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Harvey Milk

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Message par Leurtillois Lun 9 Mar 2009 - 22:15

Largo a écrit:
Il semble ici alterner entre vraies et fausses images d'archives, brouillant la frontière entre image télévisée d'époque et reconstitution fictionnelle.

Est-ce que c'est moi, ou alors la distinction entre vraies et fausses images d'archives n'est pas toujours évidente à faire, sur le moment ? ça m'a un peu perturbé, dans la mesure où je ne savais pas toujours ce qu'il fallait en penser.
Quoiqu'il en soit, j'ai trouvé que l'utilisation d'images vieillies (volontairement ou pas) est dans l'ensemble assez efficace. Par exemple au tout début du film, les premières images, d'une descente dans une boîte gay sont assez fortes - bien qu'altérées par le long générique de début, par dessus, ce que j'ai trouvé très dommage... du mal à comprendre ce choix...
Le film m'a plu, j'en garde pour l'instant le souvenir d'une belle simplicité. Cependant il m'a semblé qu'il y avait une sorte de déséquilibre entre le début, disons les vingt premières minutes, et le reste du film. Le début, à l'exception du premier plan sur HM qui inaugure la voix off, est traversé par une vraie liberté, celle, intérieure d'HM : c'est sa rencontre avec son premier amoureux, le vrai (désolé mais j'oublie souvent les noms des personnages), leur première nuit ensemble et leur installation à S Francisco. Scènes d'exposition en somme, où GVS nous apparaît à la fois très brillant et très sobre. J'ai été très marqué par exemple par une succession de deux plans, quand le couple s'embrasse sur le trottoir de leur boutique, juste après la scène qui nous présente le tenancier du bar d'en face qui s'essuie avec un mouchoir la main qui a serré celle d'HM : c'est quand, juste après un plan du début du baiser avec la caméra posée prosaïquement en face du couple, il y a ce plan aérien et lointain, comme s'ils étaient filmés par une caméra de vidéiosurveillance. Et puis il y a la musique, à chaque fois qui fait vraiment plaisir (les bandes originales de GVS c'est quelque chose non? Je pense aux réinstrumentalisations de Nino Rota dans PP...) Enfin bref. Voilà, et après ce début éblouissant, j'ai trouvé que le film perdait de cette poésie (ou je ne sais pas comment appeler ça...liberté par exemple), qu'il n'arrivait pas toujours à prendre un peu de hauteur sur son aspect didactique (par ailleurs efficace), et enfin que le film s'appuyait trop sur le langage, les mots. Je dis ça parce qu'il y avait des scènes où je n'arrivais pas toujours à bien lire les sous-titres en même temps que j'essayais de voir ce qui se passait dans le cadre.

Leurtillois

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Message par Borges Mar 10 Mar 2009 - 11:27

Il m'arrive souvent de me demander ce que vous faites quand vous êtes supposés regarder un film.
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Message par Invité Mar 10 Mar 2009 - 21:29

Borges a écrit:Il m'arrive souvent de me demander ce que vous faites quand vous êtes supposés regarder un film.

Salut,

Souvent j'en regarde un autre, I've said it before..

Eyquem a écrit:(salut Marco : je crois que JM fait juste référence au texte de Burdeau sur Mesrine et Coluche.)

oui, absolument.

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Message par Borges Mer 11 Mar 2009 - 11:06

JM a écrit:
Borges a écrit:Il m'arrive souvent de me demander ce que vous faites quand vous êtes supposés regarder un film.

Salut,

Souvent j'en regarde un autre, I've said it before..

Oui, le cinéma peut être ce que vous désirez qu'il soit.

"Essayez de réellement voir ce que vous voyez."

(Badiou, second manifeste pour la philosophie, 13)
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Message par Largo Jeu 12 Mar 2009 - 17:21

Leurtillois a écrit:
Largo a écrit:
Il semble ici alterner entre vraies et fausses images d'archives, brouillant la frontière entre image télévisée d'époque et reconstitution fictionnelle.

