Meruem/la mort d'un roi suprême : "Hunter x Hunter" (2011)
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Meruem/la mort d'un roi suprême : "Hunter x Hunter" (2011)
Je vais dans ce texte tenter de relire l'arc Kimera Ants de Hunter x Hunter à partir d'une conscience d'une Histoire du Japon. Un peu comme je l'ai fait avec la série Mobile Suit Gundam pour la revue spectres du cinéma en numérique.
Commençons par isoler trois motifs de la narration : Une explosion atomique en forme de rose, un roi insecte suprême, un peuple d'humains hypnotisé que les héros tentent de libérer en affrontant le roi insecte et sa garde.
L'histoire de base est simple, une espèce mutante d'insectes, les fourmis chimères, qui évoluent en s'appropriant l'adn des animaux dont elles se nourrissent, fini par assimiler l'humain et acquérir sa taille et sa puissance. Les premiers épisodes de cet arc de Hunter x Hunter se concentrent sur le fait que l'homme est devenu une proie et n'est plus au sommet de la chaîne alimentaire. Dés lors l'affrontement entre les deux espèces est inévitable.
Les héros de l'aventure qui sont bien entendu humains, perçoivent dés le départ la menace et tentent de s'approcher de la fourmilière d'où la prolifération de cette nouvelle mutation commence. Le danger devient de plus en plus prégnant avec la naissance de la garde royale et du roi, qui sont des créatures extraordinairement puissantes. Elles font peser sur l'espèce humaine la menace d'une annihilation. Les fourmis chimères se nourissent non seulement de chair humaine, qui leur semble particulièrement riche, mais sélectionnent aussi des humains pour les transformer en créatures de la même espèce qu'elles.
Ainsi, très vite l'affrontement frontal attendu dérive vers d'autres stratégies et questionnements qui sont l'apanage de la série Hunter x Hunter. Le fait que les fourmis chimères aient une part humaine dans leur adn empêche les deux espèces, les deux camps qui s'affrontent de percevoir l'ennemi/la proie en face comme une pure altérité. Les affrontements physiques et stratégiques deviennent des affrontements psychologiques, ce qui entraine des déplacements d'individus d'un camp à un autre... L'impureté à la base de la mutation des fourmis chimères en étant l'origine.
Le roi suite à sa naissance, quitte la fourmilière accompagné de sa garde, et s'empare du palais d'une nation humaine dirigée par un dictateur. Alors, sans révéler son réel visage, le roi régne derrière le corps mort du dictateur. Le cadavre est manipulé telle une marrionnette par un des membres de la garde royale. Un autre membre de la garde royale hypnotise l'ensemble de la population de la nation dans le but d'établir une sélection à transformer en fourmis chimères.
On sent là un semblant de volonté de l'auteur du manga de créer un conte, une fable avec une résonnance politique, et ce, bien que l'aspect shounen (manga pour jeune garçon) ne soit à aucun moment dissipée, sans qu'il n'y ait à aucun moment le moindre doute sur la nature du produit. Le roi insecte est en effet un décalque du méchant cell de Dragon Ball (série qui est assez inspiré de la légende du roi singe, Voyage en Occident)... Il est l'un des nombreux clin d'oeil de la série Hunter x Hunter à ce métre étalon du shounen manga, ou pour être plus précis du "nekketsu". Cell, en plus d'avoir un design similaire au roi insecte, s'approprie aussi la force des personnages qu'il absorbe (mange).
On a donc au fond, dans ce caneva, le contexte classique du nekketsu, ou de la plus part des récits héroïques se basant sur l'action, l'affrontement direct, guerrier. Faire de l'ennemi une créature inhumaine rendant le fait d'arme d'autant plus nécessaire...
Car évidemment la réelle justice en plus de la nécessité de survivre, la Morale, avance à visage humain. Mais l'idée de la fable persiste dans les parti pris narratifs de l'auteur. On se dit par exemple que le roi insecte est aussi quelque chose du dictateur. Il est la métaphore d'une nature qui pousse un homme à exercer sa tyrannie et aussi/ou plutôt le fantasme qu'un tel homme pourrait se faire de sa "puissance". Le dictateur est un roi tyran/dieu raté, une persistance archaïque qui se force, joue énormément pour faire croire en sa nature divine.
Mais je m'éloigne trop en dégageant cette idée de la dynamique de la série. Celle-ci semble vaguement s'intéresser au potentiel de cet élément qu'elle met pourtant en jeu. C'est assez décevant, comme nous sommes dans un shounen manga, le roi insecte est réellement le plus puissant des êtres vivants, et la série n'est que difficilement lisible comme une fable bien qu'elle en porte la trace. Le spectateur attend le déploiement de puissance pour ce qu'il est, la capacité de détruire le plus grand nombre d'ennemis, par la ruse, la magie, ou la force brute. La fin du récit fait cependant revenir le dictateur au devant de l’image, ou plutôt, comme souvent dans le fantastique, l’événement auquel nous avons été invité est rationnalisé par « la réalité sociale » de l’univers de la fiction… un univers pourtant très heroïc-fantasy, qui fonctionne donc comme un monde parallèle au notre. Cette réalité sociale qui est un reflet de la notre avec ses dictateurs, ses grandes villes où règnent les inégalités sociales, et ses médias… voit donc ces derniers donner à voir les événements de l’arc kimera ants sous une autre forme que celle qui nous est apparue : le dictateur aurait, d’après des flashs infos, dans un coup de folie fait massacrer une partie de son peuple avant de se donner la mort.
Dans la logique de la série il est évident que les médias se trompent ou cachent la vérité : le fait qu'un insecte mutant aux supers pouvoirs s'est emparé du trône du dictateur et a fait massacrer une partie de la population en voulant convertir l'autre partie en créatures de la même espèce que lui. La logique de la fable, elle, ne trancherait pas aussi nettement... Il y a chez un dictateur quelque chose d'un insecte.
En continuant malgré tout dans le sens d'un semblant de fable, les fourmis chimères apparaissent aussi comme l'équivalent des araignées géantes de Starship Troopers… les héros envoyés les tuer semblent s’être battu contre des êtres qu’ils ont par un processus idéologique déshumanisé.... ainsi la morale de l'arc des kimera ants se rapproche de celle du film de Verhoeven... et ce, bien qu'il n y ait là rien de satirique, au contraire, le plus grand sérieux règne durant toute la narration. Les supers pouvoirs sont des supers pouvoirs, les insectes mutants des insectes mutants, aucune idée au sein de la symbolique de la série ne se cache derrière eux. Du moins lorsqu'on ne tente pas, comme je suis entrain de le faire, de faire jouer les éléments déployés dans cette fiction avec un contexte plus large : une conscience de l'Histoire de la nation d'origine de ce manga.
Qu'est-ce que tout cela a donc de japonais?
Je reviens aux trois motifs isolés, et révèle dans le même mouvement la conclusion de l'histoire :
les humains malgré le fait qu'ils aient envoyés quelques uns de leurs plus puissants représentants se trouvent dépassés par la puissance du roi des kimera ants et de sa garde. Ils ne trouvent comme issu que l'emploi d'une arme terrible, une bombe atomique qui lors de son explosion semble avoir la forme d'une rose. Au champignon de la réelle bombe atomique est substituée la beauté de la rose.
Cette bombe atomique employée pour tuer un être suprême, le roi des fourmis chimère, semble d'abord avoir échoué. Le roi sort de cette explosion vivant. La suite de la narration révèle cependant que malgré le fait qu'il ait survécut à l'explosion un poison contenu dans la bombe le tuera à petit feu.
Là semble apparaître quelque chose de la conscience japonaise, une bombe atomique et un roi insecte semi-divin.
Le moment de l'histoire du japon où une bombe atomique a tué un roi semi-divin n'existe a priori pas, mais le seul pays à avoir subit une attaque atomique est le Japon. Il est aussi étrange de se dire à partir de ce texte que le peuple japonais a souvent été comparé par les occidentaux à une fourmilière.
Dés lors faut-il voir dans la fourmi chimère une image d'un Japon impérial inhumain hanté par une humanité post et pré-empire du Japon?
Je m'avance peut-être déjà trop, et surinterprète certainement....
Quoiqu'il en soit, suite à la défaite, l'Empereur du Japon jusqu'alors considéré comme un dieu, est déchu par la nouvelle constitution démocratique de cet état légendaire, pour ne garder que sa symbolique.
Le roi insecte de Hunter x Hunter, lui, n'est rien d'un puissant symbole, sa puissance divine est biologique, c'est un super être, apparemment dans la série le plus puissant être vivant sur terre. Son régne ne doit rien au symbolique ou au religieux... L'opposition principale entre l'ordre humain et celui des fourmis chimères est d'ailleurs présenté dans la série dans ce sens là : contrairement au dictateur qu'il tue et remplace, la puissance du roi insecte ne doit rien aux circonstances, aux jeux de pouvoir et symbolique, son régne est naturel, sa place comme roi est génétiquement déterminée. L'espèce humaine qu'il menace est menacée dans l'ordre naturel des choses. Le roi fait d'ailleurs remarquer qu'un humain ne culpabilise pas après avoir manger un cochon ou de la volaille. Cependant la narration de la série consiste au fur et à mesure que la fin approche à humaniser le roi et les fourmis chimères ou plutôt à faire de leur altérité plus qu'une pure puissance de mort. Le roi n'inspire plus juste le danger de mort que provoque sa puissance, mais aussi le sublime que devrait inspirer un roi, surtout lorsqu'il fait face à ses limites et aux questionnements qu'elles provoquent. En plus d'être la plus puissante des armes biologiques, le sommet de la chaîne alimentaire, il est un être doué d'une grande intelligence, intelligence qui trouve son illustration la plus simple dans ses victoires face aux plus grands champions de jeux de stratégies, qu'il invite pour occuper sa vie de palais et fait tuer après leur défaite. Mais il est aussi dans les derniers épisodes un être capable d'être magnanime, ce qui fait croire que les héros se sont en partie trompé sur son compte.
