L'Aube de la planète des singes (2014)
L'Aube de la planète des singes (2014)
je me souviens que dans mon jeune âge, mes parents me convièrent à une conférence qui se déroulait dans la petite succursale d'une banque anonyme. Il faisait nuit, une nuit d'été, et le thème de la conférence était la Chine; je ne pourrais plus, le temps a fait son œuvre, évoquer le sujet précis qui était présenté, dans un lieu si improbable. Ni les circonstances qui mirent dans mes mains, à l'issue de la soirée, un ouvrage que j'ai conservé depuis lors et lu avec grand intérêt le matin venu: il s'agissait des aventures du roi singe de renom, et des déboires qu'il rencontrait tandis qu'il tentait de protéger des démons, un saint homme et sa petite troupe, perdue dans les montagnes chinoises bercées des volutes du brouillard.
C'était vraiment un livre fascinant. Les dessins en étaient merveilleux.
La cruauté du roi singe à frapper l'illusion hardiment à l'aide de son bâton, et percer les apparences avec la précision et l'insensibilité d'un chirurgien, quand bien même la sorcière, reine de la cour infernale entourée des formes bestiales de ses séides, se recouvrait des charmes d'une jeune et fragile jouvencelle, me laissait songeur, désappointé.
Sans doute, à contrario du roi singe, n'étais-je pas insensible aux traits de la succube anthropophage, quels qu'ils puissent être, et à l'instar des bouddhistes perchés sur le bord de précipices accueillant le vide de l'âme, j'ouvrais grand mon bec devant son art théâtrale des ombres et l'infinie variété de son imagination.
De manière assez amusante, au singe, au "ape", la tradition occidentale reproche de "singer", de mimer l'homme ; tout comme la sorcière : prendre l'apparence d'êtres qu'elle n'est pas, par art de la tromperie.
C'est comme si les rôles étaient inversés dans cette histoire. Et le singe, le roi singe, "monkey" puisqu'il a une queue, discerne au delà du voile et du maquillage qui recouvre les noirs desseins de la sorcière, au delà des artifices de l'actrice, et sauvegarde l'"humanité" des personnages « positifs ».
Ainsi deux mondes se côtoient, comme deux scènes: l'une austère, entêtée des prières, et l'autre fabuleuse et animée des ricanements des monstres ; et le roi singe peut à loisir aller de l'une à l'autre, guidé par son intelligence humaine et son implacable et animale férocité là où les pauvres humains que nous sommes se fourvoient et hésitent à la conduite à mener.
De nos jours Hollywood emprunte les traits simiesques à d'autres fins, pour d'autres contes, mais c'est encore et toujours de ce fossé qu'il s'agit, où plonge la théorie de l'évolution, qui sépare l'animal du genre humain.
Il existe un ouvrage de philosophie qui m'a intéressé, de ce point de vue, « le zoo des philosophes » ;
l'auteur dit, je la cite : « La charge symbolique s’accroît quand se creuse l'écart avec la réalité car ce qui compte (…) ce n'est pas l'animal réel mais la bête imaginaire qui servira à interpréter les comportements humains ou évaluer des populations ».
Donner à la peur de l'autre une construction du visible, une peinture de son étrangeté quasi animale, afin de le pousser hors du royaume des hommes.
Mais qu'en est-il de l'aube de cette planète des singes ?
On a eu droit à l'aube des morts, à l'aube rouge ; des histoires où l'humanité, c'est à dire l'Amérique, se trouvait rejetée hors des murs de la cité.
Le jour nouveau rompt avec l'Histoire et les hommes ; ils ne semblent plus concernés que par le crépuscule.
Ces récits avaient valeur d'avertissement, de mise en garde_ regardez vous dans le miroir et agissez afin d'échapper à cette image prophétique ou à cette image du temps présent.
Rien de très nouveau sous le soleil.
Si on tenait le film pour une démonstration géométrique, on aurait la difficile tâche de remonter au théorème fondateur en suivant à contre courant les axiomes présentés.
