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Los Olvidados, The Selfish Giant, de la pauvreté et des enfants dans les films

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Message par adeline Dim 16 Mar 2014 - 20:22

J'ai vu hier soir Los Olvidados, que je n'avais encore jamais vu. Énorme choc, comme le savent ceux qui l'ont vu.

J'ai pensé, ensuite, à The Selfish Giant. Ce dernier film m'avait paru immensément violent, d'une dureté innommable à l'égard des gamins, injuste et insupportable (c'est une partie de mon sentiment sur le film, que je trouve aussi très beau et très fort).

Los Olvidados est bien plus dur, les gamins y meurent également, les scènes difficilement soutenables y sont plus nombreuses, l'espoir également absent. Pourtant, je n'ai éprouvé aucun sentiment de rejet à l'égard du film de Bunuel. Tout m'a semblé juste, nécessaire et évident, révoltant et inique, mais je n'ai jamais eu l'impression que le film était injuste avec les gamins. Il montrait que la vie l'était, mais lui-même ne l'était pas.

À quoi cela peut-il tenir ?

Dans le film anglais, la plus grande injustice, la mort de Swifty, qui survient comme un coup de massue gigantesque dont on sent la volonté de marquer, de faire effet, est une mort gratuite. La situation, la société a voulu que les gamins se retrouvent à cet endroit-là à ce moment-là, mais c'est un coup de malchance qui a fait que le câble a touché Swifty. Il aurait aussi bien pu ne pas mourir, personne n'a voulu le tuer. C'est un coup du sort, le hasard, le destin, la faute à pas de chance. Et celui qui en porte toute la culpabilité est justement celui qui aimait le plus Swifty, Arbor. Du coup, le film se transforme lors de la dernière partie en une sorte de drame de la culpabilité avec un seul horizon moral, celui de pardon que la mère peut accorder à Arbor.

Dans le film de Bunuel, on est loin de cet univers. Le gamin qui tue, Jaibo, celui qui fait le mal, est un gamin des rues à la même enseigne que les autres. Sans amour, sans argent, seul. Si c'est bien son geste qui est à l'origine des morts, s'il en est bien coupable, cela ne veut pas dire que le film ne montre pas de manière très forte que c'est la société, le contexte, la situation qui sont responsables de ces drames. Aucune mise en scène de l'effet, de la surprise n'intervient. La mort n'est pas là choquante, elle est l'aboutissement ultime des violences que les gamins subissent et font subir.

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Message par Eyquem Mar 18 Mar 2014 - 13:02

Hello Adeline,
Adeline a écrit:Du coup, le film se transforme lors de la dernière partie en une sorte de drame de la culpabilité avec un seul horizon moral, celui de pardon que la mère peut accorder à Arbor.
Los Olvidados aurait pu prendre la tournure d'un drame de la culpabilité. Bunuel avait tourné une autre fin: au lieu que ce soit Pedro qui meure, c'était Jaïbo qui tombait. Après quoi, Pedro retournait au centre-école et tout rentrait dans l'ordre; l'éducateur avait eu raison de faire confiance à Pedro, contre les partisans de la répression; les choses n'allaient pas si mal, sinon que le pauvre Pedro allait devoir vivre avec la mort de Jaïbo sur la conscience.

Ca aurait été vraiment très très différent de l'effet que produit le film, dans la version qu'on connaît.

Bunuel avait tourné cette fin pour rassurer son producteur, horrifié par les scènes que Bunuel avait tournées, qui donnaient une si mauvaise image du Mexique. Si la fin voulue par Bunuel l'a emporté, c'est parce que le film a eu du succès à Cannes, où Bunuel a reçu le prix de la mise en scène. (Tesson, "L'autre fin de Los Olvidados", Cdc 546)
Tout le monde avait oublié cette 2e fin, avant qu'on retombe par hasard sur les bobines, presque 50 après, en 1996.

(J'aime bien ce genre d'histoire: ça rappelle à quel point les grands films, ça tient presque du miracle qu'ils soient parvenus à se frayer un chemin jusqu'à nous.)
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Message par adeline Mar 18 Mar 2014 - 21:50

Ah mais c'est incroyable cette histoire ! Je connaissais l'existence de l'autre fin, mais je n'imaginais pas qu'elle était ainsi le miroir moral de la fin conservée.

Les deux films ont aussi en commun le transport du corps de l'enfant mort, j'y pense maintenant. Mais chez Bunuel, c'est le dernier plan du film, qui se termine, implacable, sur le corps de Pedro qui roule. Dans The Selfish Giant, je me souviens m'être demandé comment le film pouvait continuer après cet événement. En un sens à la fois positif (la vie doit bien continuer, il y a toujours quelque chose après, quelque chose à vivre, aussi dur cela soit-il) et négatif (c'est impossible de continuer à raconter une "histoire" après un tel choc).
On trouve encore d'autres choses, mais qui sont dans un film comme en négatif de l'autre. La relation avec la mère. La mère de Pedro le rejette alors qu'il est en constante demande d'amour et de reconnaissance. Dans The Selfish Giant, c'est l'inverse : la mère d'Arbor est sa première alliée, elle le défend contre la police. C'est étrange de se rendre compte de cette inversion d'une époque à l'autre : la famille est rejet, impossible communauté pour les enfants chez Bunuel, quand elle est dans l'Angleterre de 2013 le seul espace accueillant pour eux.
L'école/institution : chez Bunuel, elle est un lieu hors du monde, protecteur, le lieu où Pedro pourrait vivre enfin hors de la violence de la rue. Dans The Selfish Giant, elle accueille au contraire la violence de l'extérieure et exclue les deux gamins.
Enfin on retrouve la figure de l'adulte qui se sert des enfants, le ferrailleur en Angleterre, le musicien aveugle au Mexique. L'un s'amende, l'autre pas.

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Message par adeline Jeu 20 Mar 2014 - 19:53

La critique de J. Doniol-Valcroze dans les Cahiers, n°7 de décembre 1951

Spoiler:

C'est un beau texte, qui rend compte de ce que je ressens également, l'impression qu'il est très difficile de parler du film (de même qu'il est très difficile de parler de Las Hurdes).
En rapport avec ce qui me préoccupe, il dit de Bunuel que c'est l'un des seuls "moralistes" de l'écran à ne pas faire sourire. Alors justement qu'il ne fait pas de morale, qu'il met à bas les couples habituels de la moralité (qui veut qu'une mère ne puisse être indigne, etc.), si je ne me trompe pas.

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