Est-ce que c'est moi, ou alors la distinction entre vraies et fausses images d'archives n'est pas toujours évidente à faire, sur le moment ? ça m'a un peu perturbé, dans la mesure où je ne savais pas toujours ce qu'il fallait en penser.
Quoiqu'il en soit, j'ai trouvé que l'utilisation d'images vieillies (volontairement ou pas) est dans l'ensemble assez efficace. Par exemple au tout début du film, les premières images, d'une descente dans une boîte gay sont assez fortes - bien qu'altérées par le long générique de début, par dessus, ce que j'ai trouvé très dommage... du mal à comprendre ce choix....

Oui, d'accord avec toi. Le générique est très prenant. Ce sont de fausses images "amateur", la transition avec PP est évidente.

Ce que dit Marco du rapport des gays à la télévision semble aller dans le sens du film, qui montre bien comment le rapport de force passe par ce média là. D'abord, la vieille conservatrice semble monopoliser la parole à la télévision, puis une fois élu, Milk est invité sur un plateau de TV et n'hésite pas à parler de son statut d'homosexuel en ayant recours à la blague et l'humour, comme dans ses meetings ou sa vie privée.

Sinon, GVS fait son film sur les gays, Spike Lee sur les noirs comme Bouchareb sur les tirailleurs. Contrairement aux autres, je parle des intentions, GVS ne donne pas l'impression de faire un film "contre" ou pour la reconnaissance de droits. Ca ressemble plutôt à un témoignage de reconnaissance, une forme d'hommage rendu au héros.

Du coup, ce serait quand même bien si GVS pouvait nous parler aussi, un jour, de la condition des gays aujourd'hui aux USA. Il y a des régions où les mentalités n'ont pas du beaucoup évoluer depuis les années 70-80, non ?
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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 10:50

Oui Largo. La visibilité (dans la grande ville, à la télévision, les discours, …), c’est quand même tout le sujet du film. Si j’ai bien vu ce que j’ai vu, entendu ce que j’ai entendu.


Les bars ouverts sur la rue, avec terrasses bondées et vitres arborant le drapeau arc-en-ciel, ont remplacé les bars cachés dans les petites rues et dont les lourdes portes étaient munies d’un judas qui permettait à l’établissement de se protéger contre toute agression ou invasion indésirable. C’est donc toute l’histoire de cette sociabilité et de ce « monde » que les homosexuels ont construits au cours du siècle qu’il faut prendre en considération aujourd’hui si l’on veut analyser ce qu’est la « communauté » gay, dont la simple évocation semble faire frémir d’horreur les bien-pensants de toutes obédiences. Car cette sociabilité, dont il est si facile aujourd’hui de dénoncer les effets d’uniformité ou l’envahissement par la commercialisation, a d’abord eu, et a toujours, une valeur émancipatrice, par la possibilité qu’elle offre aux jeunes gays (et aux jeunes lesbiennes) d’accélérer le processus d’acceptation de soi. (1)
L’effet de liberté instauré par la visibilité homosexuelle s’étend probablement jusqu’à ceux qui ne participent pas à cette « culture », soit parce qu’ils ne le peuvent pas (ils n’habitent pas dans une grande ville), soit parce qu’ils ne le veulent pas (ils choisissent de se tenir à l’écart du « milieu » gay). Il ne fait aucun doute que la vie des gays et des lesbiennes dans leur ensemble a évolué, au cours des vingt dernières années, de manière globale mais différenciée selon leur degré de proximité ou d’éloignement avec les lieux de la vie subculturelle, du fait de la visibilité d’un certain nombre d’entre eux. Car l’important est que l’homosexualité soit dicible et montrable. Un gay – ou un couple gay – n’a pas besoin d’appartenir au « milieu gay » pour profiter des conquêtes obtenues par la visibilité et l’affirmation homosexuelles : il est en effet possible, pour un nombre sans cesse croissant d’entre eux, de vivre plus sereinement, de ne plus dissimuler totalement ce qu’ils sont.

Didier Eribon, Réflexions sur la question gay, 1999, pp.47-49.

(1) Les enquêtes menées à Chicago par Gilbert Herdt et Andrew Boxer montrent comment la visibilité collective dans les grandes villes a permis aux jeunes gays et lesbiennes d’assumer de plus en plus tôt leur homosexualité.

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 11:48

L’erreur que je semble déceler ici ou là (comparaison avec le Che, repenser éventuellement le rôle de la tv dans l’œuvre de GVS, le combat d'un homme contre la société…) est une tendance à généraliser l’idée de révolution, de combat politique, de lutte d’une minorité (ou le rôle d'un média). On ne devrait pas ici, je pense, faire abstraction de la spécificité du mouvement gay et lesbien, de ce que celui-ci implique dans ses pratiques, dans ses actes, et pouvant se prolonger, se construire aussi bien avec « des politicards, des représentants costumés et gominés.... », sans oublier les crottes de chiens.

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Message par Borges Ven 13 Mar 2009 - 17:44


-Marco, tu t'y connais un peu en musique, en opéra; pourquoi ne pas plutôt aborder le film depuis cet angle...?

-J'éprouve aucune sympathie pour Harvey Milk, et vous?

-Le vrai personnage du film, c'est le tueur... le loser, le pauvre type, qui ne réussit pas à gagner son quart d'heure de visibilité; l'homosexuel "refoulé"; on pense à Elephant...

-HM ne fait pas de politique, c'est juste du commerce, de la communication, un vendeur d'espoir, quelqu'un qui veut vivre dans l'image, comme la fille dans "to die for"...

-Devenir-visible, devenir-majoritaire...

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 19:49

Borges a écrit:

-Marco, tu t'y connais un peu en musique, en opéra; pourquoi ne pas plutôt aborder le film depuis cet angle...?

-J'éprouve aucune sympathie pour Harvey Milk, et vous?

-Le vrai personnage du film, c'est le tueur... le loser, le pauvre type, qui ne réussit pas à gagner son quart d'heure de visibilité; l'homosexuel "refoulé"; on pense à Elephant...

-HM ne fait pas de politique, c'est juste du commerce, de la communication, un vendeur d'espoir, quelqu'un qui veut vivre dans l'image, comme la fille dans "to die for"...

-Devenir-visible, devenir-majoritaire...

C'est bien. Tu as tout compris. Continue le combat (viril).
Parlons opéra. Evacuons la question homosexuelle.
Comme tu dis si bien, le vrai personnage, c'est l'homo refoulé.
Le refoulé c'est le vrai, le bon PD.

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Message par Borges Ven 13 Mar 2009 - 21:18

Hello Marco, comment va le Dasein?

Comme tu sembles mal lire, ne rien comprendre, et t'emporter pour des riens, surtout en ce qui concerne le bon et le mauvais personnage; mais en même temps, tu vois juste, tu m'auras bien compris : "la question homosexuelle" n'a strictement aucun intérêt, pour moi; elle a perdu tout intérêt, plutôt, depuis qu'ils veulent être comme tout le monde, se marier, avoir des gosses... Les homosexuels, c'est des gens comme les autres, qu'ils se battent pour leurs droits, leur identité... visibilité, rien de plus normal...

Si tu veux approcher ce que je dis, trop vite, faut voir quelques films de GVS, depuis l'opposition Hal/Henry V; c'est la baguette magique qui permet d'y voir un peu clair, dans son cinéma, comme dans sa carrière. Compare ce film à "My own private Idaho", et tu auras peut-être une idée de ce que je dis, quand je parle de personnage intéressant.

Pour la virilité, et le combat viril, je ne pense pas qu'ils soient ignorés des homosexuels, les filles et les garçons.



Pour finir, disons que je ne comprends rien au ton de ta réponse.

Mais qu'as-tu compris de ce que je n'ai pas dit?

Borges
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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 22:00

Tu sais bien Borges que je te comprends rarement.

Je pense que ce qui suit répondra assez bien à tes interrogations. Au plaisir.



Visibilité ?

Toutes les enquêtes menées auprès des homosexuels (des deux sexes) attestent que l’expérience de l’insulte (sans même parler de l’agression physique) est l’un des traits les plus communs de leur existence. A des degrés divers, bien sûr, selon les pays et, au sein d’un même pays, selon le lieu où ils vivent et le milieu social dans lequel ils évoluent. Mais c’est une réalité vécue par presque tous. Ce qui signifie que même ceux qui se sentent aujourd’hui les plus libres, dans les grandes villes des pays occidentaux, doivent savoir négocier à chaque instant le rapport avec le monde alentour : savoir où il est possible de donner la main à son partenaire, où il est possible de laisser transparaître de l’affection pour l’autre du même sexe et où il vaut mieux éviter de le faire. Ce savoir pratique, si intériorisé qu’il affleure rarement à la conscience, n’a nullement besoin d’être explicité pour agir et organiser les conduites adaptées. Les erreurs d’appréciation peuvent en effet avoir des conséquences très douloureuses. L’expérience de l’agression physique ou la perception de sa menace obsédante sont si présentes dans la vie des gays qu’on les retrouve dans presque tous les récits autobiographiques et de dans de nombreux romans dont les personnages sont des hommes gays. Parfois, aucun geste n’est nécessaire : l’apparence ou les vêtements suffisent à déclencher la haine. Pour les gays les plus affirmés autant que pour ceux qui le sont moins ou ne le sont pas du tout, pour ceux qui « s’affichent » comme pour ceux qui font preuve de « discrétion », la possibilité d’être l’objet de l’agression verbale ou physique reste omniprésente et, en tout cas, elle a été souvent déterminante dans la manière dont ils ont construit leur identité personnelle, en développant notamment une capacité à percevoir le danger ou en apprenant à contrôler très strictement leurs gestes et leurs paroles.
On a parlé récemment de « harcelement moral » pour décrire ce que subissent certains salariés sur leur lieu de travail. Les conséquences psychologiques en sont considérables. Mais la vie des gays n’est-elle pas entièrement définie par un « harcèlement moral » permanent, direct ou indirect, un harcèlement présent dans toutes les situations de leur existence, un harcèlement social ? Et la personnalité qu’ils construisent, l’identité qu’ils façonnent, ne sont-elles pas déterminées par les conséquences psychologiques de cette position sociale de « harcelés » dans la vie quotidienne (par l’injure, la moquerie, l’agression, l’hostilité ambiante) ? On conçoit que l’un des principes structurants des subjectivités gays et lesbiennes consiste à chercher les moyens de fuir l’injure et la violence, que cela passe souvent par la dissimulation de soi-même ou par l’émigration vers des lieux plus cléments.

C’est pourquoi les vies gays regardent vers la ville et ses réseaux de sociabilité. […] La ville a toujours été le refuge des homosexuels. A la fin des années soixante, un activiste gay décrivait San Francisco comme un « camp de réfugiés », vers lequel sont venus de toute la nation des gens qui voulaient échapper à l’impossibilité de vivre des vies gays dans l’atmosphère hostile, voire haineuse, des petites villes.

[…]

La ville est avant tout une manière d’échapper autant que possible à l’horizon de l’injure en tant qu’il signifie l’impossibilité de vivre son homosexualité sans avoir à la dissimuler en permanence.

Didier Eribon, Réflexions sur la question gay, 1999, pp.33-42.


En tout cas, ce qui caractérise l’homosexuel, c’est qu’il est quelqu’un qui, un jour ou l’autre, est confronté à la décision de dire ce qu’il est, tandis qu’un hétérosexuel n’a pas besoin de le faire puisqu’il est présupposé que tout le monde l’est. Le rapport au « secret » et à la gestion différenciée de ce « secret » dans des situations différentes est l’une des caractéristiques des vies homosexuelles. C’est l’un des enjeux, bien sûr, de la visibilité et de l’affirmation revendiquée aujourd’hui par les gays et les lesbiennes : montrer que l’homosexualité existe et interrompre ainsi le processus de reproduction de l’évidence hétéronormative. Cela ne change rien au fait que l’homosexuel aura toujours, à un moment donné de sa vie, à dire, ou en tout cas à faire savoir aux autres ce qu’il est, mais cela permet de rendre plus aisé le geste et moins douloureux le moment de dire.
Cela ne suffit d’ailleurs pas. L’homosexuel qui est obligé – ou qui fait le choix – d’essayer de cacher ce qu’il est ne peut jamais être certain que l’autre à qui il veut cacher son « secret » ne le connaît pas malgré tout, ou ne le soupçonne pas tout en feignant de l’ignorer. […]
L’homosexuel est donc placé dans une situation d’infériorité puisqu’il peut être l’objet du discours des autres, qui se jouent de lui et profitent du privilège que leur donnent et le fait de savoir, et celui de savoir en même temps que celui dont il est question non seulement croit que les autres ne savent pas mais redoute plus que tout au monde qu’ils puissent savoir.
A l’inverse, lorsque l’homosexuel tient à affirmer ce qu’il est, l’hétérosexuel, qui n’a pas besoin de dire ce qu’il est, jouit encore d’un privilège car il peut feindre de ne pas vouloir savoir, de ne pas s’intéresser, de ne pas comprendre pourquoi il est besoin de dire, etc. C’est ce que Eve Kosofsky Segwick appelle « the privilege of unknowing », c’est-à-dire la faculté non pas d’ignorer mais de ne pas vouloir savoir, de faire comme s’il n’y avait rien à savoir. Sans doute parce que, lorsque l’homosexuel dit qu’il est homosexuel, l’hétérosexuel est obligé de se penser comme hétérosexuel, alors que jusque-là il n’avait pas à se poser de question sur son identité et sur l’ordre social par lequel elle est instituée. Il était dans un état de privilège absolu. Aussi s’indigne-t-il lorsqu’il est menacé de le perdre, ne serait-ce que partiellement, et demande aux gays d’en revenir à la « discrétion », c’est-à-dire de lui permettre de revenir à la paix de ses certitudes, au confort de sa normalité qui reposait sur le silence des autres. Ou bien, plus simplement encore, l’hétérosexuel considère que l’homosexuel se tient mal, exagère, « s’affiche », provoque… Ainsi l’homosexuel ne peut-il être que l’objet du discours et devient insupportable dès qu’il prétend en être le sujet.
[…]
C’est un paradoxe indépassable : le gay qui décide de se dire s’expose au commentaire ironique ou condescendant et parfois à la rebuffade, et celui qui préfère se taire se place dans une situation fausse et en tout cas dépendante. Au premier, on fait la leçon. Du second on se moque.

Didier Eribon, Réflexions sur la question gay, 1999, pp.84-86.

Devenir majoritaire ? Devenir révolutionnaire ?


Sous peine de s’en tenir au plaisir narcissique de prendre des poses et de proférer des discours radicaux mais vides de contenu, on ne doit jamais oublier que la subversion est toujours partielle et localisée. La subversion subvertit quelque chose, à un moment donné, ou bien n’est rien du tout. Par conséquent, il faut se demander sur quel point opère une « subversion » et ce qu’elle déstabilise. Et chercher à savoir ce qui, dans chaque situation, est le plus « subversif ». Il apparaît alors clairement que, dans certains cas, l’aspiration au « conformisme » est plus déstabilisatrice et peut se révéler bien plus subversive que toutes les proclamations révolutionnaires. L’on constate même aujourd’hui que ceux qui défendent l’ordre social (ou l’ « ordre symbolique ») contre les revendications du droit au mariage homosexuel peuvent, à l’inverse, parfaitement ignorer les comportements qui se croient subversifs, ou même, chez les plus « libéraux » d’entre eux, les apprécier et les encourager comme un ailleurs exotique dans lequel ils aimeraient cantonner les gays et les lesbiennes plutôt que les laisser revendiquer l’accès à l’égalité. La « subversion » est désormais concédée aux gays et aux lesbiennes, à condition qu’ils n’en sortent pas. Ce qui tendrait à montrer que ce qui est subversif aujourd’hui, c’est de refuser ce rôle désigné et attendu socialement.

Didier Eribon, Réflexions sur la question gay, 1999, pp.182-183.


Je suis homosexuel. Bonne lecture.
Inutile de rajouter que je vous conseille ce très bon bouquin.

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 22:32

Borges a écrit:
Hello Marco, comment va le Dasein?

Comme tu sembles mal lire, ne rien comprendre, et t'emporter pour des riens, surtout en ce qui concerne le bon et le mauvais personnage; mais en même temps, tu vois juste, tu m'auras bien compris : "la question homosexuelle" n'a strictement aucun intérêt, pour moi; elle a perdu tout intérêt, plutôt, depuis qu'ils veulent être comme tout le monde, se marier, avoir des gosses... Les homosexuels, c'est des gens comme les autres, qu'ils se battent pour leurs droits, leur identité... visibilité, rien de plus normal...

Si tu veux approcher ce que je dis, trop vite, faut voir quelques films de GVS, depuis l'opposition Hal/Henry V; c'est la baguette magique qui permet d'y voir un peu clair, dans son cinéma, comme dans sa carrière. Compare ce film à "My own private Idaho", et tu auras peut-être une idée de ce que je dis, quand je parle de personnage intéressant.

Pour la virilité, et le combat viril, je ne pense pas qu'ils soient ignorés des homosexuels, les filles et les garçons.



Pour finir, disons que je ne comprends rien au ton de ta réponse.

Mais qu'as-tu compris de ce que je n'ai pas dit?

Je devrais pourtant être habitué. Mais ton petit côté donneur de leçon, ta ritournelle activiste (confortable) et redresseur de tort et j'en passe, désolé mais là, ça ne passe pas, vraiment pas. Je trouve cela assez infect.

"la question homosexuelle" […] a perdu tout intérêt pour moi.
ça ne t'empêche pas de dormir j'espère.

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 23:16

Bonsoir,

Je ne veux pas faire ma mouche au milieu de votre échange, juste dire que ça me paraît un peu tordu le texte que tu as posté là Marco. Ca me paraît pas formidable, mais bon...

Je voulais surtout préciser qu'il y a un dossier cinéma queer dans le dernier numéro de Multitudes .

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 23:23

JM a écrit:Bonsoir,

Je ne veux pas faire ma mouche au milieu de votre échange, juste dire que ça me paraît un peu tordu le texte que tu as posté là Marco. Ca me paraît pas formidable, mais bon...
Ce n'est pas un échange privé que je sache.
Tu dis que le texte que j'ai posté est tordu sans rien préciser. Tu ajoutes ensuite ce lien sur le cinéma queer. Quel est le sens de ton post ?

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 23:36

Je n'ai plus de désir ici, de rester ici.
Amusez-vous bien. Vous avez un groupe, un bon groupe.
Je vous laisse à vos certitudes.

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Message par Invité Ven 13 Mar 2009 - 23:47

_Marco a écrit:
JM a écrit:Bonsoir,

Je ne veux pas faire ma mouche au milieu de votre échange, juste dire que ça me paraît un peu tordu le texte que tu as posté là Marco. Ca me paraît pas formidable, mais bon...
Ce n'est pas un échange privé que je sache.
Tu dis que le texte que j'ai posté est tordu sans rien préciser. Dans quel but ?

Dans quel but ? C'est quoi cette question ? Dans quel but je ne précise rien ou dans quel but le texte est selon moi tordu ? A la deuxième question je n'ai pas de réponse, à la première peut-être parce que je sais que tu vas me demander de préciser, et que, comme souvent dernièrement, au moment même où j'aurai dû me justifier, j'aurais eu l'impression d'avoir été plus bas que toi ou que la personne que tu cites.

Tout le passage sur la subversion, le "et si parfois le comble de la subversion c'était de ne pas être subversif", ça me paraît pas folichon du tout. Je sais pas, c'est peut-être idiot ce que je vais dire, mais pour moi c'est un peu comme si on me disait : "moi tu sais je suis de gauche, mais quand je suis avec des gens de gauche, pour être subversif, je me positionne plutôt à droite." On peut appeler cela de la subversion...refuser ce qu'on considère comme un ghetto pour foncer dans un autre, comprends pas trop l'idée..cela dépasse sans doute les limites de mon entendement..

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Message par Eyquem Sam 14 Mar 2009 - 0:47

JM :
Tout le passage sur la subversion, le "et si parfois le comble de la subversion c'était de ne pas être subversif", ça me paraît pas folichon du tout.

Si on se souvient de ce qui s'est dit contre le PACS, en 1999, ou encore récemment en Italie, à propos du DICO (projet équivalent du PACS et abandonné devant la résistance de l'église et de la droite), on comprend très bien ce que dit Eribon, il me semble.

Borges :
J'éprouve aucune sympathie pour Harvey Milk, et vous?
C'est à Gus Van Sant qu'il faut poser la question.
Je ne vois pas trop comment tu peux aimer le film sans aimer le personnage qu'il en fait.

"la question homosexuelle" n'a strictement aucun intérêt, pour moi; elle a perdu tout intérêt, plutôt, depuis qu'ils veulent être comme tout le monde, se marier, avoir des gosses... Les homosexuels, c'est des gens comme les autres, qu'ils se battent pour leurs droits, leur identité... visibilité, rien de plus normal...
Mais est-ce que c'est une question d'intérêt ?
Est-ce une question de "vouloir être comme tout le monde" ?
C'est pas une question de "vouloir être" mais une question de "ne pas pouvoir être".

On peut toujours juger que la "question" n'a aucun intérêt, si l'on vise un complet bouleversement de l'état des choses, où elle ne se posera plus dans ces termes. Mais en attendant, un peu de morale provisoire ne serait pas trop mal - et quelques mots mieux choisis, pour éviter les malentendus.

(sinon, je trouve particulièrement triste de se disputer à propos d'un film de Gus Van Sant)
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Message par Invité Sam 14 Mar 2009 - 6:58

JM a écrit:
Tout le passage sur la subversion, le "et si parfois le comble de la subversion c'était de ne pas être subversif", ça me paraît pas folichon du tout. Je sais pas, c'est peut-être idiot ce que je vais dire, mais pour moi c'est un peu comme si on me disait : "moi tu sais je suis de gauche, mais quand je suis avec des gens de gauche, pour être subversif, je me positionne plutôt à droite." On peut appeler cela de la subversion...refuser ce qu'on considère comme un ghetto pour foncer dans un autre, comprends pas trop l'idée..cela dépasse sans doute les limites de mon entendement..
Ca c'est de la comparaison ! Là, je ne peux rien pour toi. Pas envie d'argumenter. Il suffit de naviguer un petit peu. Sympa de naviguer non?

Tiens là par exemple, pour toi et Borges ("subversif" et "conformisme" étaient entre guillemets dans le texte d'Eribon, ça aurait dû te mettre la puce à l'oreille):
http://www.vacarme.org/article457.html

Bon, je me casse vraiment. Eyquem et d'autres, à bientôt peut-être. (Ce n'est pas qu'une petite dispute à propos de GVS, il y a des attitudes psychorigides révolutionnaires à la mords-moi-le-nœud que je n'ai plus envie de supporter. Courage fuyons.).

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Message par Invité Sam 14 Mar 2009 - 8:50

Hello,

Que la réaction refuse de reconnaître un certain nombre de droits aux couples homosexuels, qu'elle nie "les comportements qui se croient subversifs", je ne remets pas évidemment cette vérité en cause dans le texte de Eribon. Ce qui me paraît peu clair, c'est la conclusion :

Il apparaît alors clairement que, dans certains cas, l’aspiration au « conformisme » est plus déstabilisatrice et peut se révéler bien plus subversive que toutes les proclamations révolutionnaires.

Ce qui tendrait à montrer que ce qui est subversif aujourd’hui, c’est de refuser ce rôle désigné et attendu socialement.

Il est peu évident dans cet extrait de texte de simplement se rendre compte si cette attitude "conformiste" est à vocation subversive dans certains milieux, ou s'il s'agit de revendiquer et assumer vraiment un choix de vie "conformiste", ou les deux.

Même l'auteur de ce texte semble avoir un peu de recul sur son énoncé :

Sous peine de s’en tenir au plaisir narcissique de prendre des poses et de proférer des discours radicaux mais vides de contenu,

Bon après si on est tenu de dire que ce texte est génial ou de fermer sa gueule plutôt que de dire ce qu'on ne pense, faut juste le préciser avant de le citer, même si ta manière de faire ces derniers temps encourage naturellement à recevoir tes textes de cette manière-là.