Apprendre son nom, Meruem, vu qu'il ne se connaissait et ne se définissait que par son titre, celui de roi, sera l'une de ses raisons de combattre l'un des humains venu le défier. Le roi ayant appris le nom que lui a donné celle qui l'a engendré avant de mourir, renoncera même, dans les derniers épisodes, à utiliser sa force. Son unique but étant de retrouver sa seule amie, une humaine, Komugi. Komugi étant la seule personne qu'il a rencontré capable de le surpasser dans un domaine précis, le jeu de Gun-gi, un jeu inspiré du jeu de Go, est l'être qui lui inspire le plus grand respect. Elle provoque en lui de grands bouleversements, et est plus décisif dans l'évolution du personnage que les héros martiaux surpuissants qui l'affrontent. Pourtant Komugi n'a aucun attribut de pouvoir, elle est aveugle et semble pauvre et au premier abord idiote. Le personnage est représenté constamment la morve au nez. Elle est l'exact opposé du roi suprême, qu'est l'insecte Meruem. Le nom est ici, non pas ce qui identifie une personne dans un espace social (nom de famille) et le fait appartenir à une communauté, mais ce qui "humanise" l'insecte roi en le sortant de ce qu'on croit être ce qui le détermine génétiquement. Meruem c'est juste son nom, ce n'est pas un prénom, il n'y a pas de nom de famille.
L'interprétation qui suit sur des parties de Gun-gi entre les deux personnages, dit la nature du changement du roi insecte qui en mourant n'est plus que Meruem, l'être aimé par Komugi, jeune fille aveugle, qui ne voit pas non plus la tyrannie et le mal que représente le roi :
La possibilité d'une erreur de jugement, sur la nature du roi insecte est très tôt signalée dans le récit, lorsque le héros naïf, Gon, affronte un escadron de fourmis chimères. Aprés les avoir massacré quasiment sans état d'âme il se justifie en disant grosso modo que des créatures qui n'ont aucune pitié pour des membres de la même espèce qu'elles ne méritent pas de vivre.
Une tournure d’esprit qui caractérise peut-être la possibilité d’une guerre totale contre un peuple : les japonais qui n’avaient pour leur propre vie aucun respect ne donnaient-il pas le bâton pour se faire battre par une armée américaine plus humaine ?
Le mentor du héros se demande alors ce qu'il adviendrait si jamais ces créatures s'avéraient capables de compassion pour les autres membres de leur espèce. Ainsi au fur et à mesure de l'avancement du récit ce postulat sera dépassé car lors de leurs combats hommes et Kimera ants se rendront compte mutuellement de leurs similitudes... Ce sans pour autant faire éviter l'inéluctabilité de la mise à mort de l'ennemi, mise à mort qui dés lors se fera dans de sombres émotions, peu communes dans le shounen. Lorsque le héros Gon tue un membre de la garde royale, ce n'est plus l'émotion positive de la victoire et de la performance martiale qui fait surface, mais le malaise suite à un massacre, à une boucherie. La nécessité de cette mise à mort sera d'ailleurs profondément motivée par un désir de vengeance plus que par l'altérité de l'ennemi. Lorsque l'arme ultime est employée par le chef des héros, Netero, pour tuer le roi insecte, ce n'est pas la beauté de l'explosion en forme de rose que l'auteur tente de communiquer mais l'idée que cette puissance est surtout quelque chose de terrifiant, quelque chose de terrifiant fait dans la nécessité de préserver la race humaine. L'écho avec l'histoire du Japon, avec la réelle bombe atomique, fait prendre corps à cette idée. On se dit que les fourmis chimères ont quelque chose de l'Empire du Japon, condamné pour crimes de guerre après avoir quitté son humanité en s'enfonçant dans la logique de conquête et de domination du monde (le projet de la Grande Asie). A l'image des fourmis chimères les japonais de la première partie de l'ère showa tentent d'assimiler les peuples conquis ou les réduisent en esclavage... au nom de l'Empereur... roi d'une fourmilière humaine qui fait corps, ou vit dans le fantasme d'être un seul corps, répondant à une logique quasi génétiquement déterminée : l'esprit, la race japonaise. Les personnages insectes dans la série sont souvent juste des êtres qui après leur seconde naissance sous forme d'insectes mutants ont oublié qu'ils étaient humains. Certains d'entre eux retrouvent la mémoire… et parfois même, à la fin du récit, sont acceptés malgré leur nouvelle apparence par la famille humaine qu'ils avaient perdus après avoir été dévorés et assimilés par les fourmis chimères. Une héroïne devenue fourmi chimère n'oublie pas son passé et continu à combattre du côté des humains. Il est même question au début de la série d'une corruption de la nature première des fourmis chimères par l'assimilation de l'espèce humaine, qui apporte de l'individualisme à l'esprit de corps du système socio/génétique des fourmis, qui se trouve déséquilibré. La notion de "nom" pour désigné un individu qui apparait avec cette nouvelle mutation est aussi mise en cause.
C'est dans le sens de cette logique du devenir humain de la fourmi et du devenir fourmi de l'humain que le roi insecte renonce à sa nature divine, accepte sa mort en remplaçant son titre qui est un don génétique par son nom. Ce changement n'est pas seulement dû à la défaite face au poison de l'arme atomique mais surtout à sa rencontre avec Komugi, la reine aveugle mais invincible du jeu de Gun-gi qui dans la logique de l'amour et du mélodrame nous fait presque pardonner au roi sa tyrannie, ses crimes. L'Empereur dieu, le tenno japonais, lui, en perdant sa nature divine ne deviendra donc qu'un symbole... bien que contrairement au roi insecte de la fiction il n'ait jamais été, biologiquement parlant, un dieu. Sa relation à l'Histoire, vu du point de vue d'une extrême gauche japonaise serait même plus à rapprocher de celle du dictateur tué par le roi insecte. Cependant on ne retient pas de Hirohito de volonté tyrannique, la réelle incarnation du mal, aux yeux d'une histoire dominante, dans le cas de l'Empire du Japon étant le général Tojo.
L'Empereur n'était apparement qu'un homme, un symbole manipulé par des factions politiques... Il est donc doublement mort, son pouvoir n'étant, même avant la défaite japonaise, que symbolique, sa destitution d'un statut divin n'est que la fin d'une illusion. Une illusion qui semblait pourtant faire l'unité du Japon.
L'Empereur comme créature divine, est donc autant un personnage de fiction, de conte, que le roi insecte. La mort de son statut divin importe moins que l'idée qu'il a fini par incarner. Il n y a aucun crime à attribuer à un homme qui n'était qu'une illusion du pouvoir, manipulée par le corps militaire. Le véritable insecte menaçant l'humanité était le général Tojo. L'Empereur Showa, Hirohito, lui, a vécut dignement de longues années après la fin de la guerre. Le symbole incarné par son corps ayant survécu, en tuant le faux dieu, à l'idée que des crimes ont été commis en son nom.
Meruem comme Hirohito accepte la fin de sa nature divine, il l'accompagne même en lui trouvant bien plus de beauté, voire en l'opposant à la cruauté et à l'amoralité de sa nature divine/insecte. Par sa mort comme dieu, l'humain a vaincu. Et plus que la bombe atomique ou la guerre, c'est le jeu fictionnel ou l'espace symbolique représenté par la partie de Gun-gi qui permet au roi de mourir en retrouvant son humanité.
Le Gun-gi, comme beaucoup de jeux de stratégies, est une représentation de la guerre ou l'adversaire n'est pas l'ennemi mais souvent l'ami. Il a donc mieux valu pour le Japon et son Empereur de perdre contre l'ami américain plutôt que contre l'ennemi américain. Le général Tojo a perdu contre l'ennemi, il a été condamné à mort. Hirohito a perdu contre un ami, Mc Arthur l'a libéré de l'illusion d'être un dieu sans lui ôter la vie. L'insecte Tojo est mort suite à la défaite et l'explosion atomique, Hirohito a survécut en gardant avec son humanité retrouvée le puissant symbole qu'est être "tennô", empereur.
Mais la fiction Hunter x Hunter offre des perspectives plus belles que sa relecture depuis l'Histoire, car la beauté dans le fait d'être roi est surtout dans la tragédie de mourir comme n'importe quel humain... dans les bras de celle qu'on aime.
Commençons par isoler trois motifs de la narration : Une explosion atomique en forme de rose, un roi insecte suprême, un peuple d'humains hypnotisé que les héros tentent de libérer en affrontant le roi insecte et sa garde.
L'histoire de base est simple, une espèce mutante d'insectes, les fourmis chimères, qui évoluent en s'appropriant l'adn des animaux dont elles se nourrissent, fini par assimiler l'humain et acquérir sa taille et sa puissance. Les premiers épisodes de cet arc de Hunter x Hunter se concentrent sur le fait que l'homme est devenu une proie et n'est plus au sommet de la chaîne alimentaire. Dés lors l'affrontement entre les deux espèces est inévitable.
Les héros de l'aventure qui sont bien entendu humains, perçoivent dés le départ la menace et tentent de s'approcher de la fourmilière d'où la prolifération de cette nouvelle mutation commence. Le danger devient de plus en plus prégnant avec la naissance de la garde royale et du roi, qui sont des créatures extraordinairement puissantes. Elles font peser sur l'espèce humaine la menace d'une annihilation. Les fourmis chimères se nourissent non seulement de chair humaine, qui leur semble particulièrement riche, mais sélectionnent aussi des humains pour les transformer en créatures de la même espèce qu'elles.
Ainsi, très vite l'affrontement frontal attendu dérive vers d'autres stratégies et questionnements qui sont l'apanage de la série Hunter x Hunter. Le fait que les fourmis chimères aient une part humaine dans leur adn empêche les deux espèces, les deux camps qui s'affrontent de percevoir l'ennemi/la proie en face comme une pure altérité. Les affrontements physiques et stratégiques deviennent des affrontements psychologiques, ce qui entraine des déplacements d'individus d'un camp à un autre... L'impureté à la base de la mutation des fourmis chimères en étant l'origine.
Le roi suite à sa naissance, quitte la fourmilière accompagné de sa garde, et s'empare du palais d'une nation humaine dirigée par un dictateur. Alors, sans révéler son réel visage, le roi régne derrière le corps mort du dictateur. Le cadavre est manipulé telle une marrionnette par un des membres de la garde royale. Un autre membre de la garde royale hypnotise l'ensemble de la population de la nation dans le but d'établir une sélection à transformer en fourmis chimères.
On sent là un semblant de volonté de l'auteur du manga de créer un conte, une fable avec une résonnance politique, et ce, bien que l'aspect shounen (manga pour jeune garçon) ne soit à aucun moment dissipée, sans qu'il n'y ait à aucun moment le moindre doute sur la nature du produit. Le roi insecte est en effet un décalque du méchant cell de Dragon Ball (série qui est assez inspiré de la légende du roi singe, Voyage en Occident)... Il est l'un des nombreux clin d'oeil de la série Hunter x Hunter à ce métre étalon du shounen manga, ou pour être plus précis du "nekketsu". Cell, en plus d'avoir un design similaire au roi insecte, s'approprie aussi la force des personnages qu'il absorbe (mange).
On a donc au fond, dans ce caneva, le contexte classique du nekketsu, ou de la plus part des récits héroïques se basant sur l'action, l'affrontement direct, guerrier. Faire de l'ennemi une créature inhumaine rendant le fait d'arme d'autant plus nécessaire...
Car évidemment la réelle justice en plus de la nécessité de survivre, la Morale, avance à visage humain. Mais l'idée de la fable persiste dans les parti pris narratifs de l'auteur. On se dit par exemple que le roi insecte est aussi quelque chose du dictateur. Il est la métaphore d'une nature qui pousse un homme à exercer sa tyrannie et aussi/ou plutôt le fantasme qu'un tel homme pourrait se faire de sa "puissance". Le dictateur est un roi tyran/dieu raté, une persistance archaïque qui se force, joue énormément pour faire croire en sa nature divine.
Mais je m'éloigne trop en dégageant cette idée de la dynamique de la série. Celle-ci semble vaguement s'intéresser au potentiel de cet élément qu'elle met pourtant en jeu. C'est assez décevant, comme nous sommes dans un shounen manga, le roi insecte est réellement le plus puissant des êtres vivants, et la série n'est que difficilement lisible comme une fable bien qu'elle en porte la trace. Le spectateur attend le déploiement de puissance pour ce qu'il est, la capacité de détruire le plus grand nombre d'ennemis, par la ruse, la magie, ou la force brute. La fin du récit fait cependant revenir le dictateur au devant de l’image, ou plutôt, comme souvent dans le fantastique, l’événement auquel nous avons été invité est rationnalisé par « la réalité sociale » de l’univers de la fiction… un univers pourtant très heroïc-fantasy, qui fonctionne donc comme un monde parallèle au notre. Cette réalité sociale qui est un reflet de la notre avec ses dictateurs, ses grandes villes où règnent les inégalités sociales, et ses médias… voit donc ces derniers donner à voir les événements de l’arc kimera ants sous une autre forme que celle qui nous est apparue : le dictateur aurait, d’après des flashs infos, dans un coup de folie fait massacrer une partie de son peuple avant de se donner la mort.
Dans la logique de la série il est évident que les médias se trompent ou cachent la vérité : le fait qu'un insecte mutant aux supers pouvoirs s'est emparé du trône du dictateur et a fait massacrer une partie de la population en voulant convertir l'autre partie en créatures de la même espèce que lui. La logique de la fable, elle, ne trancherait pas aussi nettement... Il y a chez un dictateur quelque chose d'un insecte.
En continuant malgré tout dans le sens d'un semblant de fable, les fourmis chimères apparaissent aussi comme l'équivalent des araignées géantes de Starship Troopers… les héros envoyés les tuer semblent s’être battu contre des êtres qu’ils ont par un processus idéologique déshumanisé.... ainsi la morale de l'arc des kimera ants se rapproche de celle du film de Verhoeven... et ce, bien qu'il n y ait là rien de satirique, au contraire, le plus grand sérieux règne durant toute la narration. Les supers pouvoirs sont des supers pouvoirs, les insectes mutants des insectes mutants, aucune idée au sein de la symbolique de la série ne se cache derrière eux. Du moins lorsqu'on ne tente pas, comme je suis entrain de le faire, de faire jouer les éléments déployés dans cette fiction avec un contexte plus large : une conscience de l'Histoire de la nation d'origine de ce manga.
Qu'est-ce que tout cela a donc de japonais?
Je reviens aux trois motifs isolés, et révèle dans le même mouvement la conclusion de l'histoire :
les humains malgré le fait qu'ils aient envoyés quelques uns de leurs plus puissants représentants se trouvent dépassés par la puissance du roi des kimera ants et de sa garde. Ils ne trouvent comme issu que l'emploi d'une arme terrible, une bombe atomique qui lors de son explosion semble avoir la forme d'une rose. Au champignon de la réelle bombe atomique est substituée la beauté de la rose.
Cette bombe atomique employée pour tuer un être suprême, le roi des fourmis chimère, semble d'abord avoir échoué. Le roi sort de cette explosion vivant. La suite de la narration révèle cependant que malgré le fait qu'il ait survécut à l'explosion un poison contenu dans la bombe le tuera à petit feu.
Là semble apparaître quelque chose de la conscience japonaise, une bombe atomique et un roi insecte semi-divin.
Le moment de l'histoire du japon où une bombe atomique a tué un roi semi-divin n'existe a priori pas, mais le seul pays à avoir subit une attaque atomique est le Japon. Il est aussi étrange de se dire à partir de ce texte que le peuple japonais a souvent été comparé par les occidentaux à une fourmilière.
Dés lors faut-il voir dans la fourmi chimère une image d'un Japon impérial inhumain hanté par une humanité post et pré-empire du Japon?
Je m'avance peut-être déjà trop, et surinterprète certainement....
Quoiqu'il en soit, suite à la défaite, l'Empereur du Japon jusqu'alors considéré comme un dieu, est déchu par la nouvelle constitution démocratique de cet état légendaire, pour ne garder que sa symbolique.
Le roi insecte de Hunter x Hunter, lui, n'est rien d'un puissant symbole, sa puissance divine est biologique, c'est un super être, apparemment dans la série le plus puissant être vivant sur terre. Son régne ne doit rien au symbolique ou au religieux... L'opposition principale entre l'ordre humain et celui des fourmis chimères est d'ailleurs présenté dans la série dans ce sens là : contrairement au dictateur qu'il tue et remplace, la puissance du roi insecte ne doit rien aux circonstances, aux jeux de pouvoir et symbolique, son régne est naturel, sa place comme roi est génétiquement déterminée. L'espèce humaine qu'il menace est menacée dans l'ordre naturel des choses. Le roi fait d'ailleurs remarquer qu'un humain ne culpabilise pas après avoir manger un cochon ou de la volaille. Cependant la narration de la série consiste au fur et à mesure que la fin approche à humaniser le roi et les fourmis chimères ou plutôt à faire de leur altérité plus qu'une pure puissance de mort. Le roi n'inspire plus juste le danger de mort que provoque sa puissance, mais aussi le sublime que devrait inspirer un roi, surtout lorsqu'il fait face à ses limites et aux questionnements qu'elles provoquent. En plus d'être la plus puissante des armes biologiques, le sommet de la chaîne alimentaire, il est un être doué d'une grande intelligence, intelligence qui trouve son illustration la plus simple dans ses victoires face aux plus grands champions de jeux de stratégies, qu'il invite pour occuper sa vie de palais et fait tuer après leur défaite. Mais il est aussi dans les derniers épisodes un être capable d'être magnanime, ce qui fait croire que les héros se sont en partie trompé sur son compte.
Apprendre son nom, Meruem, vu qu'il ne se connaissait et ne se définissait que par son titre, celui de roi, sera l'une de ses raisons de combattre l'un des humains venu le défier. Le roi ayant appris le nom que lui a donné celle qui l'a engendré avant de mourir, renoncera même, dans les derniers épisodes, à utiliser sa force. Son unique but étant de retrouver sa seule amie, une humaine, Komugi. Komugi étant la seule personne qu'il a rencontré capable de le surpasser dans un domaine précis, le jeu de Gun-gi, un jeu inspiré du jeu de Go, est l'être qui lui inspire le plus grand respect. Elle provoque en lui de grands bouleversements, et est plus décisif dans l'évolution du personnage que les héros martiaux surpuissants qui l'affrontent. Pourtant Komugi n'a aucun attribut de pouvoir, elle est aveugle et semble pauvre et au premier abord idiote. Le personnage est représenté constamment la morve au nez. Elle est l'exact opposé du roi suprême, qu'est l'insecte Meruem. Le nom est ici, non pas ce qui identifie une personne dans un espace social (nom de famille) et le fait appartenir à une communauté, mais ce qui "humanise" l'insecte roi en le sortant de ce qu'on croit être ce qui le détermine génétiquement. Meruem c'est juste son nom, ce n'est pas un prénom, il n'y a pas de nom de famille.
L'interprétation qui suit sur des parties de Gun-gi entre les deux personnages, dit la nature du changement du roi insecte qui en mourant n'est plus que Meruem, l'être aimé par Komugi, jeune fille aveugle, qui ne voit pas non plus la tyrannie et le mal que représente le roi :
michiru3050 a écrit:
...did anybody notice kokoriko(a gungi technique) means King itself?
This technique try to win the game by making King piece isolate.But komugi tells him this technique is Shiro (road to death) a while ago ( ep
- Spoiler:
Cette phase d'une partie de Gun-gi entre le roi et Komugi reflète aussi les enjeux de la narration : les héros devaient isoler le roi de sa garde pour l'éliminer
104). Isolated king must die. But she shows him a new tactics to save
king in ep 135. It means "king doesn't have to die". In reality, king
didin't be killed by Netero's nuke attack.
- Spoiler:
Netero est le chef du groupe de héros venu tuer le roi. Incapable de vaincre le roi avec son art martial, il utilise une bombe atomique.
But king counterattacked her and shows that isolated king must die after
all ( by poison). Komugi finds a new counterattack and said "I'll go
with you". King is not alone anymore. Meruem tells her he can't win
even once(He couldn't beat kokoriko). It means Kokoriko is not shiro
anymore. She saved the isolated king.
The black screen at the end has a couple meanings
The dying king has lost even his sight.
His mother named him Meruemu as "Light shining on everything". It's
stated that "His en shined into the palace as if it's sunshine" and "He
manipulated light particles to search Palm in a house" a while ago. He
got a god-like light power at that moment. But black pages suggests that
he doesn't have any light now. This is a view that Komugi was seeing
from the beginning. She couldn't see any light. To her, he was just
Meruem.
After all, those pages show us that he lost everything but gained
what he trully wanted.
He didn't need any soldiers, palaces, countries, power, strength, even
his sight(as Komugi). He just wanted to play Gungi with Komugi.
This is the same to her too. She had nothing besides Gungi. Nobody
loved her and couldn't play Gungi as well as she did. She was lonely
Gungi King(Queen?). But she gained Meruem.
That's why she cryed when he counterattacked her new kokoriko. She once
needed to create and kill tactics on Gungi by herself. But she gained
the perfect opponent and can create tactics with him(I guess to create
tactics suggests to create a baby as she said kokoriko is her baby.)
The one "Light shines on everything" loved (and was loved by) was a blind girl. What a story!
They started a new(the last) game in darkness.
"1-5-1 king".
"9-5-1 king".
Then it was stopped. These two king pieces don't go anywhere anymore.
Two kings (King of living things and Gungi King) are together forever.
La possibilité d'une erreur de jugement, sur la nature du roi insecte est très tôt signalée dans le récit, lorsque le héros naïf, Gon, affronte un escadron de fourmis chimères. Aprés les avoir massacré quasiment sans état d'âme il se justifie en disant grosso modo que des créatures qui n'ont aucune pitié pour des membres de la même espèce qu'elles ne méritent pas de vivre.
Une tournure d’esprit qui caractérise peut-être la possibilité d’une guerre totale contre un peuple : les japonais qui n’avaient pour leur propre vie aucun respect ne donnaient-il pas le bâton pour se faire battre par une armée américaine plus humaine ?
Le mentor du héros se demande alors ce qu'il adviendrait si jamais ces créatures s'avéraient capables de compassion pour les autres membres de leur espèce. Ainsi au fur et à mesure de l'avancement du récit ce postulat sera dépassé car lors de leurs combats hommes et Kimera ants se rendront compte mutuellement de leurs similitudes... Ce sans pour autant faire éviter l'inéluctabilité de la mise à mort de l'ennemi, mise à mort qui dés lors se fera dans de sombres émotions, peu communes dans le shounen. Lorsque le héros Gon tue un membre de la garde royale, ce n'est plus l'émotion positive de la victoire et de la performance martiale qui fait surface, mais le malaise suite à un massacre, à une boucherie. La nécessité de cette mise à mort sera d'ailleurs profondément motivée par un désir de vengeance plus que par l'altérité de l'ennemi. Lorsque l'arme ultime est employée par le chef des héros, Netero, pour tuer le roi insecte, ce n'est pas la beauté de l'explosion en forme de rose que l'auteur tente de communiquer mais l'idée que cette puissance est surtout quelque chose de terrifiant, quelque chose de terrifiant fait dans la nécessité de préserver la race humaine. L'écho avec l'histoire du Japon, avec la réelle bombe atomique, fait prendre corps à cette idée. On se dit que les fourmis chimères ont quelque chose de l'Empire du Japon, condamné pour crimes de guerre après avoir quitté son humanité en s'enfonçant dans la logique de conquête et de domination du monde (le projet de la Grande Asie). A l'image des fourmis chimères les japonais de la première partie de l'ère showa tentent d'assimiler les peuples conquis ou les réduisent en esclavage... au nom de l'Empereur... roi d'une fourmilière humaine qui fait corps, ou vit dans le fantasme d'être un seul corps, répondant à une logique quasi génétiquement déterminée : l'esprit, la race japonaise. Les personnages insectes dans la série sont souvent juste des êtres qui après leur seconde naissance sous forme d'insectes mutants ont oublié qu'ils étaient humains. Certains d'entre eux retrouvent la mémoire… et parfois même, à la fin du récit, sont acceptés malgré leur nouvelle apparence par la famille humaine qu'ils avaient perdus après avoir été dévorés et assimilés par les fourmis chimères. Une héroïne devenue fourmi chimère n'oublie pas son passé et continu à combattre du côté des humains. Il est même question au début de la série d'une corruption de la nature première des fourmis chimères par l'assimilation de l'espèce humaine, qui apporte de l'individualisme à l'esprit de corps du système socio/génétique des fourmis, qui se trouve déséquilibré. La notion de "nom" pour désigné un individu qui apparait avec cette nouvelle mutation est aussi mise en cause.
C'est dans le sens de cette logique du devenir humain de la fourmi et du devenir fourmi de l'humain que le roi insecte renonce à sa nature divine, accepte sa mort en remplaçant son titre qui est un don génétique par son nom. Ce changement n'est pas seulement dû à la défaite face au poison de l'arme atomique mais surtout à sa rencontre avec Komugi, la reine aveugle mais invincible du jeu de Gun-gi qui dans la logique de l'amour et du mélodrame nous fait presque pardonner au roi sa tyrannie, ses crimes. L'Empereur dieu, le tenno japonais, lui, en perdant sa nature divine ne deviendra donc qu'un symbole... bien que contrairement au roi insecte de la fiction il n'ait jamais été, biologiquement parlant, un dieu. Sa relation à l'Histoire, vu du point de vue d'une extrême gauche japonaise serait même plus à rapprocher de celle du dictateur tué par le roi insecte. Cependant on ne retient pas de Hirohito de volonté tyrannique, la réelle incarnation du mal, aux yeux d'une histoire dominante, dans le cas de l'Empire du Japon étant le général Tojo.
L'Empereur n'était apparement qu'un homme, un symbole manipulé par des factions politiques... Il est donc doublement mort, son pouvoir n'étant, même avant la défaite japonaise, que symbolique, sa destitution d'un statut divin n'est que la fin d'une illusion. Une illusion qui semblait pourtant faire l'unité du Japon.
L'Empereur comme créature divine, est donc autant un personnage de fiction, de conte, que le roi insecte. La mort de son statut divin importe moins que l'idée qu'il a fini par incarner. Il n y a aucun crime à attribuer à un homme qui n'était qu'une illusion du pouvoir, manipulée par le corps militaire. Le véritable insecte menaçant l'humanité était le général Tojo. L'Empereur Showa, Hirohito, lui, a vécut dignement de longues années après la fin de la guerre. Le symbole incarné par son corps ayant survécu, en tuant le faux dieu, à l'idée que des crimes ont été commis en son nom.
Meruem comme Hirohito accepte la fin de sa nature divine, il l'accompagne même en lui trouvant bien plus de beauté, voire en l'opposant à la cruauté et à l'amoralité de sa nature divine/insecte. Par sa mort comme dieu, l'humain a vaincu. Et plus que la bombe atomique ou la guerre, c'est le jeu fictionnel ou l'espace symbolique représenté par la partie de Gun-gi qui permet au roi de mourir en retrouvant son humanité.
Le Gun-gi, comme beaucoup de jeux de stratégies, est une représentation de la guerre ou l'adversaire n'est pas l'ennemi mais souvent l'ami. Il a donc mieux valu pour le Japon et son Empereur de perdre contre l'ami américain plutôt que contre l'ennemi américain. Le général Tojo a perdu contre l'ennemi, il a été condamné à mort. Hirohito a perdu contre un ami, Mc Arthur l'a libéré de l'illusion d'être un dieu sans lui ôter la vie. L'insecte Tojo est mort suite à la défaite et l'explosion atomique, Hirohito a survécut en gardant avec son humanité retrouvée le puissant symbole qu'est être "tennô", empereur.
Mais la fiction Hunter x Hunter offre des perspectives plus belles que sa relecture depuis l'Histoire, car la beauté dans le fait d'être roi est surtout dans la tragédie de mourir comme n'importe quel humain... dans les bras de celle qu'on aime.
Dernière édition par wootsuibrick le Dim 3 Aoû 2014 - 5:01, édité 32 fois
Re: Meruem/la mort d'un roi suprême : "Hunter x Hunter" (2011)
Woot, c'est vraiment passionnant, comme pour Mobile Suit !
adeline- Messages : 3000
Re: Meruem/la mort d'un roi suprême : "Hunter x Hunter" (2011)
Merci Adeline, j'ai rajouté pas mal d'éléments (notamment sur la fin) suite à ton post.
Re: Meruem/la mort d'un roi suprême : "Hunter x Hunter" (2011)
La version retravaillée du texte :
Meruem/la mort d’un roi
Commençons par isoler trois motifs de la narration de l’arc kimera ants du manga Hunter x Hunter : une explosion atomique en forme de rose, un roi insecte suprême, un peuple d'humains hypnotisé que les héros tentent de libérer en affrontant le roi insecte et sa garde.
Je relierai, plus loin dans le texte, ces motifs à une conscience de l’Histoire du Japon.
L'histoire de base est simple, une espèce mutante d'insectes, les fourmis chimères, qui évoluent en s'appropriant l'ADN des animaux dont elles se nourrissent, fini par assimiler l'humain et acquérir son intelligence et ses pouvoirs. Les premiers épisodes de cet arc se concentrent sur l’idée que l'homme est devenu une proie et n'est plus au sommet de la chaîne alimentaire. Dés lors l'affrontement mortel entre les deux espèces semble inévitable.
Les héros perçoivent dés le départ la menace et tentent de s'approcher de la fourmilière d'où la prolifération de cette nouvelle mutation commence. Le danger devient de plus en plus prégnant avec la naissance de la garde royale, puis du roi.
Les fourmis chimères se nourrissent non seulement de chair humaine, qui leur semble particulièrement riche, mais sélectionnent aussi des humains pour les transformer en créatures de la même espèce qu'elles.
Mais très vite le combat frontal attendu dérive vers d'autres stratégies et questionnements. Le fait que les fourmis chimères aient une part humaine dans leur ADN empêche les deux espèces, les deux camps qui s'affrontent de percevoir l'ennemi/la proie en face comme une pure altérité. Les affrontements physiques et stratégiques deviennent des affrontements psychologiques, ce qui entraine des déplacements d'individus d'un camp à un autre... l'impureté à la base de la mutation des fourmis chimères en étant l'origine.
Le roi, accompagné de sa garde, quitte la fourmilière. Il laisse sa mère, reine mourante suite à l’accouchement difficile, derrière lui, et s'empare du palais d'une nation humaine dirigée par un dictateur.
Alors, sans révéler son réel visage, il règne derrière le corps mort du dictateur. Le cadavre est manipulé, telle une marionnette, par un des membres de la garde du roi. Les fourmis chimères s’adressent à la nation via les médias et l’organe de propagande du dictateur. Un second garde royal se charge lui d’hypnotiser l'ensemble de la nation.
On sent là une forme de métaphore, du moins un semblant de volonté de l'auteur du manga de créer un « conte », une « fable » avec une résonnance politique, et ce, bien que l'aspect shounen (manga pour jeune garçon) ne soit à aucun moment dissipée, sans qu'il y ait à aucun moment le moindre doute sur la nature du produit. Le roi insecte est en effet un décalque du méchant Cell du manga Dragon Ball... Il est l'un des nombreux clins d'œil de la série Hunter x Hunter à ce mètre étalon du shounen manga, ou pour être plus précis du nekketsu. Cell, en plus d'avoir un design similaire au roi insecte, s'approprie aussi la force des personnages qu'il absorbe (mange).
On a donc au fond, dans ce canevas, le contexte classique du nekketsu ou de la plus part des récits héroïques se basant sur l'action, l'affrontement direct et guerrier entre deux camps. Faire de l'ennemi une créature inhumaine rend le fait d'arme d'autant plus nécessaire ; et la Justice, la Morale, avancent évidemment à visage humain.
L'idée de « la fable », du « conte », elle, persiste malgré tout dans les partis pris narratifs de l'auteur. Il serait intéressant donc, avant de continuer, de tenter de voir en quoi cet arc de Hunter x Hunter a une résonnance avec ce genre ancestral que l’on nomme le conte.
Déjà, il s’agit de deux genres, le shounen et le conte, qui semblent d’abord s’adresser aux enfants, du moins à un public non adulte qui porte peu d’intérêt à la vraisemblance. Que des fourmis à tête de lion ou de pieuvre puissent parler japonais, réfléchir à la portée morale de leurs actes et écouter de la musique rock, peu importe… Cette tendance à anthropomorphiser des êtres non humain, animaux ou insectes est donc l’autre point commun, bien que cette anthropomorphisation soit dans cette série due à une mutation génétique d’une espèce fictionnelle de fourmis. Cette espèce résonne d’ailleurs particulièrement avec l’idée de la fable ; bien que de la fourmi de la fable d’Esope à la fourmi du manga de Togashi Yoshihiro, il y ait tout un monde. Mais derrière ce carnaval de créatures aussi diverses qu’unies dans l’anthropomorphisme, se cache le récit des relations de pouvoir qui composent la réalité sociopolitique, et la possibilité de dépasser le constat d’une injustice de ces relations par la morale.
Ainsi, dans le sens du conte et de la fable, on peut se dire que le roi fourmi est aussi quelque chose du dictateur. Il est la métaphore d'une nature qui pousse un homme à exercer sa tyrannie et aussi/ou plutôt le fantasme qu'un tel homme pourrait se faire de sa "puissance". Le dictateur est un roi tyran/dieu raté, une persistance archaïque [url=#_ftn1][1][/url]qui se force, joue énormément pour faire croire au théâtre de sa supposée nature supérieure.
Mais je m'éloigne peut-être trop en dégageant cette idée de la dynamique de la série. Celle-ci semble vaguement s'intéresser au potentiel symbolique de cet élément qu'elle met pourtant en jeu. C'est un fait assez décevant, comme nous sommes dans un shounen manga le roi insecte est « réellement » le plus puissant des êtres vivants, et la série n'est ainsi que difficilement lisible comme un « conte » bien qu'elle en porte la trace. Le spectateur attend le déploiement de puissance pour ce qu'il est, la capacité de détruire le plus grand nombre d'ennemis, par la ruse, la magie ou la force brute.
La fin du récit de l’arc fait revenir le dictateur au devant de l’image, ou plutôt, comme souvent dans le fantastique, l’événement auquel nous avons été invité est rationnalisé par « la réalité sociale » de l’univers de fiction… un univers pourtant du genre fantasy, qui fonctionne donc comme un monde parallèle au notre. Sa réalité sociale est un reflet de la notre avec ses dictateurs, ses grandes villes, où règnent les inégalités sociales, et ses médias. Ces derniers donnent à voir les événements sous une forme différente de celle qui nous est apparue. Le dictateur aurait, d’après les news, dans un coup de folie fait massacrer une partie de « son peuple » avant de se donner la mort.
Dans la logique de la série il est évident que les médias se trompent ou cachent la vérité en connivence avec les politiques : le fait qu'un insecte mutant aux supers pouvoirs s'est emparé du trône du dictateur et a fait massacrer une partie de la population.
La logique de la fable et du conte, elle, ne trancherait pas aussi nettement... Il y a chez un dictateur quelque chose d'un insecte, mais sans les supers pouvoirs.
En continuant malgré tout dans le sens d'un semblant de fable politique, les fourmis chimères apparaissent aussi, dans un subtil ou confus renversement, comme l'équivalent des araignées géantes du film Starship Troopers… les héros envoyés les tuer semblent s’être battu contre des êtres qu’ils ont, par un processus idéologique, déshumanisé. Ainsi, la morale de l'arc des kimera ants se rapproche de celle du film de Verhoeven, et ce, bien qu'il n y ait là rien de satirique, au contraire, le plus grand sérieux règne durant toute la narration. Les supers pouvoirs sont des supers pouvoirs, les insectes mutants des insectes mutants, aucune symbolique forte ne se cache au sein des idées de la série. Du moins lorsqu'on ne tente pas de faire jouer les éléments déployés dans cette fiction avec un contexte plus large ; une conscience de l'Histoire de la nation d'origine de ce manga, par exemple.
En effet, qu'est-ce que tout cela a donc de japonais?
Je reviens aux trois motifs isolés en début de texte, et révèle la conclusion de l'histoire : les humains malgré le fait qu'ils aient envoyés quelques uns de leurs plus puissants représentants se trouvent dépassés par la puissance du roi insecte et de sa garde. Ils ne trouvent comme issue que l'emploi d'une arme terrible, une bombe atomique qui lors de son explosion semble avoir la forme d'une rose. Au champignon de la réelle bombe atomique le manga a substitué la beauté de la rose.
Cette bombe « atomique » employée pour tuer un être suprême, le roi des fourmis chimères, semble d'abord avoir échoué. Le roi sort de cette explosion vivant. La suite de la narration révèle cependant que malgré le fait qu'il ait survécut à l'explosion un poison contenu dans la bombe le tuera à petit feu.
Là, semble apparaître quelque chose de la conscience historique japonaise : une bombe atomique et un roi insecte semi divin.
Le moment de l'histoire du japon où une bombe atomique a tué un roi insecte semi divin n'existe a priori pas, mais le seul pays à avoir subit une attaque atomique est le Japon.
Il est aussi étrange de se dire, à partir de ce texte, que le peuple japonais a souvent été comparé à une fourmilière. Des fourmis aussi travailleuses que celles de la fable d’Esope.
Dés lors faut-il voir dans la fourmi chimère une image d'un Japon impérial inhumain hanté par une humanité post et pré-empire du Japon?
Je m'avance peut-être déjà trop, et sur interprète certainement....
Quoiqu'il en soit, suite à la défaite, l'Empereur du Japon jusqu'alors considéré comme un être divin, est déchu par la nouvelle constitution démocratique de cet état légendaire, pour ne garder que sa symbolique.
Le roi insecte, lui, n'est rien d'un puissant symbole, sa puissance « divine » est biologique, c'est un super être, apparemment dans la série le plus puissant être vivant sur terre. Son règne ne doit rien au symbolique ou au religieux.
L'opposition principale entre l'ordre humain et celui des fourmis chimères est d'ailleurs présenté dans la série dans ce sens là : contrairement au dictateur qu'il tue et remplace, la puissance du roi insecte ne doit rien aux circonstances, aux jeux de pouvoir et symbolique, son règne est naturel, sa place comme roi est génétiquement déterminée. L'espèce humaine qu'il menace est menacée dans l'ordre naturel des choses. Le roi fait d'ailleurs remarquer dans une ligne de dialogue qu'un être humain ne culpabilise pas après avoir mangé du cochon ou de la volaille.
Cependant la narration de la série consiste au fur et à mesure que la fin approche à humaniser le roi et les fourmis chimères ou plutôt à faire de leur altérité plus qu'une pure puissance de mort. Le roi n'inspire plus juste le danger de mort dû à sa puissance et à sa place de super prédateur mais aussi le sublime de son titre, surtout lorsqu'il fait face à ses limites et aux questionnements qu'elles provoquent. En plus d'être la plus puissante des créatures biologiques, le sommet de la chaîne alimentaire, il est un être doué d'une grande intelligence, intelligence qui trouve son illustration la plus évidente dans ses victoires face aux plus grands champions de jeux de stratégies, qu'il invite pour occuper sa vie de palais et fait tuer après leur défaite. Mais il est surtout dans les derniers épisodes un être qui apprend à être magnanime, qui ne voit plus dans la terreur qu’il inspire une finalité, ce qui fini par faire croire que les héros se sont, en partie, trompés sur sa réelle nature.
Un humain venu le défier, Netero, le chef du groupe de héros, lui promet de lui apprendre le nom que lui a laissé la reine, sa mère, en mourant. Apprendre son nom, Meruem, vu qu'il ne se connaissait et ne se définissait que par son titre, celui de roi, sera l'une des raisons de combattre cet humain avec qui il tente pourtant d’abord de négocier un nouveau « statut » pour leurs deux espèces. Leur affrontement finira par l’explosion de la bombe atomique que portait en lui Netero.
Le roi ayant appris le nom que lui a donné celle qui l'a engendré avant de mourir, renoncera même, dans les derniers épisodes, à utiliser sa force. Le but unique qui se dessinera, dans les derniers épisodes de l’arc, sera dés lors, pour lui, de retrouver dans les décombres de la bataille, et malgré une amnésie due au choc de l’explosion atomique, sa seule amie, une humaine, Komugi. Cette dernière n’est pas son ami par un hasard sentimentaliste, elle est surtout la seule personne capable de le surpasser dans un domaine précis, le jeu de gun-gi, un jeu fictif inspiré du jeu de go. Elle provoque en lui, par le moyen de ce jeu de stratégie, de grands bouleversements. [url=#_ftn2][2][/url] Le roi mourra d’ailleurs de son empoisonnement en jouant sa dernière partie de gun-gi avec elle.
Pourtant Komugi ne possède aucun attribut de pouvoir, elle est aveugle, semble pauvre et au premier abord idiote. Le personnage est représenté constamment la morve au nez. Elle est l'exact opposé du roi suprême, qu'est l'insecte Meruem. Le nom est ici, non pas ce qui identifie une personne dans un espace social en le faisant appartenir à une famille, une communauté, mais ce qui "humanise" l'insecte roi en le sortant de ce qui le détermine génétiquement.
La possibilité d'une erreur de jugement, sur la nature du roi insecte est très tôt signalée dans le récit, lorsque le héros naïf, Gon, affronte un escadron de fourmis chimères. Après les avoir massacré quasiment sans état d'âme il se justifie en disant grosso modo que des créatures qui n'ont aucune pitié pour des membres de la même espèce qu'elles ne méritent pas de vivre.
Une tournure d’esprit qui caractérise peut-être la possibilité moralement de mener une guerre totale contre un peuple. Ainsi, les japonais qui n’avaient pour leur propre vie aucun respect ne donnaient-il pas le bâton pour se faire battre par une armée américaine plus humaine ?
Le mentor du héros se demande ce qu'il adviendrait si jamais ces créatures s'avéraient capables de compassion pour les autres membres de leur espèce.
Au fur et à mesure de l'avancement du récit ce postulat sera dépassé. Au fil de leurs combats hommes et Kimera ants se rendront compte mutuellement de leurs similitudes... Ce, sans pour autant faire éviter l'inéluctabilité de la mise à mort de l'ennemi, mise à mort qui dés lors se fera dans de sombres émotions, peu communes dans le genre du shounen manga.
Lorsque le héros Gon tue un membre de la garde royale, ce n'est plus l'émotion positive de la victoire et de la performance martiale qui fait surface, mais le malaise suite à un massacre, à une boucherie. La nécessité de cette mise à mort sera d'ailleurs profondément motivée par un désir de vengeance plus que par l'altérité de l'ennemi.
Lorsque l'arme ultime est employée par Netero, pour tuer le roi insecte, ce n'est pas la beauté de l'explosion en forme de rose que l'auteur tente de communiquer mais l'idée que cette puissance est surtout quelque chose de terrifiant, mais quelque chose de terrifiant fait dans l’idée de préserver la race humaine. L'écho avec l'histoire du Japon, avec la réelle bombe atomique, fait prendre corps à cette idée. On se dit que les fourmis chimères ont quelque chose de l'Empire du Japon, condamné pour crimes de guerre après avoir quitté son humanité en s'enfonçant dans la logique de conquête et de domination du monde (le projet de la Grande Asie). A l'image des fourmis chimères les japonais de la première partie de l'ère showa tels que dépeint par les vainqueurs de la seconde guerre et les peuples qu’ils ont agressé, ont tenté d'assimiler ou réduire en « esclavage » ces peuples au nom de l'Empereur... roi d'une fourmilière humaine qui fait corps, ou vit dans le fantasme d'être un seul corps, répondant à une logique quasi génétiquement déterminée : l'esprit, la race japonaise homogène.
Les personnages insectes dans la série sont souvent des êtres qui après leur seconde naissance sous forme d'insectes mutants ont oublié qu'ils étaient humains. Certains d'entre eux retrouvent la mémoire… et parfois même, à la fin du récit, sont acceptés malgré leur nouvelle apparence par la famille humaine qu'ils avaient perdus après avoir été dévorés et assimilés par d’autres fourmis chimères. Une héroïne devenue fourmi chimère, Palm, n'oublie pas son passé et continu à combattre du côté des humains.
Il est même étrangement question au début de la série d'une corruption de la nature première des fourmis chimères par l'assimilation de l'espèce humaine, qui apporte de l'individualisme à l'esprit de corps du système socio/génétique des fourmis, qui se trouve déséquilibré. La notion de "nom" pour désigner un individu qui apparait avec cette nouvelle mutation est aussi mise en cause.
C'est dans le sens de cette logique confuse du devenir humain de la fourmi et du devenir fourmi de l'humain que le roi insecte renonce à sa nature divine, accepte sa mort en remplaçant son titre qui est un don génétique par son nom. Ce changement n'est pas seulement dû à la défaite face au poison de l'arme atomique mais surtout à sa rencontre avec Komugi, la reine aveugle mais invincible du jeu de gun-gi qui dans la logique de l'amour et du mélodrame nous fait presque pardonner au roi sa tyrannie, ses crimes contre l’humanité. L'Empereur dieu, le tenno japonais, lui, en perdant sa nature divine ne deviendra donc qu'un symbole... bien que contrairement au roi insecte de la fiction il n'ait jamais été, biologiquement parlant, un dieu. Sa relation à l'Histoire, vu du point de vue d'une extrême gauche japonaise serait même plus à rapprocher de celle du dictateur tué par le roi insecte. Cependant on ne retient pas de Hirohito de volonté tyrannique, la réelle incarnation du mal, aux yeux d'une histoire dominante, dans le cas de l'Empire du Japon étant le général Tojo.
L'Empereur n'était apparemment qu'un homme, un symbole manipulé par des factions politiques... Il est donc doublement mort, son pouvoir n'étant, même avant la défaite japonaise, que symbolique, sa destitution d'un statut divin est la fin d'une illusion. Une illusion qui semblait pourtant faire l'unité du Japon ou la fiction de cette unité.
L'Empereur comme créature divine, est donc autant un personnage de fiction, de conte, que le roi insecte. La mort de son statut divin importe moins que l'idée qu'il a fini par incarner.
Il n y a ainsi aucun crime à attribuer à un homme qui n'était qu'une illusion du pouvoir, manipulée par le corps militaire. Le véritable insecte menaçant l'humanité était donc le général Tojo. L'Empereur Showa, Hirohito, lui, a vécut dignement de longues années après la fin de la guerre. Le symbole incarné par son corps ayant survécu, en tuant le faux dieu, à l'idée que des crimes ont été commis en son nom.
Meruem comme Hirohito accepte la fin de sa nature divine, il l'accompagne même en lui trouvant bien plus de beauté, voire en l'opposant à la cruauté et à l'amoralité de sa nature divine/insecte. Par la mort du divin, l'humain a vaincu ; et plus que la bombe atomique ou la guerre, c'est le jeu fictionnel ou l'espace symbolique représenté par la partie de gun-gi qui permet au roi dieu de mourir en retrouvant son humanité.
En effet le gun-gi, comme beaucoup de jeux de stratégies, est une représentation de la guerre ou l'adversaire n'est pas l'ennemi mais souvent l'ami. Il a donc mieux valu pour le Japon et son Empereur de perdre contre l'ami américain plutôt que contre l'ennemi américain.
Le général Tojo a perdu contre l'ennemi, il a été condamné à mort. Hirohito a perdu contre un ami, Mc Arthur l'a libéré de l'illusion d'être un dieu sans avoir à lui ôter la vie. L'insecte Tojo est mort suite à la défaite et l'explosion atomique, Hirohito a survécut en gardant avec son humanité retrouvée le puissant symbole qu'est être le tenno, l’Empereur.
Ainsi la fiction Hunter x Hunter offre des perspectives plus belles que sa relecture depuis l'Histoire. La beauté dans le fait d'être roi est surtout dans la tragédie de mourir comme n'importe quel humain, dans les bras de celle qu'on aime lors d’une ultime partie de gun-gi.
[url=#_ftnref][1][/url] Je me réfère ici au texte de (borges) publié dans le numéro deux de la revue Mondes du cinéma : Un roi mort à New York.
[url=#_ftnref][2][/url] L'interprétation qui suit, faite par le forumeur michiru3050, sur des parties de gun-gi entre les deux personnages, dit la nature du changement du roi insecte qui en mourant n'est plus que Meruem, l'être aimé par Komugi : « ...did anybody notice kokoriko (a Gun-gi technique) means King itself?
This technique try to win the game by making King piece isolate. — Cette phase d'une partie de gun-gi entre le roi et Komugi reflète aussi les enjeux de la narration : les héros devaient isoler le roi de sa garde afin de l'éliminer — But komugi tells him this technique is shiro (road to death) a while ago ( episode 104). Isolated king must die. But she shows him a new tactics to save king in episode 135. It means "king doesn't have to die". In reality, king didn't be killed by Netero's nuke attack.
But king counterattacked her and shows that isolated king must die after all (by poison). Komugi finds a new counterattack and said "I'll go with you". King is not alone anymore. Meruem tells her he can't win even once (He couldn't beat kokoriko). It means kokoriko is not shiro anymore. She saved the isolated king.
The black screen at the end has a couple meanings :
The dying king has lost even his sight. His mother named him Meruemu as "Light shining on everything". It's stated that "His en — le en est une forme de pouvoir magique — shined into the palace as if it's sunshine" and "He manipulated light particles to search Palm —Palm, une des ennemis du roi, tenait en otage Komugi— in a house" a while ago. He got a god-like light power at that moment. But black screens suggests that he doesn't have any light now. This is a view that Komugi was seeing from the beginning. She couldn't see any light. To her, he was just Meruem. After all, those black screens show us that he lost everything but gained what he trully wanted. He didn't need any soldiers, palaces, countries, power, strength, even his sight(as Komugi). He just wanted to play Gun-gi with Komugi.
This is the same to her too. She had nothing besides Gungi. Nobody loved her and couldn't play Gungi as well as she did. She was lonely Gun-gi King (Queen?). But she gained Meruem. That's why she cryed when he counterattacked her new kokoriko. She once needed to create and kill tactics on Gungi by herself. But she gained the perfect opponent and can create tactics with him(I guess to create
tactics suggests to create a baby as she said kokoriko is her baby.)
The one "Light shines on everything" loved (and was loved by) was a blind girl. What a story!
They started a new(the last) game in darkness.
"1-5-1 king".
"9-5-1 king".
Then it was stopped. These two king pieces don't go anywhere anymore. Two kings (King of living things and Gungi King) are together forever. »
Meruem/la mort d’un roi
Commençons par isoler trois motifs de la narration de l’arc kimera ants du manga Hunter x Hunter : une explosion atomique en forme de rose, un roi insecte suprême, un peuple d'humains hypnotisé que les héros tentent de libérer en affrontant le roi insecte et sa garde.
Je relierai, plus loin dans le texte, ces motifs à une conscience de l’Histoire du Japon.
L'histoire de base est simple, une espèce mutante d'insectes, les fourmis chimères, qui évoluent en s'appropriant l'ADN des animaux dont elles se nourrissent, fini par assimiler l'humain et acquérir son intelligence et ses pouvoirs. Les premiers épisodes de cet arc se concentrent sur l’idée que l'homme est devenu une proie et n'est plus au sommet de la chaîne alimentaire. Dés lors l'affrontement mortel entre les deux espèces semble inévitable.
Les héros perçoivent dés le départ la menace et tentent de s'approcher de la fourmilière d'où la prolifération de cette nouvelle mutation commence. Le danger devient de plus en plus prégnant avec la naissance de la garde royale, puis du roi.
Les fourmis chimères se nourrissent non seulement de chair humaine, qui leur semble particulièrement riche, mais sélectionnent aussi des humains pour les transformer en créatures de la même espèce qu'elles.
Mais très vite le combat frontal attendu dérive vers d'autres stratégies et questionnements. Le fait que les fourmis chimères aient une part humaine dans leur ADN empêche les deux espèces, les deux camps qui s'affrontent de percevoir l'ennemi/la proie en face comme une pure altérité. Les affrontements physiques et stratégiques deviennent des affrontements psychologiques, ce qui entraine des déplacements d'individus d'un camp à un autre... l'impureté à la base de la mutation des fourmis chimères en étant l'origine.
Le roi, accompagné de sa garde, quitte la fourmilière. Il laisse sa mère, reine mourante suite à l’accouchement difficile, derrière lui, et s'empare du palais d'une nation humaine dirigée par un dictateur.
Alors, sans révéler son réel visage, il règne derrière le corps mort du dictateur. Le cadavre est manipulé, telle une marionnette, par un des membres de la garde du roi. Les fourmis chimères s’adressent à la nation via les médias et l’organe de propagande du dictateur. Un second garde royal se charge lui d’hypnotiser l'ensemble de la nation.
On sent là une forme de métaphore, du moins un semblant de volonté de l'auteur du manga de créer un « conte », une « fable » avec une résonnance politique, et ce, bien que l'aspect shounen (manga pour jeune garçon) ne soit à aucun moment dissipée, sans qu'il y ait à aucun moment le moindre doute sur la nature du produit. Le roi insecte est en effet un décalque du méchant Cell du manga Dragon Ball... Il est l'un des nombreux clins d'œil de la série Hunter x Hunter à ce mètre étalon du shounen manga, ou pour être plus précis du nekketsu. Cell, en plus d'avoir un design similaire au roi insecte, s'approprie aussi la force des personnages qu'il absorbe (mange).
On a donc au fond, dans ce canevas, le contexte classique du nekketsu ou de la plus part des récits héroïques se basant sur l'action, l'affrontement direct et guerrier entre deux camps. Faire de l'ennemi une créature inhumaine rend le fait d'arme d'autant plus nécessaire ; et la Justice, la Morale, avancent évidemment à visage humain.
L'idée de « la fable », du « conte », elle, persiste malgré tout dans les partis pris narratifs de l'auteur. Il serait intéressant donc, avant de continuer, de tenter de voir en quoi cet arc de Hunter x Hunter a une résonnance avec ce genre ancestral que l’on nomme le conte.
Déjà, il s’agit de deux genres, le shounen et le conte, qui semblent d’abord s’adresser aux enfants, du moins à un public non adulte qui porte peu d’intérêt à la vraisemblance. Que des fourmis à tête de lion ou de pieuvre puissent parler japonais, réfléchir à la portée morale de leurs actes et écouter de la musique rock, peu importe… Cette tendance à anthropomorphiser des êtres non humain, animaux ou insectes est donc l’autre point commun, bien que cette anthropomorphisation soit dans cette série due à une mutation génétique d’une espèce fictionnelle de fourmis. Cette espèce résonne d’ailleurs particulièrement avec l’idée de la fable ; bien que de la fourmi de la fable d’Esope à la fourmi du manga de Togashi Yoshihiro, il y ait tout un monde. Mais derrière ce carnaval de créatures aussi diverses qu’unies dans l’anthropomorphisme, se cache le récit des relations de pouvoir qui composent la réalité sociopolitique, et la possibilité de dépasser le constat d’une injustice de ces relations par la morale.
Ainsi, dans le sens du conte et de la fable, on peut se dire que le roi fourmi est aussi quelque chose du dictateur. Il est la métaphore d'une nature qui pousse un homme à exercer sa tyrannie et aussi/ou plutôt le fantasme qu'un tel homme pourrait se faire de sa "puissance". Le dictateur est un roi tyran/dieu raté, une persistance archaïque [url=#_ftn1][1][/url]qui se force, joue énormément pour faire croire au théâtre de sa supposée nature supérieure.
Mais je m'éloigne peut-être trop en dégageant cette idée de la dynamique de la série. Celle-ci semble vaguement s'intéresser au potentiel symbolique de cet élément qu'elle met pourtant en jeu. C'est un fait assez décevant, comme nous sommes dans un shounen manga le roi insecte est « réellement » le plus puissant des êtres vivants, et la série n'est ainsi que difficilement lisible comme un « conte » bien qu'elle en porte la trace. Le spectateur attend le déploiement de puissance pour ce qu'il est, la capacité de détruire le plus grand nombre d'ennemis, par la ruse, la magie ou la force brute.
La fin du récit de l’arc fait revenir le dictateur au devant de l’image, ou plutôt, comme souvent dans le fantastique, l’événement auquel nous avons été invité est rationnalisé par « la réalité sociale » de l’univers de fiction… un univers pourtant du genre fantasy, qui fonctionne donc comme un monde parallèle au notre. Sa réalité sociale est un reflet de la notre avec ses dictateurs, ses grandes villes, où règnent les inégalités sociales, et ses médias. Ces derniers donnent à voir les événements sous une forme différente de celle qui nous est apparue. Le dictateur aurait, d’après les news, dans un coup de folie fait massacrer une partie de « son peuple » avant de se donner la mort.
Dans la logique de la série il est évident que les médias se trompent ou cachent la vérité en connivence avec les politiques : le fait qu'un insecte mutant aux supers pouvoirs s'est emparé du trône du dictateur et a fait massacrer une partie de la population.
La logique de la fable et du conte, elle, ne trancherait pas aussi nettement... Il y a chez un dictateur quelque chose d'un insecte, mais sans les supers pouvoirs.
En continuant malgré tout dans le sens d'un semblant de fable politique, les fourmis chimères apparaissent aussi, dans un subtil ou confus renversement, comme l'équivalent des araignées géantes du film Starship Troopers… les héros envoyés les tuer semblent s’être battu contre des êtres qu’ils ont, par un processus idéologique, déshumanisé. Ainsi, la morale de l'arc des kimera ants se rapproche de celle du film de Verhoeven, et ce, bien qu'il n y ait là rien de satirique, au contraire, le plus grand sérieux règne durant toute la narration. Les supers pouvoirs sont des supers pouvoirs, les insectes mutants des insectes mutants, aucune symbolique forte ne se cache au sein des idées de la série. Du moins lorsqu'on ne tente pas de faire jouer les éléments déployés dans cette fiction avec un contexte plus large ; une conscience de l'Histoire de la nation d'origine de ce manga, par exemple.
En effet, qu'est-ce que tout cela a donc de japonais?
Je reviens aux trois motifs isolés en début de texte, et révèle la conclusion de l'histoire : les humains malgré le fait qu'ils aient envoyés quelques uns de leurs plus puissants représentants se trouvent dépassés par la puissance du roi insecte et de sa garde. Ils ne trouvent comme issue que l'emploi d'une arme terrible, une bombe atomique qui lors de son explosion semble avoir la forme d'une rose. Au champignon de la réelle bombe atomique le manga a substitué la beauté de la rose.
Cette bombe « atomique » employée pour tuer un être suprême, le roi des fourmis chimères, semble d'abord avoir échoué. Le roi sort de cette explosion vivant. La suite de la narration révèle cependant que malgré le fait qu'il ait survécut à l'explosion un poison contenu dans la bombe le tuera à petit feu.
Là, semble apparaître quelque chose de la conscience historique japonaise : une bombe atomique et un roi insecte semi divin.
Le moment de l'histoire du japon où une bombe atomique a tué un roi insecte semi divin n'existe a priori pas, mais le seul pays à avoir subit une attaque atomique est le Japon.
Il est aussi étrange de se dire, à partir de ce texte, que le peuple japonais a souvent été comparé à une fourmilière. Des fourmis aussi travailleuses que celles de la fable d’Esope.
Dés lors faut-il voir dans la fourmi chimère une image d'un Japon impérial inhumain hanté par une humanité post et pré-empire du Japon?
Je m'avance peut-être déjà trop, et sur interprète certainement....
Quoiqu'il en soit, suite à la défaite, l'Empereur du Japon jusqu'alors considéré comme un être divin, est déchu par la nouvelle constitution démocratique de cet état légendaire, pour ne garder que sa symbolique.
Le roi insecte, lui, n'est rien d'un puissant symbole, sa puissance « divine » est biologique, c'est un super être, apparemment dans la série le plus puissant être vivant sur terre. Son règne ne doit rien au symbolique ou au religieux.
L'opposition principale entre l'ordre humain et celui des fourmis chimères est d'ailleurs présenté dans la série dans ce sens là : contrairement au dictateur qu'il tue et remplace, la puissance du roi insecte ne doit rien aux circonstances, aux jeux de pouvoir et symbolique, son règne est naturel, sa place comme roi est génétiquement déterminée. L'espèce humaine qu'il menace est menacée dans l'ordre naturel des choses. Le roi fait d'ailleurs remarquer dans une ligne de dialogue qu'un être humain ne culpabilise pas après avoir mangé du cochon ou de la volaille.
Cependant la narration de la série consiste au fur et à mesure que la fin approche à humaniser le roi et les fourmis chimères ou plutôt à faire de leur altérité plus qu'une pure puissance de mort. Le roi n'inspire plus juste le danger de mort dû à sa puissance et à sa place de super prédateur mais aussi le sublime de son titre, surtout lorsqu'il fait face à ses limites et aux questionnements qu'elles provoquent. En plus d'être la plus puissante des créatures biologiques, le sommet de la chaîne alimentaire, il est un être doué d'une grande intelligence, intelligence qui trouve son illustration la plus évidente dans ses victoires face aux plus grands champions de jeux de stratégies, qu'il invite pour occuper sa vie de palais et fait tuer après leur défaite. Mais il est surtout dans les derniers épisodes un être qui apprend à être magnanime, qui ne voit plus dans la terreur qu’il inspire une finalité, ce qui fini par faire croire que les héros se sont, en partie, trompés sur sa réelle nature.
Un humain venu le défier, Netero, le chef du groupe de héros, lui promet de lui apprendre le nom que lui a laissé la reine, sa mère, en mourant. Apprendre son nom, Meruem, vu qu'il ne se connaissait et ne se définissait que par son titre, celui de roi, sera l'une des raisons de combattre cet humain avec qui il tente pourtant d’abord de négocier un nouveau « statut » pour leurs deux espèces. Leur affrontement finira par l’explosion de la bombe atomique que portait en lui Netero.