L'infographie au début suit la rotation du globe tandis qu'une épidémie se répand sur le monde : l'animation prend fin par un mouvement allant des territoires de la Russie et de l'Asie de l'est vers la Californie.
Les singes vivent en autonomie de l'autre côté du golden gate bridge, la "porte sur le Pacifique".
Dans la première scène, un groupe de chasseurs tombe de manière inopinée sur un ours; le combat s'engage et la bête est tuée.
Le doc m'a indiqué que l'ours était l’emblème de l'état californien. Ainsi un groupe cherchant à subsister entre en conflit avec une entité qui figure cet état.
Où se situe ce groupe?
L'infographie, la césure topologique que représente le pont, invitent à penser qu'il s'agit d'un territoire imaginaire, un espace transitoire, qui donne assise à l'idée d'une invasion.
L'un des postulat principaux, moteur, concerne la situation de l'Amérique: décadente, elle périclite, s'effondre sur ses bases, elle est menacée de disparition.
La critique est cinglante et semble condamner la politique à l'extérieur _ les survivants du virus vont sur le territoire des singes afin de remettre en route un barrage hydraulique, comme pour mieux mettre en lumière la vertu de l'isolationnisme.
L'autorité chez le groupe des hommes, incarnée par Gary Oldman, est d'ailleurs plongée dans le passé; deuil de l'enfance supprimée, vétéran de la guerre (Irak? Afghanistan?), comme si l'Amérique ne pouvait plus se projeter dans l'avenir, dans le devenir idéal.
Les héros positifs forment une famille recomposée, mais qui est elle aussi hantée par le mort des enfants, par l'impossibilité de la procréation.
L'importance de la cellule familiale, des liens du sang, l'hérédité, plus que les cicatrices, les torts du passés, outrepassent tout lien politique ou contractuel.
L'habitat de César, le leader des singes, est au sommet de leur village; on y accède en suivant une passerelle montante en forme d'hélicoïde d'adn lol; c'est le giron où sa femme enfante un fils.
Les singes opposent au petit groupe des hommes, en majorité des blancs, le nombre et la multiplicité, la vitalité procréatrice.
A deux reprises, les assiégés s'interrogent, combien sont-ils? les pronostics sont toujours en deçà de la réalité. Ainsi la menace essentielle est elle celle du nombre, d'être surpassé en nombre, par le multiple singe.
Mais c'est qui ce singe?
Revenons peut-être au virus initial. Celui qui écarte le singe du domaine de l'éthologie pour le faire entrer de plein pied, de pleine main, dans celui de l'anthropomorphisme.
La différence de degré, minime, entre le singe et l'homme invite à tous les fantasmes (jolie recherche sur un forum, ici, trouvée grâce au doc: http://king-kong.fansforum.info/t560-Les-origines-de-King-Kong.htm?start=30).
Le virus mortel est transmis du singe à l'homme. Un des personnages principaux dit qu'ils n'y sont pour rien, mais le résultat est là, c'est la fin de l'humanité (à l'américaine). En effet ce virus a été produit par les expériences des scientifiques sur les cobayes singes afin de les rendre intelligent, d'accroitre leur capacité de raisonnement etc.
Si ce virus mortel avait pour nom "peur de l'immigration", peur de la perte des "valeurs" culturelles et raciales américaines, je serais pas plus étonné que ça lol.
La famille blanche se porte au chevet de la femme de César afin de l'aider à accoucher; cet apprentissage de techniques, c'est l'élément positif d'une identité américaine en voix de partage, encore à naitre.
Mais a contrario, il y a l'illusion de partager les mêmes gestes, les mêmes attitudes, par exemple les scènes avec Koba (qui est soit dit en passant un surnom de staline lol) qui sont propres à la fourberie, à la malignité "caractéristique" du singe dans l'imaginaire occidental.
Et la balance penche bien sûr du côté des liens de sang, de l'hérédité;
César choisit son peuple et les deux groupes ne peuvent de fait cohabiter, suivant la logique mise en images.
On a déjà vu Hollywood se servir du golden gate bridge (dans un western avec Johnny Depp) et évoquer la disparition de population, le lien entre l'asie et l'amérique etc ...
une belle petite obsession réactionnaire. Personnellement je pense que c'est un film de merde mais ça ne regarde que moi lol
C'était vraiment un livre fascinant. Les dessins en étaient merveilleux.
La cruauté du roi singe à frapper l'illusion hardiment à l'aide de son bâton, et percer les apparences avec la précision et l'insensibilité d'un chirurgien, quand bien même la sorcière, reine de la cour infernale entourée des formes bestiales de ses séides, se recouvrait des charmes d'une jeune et fragile jouvencelle, me laissait songeur, désappointé.
Sans doute, à contrario du roi singe, n'étais-je pas insensible aux traits de la succube anthropophage, quels qu'ils puissent être, et à l'instar des bouddhistes perchés sur le bord de précipices accueillant le vide de l'âme, j'ouvrais grand mon bec devant son art théâtrale des ombres et l'infinie variété de son imagination.
De manière assez amusante, au singe, au "ape", la tradition occidentale reproche de "singer", de mimer l'homme ; tout comme la sorcière : prendre l'apparence d'êtres qu'elle n'est pas, par art de la tromperie.
C'est comme si les rôles étaient inversés dans cette histoire. Et le singe, le roi singe, "monkey" puisqu'il a une queue, discerne au delà du voile et du maquillage qui recouvre les noirs desseins de la sorcière, au delà des artifices de l'actrice, et sauvegarde l'"humanité" des personnages « positifs ».
Ainsi deux mondes se côtoient, comme deux scènes: l'une austère, entêtée des prières, et l'autre fabuleuse et animée des ricanements des monstres ; et le roi singe peut à loisir aller de l'une à l'autre, guidé par son intelligence humaine et son implacable et animale férocité là où les pauvres humains que nous sommes se fourvoient et hésitent à la conduite à mener.
De nos jours Hollywood emprunte les traits simiesques à d'autres fins, pour d'autres contes, mais c'est encore et toujours de ce fossé qu'il s'agit, où plonge la théorie de l'évolution, qui sépare l'animal du genre humain.
Il existe un ouvrage de philosophie qui m'a intéressé, de ce point de vue, « le zoo des philosophes » ;
l'auteur dit, je la cite : « La charge symbolique s’accroît quand se creuse l'écart avec la réalité car ce qui compte (…) ce n'est pas l'animal réel mais la bête imaginaire qui servira à interpréter les comportements humains ou évaluer des populations ».
Donner à la peur de l'autre une construction du visible, une peinture de son étrangeté quasi animale, afin de le pousser hors du royaume des hommes.
Mais qu'en est-il de l'aube de cette planète des singes ?
On a eu droit à l'aube des morts, à l'aube rouge ; des histoires où l'humanité, c'est à dire l'Amérique, se trouvait rejetée hors des murs de la cité.
Le jour nouveau rompt avec l'Histoire et les hommes ; ils ne semblent plus concernés que par le crépuscule.
Ces récits avaient valeur d'avertissement, de mise en garde_ regardez vous dans le miroir et agissez afin d'échapper à cette image prophétique ou à cette image du temps présent.
Rien de très nouveau sous le soleil.
Si on tenait le film pour une démonstration géométrique, on aurait la difficile tâche de remonter au théorème fondateur en suivant à contre courant les axiomes présentés.
L'infographie au début suit la rotation du globe tandis qu'une épidémie se répand sur le monde : l'animation prend fin par un mouvement allant des territoires de la Russie et de l'Asie de l'est vers la Californie.
Les singes vivent en autonomie de l'autre côté du golden gate bridge, la "porte sur le Pacifique".
Dans la première scène, un groupe de chasseurs tombe de manière inopinée sur un ours; le combat s'engage et la bête est tuée.
Le doc m'a indiqué que l'ours était l’emblème de l'état californien. Ainsi un groupe cherchant à subsister entre en conflit avec une entité qui figure cet état.
Où se situe ce groupe?
L'infographie, la césure topologique que représente le pont, invitent à penser qu'il s'agit d'un territoire imaginaire, un espace transitoire, qui donne assise à l'idée d'une invasion.
L'un des postulat principaux, moteur, concerne la situation de l'Amérique: décadente, elle périclite, s'effondre sur ses bases, elle est menacée de disparition.
La critique est cinglante et semble condamner la politique à l'extérieur _ les survivants du virus vont sur le territoire des singes afin de remettre en route un barrage hydraulique, comme pour mieux mettre en lumière la vertu de l'isolationnisme.
L'autorité chez le groupe des hommes, incarnée par Gary Oldman, est d'ailleurs plongée dans le passé; deuil de l'enfance supprimée, vétéran de la guerre (Irak? Afghanistan?), comme si l'Amérique ne pouvait plus se projeter dans l'avenir, dans le devenir idéal.
Les héros positifs forment une famille recomposée, mais qui est elle aussi hantée par le mort des enfants, par l'impossibilité de la procréation.
L'importance de la cellule familiale, des liens du sang, l'hérédité, plus que les cicatrices, les torts du passés, outrepassent tout lien politique ou contractuel.
L'habitat de César, le leader des singes, est au sommet de leur village; on y accède en suivant une passerelle montante en forme d'hélicoïde d'adn lol; c'est le giron où sa femme enfante un fils.
Les singes opposent au petit groupe des hommes, en majorité des blancs, le nombre et la multiplicité, la vitalité procréatrice.
A deux reprises, les assiégés s'interrogent, combien sont-ils? les pronostics sont toujours en deçà de la réalité. Ainsi la menace essentielle est elle celle du nombre, d'être surpassé en nombre, par le multiple singe.
Mais c'est qui ce singe?
Revenons peut-être au virus initial. Celui qui écarte le singe du domaine de l'éthologie pour le faire entrer de plein pied, de pleine main, dans celui de l'anthropomorphisme.
La différence de degré, minime, entre le singe et l'homme invite à tous les fantasmes (jolie recherche sur un forum, ici, trouvée grâce au doc: http://king-kong.fansforum.info/t560-Les-origines-de-King-Kong.htm?start=30).
Le virus mortel est transmis du singe à l'homme. Un des personnages principaux dit qu'ils n'y sont pour rien, mais le résultat est là, c'est la fin de l'humanité (à l'américaine). En effet ce virus a été produit par les expériences des scientifiques sur les cobayes singes afin de les rendre intelligent, d'accroitre leur capacité de raisonnement etc.
Si ce virus mortel avait pour nom "peur de l'immigration", peur de la perte des "valeurs" culturelles et raciales américaines, je serais pas plus étonné que ça lol.
La famille blanche se porte au chevet de la femme de César afin de l'aider à accoucher; cet apprentissage de techniques, c'est l'élément positif d'une identité américaine en voix de partage, encore à naitre.
Mais a contrario, il y a l'illusion de partager les mêmes gestes, les mêmes attitudes, par exemple les scènes avec Koba (qui est soit dit en passant un surnom de staline lol) qui sont propres à la fourberie, à la malignité "caractéristique" du singe dans l'imaginaire occidental.
Et la balance penche bien sûr du côté des liens de sang, de l'hérédité;
César choisit son peuple et les deux groupes ne peuvent de fait cohabiter, suivant la logique mise en images.
On a déjà vu Hollywood se servir du golden gate bridge (dans un western avec Johnny Depp) et évoquer la disparition de population, le lien entre l'asie et l'amérique etc ...
une belle petite obsession réactionnaire. Personnellement je pense que c'est un film de merde mais ça ne regarde que moi lol
Invité- Invité
Re: L'Aube de la planète des singes (2014)
merci woot,
il y a aussi la version de Jeffrey Lau.
je n'en ai vu aucune.
Celle de 2014 ressemble beaucoup à Legend of Zu .
il y a aussi la version de Jeffrey Lau.
je n'en ai vu aucune.
Celle de 2014 ressemble beaucoup à Legend of Zu .
Invité- Invité
Re: L'Aube de la planète des singes (2014)
Pour celle de 2014, oui je me disais aussi que y avait un côté très Legend of Zu.
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