Juste un truc qui m'a choqué récemment, c'est juste une anecdote, surtout ne pas en tirer de conclusion : je participais à un cercle de silence un après-midi organisé en soutien des sans-papiers lorsqu'au bout d'un moment un couple de garçons d'une trentaine d'années main dans la main est passé en plein milieu du cercle en bousculant tout le monde. Juste pour "foutre la merde". Je ne comprends pas un tel geste. Simplement deux connards, sans doute. Je me suis vaguement posé la question de savoir si cette attitude était liée au fait que le cercle était visiblement constitué en majeure partie de personnes d'obédience religieuse. En tout cas cette attitude m'a profondément choqué, d'autant plus que j'ai eu l'impression qu'il y avait quelque chose derrière celle-ci, un "message", comme le mois d'avant il y avait eu un groupe d'extrême droite qui était venu bousculer des gens et faire du bruit.

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Message par Borges Sam 14 Mar 2009 - 10:48

Hello Eyquem

Je te connais plus inspiré dans tes remarques.

-On ne peut pas aimer un film sans trouver le personnage principal sympa? C'est une nouvelle règle critique, un nouvel art d'aimer les oeuvres d'art?

-Pour le concept d'intérêt, on peut renvoyer à Kant, et après lui bien sûr à Deleuze.


Etc.


Cette discussion n'a aucun intérêt; y a aucun différend entre nous, à discuter.
Vouloir défendre "la cause homosexuelle" ici, c'est comme chercher à défendre la place de Proust dans l'histoire de la littérature.

Personne ne devrait être obligé de se penser à partir du verbe "être", se dire "je suis ceci, ou cela, ou encore autre chose"; personne n'est homosexuel, ou hétérosexuel, ou bi, ou je sais pas quoi d'autre, ce que devraient comprendre les deleuziens, aussi bien que les ranciériens...
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Message par Borges Sam 14 Mar 2009 - 11:02

Eyquem a écrit:

Si on se souvient de ce qui s'est dit contre le PACS, en 1999, ou encore récemment en Italie, à propos du DICO (projet équivalent du PACS et abandonné devant la résistance de l'église et de la droite), on comprend très bien ce que dit Eribon, il me semble.



Question : que peut bien signifier lutter pour accéder à des valeurs de la droite et de l'Eglise?

La différence entre l'esclave et le Maître, selon Nietzsche.

Comme disait Derrida : "je suis pour le mariage homosexuel, mais je suis surtout contre le mariage en général."
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Message par Borges Sam 14 Mar 2009 - 11:04

Marco : malheureusement, il n'y a personne ici qui pense le contraire de ce que tu penses.
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Message par Eyquem Sam 14 Mar 2009 - 12:55

Salut tous,

Borges a écrit:Marco : malheureusement, il n'y a personne ici qui pense le contraire de ce que tu penses.
C'est bien ce qui me semblait, et c'est pour ça que je parlais de malentendu. La phrase de Derrida dit ça très bien.

On ne peut pas aimer un film sans trouver le personnage principal sympa? C'est une nouvelle règle critique, un nouvel art d'aimer les oeuvres d'art?
Claro que no. Je parle des personnages de Van Sant seulement. Il n'y en a aucun dans ses films pour lequel il n'éprouve pas de la sympathie, même White dans "Milk".

Je te connais plus inspiré dans tes remarques.
C'est possible, mais comme dit Pierre Michon : "le roi vient quand il veut".
Wink


Dernière édition par Eyquem le Sam 14 Mar 2009 - 13:41, édité 1 fois
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Message par Leurtillois Sam 14 Mar 2009 - 13:06

C'est étrange, cette dispute enflammée autour d'une ou deux phrases de Borges mal entendues. Que dirait GVS, s'il lisait ce qui a été dit hier soir ?
Est-ce qu'on ne s'est pas (un peu) éloigné du film, de ce qu'il montre ?

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Message par Invité Sam 14 Mar 2009 - 15:01

vous en être éloignés, certes.
ne jamais vous en être approchés, assurément.

de l'extérieur votre amateurisme infatué vous discrédite.

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