Le roi ayant appris le nom que lui a donné celle qui l'a engendré avant de mourir, renoncera même, dans les derniers épisodes, à utiliser sa force. Le but unique qui se dessinera, dans les derniers épisodes de l’arc, sera dés lors, pour lui, de retrouver dans les décombres de la bataille, et malgré une amnésie due au choc de l’explosion atomique, sa seule amie, une humaine, Komugi. Cette dernière n’est pas son ami par un hasard sentimentaliste, elle est surtout la seule personne capable de le surpasser dans un domaine précis, le jeu de gun-gi, un jeu fictif inspiré du jeu de go. Elle provoque en lui, par le moyen de ce jeu de stratégie, de grands bouleversements. [url=#_ftn2][2][/url] Le roi mourra d’ailleurs de son empoisonnement en jouant sa dernière partie de gun-gi avec elle.
Pourtant Komugi ne possède aucun attribut de pouvoir, elle est aveugle, semble pauvre et au premier abord idiote. Le personnage est représenté constamment la morve au nez. Elle est l'exact opposé du roi suprême, qu'est l'insecte Meruem. Le nom est ici, non pas ce qui identifie une personne dans un espace social en le faisant appartenir à une famille, une communauté, mais ce qui "humanise" l'insecte roi en le sortant de ce qui le détermine génétiquement.
La possibilité d'une erreur de jugement, sur la nature du roi insecte est très tôt signalée dans le récit, lorsque le héros naïf, Gon, affronte un escadron de fourmis chimères. Après les avoir massacré quasiment sans état d'âme il se justifie en disant grosso modo que des créatures qui n'ont aucune pitié pour des membres de la même espèce qu'elles ne méritent pas de vivre.
Une tournure d’esprit qui caractérise peut-être la possibilité moralement de mener une guerre totale contre un peuple. Ainsi, les japonais qui n’avaient pour leur propre vie aucun respect ne donnaient-il pas le bâton pour se faire battre par une armée américaine plus humaine ?
Le mentor du héros se demande ce qu'il adviendrait si jamais ces créatures s'avéraient capables de compassion pour les autres membres de leur espèce.
Au fur et à mesure de l'avancement du récit ce postulat sera dépassé. Au fil de leurs combats hommes et Kimera ants se rendront compte mutuellement de leurs similitudes... Ce, sans pour autant faire éviter l'inéluctabilité de la mise à mort de l'ennemi, mise à mort qui dés lors se fera dans de sombres émotions, peu communes dans le genre du shounen manga.
Lorsque le héros Gon tue un membre de la garde royale, ce n'est plus l'émotion positive de la victoire et de la performance martiale qui fait surface, mais le malaise suite à un massacre, à une boucherie. La nécessité de cette mise à mort sera d'ailleurs profondément motivée par un désir de vengeance plus que par l'altérité de l'ennemi.
Lorsque l'arme ultime est employée par Netero, pour tuer le roi insecte, ce n'est pas la beauté de l'explosion en forme de rose que l'auteur tente de communiquer mais l'idée que cette puissance est surtout quelque chose de terrifiant, mais quelque chose de terrifiant fait dans l’idée de préserver la race humaine. L'écho avec l'histoire du Japon, avec la réelle bombe atomique, fait prendre corps à cette idée. On se dit que les fourmis chimères ont quelque chose de l'Empire du Japon, condamné pour crimes de guerre après avoir quitté son humanité en s'enfonçant dans la logique de conquête et de domination du monde (le projet de la Grande Asie). A l'image des fourmis chimères les japonais de la première partie de l'ère showa tels que dépeint par les vainqueurs de la seconde guerre et les peuples qu’ils ont agressé, ont tenté d'assimiler ou réduire en « esclavage » ces peuples au nom de l'Empereur... roi d'une fourmilière humaine qui fait corps, ou vit dans le fantasme d'être un seul corps, répondant à une logique quasi génétiquement déterminée : l'esprit, la race japonaise homogène.
Les personnages insectes dans la série sont souvent des êtres qui après leur seconde naissance sous forme d'insectes mutants ont oublié qu'ils étaient humains. Certains d'entre eux retrouvent la mémoire… et parfois même, à la fin du récit, sont acceptés malgré leur nouvelle apparence par la famille humaine qu'ils avaient perdus après avoir été dévorés et assimilés par d’autres fourmis chimères. Une héroïne devenue fourmi chimère, Palm, n'oublie pas son passé et continu à combattre du côté des humains.
Il est même étrangement question au début de la série d'une corruption de la nature première des fourmis chimères par l'assimilation de l'espèce humaine, qui apporte de l'individualisme à l'esprit de corps du système socio/génétique des fourmis, qui se trouve déséquilibré. La notion de "nom" pour désigner un individu qui apparait avec cette nouvelle mutation est aussi mise en cause.
C'est dans le sens de cette logique confuse du devenir humain de la fourmi et du devenir fourmi de l'humain que le roi insecte renonce à sa nature divine, accepte sa mort en remplaçant son titre qui est un don génétique par son nom. Ce changement n'est pas seulement dû à la défaite face au poison de l'arme atomique mais surtout à sa rencontre avec Komugi, la reine aveugle mais invincible du jeu de gun-gi qui dans la logique de l'amour et du mélodrame nous fait presque pardonner au roi sa tyrannie, ses crimes contre l’humanité. L'Empereur dieu, le tenno japonais, lui, en perdant sa nature divine ne deviendra donc qu'un symbole... bien que contrairement au roi insecte de la fiction il n'ait jamais été, biologiquement parlant, un dieu. Sa relation à l'Histoire, vu du point de vue d'une extrême gauche japonaise serait même plus à rapprocher de celle du dictateur tué par le roi insecte. Cependant on ne retient pas de Hirohito de volonté tyrannique, la réelle incarnation du mal, aux yeux d'une histoire dominante, dans le cas de l'Empire du Japon étant le général Tojo.
L'Empereur n'était apparemment qu'un homme, un symbole manipulé par des factions politiques... Il est donc doublement mort, son pouvoir n'étant, même avant la défaite japonaise, que symbolique, sa destitution d'un statut divin est la fin d'une illusion. Une illusion qui semblait pourtant faire l'unité du Japon ou la fiction de cette unité.
L'Empereur comme créature divine, est donc autant un personnage de fiction, de conte, que le roi insecte. La mort de son statut divin importe moins que l'idée qu'il a fini par incarner.
Il n y a ainsi aucun crime à attribuer à un homme qui n'était qu'une illusion du pouvoir, manipulée par le corps militaire. Le véritable insecte menaçant l'humanité était donc le général Tojo. L'Empereur Showa, Hirohito, lui, a vécut dignement de longues années après la fin de la guerre. Le symbole incarné par son corps ayant survécu, en tuant le faux dieu, à l'idée que des crimes ont été commis en son nom.
Meruem comme Hirohito accepte la fin de sa nature divine, il l'accompagne même en lui trouvant bien plus de beauté, voire en l'opposant à la cruauté et à l'amoralité de sa nature divine/insecte. Par la mort du divin, l'humain a vaincu ; et plus que la bombe atomique ou la guerre, c'est le jeu fictionnel ou l'espace symbolique représenté par la partie de gun-gi qui permet au roi dieu de mourir en retrouvant son humanité.
En effet le gun-gi, comme beaucoup de jeux de stratégies, est une représentation de la guerre ou l'adversaire n'est pas l'ennemi mais souvent l'ami. Il a donc mieux valu pour le Japon et son Empereur de perdre contre l'ami américain plutôt que contre l'ennemi américain.
Le général Tojo a perdu contre l'ennemi, il a été condamné à mort. Hirohito a perdu contre un ami, Mc Arthur l'a libéré de l'illusion d'être un dieu sans avoir à lui ôter la vie. L'insecte Tojo est mort suite à la défaite et l'explosion atomique, Hirohito a survécut en gardant avec son humanité retrouvée le puissant symbole qu'est être le tenno, l’Empereur.
Ainsi la fiction Hunter x Hunter offre des perspectives plus belles que sa relecture depuis l'Histoire. La beauté dans le fait d'être roi est surtout dans la tragédie de mourir comme n'importe quel humain, dans les bras de celle qu'on aime lors d’une ultime partie de gun-gi.
[url=#_ftnref][1][/url] Je me réfère ici au texte de (borges) publié dans le numéro deux de la revue Mondes du cinéma : Un roi mort à New York.
[url=#_ftnref][2][/url] L'interprétation qui suit, faite par le forumeur michiru3050, sur des parties de gun-gi entre les deux personnages, dit la nature du changement du roi insecte qui en mourant n'est plus que Meruem, l'être aimé par Komugi : « ...did anybody notice kokoriko (a Gun-gi technique) means King itself?
This technique try to win the game by making King piece isolate. — Cette phase d'une partie de gun-gi entre le roi et Komugi reflète aussi les enjeux de la narration : les héros devaient isoler le roi de sa garde afin de l'éliminer — But komugi tells him this technique is shiro (road to death) a while ago ( episode 104). Isolated king must die. But she shows him a new tactics to save king in episode 135. It means "king doesn't have to die". In reality, king didn't be killed by Netero's nuke attack.
But king counterattacked her and shows that isolated king must die after all (by poison). Komugi finds a new counterattack and said "I'll go with you". King is not alone anymore. Meruem tells her he can't win even once (He couldn't beat kokoriko). It means kokoriko is not shiro anymore. She saved the isolated king.
The black screen at the end has a couple meanings :
The dying king has lost even his sight. His mother named him Meruemu as "Light shining on everything". It's stated that "His en — le en est une forme de pouvoir magique — shined into the palace as if it's sunshine" and "He manipulated light particles to search Palm —Palm, une des ennemis du roi, tenait en otage Komugi— in a house" a while ago. He got a god-like light power at that moment. But black screens suggests that he doesn't have any light now. This is a view that Komugi was seeing from the beginning. She couldn't see any light. To her, he was just Meruem. After all, those black screens show us that he lost everything but gained what he trully wanted. He didn't need any soldiers, palaces, countries, power, strength, even his sight(as Komugi). He just wanted to play Gun-gi with Komugi.
This is the same to her too. She had nothing besides Gungi. Nobody loved her and couldn't play Gungi as well as she did. She was lonely Gun-gi King (Queen?). But she gained Meruem. That's why she cryed when he counterattacked her new kokoriko. She once needed to create and kill tactics on Gungi by herself. But she gained the perfect opponent and can create tactics with him(I guess to create
tactics suggests to create a baby as she said kokoriko is her baby.)
The one "Light shines on everything" loved (and was loved by) was a blind girl. What a story!
They started a new(the last) game in darkness.
"1-5-1 king".
"9-5-1 king".
Then it was stopped. These two king pieces don't go anywhere anymore. Two kings (King of living things and Gungi King) are together forever. »
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