons :
C'est ainsi qu'il faut expliquer l'énigme apparente du film : la grande césure qui le traverse vers sa fin, et qui fait venir, juste après une image d'exil absolu et de mort subjective, une séquence qu'on dirait tirée des scènes les plus drôles de Chaplin, et singulièrement de Les lumières de la ville. Cette césure nous dit que la fiction, et ses genres disparates, ne sont que des appareils à capter une vérité de l'univers, vérité qui est distribuable au même point (ici, pour le même personnage) selon des genres opposés. La vérité n'a pas de genre. Elle est neutre, parce qu'elle est comme une lumière de l'univers lui-même, et que ce qui importe à Murnau est de faire venir cette lumière dans ses films, mettant au service de cette venue le disparate superficiel des images, des techniques et des genres.
Murnau peut donc agencer librement des matériaux d'époque, à partir d'une thèse que le cinéma seul peut tenir : l'univers est incessamment relevé par une grâce d'exister qui enveloppe la terreur qu'il génère. Pourquoi le cinéma ? Parce que cet enveloppement est celui de la mobilité par la lumière. Nosferatu, ici, nous guide : la terreur y est proprement subvertie, de l'intérieur de sa propre croissance, par une aura lumineuse qui commence dès les plans crépusculaires des prairies et des chevaux sauvages, et s'achève dans ce matin solaire où mort et amour coïncident.
Le cinéma de Murnau est celui du temps de la lumière. C'est bien ce que récapitule, dans le film, le grand plan général du quartier, qui n'est que saisie sur les murs, les toits et les fenêtres, du passage de l'être-lumière. Mais tout aussi bien, du côté de l'hôtel Atlantic, le jeu entre les portes, qui sont à la fois transparence et fermeture, et le dehors, toujours enchanté. Le portier, quant à lui, est le passeur, le signe qui circule entre la transparence et le dehors.
n'est-ce pas un commentaire lumineux de shining ?
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
en attendant godot
perceval (rohmer)
lancelot (bresson)
The insistence on reality is not a matter of ethical purity but of cinematic fact (...) On the stage, two trees may constitute a forest, and two brooms the two trees; for the screen, this would yield only two brooms. A stage empty of everything but a couple of platforms may be made to constitute everything from the Roman Senate to the bedroom of Caesar's wife, to a field of battle; on the screen, it is an empty stage with a couple of platforms on it.
(Cavell,The World Viewed)
l'image du perceval complique les choses, le partage, entre la scène théâtrale- l'arbre-théâtre et l'écran de cinéma; ce n'est pas un arbre réel, ce n'est pas du théâtre; ou alors si; non?
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
(les raisins de la colère;JF; une fiction)
(paradise; SD; un documentaire)
quel est le statut ontologique de ces deux images?
pour qui sait d'où viennent les deux images; pour qui ne le sait pas, ce sera différent; au fond, la distinction est impossible à faire, si on ne sait pas; enfin, je pense.
deux fictions hantent "highway", du moins pour moi : les raisins de la colère et la strada;
Borges- Messages : 6044
Re: Avec Sergey Dvortsevoy et le documentaire
cette problématique est très gordadienne, celle des visages, pas la précédente à propos des décors, quoique... : la mise en scène des statues antiques du Mépris...
Invité- Invité
Page 1 sur 2 • 1, 2
Sujets similaires
» Hantons ce forum, dansons avec les spectres plutôt qu'avec Zuckie
» Le survival : un genre de documentaire animalier ?
» S21 de Rithy Panh et la question documentaire
» Documentaire sur Pedro Costa
» Documentaire sur Guy Gilles à la Cinémathèque - 25 mai
» Le survival : un genre de documentaire animalier ?
» S21 de Rithy Panh et la question documentaire
» Documentaire sur Pedro Costa
» Documentaire sur Guy Gilles à la Cinémathèque - 25 mai
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum