les joies du net
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Re: les joies du net
Un article sur Google. Encore un :
http://www.lrb.co.uk/v33/n19/daniel-soar/it-knows
Au début, c'est comme d'habitude. Google retient tout, sait tout de nous ; il fait sa fortune sur notre dos en vendant notre profil à des annonceurs, etc.
Mais l'article intéresse parce qu'il prend ensuite une autre dimension. Ca devient métaphysique quand l'auteur de l'article commence à dire que Google, au fond, vise encore plus haut, quelque chose d'encore inconnu, il ne sait pas exactement ce qu'il vise ; en tout cas, ce n'est pas que l'argent, le pouvoir. Le site qui revend toutes ses infos, fait des profils de chacun de nous et vise les milliards des annonceurs (car un milliard, c'est ça qui est cool), c'est Facebook. Alors que Google, dit l'article, garde l'essentiel de ses infos pour lui, ne les revend pas, parce qu'elles commencent à constituer une somme si énorme qu'elles valent plus que de l'argent.
La métaphore qui convient, c'est même plus Big Brother, complètement datée et ringarde. La métaphore, c'est Big Baby.
Le succès du moteur était lié au départ à son système de classement : plus un article est cité, plus il est classé haut dans l'ordre des résultats de la recherche.
C'était le critère pour organiser ses réponses. Maintenant, Google utilise 200 critères - mais il garde le secret de la formule plus sûrement que s'il avait découvert la pierre philosophale.
On sait malgré tout, dit l'article, qu'un des critères les plus utiles pour Google, c'est maintenant notre comportement quand on fait une recherche : combien de temps on passe sur la page de résultats ; quel résultat on choisit (le 1er, le 4e, etc) ; combien de temps on part (si vous partez longtemps, c'est que vous naviguez sur le site vers lequel Google vous a orientés, donc que le résultat de recherche était excellent pour vous).
En gros, Google mesure notre contentement et apprend en retour notre façon de formuler nos demandes. Notre plaisir est sa récompense (je vais me reconvertir dans la pub : en anglais, ça sonnerait trop bien) : il veut nous faire plaisir parce que c'est comme ça qu'il apprend. Et plus il apprend, plus nous sommes contents de lui ; et plus il apprend.
Pour schématiser, au début, quand vous tapiez "hot dogs" dans "Images", il vous sortait des images de chiens ; il a vu que vous étiez pas contents : la fois d'après, il aura retenu la leçon et il vous sortira des images de sandwichs.
Je m'en suis rendu compte l'autre jour. Quand on tape une recherche, maintenant, Google commence à nous orienter vers des mots synonymes. Je trouve ça dingue. Avant, il cherchait le mot exact ; il continue à le faire mais il a appris aussi les synonymes.
L'article se termine par un résumé de l'expérience GOOG-411, en 2007. Si j'ai bien compris, c'était une sorte d'opérateur à l'ancienne mode : vous appeliez ce service téléphonique, vous formuliez votre demande, et GOOG-411 vous proposait divers résultats, et pouvait vous mettre en connexion téléphonique avec l'un d'eux, comme les renseignements.
Personne voyait trop l'utilité d'un tel service pour Google qui le proposait gratuitement et pour lequel il faisait beaucoup de pub. Au bout de trois ans, le truc fut fermé.
De quoi s'agissait-il ? Google a tout simplement appris à écouter et à comprendre ce qu'on disait oralement : il a appris à reconnaître vocalement tous les mots anglais, avec tous les accents possibles, et qu'ils soient prononcés avec un cheveu sur la langue ou un chewing gum ou en bégayant ou en parlant vite ou en parlant lentement. Bref, de la reconnaissance vocale. Et c'est à partir de ces données qu'il a conçu Android, un système de recherche par reconnaissance vocale, installé sur les portables.
Depuis, Google récupère, via ce sytème, des infos sur le vocabulaire, la syntaxe de toutes les langues du monde. Il apprend à parler, pour ainsi dire.
Bien sûr, ça continue. A quoi ça peut bien servir que Google apprenne à parler ? On ne sait pas trop ; c'est comme le début le disait : Google vise quelque chose d'inconnu, il ne sait pas exactement ce qu'il cherche, sinon que ça vaut plus que de l'or.
Une des premières utilisations possibles, en attendant, ça va être l'indexation de toutes les vidéos en ligne. C'est-à-dire qu'en tapant une phrase, on pourrait retrouver la vidéo dans laquelle elle est prononcée.
Et ainsi de suite.
Peut-être que dans dix ans, Clément Rosset écrira une suite à "Le réel et son double" : ça sera "Google et son double". lol
http://www.lrb.co.uk/v33/n19/daniel-soar/it-knows
Au début, c'est comme d'habitude. Google retient tout, sait tout de nous ; il fait sa fortune sur notre dos en vendant notre profil à des annonceurs, etc.
Nous ne sommes pas des clients de Google : nous sommes ses produits.The fear seems be based on the assumption that if Google is gathering all this information then it must be doing so in order to sell it: it is a profit-making company, after all. ‘We are not Google’s customers,’ Siva Vaidhyanathan writes in The Googlisation of Everything. ‘We are its product. We – our fancies, fetishes, predilections and preferences – are what Google sells to advertisers.’
Mais l'article intéresse parce qu'il prend ensuite une autre dimension. Ca devient métaphysique quand l'auteur de l'article commence à dire que Google, au fond, vise encore plus haut, quelque chose d'encore inconnu, il ne sait pas exactement ce qu'il vise ; en tout cas, ce n'est pas que l'argent, le pouvoir. Le site qui revend toutes ses infos, fait des profils de chacun de nous et vise les milliards des annonceurs (car un milliard, c'est ça qui est cool), c'est Facebook. Alors que Google, dit l'article, garde l'essentiel de ses infos pour lui, ne les revend pas, parce qu'elles commencent à constituer une somme si énorme qu'elles valent plus que de l'argent.
Plus que de l'argent ? C'est là que moi, j'ai commencé à frissonner. lolthe information Google has is too valuable to give away, it has another reason for collecting every piece of data it possibly can, the stuff it’s amassing is worth more than just money
La métaphore qui convient, c'est même plus Big Brother, complètement datée et ringarde. La métaphore, c'est Big Baby.
Car Google n'est plus seulement un gros oeil qui surveille tout et se contente de faire des fiches : c'est un gros bébé qui apprend.Levy tells the story of a new recruit with a long managerial background who asked Google’s senior vice-president of engineering, Alan Eustace, what systems Google had in place to improve its products. ‘He expected to hear about quality assurance teams and focus groups’ – the sort of set-up he was used to. ‘Instead Eustace explained that Google’s brain was like a baby’s, an omnivorous sponge that was always getting smarter from the information it soaked up.’
Ce n'est donc plus une simple affaire de quantité d'informations. Le savoir amassé fait entrer Google dans une sorte de processus dynamique d'apprentissage dont la qualité suit une courbe exponentielle.Google is learning. The more data it gathers, the more it knows, the better it gets at what it does. Of course, the better it gets at what it does the more money it makes, and the more money it makes the more data it gathers and the better it gets at what it does – an example of the kind of win-win feedback loop Google specialises in – but what’s surprising is that there is no obvious end to the process
Le succès du moteur était lié au départ à son système de classement : plus un article est cité, plus il est classé haut dans l'ordre des résultats de la recherche.
C'était le critère pour organiser ses réponses. Maintenant, Google utilise 200 critères - mais il garde le secret de la formule plus sûrement que s'il avait découvert la pierre philosophale.
On sait malgré tout, dit l'article, qu'un des critères les plus utiles pour Google, c'est maintenant notre comportement quand on fait une recherche : combien de temps on passe sur la page de résultats ; quel résultat on choisit (le 1er, le 4e, etc) ; combien de temps on part (si vous partez longtemps, c'est que vous naviguez sur le site vers lequel Google vous a orientés, donc que le résultat de recherche était excellent pour vous).
En gros, Google mesure notre contentement et apprend en retour notre façon de formuler nos demandes. Notre plaisir est sa récompense (je vais me reconvertir dans la pub : en anglais, ça sonnerait trop bien) : il veut nous faire plaisir parce que c'est comme ça qu'il apprend. Et plus il apprend, plus nous sommes contents de lui ; et plus il apprend.
Pour schématiser, au début, quand vous tapiez "hot dogs" dans "Images", il vous sortait des images de chiens ; il a vu que vous étiez pas contents : la fois d'après, il aura retenu la leçon et il vous sortira des images de sandwichs.
Je m'en suis rendu compte l'autre jour. Quand on tape une recherche, maintenant, Google commence à nous orienter vers des mots synonymes. Je trouve ça dingue. Avant, il cherchait le mot exact ; il continue à le faire mais il a appris aussi les synonymes.
L'article se termine par un résumé de l'expérience GOOG-411, en 2007. Si j'ai bien compris, c'était une sorte d'opérateur à l'ancienne mode : vous appeliez ce service téléphonique, vous formuliez votre demande, et GOOG-411 vous proposait divers résultats, et pouvait vous mettre en connexion téléphonique avec l'un d'eux, comme les renseignements.
Personne voyait trop l'utilité d'un tel service pour Google qui le proposait gratuitement et pour lequel il faisait beaucoup de pub. Au bout de trois ans, le truc fut fermé.
De quoi s'agissait-il ? Google a tout simplement appris à écouter et à comprendre ce qu'on disait oralement : il a appris à reconnaître vocalement tous les mots anglais, avec tous les accents possibles, et qu'ils soient prononcés avec un cheveu sur la langue ou un chewing gum ou en bégayant ou en parlant vite ou en parlant lentement. Bref, de la reconnaissance vocale. Et c'est à partir de ces données qu'il a conçu Android, un système de recherche par reconnaissance vocale, installé sur les portables.
Depuis, Google récupère, via ce sytème, des infos sur le vocabulaire, la syntaxe de toutes les langues du monde. Il apprend à parler, pour ainsi dire.
Three years later, the service was dropped, but by then Google had launched its Android operating system and had released into the wild an improved search-by-voice service that didn’t require a phone call. You tapped the little microphone icon on your phone’s screen – it was later extended to Blackberries and iPhones – and your speech was transmitted via the mobile internet to Google servers, where it was interpreted using the advanced techniques the GOOG-411 exercise had enabled. The baby had learned to talk. Now that Android phones are being activated at a rate of more than half a million a day,[4] Google suddenly has a vast and growing repository of spoken words, in every language on earth, and a much more powerful learning machine
Bien sûr, ça continue. A quoi ça peut bien servir que Google apprenne à parler ? On ne sait pas trop ; c'est comme le début le disait : Google vise quelque chose d'inconnu, il ne sait pas exactement ce qu'il cherche, sinon que ça vaut plus que de l'or.
Une des premières utilisations possibles, en attendant, ça va être l'indexation de toutes les vidéos en ligne. C'est-à-dire qu'en tapant une phrase, on pourrait retrouver la vidéo dans laquelle elle est prononcée.
If, however, Google is able to deploy its newly capable voice recognition system to transcribe the spoken words in the two days’ worth of video uploaded to YouTube every minute, there would be an explosion in the amount of searchable material. Since there’s no reason Google can’t do it, it will.
Et ainsi de suite.
Peut-être que dans dix ans, Clément Rosset écrira une suite à "Le réel et son double" : ça sera "Google et son double". lol
Eyquem- Messages : 3126
Re: les joies du net
salut Eyquem,
il y a un truc que je ne suis pas sûr de comprendre dans l'article : ce qui "apprend", c'est la boîte ou le système informatique ?
(dans le 2° cas, qui m'apparait incroyable, alors il y aurait bien de quoi flipper.)
il y a un truc que je ne suis pas sûr de comprendre dans l'article : ce qui "apprend", c'est la boîte ou le système informatique ?
(dans le 2° cas, qui m'apparait incroyable, alors il y aurait bien de quoi flipper.)
Invité- Invité
Re: les joies du net
un peu de nominalisme n'a jamais fait de mal à personne : google dit, google fait, google apprend, facebook fait, dit... ne pas multiplier les êtres uniquement...
Borges- Messages : 6044
Re: les joies du net
salut Stéphane,Stéphane Pichelin a écrit:salut Eyquem,
il y a un truc que je ne suis pas sûr de comprendre dans l'article : ce qui "apprend", c'est la boîte ou le système informatique ?
(dans le 2° cas, qui m'apparait incroyable, alors il y aurait bien de quoi flipper.)
Google n'est pas encore HAL : j'imagine qu'il ne se s'autoprogramme pas tout seul.
Ce qui m'a retenu dans l'article, c'est que l'appétit de Google m'a semblé monter encore d'un cran. On disait jusque là : "Google veut être tout Internet, que tout Internet passe par lui". Mais il faut ajouter : "Google veut que tout soit dupliqué sur Internet". Et puisqu'on parlait de syllogisme ailleurs, on peut trouver que la conclusion, à partir de ces deux prémisses, est un tout petit peu effrayante.
Eyquem- Messages : 3126
Re: les joies du net
L’art et la littérature sont des disciplines bien ingrates quand on sait que la réussite professionnelle telle qu’on l’entend ordinairement et qui, pour les autres activités humaines, couronne tout de même une certaine excellence, n’a en l’occurrence rien à voir avec la qualité de l’œuvre, laquelle souvent, bien au contraire, la dessert ou la condamne. Nous voyons donc des artistes et des écrivains travailler en toute conscience, sinon à leur perte, en tout cas à leur ruine, engageant leurs forces et leur talent dans l’accomplissement d’une œuvre dont ils ne tireront pour tout profit que davantage de solitude encore, de pauvreté, de détresse et d’humiliation sociales. Et il faut être fort aujourd’hui, très fort, pour trouver son salut dans la chose en soi.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
http://www.rue89.com/2011/10/14/israel-et-le-travail-de-france-2-pourquoi-tant-de-haine-225574
careful- Messages : 690
Re: les joies du net
La mondialisation (la circulation mondiale des biens et des signes) fait proliférer les abstractions économiques et les idéologies (que ce soit le concept de “marché libre” ou celui de “bien commun”). Mais la res publica mondiale reste sans contenu politique tangible. Les notions d’“intérêt mondial” et de “bien mondial” sont particulièrement difficiles à définir et à défendre.
Par ailleurs, la mondialisation s’appuie sur l’explosion des techniques de manipulation de l’abstraction. Quoi de plus abstrait que le virtuel? Nouvel alphabet, le virtuel s’est imposé comme un outil efficace, mêlant le visible et l’intelligible, l’image et le langage (images de synthèse, simulation numérique) ou hybridant le monde réel et le monde virtuel.
La mondialisation et la virtualisation convergent, se renforcent l’une l’autre, et mélangent intimement jusqu’à les confondre ces deux formes très différentes d’abstraction : l’abstraction de l’argent et des nombres, d’une part, l’abstraction des idées et des essences, d’autre part.
Cette confusion est source d’amalgames et de brouillages, aux conséquences sociales et politiques.
Cela non plus n’est pas un phénomène nouveau, ni d’ailleurs le désenchantement et les rejets qu’elle suscite. Ce qui est nouveau, c’est l’empire qu’elle a pris sur les esprits, son extension universelle, et la faiblesse de la riposte.
Comment définir les conditions de possibilité politique et éthique de la “civilisation-monde” dans une telle confusion? Comment en réguler l’émergence? Pour quelles fins, pour quel projet mondial? La « compression planétaire » des peuples du monde conduit progressivement et inévitablement à la formationd’une communauté mondiale de facto. Elle préfigure l’émergence d’une “planète des esprits”[1], capable d’initier une nouvelle renaissance.
Ce qu’il est convenu d’appeler la Renaissance (européenne) tient symboliquement en trois dates: 1454, 1492, 1517. Trois noms la ponctuent: Gütenberg, Colomb, Luther. Trois inventions la résument: l’imprimerie, l’Amérique, la Réforme.
Comme il y a plus de cinq siècles, nous assistons aujourd’hui à l’invention quasi simultanée d’une nouvelle imprimerie et d’une nouvelle Amérique. La nouvelle imprimerie, c’est le numérique. La nouvelle Amérique, c’est le cyberespace, comme continent abstrait, indéfini.
Il nous reste à inventer la nouvelle Réforme.
Comme jadis Luther, il faudrait tonner contre les "indulgences" accordées aux paradis fiscaux, et aux monopoles, à l’heure des rendements croissants et des énormes valorisations boursières qu’ils autorisent ; contre les indulgences dont bénéficient les lobbies et les groupes d’intérêts privés, à l’heure de la crise du bien commun et de la faiblesse de l’intérêt général; contre les indulgences du droit à l’égard des forts et des puissants, à l’heure où les fractures s’accroissent, où la notion même de “justice sociale” est tournée en dérision.
Nous attendons cette Réforme, et la création du sens dont notre civilisation planétaire manque encore.
Il nous faut donner un sens, en effet, à ce phénomène colossal, à cette phase prodigieuse et sans doute décisive de l’évolution humaine, la compression accélérée de la planète.
Depuis les origines, l’humanité entière a été brassée, mélangée. Ce qui est nouveau, c’est la rapidité, l’intensité de ce serrage planétaire, la puissance de la mise en contact, l’intensité de la chaleur[2] dégagée par la friction des peuples.
Cette compression ne provoque pas seulement une sensation (provisoire) d’étouffement. C’est aussi un facteur déclencheur de complexification, de convergence, d’unification.
La compression planétaire facilite la montée de l’angoisse, la peur de sombrer dans la masse informe, de disparaître dans la laideur et l’uniformité. Mais elle produit aussi un sentiment d’exaltation, pour ceux qui ressentent dans toutes leurs fibres qu’ils participent à la poussée, à la montée de l’Histoire.
Moment-clé, où l’on pourrait prophétiser l’amorce d’une convergence des esprits, et même le réticent début d’une lente convergence des religions.
La notion de “compression planétaire” ne recouvre pas le concept de “mondialisation”. La mondialisation est d’essence spatiale, elle est faite d’expansion territoriale: il suffit d’évoquer les diverses formes de mondialisation que furent les impérialismes, les colonialismes et aujourd’hui la conquête des marchés et des réseaux.
La compression planétaire implique quant à elle une élévation de “température psychique". Il s’agit bien d’une mondialisation, mais d’essence psychique, et même spirituelle.
La conscience individuelle progresse aussi par « compression psychique ». Toute conscience peut avoir ardeur à croître ou au contraire renoncer à croître. Elle peut résister plus ou moins à son propre désenchantement, à une sorte de nausée ontologique, un ennui de soi. C’est la conscience qui peut décider de prendre “goût” au Monde, ou au contraire peut se laisser étouffer par lui. Lorsque, à certains moments de l’évolution, la tension de conscience croît dangereusement, ce sont cette foi, cette ardeur, ce goût de vivre et de grandir, qui font presque toute la différence.
La compression psychique est avant tout un phénomène social et même mondial. On ne peut converger seul. On ne peut converger qu’avec de l’autre, avec les autres. Nous sommes confrontés à la perspective de nous unifier avec le monde des autres. Il vaudrait mieux que ce soit de bon gré, et que cette unification ne nous uniformise pas, par abstraction, par homogénéisation et par réduction au plus petit commun dénominateur.
La mondialisation actuelle, qui est d’ordre économique et technologique, favorise une unification abstraite, numérique et unidimensionnelle. La mondialisation culturelle, politique ou éthique devrait favoriser en revanche une convergence, une idée, un sens.
Il y a toujours un retard de l’esprit sur l’événement. Mais aujourd’hui l’esprit est particulièrement en retard, parce que les événements se précipitent. La mondialisation de la planète des esprits est en retard sur la mondialisation des nombres et des procédures.
Mais la compression de la couche pensante commence à produire des effets.
La “noosphère” annoncée par Teilhard il y a plus d’un demi-siècle commence à prendre des formes tangibles.
La Noosphère est le nom donné par Teilhard de Chardin à l’« enveloppe de substance pensante » qui commence à planer au-dessus du monde. C’est une « sphère de consciences arc-boutées », une « immense machine à penser », le siège d’un « organisme pan-terrestre », muni d’un système propre de connexions et d’échanges internes, et d’un « réseau serré de liaisons planétaires ».
La Noosphère se comprime et se compénètre organiquement, d’où une tension croissante, que nous ressentons tous.
Elle se traduit aussi par l’apparition d’une « mémoire collective » de l’humanité, et par l’émergence progressive d’une « vision commune. »
Des notions comme le “patrimoine commun de l’humanité” ont aujourd’hui acquis un droit de cité mondial. Mais il nous reste beaucoup à travailler pour une “vision commune”. Il nous faut prendre conscience de notre destin, de notre convergence.
Qu’est-ce que le “fait” de la noogénèse — s’il était reconnu politiquement — entraînerait comme conséquences ?
D’abord, cela signifierait que l’humanité n’est plus cette « abstraction » que les nominalistes (Occam, Hobbes, Bentham, Mill, Hayek, Nozick) traitaient de « fiction » et de « chimère ». L’humanité “saurait” enfin qu’elle est un “Tout”, qu’elle est une oeuvre à accomplir, une passion à entretenir. Elle possèderait enfin, au-dessus du “push” économique, le “pull” d’une puissance psychique, d’une vision rassurante. Ensuite, cela signifierait l’avènement de l’autre. L’autre reconnu comme notre richesse. La “montée de l’autre” reconnue comme montée du sens.
Au moment où mondialisation, abstraction, virtualisation, représentent autant de dangers pour la notion même d’altérité, la place laissée à “l’autre” en tant qu’autre (l’hors-norme, l’impensé, l’imprévisible, mais aussi le plus défavorisé, le moins armé, le plus faible) est le meilleur indicateur de la santé de la civilisation-monde. C’est aussi la source ultime de son sens.
L’Autre constitue notre bien commun mondial le plus précieux.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
C3 M355463 53RT 4 PR0VV3R QV3 N0TR3 35PR1T P3VT F41R3 D'1MPR35510N4N735 CH0535 ! 4V D3BVT C'3T41T D1FF1C1L3 M415 M41NT3N4NT, 4 P4RT1R D3 C3TT3 L16N3, V0TR3 35PR1T 3ST 3N TR41N D3 L1R3 C3C1 4VT0M4T1QV3M3NT 54N5 M3M3 Y P3N5ER. 50Y3Z F13R5 ! S3VL5 C3RT41N3S P3RS0NN3S P3VV3NT L1R3 C3C1.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
Le vide sidérant et intersidéral de la non-pensée de Philippe Quéau, as usual:
une accumulation de généralisations creuses, et onctueuses, qui ne veulent strictement rien dire, où chaque pseudo-concept est une instance magique existant per se dans un tissu d'idéalités rhétoriques: "compression psychique", "mémoire collective de l'humanité", "mondialisation-virtualisation", etc. Toujours dans ses habituelles fadaises spiritualistes "noogénétiques" empruntées aux plus grands penseurs, comme Teilhard de Chardin.
Patrimoine commun de l'humanité, montée de l'autre, montée du sens, "pull" d'une puissance psychique, blablabla: comment peut-on ânonner autant de poncifs en si peu de lignes? Là est le mystère. Comment peut-on accorder le moindre crédit à cette phraséologie? Le mystère est encore plus grand.
Et c'est qui cet "Autre" entre guillemets? C'est le grand "Autre", voyons, la vieille catégorie abstraite qui dit tout et rien à la fois, dont se repait n'importe quel "thinker" subventionné en télécommunication.
Est-il besoin de rappeler la rencontre télévisuelle d'anthologie entre Quéau et Straub/Huillet?
http://www.ina.fr/recherche/recherche/search/qu%C3%A9au+straub
une accumulation de généralisations creuses, et onctueuses, qui ne veulent strictement rien dire, où chaque pseudo-concept est une instance magique existant per se dans un tissu d'idéalités rhétoriques: "compression psychique", "mémoire collective de l'humanité", "mondialisation-virtualisation", etc. Toujours dans ses habituelles fadaises spiritualistes "noogénétiques" empruntées aux plus grands penseurs, comme Teilhard de Chardin.
Patrimoine commun de l'humanité, montée de l'autre, montée du sens, "pull" d'une puissance psychique, blablabla: comment peut-on ânonner autant de poncifs en si peu de lignes? Là est le mystère. Comment peut-on accorder le moindre crédit à cette phraséologie? Le mystère est encore plus grand.
Et c'est qui cet "Autre" entre guillemets? C'est le grand "Autre", voyons, la vieille catégorie abstraite qui dit tout et rien à la fois, dont se repait n'importe quel "thinker" subventionné en télécommunication.
Est-il besoin de rappeler la rencontre télévisuelle d'anthologie entre Quéau et Straub/Huillet?
http://www.ina.fr/recherche/recherche/search/qu%C3%A9au+straub
Dernière édition par jerzy P le Mer 19 Oct 2011 - 13:51, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: les joies du net
C'35T VR4Ibalthazar claes a écrit:N0TR3 35PR1T P3VT F41R3 D'1MPR35510N4N735 CH0535 !
Eyquem- Messages : 3126
Re: les joies du net
jerzy P a écrit:Le vide sidérant et intersidéral de la non-pensée de Philippe Quéau, as usual:
Est-il besoin de rappeler la rencontre télévisuelle d'anthologie entre Quéau et Straub/Huillet?
http://www.ina.fr/recherche/recherche/search/qu%C3%A9au+straub
ok. Mince, si j'avais su que c'était le même... Mais comment diable as-tu fait pour le reconnaître, ça m'échappe encore davantage. Doit quand même y avoir deux ou trois types possibles à proposer ce genre de discours, nan ?
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
Hé hé, je reconnais à l'humus du "discours", et en effet, ils sont plus que trois.
Reste alors plus qu'à confirmer: un petit copicol de la première phrase dans google, et hop, c'est in ze pocket.
Puisé aussi sur son blog (ça se ramasse à la louche):
Là, par exemple, il voit grand et embrasse large, comme dirait Lapalisse.
Non mais vous avez vu le yaourt? Une vingtaine de lignes, et pas un atome de signification. De la vraie "philosophie d'entreprise" façon Pierre Dac. Ou alors, c'est un générateur automatique de textes.
"A la Husserl", again. Il lâche pas le morceau. Vraiment, je sais pas, non, je sais pas, comme dirait JMS.
Reste alors plus qu'à confirmer: un petit copicol de la première phrase dans google, et hop, c'est in ze pocket.
Puisé aussi sur son blog (ça se ramasse à la louche):
Là, par exemple, il voit grand et embrasse large, comme dirait Lapalisse.
Une université catalytique.
L’université de demain doit être catalytique: elle doit dissoudre et rendre possible. Plutôt que de couvrir les champs disciplinaires, elle doit fournir les moyens de les mettre en relation. C’est bien là sa vocation transdisciplinaire. La confusion générale dont nous avons parlé vient d’une insuffisante alphabétisation aux nouvelles représentations, et d’une absence de moyens efficaces de comprendre et d’interpréter le monde. La première tâche de l’université de demain sera donc de former à cette nouvelle "écriture" du virtuel, mais aussi à la nouvelle grammaire et à la nouvelle méthodologie intellectuelle qu’elle sous-tend. Il faut maîtriser avant toute chose la navigation dans les océans du savoir, et développer à cette fin les ressources d’une pensée formelle, systémique, transdisciplinaire, plurielle, globale. L’auto-apprentissage et la personnalisation de l’enseignement par le recours aux techniques de simulation interactive seront souhaités. La visée pédagogique prioritaire sera de penser et d’expérimenter par soi-même, d’une part, et avec les autres, d’autre part. Non pas seulement savoir, mais chercher à savoir, savoir chercher, savoir relier les faits épars, et enfin savoir se lier aux autres dans une recherche partagée seront les objectifs affirmés. On favorisera la curiosité, la créativité, l’esprit critique et l’esprit coopératif, la représentation d’une réalité sous plusieurs angles. La pensée en terme de systèmes permettra d’avoir une vue d’ensemble des multiples liens possibles entre causes et effets, entre modèles et réalités. La pensée expérimentale, qui fait varier certains aspects d’un problème tout en en conservant invariants certains autres, permet d’explorer exhaustivement un ensemble de possibilités et de résultats, de les comparer, de les extrapoler. On privilégiera la simulation et la recherche épistémologique, les expériences de pensée et l’expérience de "nouvelles réalités". Une attitude de distance philosophique, de suspension phénoménologique à la Husserl (l’épochè) sera encouragée.
Non mais vous avez vu le yaourt? Une vingtaine de lignes, et pas un atome de signification. De la vraie "philosophie d'entreprise" façon Pierre Dac. Ou alors, c'est un générateur automatique de textes.
"A la Husserl", again. Il lâche pas le morceau. Vraiment, je sais pas, non, je sais pas, comme dirait JMS.
Invité- Invité
Re: les joies du net
ouais. ça a quand même un sens, non ? du genre : on va laisser les connaissances aux machines et l'accès à ces connaissances aux concepteurs des interfaces avec les machines. autrement dit, on va être libres de toutes les expériences de pensées dans le cadre décidé par les gourous de Microsoft et d'Apple et de leurs successeurs. comme aujourd'hui, mais en plus, donc en mieux. le Bahlsen de la réflexion sur l'éducation.
Invité- Invité
Re: les joies du net
Je trouvais ça cool (enfin : frais) de ne pas mettre de liens dans ce topic. En fait google (himself) retrouve un texte à partir de n'importe laquelle de ses phrases. Je suis complètement dépassé !
J'avais mal regardé. C'est toujours la même marotte ultra moderniste.
Straub dirait encore : "pire que les nazis".
Il lui arrive quand même aussi de se méfier de l'innovation. Et il a quelques infos pas tout à fait inintéressantes. De toute façon tout le monde ne peut pas être straubien authentique, n'est-ce pas.
J'avais mal regardé. C'est toujours la même marotte ultra moderniste.
C’est bientôt la Toussaint. Emmenez donc votre Smartphone, avec vos chrysanthèmes. On peut désormais scanner les codes barre posés sur les tombes, et être ainsi reliés au site web « éternel » des défunts. Toute une vie passée est désormais encapsulée sur ces sites mémoriels, avec photos, films, et tout ce qu’on peut imaginer pour perpétuer la mémoire des morts.
Wow! Ceci est triplement ébouriffant. D’abord accorder une telle puissance d’éternité à un « algorithme » me paraît diantrement platonicien. Pourquoi pas?
platoniquement parlant, j’y vois une certaine beauté sidérale.
Straub dirait encore : "pire que les nazis".
Il lui arrive quand même aussi de se méfier de l'innovation. Et il a quelques infos pas tout à fait inintéressantes. De toute façon tout le monde ne peut pas être straubien authentique, n'est-ce pas.
Devant la mise en évidence de la montée hors limite d’une société panoptique, info-totalitaire et crypto-fasciste, à l’échelle mondiale, les idées prémonitoires d’un Jeremy Bentham (le Panopticon) ou de Michel Foucault paraîtront bien dépassées par la puissance infiniment irradiée des nouveaux moyens de contrôler tout le monde, tout le temps et partout.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
Poussière de bits.
http://funeralinnovations.com/remembrance
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careful- Messages : 690
Re: les joies du net
http://tqft.net/misc/Grothendieck%27s%20Declaration.pdf
Dernière édition par balthazar claes le Mer 15 Fév 2012 - 11:47, édité 1 fois
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
purée... je réponds.
c'est une attaque abdominen... ad eminem... ah, je suis attaqué.
lecture une fois: c'est quoi, une sur-boom où on va se repeloter le cul sur du George Mickael?
lecture deux: c'est quoi, de la science extraite d'un livre de blagues belges?
Troisième: réexamen des concepts "cible d'adoption" ou "rancune déplacée/par procuration", je comprends cette fois que si j'en refuse la signification, le transfert restera impensable, et mon karma va encore chier des tomates vertes.
Quatre: pas de quatre.
Cela dit, j'ai la foi qui me soutient.
Yo, BC.
c'est une attaque abdominen... ad eminem... ah, je suis attaqué.
lecture une fois: c'est quoi, une sur-boom où on va se repeloter le cul sur du George Mickael?
lecture deux: c'est quoi, de la science extraite d'un livre de blagues belges?
Troisième: réexamen des concepts "cible d'adoption" ou "rancune déplacée/par procuration", je comprends cette fois que si j'en refuse la signification, le transfert restera impensable, et mon karma va encore chier des tomates vertes.
Quatre: pas de quatre.
Cela dit, j'ai la foi qui me soutient.
Yo, BC.
Invité- Invité
Re: les joies du net
perso, je n'accorde aucune attention ni valeur à ce texte complètement délirant tiré du journal intime d'un mathématicien. Mais je me dois, forcément, de dire ce qu'un tel procédé m'inspire, dénoncer ce montage qui concerne des personnes précises, un événement précis, un conflit précis, mais sous la forme indirecte, neutre, objective, d'un texte sans contexte, jeté "comme ça", dissertant sur des thèmes convoqués par résonance et analogie.
Lacan, sur ce genre de questions, devrait d'ailleurs être abordé avec des pincettes. Il y a toute une dynamique de jeu de pouvoir, de maitrise et de contrôle, exhibée et dissimulée en même temps, dans la notion d'analyste comme "n'étant pas le sujet supposé savoir".
Deleuze, ou Watzlawik par exemple, sont de bons antidotes contre ce psychanalysme aliénant - et mortifère.
Un texte désitué, donc, qui ne nous dit rien à propos de rien. Juste balancé, comme ça, de façon assez perverse, même. Du genre: "je montre ça je montre rien, faites-en ce que vous voulez, c'est pas moi qui interprète".
Mais le fait même de balancer ce truc, de façon "neutre", sans aucun commentaire, dans un contexte contigu, c'est une manière d'interpréter ou de pousser à l'interprétation, une invitation indirecte à "décoder" ce qui a eu lieu à travers une "grille".
Goût pour les montages, les machines textuelles ou scopiques, automates, autonomes, des dispositifs a-subjectifs.
Dans quel but? On nous dira sans doute: dans aucun but, voyons. C'est juste livré "comme ça". C'est vous qui projetez, pas moi.
Mais il n'y a qu'une fonction possible, souhaitée ou non, à cette façon de balancer un texte de ce genre: relancer la machine, jouer les prolongations, souffler sur les braises, jouer innocemment au pompier-pyromane. "je n'ai jamais voulu encourager ce truc", dira-t-on encore.
Autre exemple: effacer une insulte, sa trace par respect de la déontologie et du règlement, ce qui a pour effet objectif de juguler toute réactivité légitime Si la personne concernée replace la trace, pour dire qu'effacement n'est pas disparition du souvenir, on répondra: je l'avais effacée, c'est vous qui l'avez remise, j'ai cherché à régler le problème, mais c'est vous qui le relancez, etc etc.
Puis déplacer dans la zone du "règlement privé" une dynamique conflictuelle qui ne relevait pas du privé. Acquiescer à cette injonction, c'est donner raison au motif d'une agression justement fondée sur la supposition d'une nature "privée" ou "privatisable" des énoncés tenus par la personne interpelée.
Donc, ce long charabia glané sur le net et posté après un évènement bien déterminé, c'est neutre, chacun en fait ce qu'il veut, c'est son problème, etc. "Just like that".
Le dispositif est pervers, donc. Mais qu'on ne me traite pas de manipulateur ou de pervers, par la bande ou en le déniant ("c'est celui qui le dit qu'il est", etc), ou en disant que c'est moi qui interprète, en tant que paranoïaque, parce que je réagis à cette livraison neutre de texte comme à une livraison d'indices à explorer: elle est faite pour ça, elle sert à ça. Elle contraint doublement et paradoxalement: à la réponse ou au silence, qui la confirmeront comme "filtre révélateur" d'on ne sait quoi.
C'est la manière BC. La façon dont sa prose organise perpétuellement des réseaux de significations à partir de textes pris aléatoirement ou soumis à une interprétation aléatoire. Et qui suscite, en ce qui me concerne, une franche aversion. Partagée? Tant mieux: c'est plus clair en le disant.
Moi, quand je crève un abcès, je le crève pour de bon. ça veut dire crever les petites poches de pus où subsiste matière à ce genre de jeux irresponsables sur les signifiants.
J'en profite pour donner une petite précision, donc, à propos de notions comme "perversion", dont on peut faire facilement ses choux-gras dans une "cyber-psychanalyse" débridée. Ma précision est d'ordre systémique, au sens de Watzlawik, ou de Bateson, et non psychanalytique.
(Contestant l'efficience de la psychanalyse comme interprétation du "sujet" ou de la "personne", ne cessant d'indiquer les ravages qu'elle suscite, ses effets d'aliénation, d'enfermement et de pouvoir, je ne vais pas me priver de contester l'usage, pour le coup vraiment débridé, d'une cyber-psychanalyse où on s'improvise analyste d'énoncés en s'auto-validant tout seul devant son écran, pour accuser un contradicteur de se livrer à de la psychanalyse de nain, pire, d'être un sorte de pervers destructeur à qui il convient de régler son compte.
Bachelard parlait d'obstacles épistémologiques: en voilà un sérieux, d'obstacle à la connaissance. On pointera donc deux formes d'obstacles, qu'on nommera, en improvisant de façon débridée: "l'instituteur psychotique surveilleur", et "le savant par génération spontanée". Et on rit, aussi. Pour se détendre.)
La manière "perverse", la "manipulation", dans la communication (celle que je nomme à tort ou à raison la manière "BC"), ça consiste à pratiquer la communication floue ou discontinue, oblique, par rébus, à jouer sur les mots, à souffler le chaud et le froid, dispatcher des informations toujours parcellaires, jamais claires, toujours mi figue mi raisin, claires-obscures, énoncés indirects, ouverts à de multiples lectures à double-sens, ou par anti-phrase.
Dans ces modalités d'expression, qui se situent dans l'a-subjectif et l'impersonnel, le récepteur est coincé par une injonction paradoxale: s'il se sent visé, c'est parce qu'il projette une intention sur ce qui n'en avait pas; s'il n'acte pas cette émission de signes, s'abstient, c'est susceptible de signifier quelque chose de son concernement, mais sur le mode de l'évitement.
Dans tous les cas, l'émetteur est abrité derrière le dispositif "neutre", et jouit de la position de contrôle: c'est vous qui interprétez, pas moi. Etc.
La manipulation perverse, dans la communication, fonctionne sur le trouble, l'incertain, l'indéterminé. Elle séduit par l'apparence d'énoncés ouverts et polysémiques dans lesquels l'interlocuteur est susceptible de bâtir des constructions qui le concernent intimement. Mais qui ne sont jamais ni confirmées ni invalidées.
Ceci a pour conséquence la manipulation, justement, qui est une volonté ou jouissance de contrôle (en termes de psychanalyse de buvette alcoolisée, j'appellerai ça, allez, hop: "jouissance par constipation rétentive". N'ayant pas peur des mots. Ce Grothendieck semblant doué pour la graphopathie).
Dépossédé de la capacité de déterminer plus ou moins clairement la position de l'émetteur, le récepteur accorde à l'émetteur le pouvoir de mettre fin à ce balancement, s'en remet à son bon vouloir.
A cette manière, j'oppose, moi, et parlant clairement en mon nom, une communication que je souhaite claire et distincte, frontale, non-ambigue dans l'expression d'une critique au sein d'une discussion, ou l'expression d'une anti-pathie manifeste, non dissimulée, dans une situation de conflit/crise entre individualités. Mais dans le contexte de la discussion en cours. Pas en déboulant par surprise, ou longtemps après, ou par dévouement "oblatif", en couvrant le contradicteur honni et démonisé d'injures scato-sexuelles accompagnées de menaces larvées.
Et voilà que ça relance, à l'occasion, de ci de là. C'est que la mansuétude qu'on s'accorde de fiche la paix à l'autre, si on veut, s'accorder la bienveillance de ne pas surveiller à la loupe le moindre de ses énoncés, belge ou pirottesque, n'est que conditionnelle. Et cette liberté conditionnelle accordée à l'autre, c'est peut-être bien généreux. Mais je ne demandais pas d'être continuellement "surpris".
On me suspectera difficilement de chercher à séduire, troubler, égarer, par des énoncés à double-sens. Toutes les cartes sont sur la table, même si la part indéterminée de l'interprétation, la mienne, celle de l'autre, sont insurmontables, ce qui est le lot de toute émission/réception de sens. Si du double-sens intervient, ce sera contre mon intention discursive.
Je ne cherche ni le pouvoir, ni le contrôle. Et si une obsession de contrôle ou de surveillance se manifeste à l'occasion de mes posts, je clarifie, je m'efforce à ce qu'aucun doute d'aucune sorte ne vienne planer là dessus ou l'encourager. Sans aucune garantie sur les feedbacks: je ne suis pas dans la tête de celui qui lit, je n'ai aucun contrôle sur les inférences qui seront les siennes à partir de mon discours. C'est d'ailleurs cette absence de garantie qui suscite chez moi l'anxiété et la multiplication de "clarifications". Qui le plus souvent se retournent en démonstration de "preuve" de ma volonté soi-disant de "soumettre".
Et si dans une hypothèse de cet ordre, je cherchais à contrôler, surveiller, soumettre, maitriser, que sais-je encore et en vertu de je ne sais trop quelle "psychose" (de l'usage de termes psychanalytiques pour définir un interlocuteur dans une communication): franchement, je m'y prendrais d'une autre manière, autrement plus efficace, autrement plus impersonnelle, autrement plus "neutralisante", "brouillante", autrement moins située sur le plan du "moi" du locuteur, autrement moins impliquée personnellement dans son discours.
Et paradoxalement (ou pas), ce souci de positionnement clair, efficace ou non (le plus souvent inefficace, vu la tendance assez générale et prisée pour le jugement personnel déguisé en considération générale, non-subjective), sera aisément qualifié de "baratin" ou de "gargarisme" chez ceux qui sempiternellement jugent, évaluent, soumettent, sans se sentir jamais tenus de justifier la moindre de leurs assertions.
Voilà pour l'écologie de la communication, les joies du net, et les leçons de respect à géométrie variable.
Petite réflexion adjacente, au sujet de la notion de "pervers".
Le manipulateur, ou ce qu'on appelle dans une certaine mauvaise littérature para-psychanalytique le "pervers-narcissique".
Marie-France Irigoyen, son best-seller: "Le Harcèlement Moral : la violence perverse au quotidien". Un truc qui a énormément marché dans les entreprises, le monde du travail et du salariat: ça a créé bien plus de paranoïa et de sentiment de harcèlement que ça n'en a guéri. En "psychologisant" les rapports de force dans l'entreprise, ne pouvant être décodés qu'en termes de problèmes privés opposant des personnes privées à d'autres personnes privées.
Ce bétonnage ou verrouillement du social par le psychologique permettant, dans l'entreprise, d'occulter tout en l'autorisant la dynamique objective du rapport de force social entre administrés et administrants, subordonnés et subordonnants.
Le résultat fut que les "victimes consentantes" de ce genre de schéma explicatif et curatif se sont davantage enfermées dans la peur et la dépendance, en se psychologisant elles-mêmes, en se quadrillant selon la grille proposée. La chasse au pervers comme agencement pervers lui-même et sans issue.
La littérature "psychologique" de M.F. Irigoyen, ainsi que celle de spécialistes de la "communication", Cyrulnik dans une fonction voisine, ou l'abruti Wolton, ont fortement contribué à valoriser l'intériorisation de la violence sociale chez les acteurs concernés. Ce genre de littérature, sans trop donner dans la nuance, est bon à jeter directement au panier. C'est surtout à ce genre de spécialistes de la communication qu'on doit des suicides dans les entreprises de télécommunication.
Lacan, sur ce genre de questions, devrait d'ailleurs être abordé avec des pincettes. Il y a toute une dynamique de jeu de pouvoir, de maitrise et de contrôle, exhibée et dissimulée en même temps, dans la notion d'analyste comme "n'étant pas le sujet supposé savoir".
Deleuze, ou Watzlawik par exemple, sont de bons antidotes contre ce psychanalysme aliénant - et mortifère.
Un texte désitué, donc, qui ne nous dit rien à propos de rien. Juste balancé, comme ça, de façon assez perverse, même. Du genre: "je montre ça je montre rien, faites-en ce que vous voulez, c'est pas moi qui interprète".
Mais le fait même de balancer ce truc, de façon "neutre", sans aucun commentaire, dans un contexte contigu, c'est une manière d'interpréter ou de pousser à l'interprétation, une invitation indirecte à "décoder" ce qui a eu lieu à travers une "grille".
Goût pour les montages, les machines textuelles ou scopiques, automates, autonomes, des dispositifs a-subjectifs.
Dans quel but? On nous dira sans doute: dans aucun but, voyons. C'est juste livré "comme ça". C'est vous qui projetez, pas moi.
Mais il n'y a qu'une fonction possible, souhaitée ou non, à cette façon de balancer un texte de ce genre: relancer la machine, jouer les prolongations, souffler sur les braises, jouer innocemment au pompier-pyromane. "je n'ai jamais voulu encourager ce truc", dira-t-on encore.
Autre exemple: effacer une insulte, sa trace par respect de la déontologie et du règlement, ce qui a pour effet objectif de juguler toute réactivité légitime Si la personne concernée replace la trace, pour dire qu'effacement n'est pas disparition du souvenir, on répondra: je l'avais effacée, c'est vous qui l'avez remise, j'ai cherché à régler le problème, mais c'est vous qui le relancez, etc etc.
Puis déplacer dans la zone du "règlement privé" une dynamique conflictuelle qui ne relevait pas du privé. Acquiescer à cette injonction, c'est donner raison au motif d'une agression justement fondée sur la supposition d'une nature "privée" ou "privatisable" des énoncés tenus par la personne interpelée.
Donc, ce long charabia glané sur le net et posté après un évènement bien déterminé, c'est neutre, chacun en fait ce qu'il veut, c'est son problème, etc. "Just like that".
Le dispositif est pervers, donc. Mais qu'on ne me traite pas de manipulateur ou de pervers, par la bande ou en le déniant ("c'est celui qui le dit qu'il est", etc), ou en disant que c'est moi qui interprète, en tant que paranoïaque, parce que je réagis à cette livraison neutre de texte comme à une livraison d'indices à explorer: elle est faite pour ça, elle sert à ça. Elle contraint doublement et paradoxalement: à la réponse ou au silence, qui la confirmeront comme "filtre révélateur" d'on ne sait quoi.
C'est la manière BC. La façon dont sa prose organise perpétuellement des réseaux de significations à partir de textes pris aléatoirement ou soumis à une interprétation aléatoire. Et qui suscite, en ce qui me concerne, une franche aversion. Partagée? Tant mieux: c'est plus clair en le disant.
Moi, quand je crève un abcès, je le crève pour de bon. ça veut dire crever les petites poches de pus où subsiste matière à ce genre de jeux irresponsables sur les signifiants.
J'en profite pour donner une petite précision, donc, à propos de notions comme "perversion", dont on peut faire facilement ses choux-gras dans une "cyber-psychanalyse" débridée. Ma précision est d'ordre systémique, au sens de Watzlawik, ou de Bateson, et non psychanalytique.
(Contestant l'efficience de la psychanalyse comme interprétation du "sujet" ou de la "personne", ne cessant d'indiquer les ravages qu'elle suscite, ses effets d'aliénation, d'enfermement et de pouvoir, je ne vais pas me priver de contester l'usage, pour le coup vraiment débridé, d'une cyber-psychanalyse où on s'improvise analyste d'énoncés en s'auto-validant tout seul devant son écran, pour accuser un contradicteur de se livrer à de la psychanalyse de nain, pire, d'être un sorte de pervers destructeur à qui il convient de régler son compte.
Bachelard parlait d'obstacles épistémologiques: en voilà un sérieux, d'obstacle à la connaissance. On pointera donc deux formes d'obstacles, qu'on nommera, en improvisant de façon débridée: "l'instituteur psychotique surveilleur", et "le savant par génération spontanée". Et on rit, aussi. Pour se détendre.)
La manière "perverse", la "manipulation", dans la communication (celle que je nomme à tort ou à raison la manière "BC"), ça consiste à pratiquer la communication floue ou discontinue, oblique, par rébus, à jouer sur les mots, à souffler le chaud et le froid, dispatcher des informations toujours parcellaires, jamais claires, toujours mi figue mi raisin, claires-obscures, énoncés indirects, ouverts à de multiples lectures à double-sens, ou par anti-phrase.
Dans ces modalités d'expression, qui se situent dans l'a-subjectif et l'impersonnel, le récepteur est coincé par une injonction paradoxale: s'il se sent visé, c'est parce qu'il projette une intention sur ce qui n'en avait pas; s'il n'acte pas cette émission de signes, s'abstient, c'est susceptible de signifier quelque chose de son concernement, mais sur le mode de l'évitement.
Dans tous les cas, l'émetteur est abrité derrière le dispositif "neutre", et jouit de la position de contrôle: c'est vous qui interprétez, pas moi. Etc.
La manipulation perverse, dans la communication, fonctionne sur le trouble, l'incertain, l'indéterminé. Elle séduit par l'apparence d'énoncés ouverts et polysémiques dans lesquels l'interlocuteur est susceptible de bâtir des constructions qui le concernent intimement. Mais qui ne sont jamais ni confirmées ni invalidées.
Ceci a pour conséquence la manipulation, justement, qui est une volonté ou jouissance de contrôle (en termes de psychanalyse de buvette alcoolisée, j'appellerai ça, allez, hop: "jouissance par constipation rétentive". N'ayant pas peur des mots. Ce Grothendieck semblant doué pour la graphopathie).
Dépossédé de la capacité de déterminer plus ou moins clairement la position de l'émetteur, le récepteur accorde à l'émetteur le pouvoir de mettre fin à ce balancement, s'en remet à son bon vouloir.
A cette manière, j'oppose, moi, et parlant clairement en mon nom, une communication que je souhaite claire et distincte, frontale, non-ambigue dans l'expression d'une critique au sein d'une discussion, ou l'expression d'une anti-pathie manifeste, non dissimulée, dans une situation de conflit/crise entre individualités. Mais dans le contexte de la discussion en cours. Pas en déboulant par surprise, ou longtemps après, ou par dévouement "oblatif", en couvrant le contradicteur honni et démonisé d'injures scato-sexuelles accompagnées de menaces larvées.
Et voilà que ça relance, à l'occasion, de ci de là. C'est que la mansuétude qu'on s'accorde de fiche la paix à l'autre, si on veut, s'accorder la bienveillance de ne pas surveiller à la loupe le moindre de ses énoncés, belge ou pirottesque, n'est que conditionnelle. Et cette liberté conditionnelle accordée à l'autre, c'est peut-être bien généreux. Mais je ne demandais pas d'être continuellement "surpris".
On me suspectera difficilement de chercher à séduire, troubler, égarer, par des énoncés à double-sens. Toutes les cartes sont sur la table, même si la part indéterminée de l'interprétation, la mienne, celle de l'autre, sont insurmontables, ce qui est le lot de toute émission/réception de sens. Si du double-sens intervient, ce sera contre mon intention discursive.
Je ne cherche ni le pouvoir, ni le contrôle. Et si une obsession de contrôle ou de surveillance se manifeste à l'occasion de mes posts, je clarifie, je m'efforce à ce qu'aucun doute d'aucune sorte ne vienne planer là dessus ou l'encourager. Sans aucune garantie sur les feedbacks: je ne suis pas dans la tête de celui qui lit, je n'ai aucun contrôle sur les inférences qui seront les siennes à partir de mon discours. C'est d'ailleurs cette absence de garantie qui suscite chez moi l'anxiété et la multiplication de "clarifications". Qui le plus souvent se retournent en démonstration de "preuve" de ma volonté soi-disant de "soumettre".
Et si dans une hypothèse de cet ordre, je cherchais à contrôler, surveiller, soumettre, maitriser, que sais-je encore et en vertu de je ne sais trop quelle "psychose" (de l'usage de termes psychanalytiques pour définir un interlocuteur dans une communication): franchement, je m'y prendrais d'une autre manière, autrement plus efficace, autrement plus impersonnelle, autrement plus "neutralisante", "brouillante", autrement moins située sur le plan du "moi" du locuteur, autrement moins impliquée personnellement dans son discours.
Et paradoxalement (ou pas), ce souci de positionnement clair, efficace ou non (le plus souvent inefficace, vu la tendance assez générale et prisée pour le jugement personnel déguisé en considération générale, non-subjective), sera aisément qualifié de "baratin" ou de "gargarisme" chez ceux qui sempiternellement jugent, évaluent, soumettent, sans se sentir jamais tenus de justifier la moindre de leurs assertions.
Voilà pour l'écologie de la communication, les joies du net, et les leçons de respect à géométrie variable.
Petite réflexion adjacente, au sujet de la notion de "pervers".
Le manipulateur, ou ce qu'on appelle dans une certaine mauvaise littérature para-psychanalytique le "pervers-narcissique".
Marie-France Irigoyen, son best-seller: "Le Harcèlement Moral : la violence perverse au quotidien". Un truc qui a énormément marché dans les entreprises, le monde du travail et du salariat: ça a créé bien plus de paranoïa et de sentiment de harcèlement que ça n'en a guéri. En "psychologisant" les rapports de force dans l'entreprise, ne pouvant être décodés qu'en termes de problèmes privés opposant des personnes privées à d'autres personnes privées.
Ce bétonnage ou verrouillement du social par le psychologique permettant, dans l'entreprise, d'occulter tout en l'autorisant la dynamique objective du rapport de force social entre administrés et administrants, subordonnés et subordonnants.
Le résultat fut que les "victimes consentantes" de ce genre de schéma explicatif et curatif se sont davantage enfermées dans la peur et la dépendance, en se psychologisant elles-mêmes, en se quadrillant selon la grille proposée. La chasse au pervers comme agencement pervers lui-même et sans issue.
La littérature "psychologique" de M.F. Irigoyen, ainsi que celle de spécialistes de la "communication", Cyrulnik dans une fonction voisine, ou l'abruti Wolton, ont fortement contribué à valoriser l'intériorisation de la violence sociale chez les acteurs concernés. Ce genre de littérature, sans trop donner dans la nuance, est bon à jeter directement au panier. C'est surtout à ce genre de spécialistes de la communication qu'on doit des suicides dans les entreprises de télécommunication.
Invité- Invité
Re: les joies du net
Ce Grothendieck semblant doué pour la graphopathie.
Sois poli, Jerzy, un peu, c'est pas vraiment n'importe qui, Grothendieck.....C'est pas n'importe quel mathématicien...
Je veux pas défendre une corporation - dont je ne fais pas partie, ni quelqu'un qui n'en a pas besoin. Mais par delà les monceaux de textes écrits - tirés de Moissons et Semailles je pense, que je ne mettrais pas dans "délirants", ne serait-ce parce qu'ils ont des objets plus précis que ce que l'apparence du texte en donne - et c'est son défaut majeur, le parcours de ce monsieur, ce qui lui est arrivé, qui ne fut pas que de sa "volonté", ne doit pas être réduit à "un délire". C'est beaucoup plus complexe que cela, je ne dis pas que c'est "très intéressant" ou profond - je vois bien que c'est de la graphopathie, le point n'est pas là. En tout cas il y a une histoire réelle, à la frontière de la folie, sans doute - et la question se pose : laquelle?, comme elle s'est posée pour Nietzsche, ou différemment, pour Holderlin. Je crois pas que l'on puisse passer sous silence cette histoire, et prendre le texte "comme tel", déconnecté de la vie de son auteur (je sais que je vais me faire taper sur les doigts, mais j'assume : c'est des doigts virtuels, après tout!). Il ne fit aucun effort pour "clarifier la connexion", en tout cas la rendre accessible à qui ne faisait pas partie du sérail - des universitaires géomètres algébristes de l'époque pour être précis (ce qui fait pas beaucoup, lol).
A noter que c'est un texte "pirate", puisque le monsieur a clairement demandé dans un cours communiqué au printemps 2010 qu'aucun texte de sa pomme ne soit disponible que ce soit par voie électronique ou autre. Même si le périmètre est obscur (est-ce que cela inclut les publications passées?)
http://tqft.net/misc/Grothendieck%27s%20Declaration.pdf
C'est quelqu'un qu'est devenu "fou" pour des raisons pas simples - c'est jamais le cas, tu vas me dire...Sauf que se mélange, dans son cas, c'est justement ce qui en fait l'intérêt, à la fois la plus grande mégalomanie, et la plus grande modestie, un peu comme le Nietzsche des derniers textes, et puis surtout une incapacité à se positionner par rapport à cela, d'où l'effondrement....Et puis la solitude extrême des gens qui virent vers des prétentions impuissantes, qui les tuent de l'intérieur.
Le texte devait être nettoyé pour une édition chez Odile Jacob, Grothendieck ne l'accepta pas, ce qui fait que ne reste que 2000 pages pirates incompréhensibles sans le décodage mathématique et humain nécessaire.
C'est pas Quéau, pour résumer...
IQI- Messages : 66
Re: les joies du net
L’hypothèse d’une communication claire, frontale, limpide, sans zones d’ombre est parfaitement chimérique, tout comme celle d’un consensus total sur et par le langage. L’outil n’est pas assez performant pour ça. Sans doute il faut s’efforcer de se diriger dans cette direction. Ici par-dessus le marché c’est un forum, un truc tout tissé de paroles impures, de débordements et de cafouillages, une tour de Babel.
Il y aurait quelque chose de parfaitement dingue à exiger le contrôle par chacun de ses propres discours.
On en était à théoriser sur les côtés navrants de l’ad hominem ; puis finalement c’est idiot, de l’ad hominem il en reste toujours un peu, toujours trop. Maintenant il faudrait se demander s’il ne serait pas judicieux de réglementer aussi le lancé en l’air, le sans-adresse ? Censurer ce qui n’est pas bien net, ce qui pourrait peut-être laisser sous-entendre des trucs ?
Ouais, ce texte de Grothendieck entre clinique et critique est parfaitement intéressant, pour ceux que ça intéresse, vis-à-vis des forums, de leur mode d’écriture, de la façon dont ça communique et dont ça foire un coup sur deux, entre autres. C’est un sujet un peu morbide et glauque sur les bords, peut-être ? Me semblait qu’ici sur la porte il y avait marqué « spectres », ça semble annoncer une certaine ouverture.
Grothendieck par exemple, il lui arrive la même chose que Jean-Jacques Rousseau premier du nom, il trouve que beaucoup trop de gens lui en veulent. Selon lui c’est à cause de son côté Superyang. Bien. Jerzy fait quelques temps plus tard et à côté une tartine sur un autre Jean-Jacques Rousseau : fichtre, faudrait-il interpréter cela comme une réponse, un renvoi, l’organisation d’un « réseau de significations » ? Pas du tout : puisqu’il s’agit de la parole pure et d’airain de Monsieur Jerzy, si limpide, pure comme l’eau claire. Y a même pas de calembour, rien à voir. En revanche et pour les mêmes raisons, lui est en droit de me reprendre à la racine sur mes travers communicationnels, sur le fait que ne disant rien j’en dis trop, et ne me prononçant pas je juge et condamne et donne des leçons ; et fondamentalement, me taisant je prémédite, je conspire, je sournoisifie à plein fourneau.
Tout cela est assez inepte. C'est le malentendu élevé au rang d'art. Je regrette, encore, d’avoir mis le pied dedans, tiens. Trop fatiguant. Et je plaide coupable, pas de problème là-dessus. Hélas, je crois qu’il y va pour moi, comme pour les autres, de l’exposition de mes petits problèmes de fonctionnement. C’est très fâcheux.
On devrait instaurer une garde alternée de la parole pleine, chacun à tour de rôle aurait une parole d'airain, insécable et bonne comme le bon pain d'antan. Ça serait autrement moins conflictuel.
Bon. Mais en dehors de ces bisbilles, il y a bien certainement des différends intéressants à annoter, à discuter, à mettre en scène. Puis sans doute, on est déjà en plein dans ce travail, même si on s'y prend chacun avec ses pieds, voire ceux d'un autre.
Il y aurait quelque chose de parfaitement dingue à exiger le contrôle par chacun de ses propres discours.
On en était à théoriser sur les côtés navrants de l’ad hominem ; puis finalement c’est idiot, de l’ad hominem il en reste toujours un peu, toujours trop. Maintenant il faudrait se demander s’il ne serait pas judicieux de réglementer aussi le lancé en l’air, le sans-adresse ? Censurer ce qui n’est pas bien net, ce qui pourrait peut-être laisser sous-entendre des trucs ?
Ouais, ce texte de Grothendieck entre clinique et critique est parfaitement intéressant, pour ceux que ça intéresse, vis-à-vis des forums, de leur mode d’écriture, de la façon dont ça communique et dont ça foire un coup sur deux, entre autres. C’est un sujet un peu morbide et glauque sur les bords, peut-être ? Me semblait qu’ici sur la porte il y avait marqué « spectres », ça semble annoncer une certaine ouverture.
Grothendieck par exemple, il lui arrive la même chose que Jean-Jacques Rousseau premier du nom, il trouve que beaucoup trop de gens lui en veulent. Selon lui c’est à cause de son côté Superyang. Bien. Jerzy fait quelques temps plus tard et à côté une tartine sur un autre Jean-Jacques Rousseau : fichtre, faudrait-il interpréter cela comme une réponse, un renvoi, l’organisation d’un « réseau de significations » ? Pas du tout : puisqu’il s’agit de la parole pure et d’airain de Monsieur Jerzy, si limpide, pure comme l’eau claire. Y a même pas de calembour, rien à voir. En revanche et pour les mêmes raisons, lui est en droit de me reprendre à la racine sur mes travers communicationnels, sur le fait que ne disant rien j’en dis trop, et ne me prononçant pas je juge et condamne et donne des leçons ; et fondamentalement, me taisant je prémédite, je conspire, je sournoisifie à plein fourneau.
Tout cela est assez inepte. C'est le malentendu élevé au rang d'art. Je regrette, encore, d’avoir mis le pied dedans, tiens. Trop fatiguant. Et je plaide coupable, pas de problème là-dessus. Hélas, je crois qu’il y va pour moi, comme pour les autres, de l’exposition de mes petits problèmes de fonctionnement. C’est très fâcheux.
On devrait instaurer une garde alternée de la parole pleine, chacun à tour de rôle aurait une parole d'airain, insécable et bonne comme le bon pain d'antan. Ça serait autrement moins conflictuel.
Bon. Mais en dehors de ces bisbilles, il y a bien certainement des différends intéressants à annoter, à discuter, à mettre en scène. Puis sans doute, on est déjà en plein dans ce travail, même si on s'y prend chacun avec ses pieds, voire ceux d'un autre.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
Mais Balthazar, une fois de plus, tu me lis mal, si tu m'accordes de prononcer cette outrecuidance. Permets-moi donc de préciser pour plus de? plus de? Compréhension. Et par souci de? souci de? Clarté. Compréhension et clarté n'étant jamais? n'étant jamais? Garanties. Toute émission textuelle étant sujette à? Sujette à? Interprétation libre.
Je ne cesse de dire par ailleurs qu'il n'y a pas de communication transparente, désambiguisée, purgée, assainie, univoque, etc, que c'est impossible, etc, et de dire qu'il y a constamment contamination, perméabilité, empiètement, projection, interférence, dispersion, dissémination.
Justement, c'est en connaissance de cela que je dis qu'il n'est pas absolument nécessaire d'en rajouter constamment une couche avec des énoncés à double sens, ambigus, dont on ne sait trop jamais s'ils sont une antiphrase, du lard et du cochon, entre chien et loup, etc. Sutout si on la prétention, ou du moins l'exigence revendiquée, d'énoncer des analyses un peu critiques, qui sortent un peu du flux permanent et chaotique de l'opinion.
Et surtout balancer une longue citation, sans explication, dans un contexte x qui ne peut que faire résonance et donner lieu à des interprétations les plus diverses.
Sachant cela, on peut, non pas fantasmer une pure transparence des âmes platonicienne, c'est une évidence, mais du moins éviter de "relancer" les malentendus en ayant l'air de vouloir y mettre fin.
L'émission de significations relativement non-ambigues, c'est possible. Ne serait que pour analyser le phénomène de l'ambiguité. On peut parler de chaos sans être chaotique. On peut parler d'opacité sans être opaque. On peut parler de dispersion sans être dispersé, etc, etc.
Sinon, le net n'est pas un outil assez ou pas assez performant, pour rendre possible, ou impossible, une communication à double-sens, à sens univoque, ou parfaitement incompréhensible. Aucun espace, virtuel ou non-virtuel, ne serait par nature lieu d'un sens univoquement partagé ou compris.
Le medium n'est pas en cause: ce genre de pratique énonciative est aussi le fait de n'importe quel contexte de communication.
Facile d'attribuer au medium, à sa nature de medium, une impossibilité de s'exprimer plus ou moins clairement, plus ou moins compréhensiblement.
Facile d'invoquer la nature du medium pour s'adonner, sans souci de réflexivité un peu critique, à l’interprétation des énoncés de ses interlocuteurs en termes "psychanalytiques".
Facile de se contenter de citations balancées à la diable, censément intéressantes "per se" (un Rotary Bot, sur fdc, fait ça très bien), ou censément faire sens parce qu'on aura procédé à quelques montages, raccords, s'éxonérant ainsi du labeur d'énoncer, analyser, argumenter, approfondir une recherche et en rendre compte.
Facile d'user du medium pour s'improviser spécialiste de tout et de n'importe quoi, s'accorder d'énoncer des calembredaines sur des questions et des champs qu'on ne maîtrise absolument pas. Et dans le but, par exemple, de rabattre leur caquet prétentieux à des interlocuteurs dont on estime, au mieux, que ce sont d'arrogants donneurs de leçon, à la limite, de bons cas (aggravés par un abus d'alcool ou autres substances propices aux états de conscience modifiée) pour une psychanalyse sauvage, et au pire, des pervers psychotiques.
Oui, le net permet tout ça, toutes ces joies. Mais tout ce qui est "hors-net" le permet également.
En l’occurrence, ce texte de Grothendieck, quelle que soit sa valeur intrinsèque, qu'aurait-il à nous dire, à nous révéler, au sujet du conflit connexe auquel il se trouve greffé et certainement pas par hasard?
Tu dis qu'il est parfaitement intéressant, entre clinique et critique, pour ceux qui y apprendraient quelque chose sur leur mode d'écriture ou la circulation de leur écriture dans les forums, etc?
Là encore, projection et détournement de sens tout à fait aléatoire, sur un fragment de texte dont ce n'est ni la fonction ni la destination.
Un texte de ce type ne dit rien en soi. Dégagé du contexte où il s'insère.
Ce qui est douteux, ce qui relève justement du fantasme d'une circulation transparente du sens, immédiate, c'est de croire qu'il se suffit à lui-même, et qu'il nous informe sur un phénomène précis.
Il ne nous apprend rien, non seulement là-dessus, mais encore il ne nous apprend rien sur quoi que ce soit, car on ne voit pas bien quel sens, quelle intelligibilité s'en dégage. On ne saisit pas l'unité de signification d'un tel texte, qui est de l'ordre de la ratiocination.
C'est certainement très beau, très impressionnant, pour ceux que ça impressionne, mais ça veut franchement pas dire grand-chose.
Et une chose est sûre, ça n'éclaire rien, mais brouille plus encore, à propos du phénomène censé s'y raccrocher causalement, par analogie résonante.
Donc, à part encourager la machinerie sans fin des interprétations et des projections, je ne vois pas trop l'utilité de ce dispositif.
Ce n'est pas parce que Grothendieck est un grand génie des mathématiques qu'ipso facto, ses ratiocinations psycho-analytiques ont une vertu éclairante sui-generis dans un contexte de communication.
C'est quoi, ce scientisme, IQI?
Parce que G est un mathématicien, ça donnerait un crédit, une légitimité, à des ratiocinations obscures sur un domaine flou, entre psychanalyse solitaire et méditation? En quoi le fait d'être mathématicien offre une garantie à la pertinence d'une telle production textuelle?
En quoi l'intérêt littéraire de ce texte, même en invoquant Hölderlin, ou autre, a quelque chose à nous dire sur ce qui s'est passé ici? Parce que le monsieur est mathématicien? Allons. S'il était porteur de siphons ou amalgameur de quenouilles, ce texte passionnant (effacé entretemps) n'aurait ni plus ni moins de valeur.
C'est comme si je postais un texte de J.P. Petit, astrophysicien émérite, spécialiste de la mécanique des fluides, sur l'invasion de l'espace aérien par les petits-gris, et que le seul fait que J.P. Petit soit un scientifique émérite rende "très intéressantes", "super-passionnantes", ses inférences et réflexions au sujet des petits gris, de la technologie extra-terrestre, etc.
Puis que je place sa réflexion au sujet des petits gris dans un contexte d'échange forumique où un mec dit qu'il pense être surveillé par des petits-gris. En ajoutant: c'est un texte très intéressant, qui nous apprend quelque chose sur notre rapport aux petits-gris, et en plus, c'est le témoignage de première main d'un grand scientifique qui a fort souffert de la méchanceté des hommes, d'une kabbale montée par ses collègues contre lui. Etc etc.
Les réflexions et démonstrations de J.P. Petit sur ce sujet sont certainement hyper-intéressantes. Mais ce qui sera hyper-intéressant, ce sera ce que J.P. Petit nous apprendra non pas au sujet des petits-gris, mais à son propre sujet.
Dans la même logique, les réflexions proto-psychanalytiques de G. au sujet de l'offense, la rancune différée, sont certainement hyper-intéressantes. Mais ce qui sera hyper-intéressant, ce sera ce que G. nous apprend non pas au sujet de l'offense et de la rancune différée, mais à son propre sujet.
Comme candidat potentiel à la troisième édition de l'anthologie des "fous littéraires" (où on trouve des scientifiques éminents dans leur domaine, spécialistes du complot des farfadets par loisir, souffrance ou introspection, thématique les concernant personnellement et stimulant des graphopathies de plus de 1000 pages hyper-intéressantes).
Tout ça a bcp d'intérêt, et ça fait questionner le lien entre littérature et raison. Déraison interne ou externe à la raison, dans le débat entre Foucault et Derrida, peut-être. Mais c'était pas le sujet. Ni le contexte. Ni la portée.
Pour lui-même, ce texte n'a aucune efficience ou portée "psychanalytique" quelconque, qui semble être son objet:
non seulement parce que la clinique psychanalytique est un modèle contestable pour des tas de raisons, non seulement parce que ce modèle sert en l'occurrence à déplacer le phénomène dont il était question dans le champ de l'interprétation psychanalytique, mais encore parce que, même au titre d'un exercice psychanalytique considéré pour lui-même, ce texte n'est qu'une introspection pure, monologique, sans portes ni fenêtres, sans la moindre portée clinique possible en admettant une efficacité - douteuse - de la clinique psychanalytique.
IQI: Mon propos ne concerne donc pas la valeur en soi d'un tel texte. Qu'il soit intéressant, comme objet littéraire, à la "frontière" entre "folie" et "raison", tout ce qu'on voudra, mais ce n'était pas ma question.
Ma remarque, pour me répéter puisque bis repetitas non solum utilia sunt sed placet, c'est qu'il ne recèle, considéré pour lui-même, aucun lien de causalité qu'on s'efforce de suggérer pour "éclairer" l'agression et le conflit résultant. Ce prétendu éclairage ne pouvant que s'offrir comme une relance à exploiter: notamment parce qu'il suggère, obliquement, sans en avoir l'air, de "psychanalyser" le bazar.
D'autant qu'on espère ou espérait en avoir fini, avec ce bazar.
C'est quand-même simple à comprendre.
Placé dans une apparence de neutralité désituée, non seulement il ne l'éclaire pas, mais il est "offert" comme montage, dispositif pour interpréter, des façons les plus diverses, le conflit sous un angle pyschanalytique débridé, qui plus est borderline. Contribuer à psychologiser plus encore l'agression et le motif de cette agression.
Ma précision était de contester cette psychanalysation et cette production d'analogies douteuses.
Et si le "net" n'est pas, et pas plus que n'importe quel espace d'échange, le lieu "approprié" pour une dynamique de style psychanalytique, la citation d'un long texte de nature non-dialogique, au contenu flou, n'est pas des plus appropriés non plus.
C'est quand-même pas chinois ce que je raconte.
* * * *
Pour le reste, Balthazar, tu confonds "parole pure et d'airain" avec souci de clarté. C'est pas tout à fait la même chose. Preuve en est: même en tentant d'être le plus clair possible, on est encore compris de travers.
Maintenant, on peut arrêter ces bisbilles stimulantes, aussi. C'est une éventualité intéressante.
Je conçois que mes tartines t'indisposent, même quand je cause cinéma. En tant que membre co-fondateur et canal historique des Spectres du cinéma, tu es resté fidèle à un événement qui a ouvert la porte de tes perceptions.
Depuis cet événement notable, tu t'es fait assez discret. De temps à autre, un bon texte, il est vrai. Quelques citations intéressantes, un bel herbier, qui nous donnent à penser, pauvres mortels s'adonnant au vacarme du blabla.
Peu de dialogisme, pas mal de boulot administratif sur le feu.
En tant que paranoïaque, j'ai remarqué que tu étais plus présent sur le forum quand j'y suis plus présent. Parce que tu tends à t'ennuyer, à "bailler", quand je ne suis pas là. Et ça, je peux comprendre: parce que je suis un mec divertissant.
Et tu es sans doute assez occupé, tu as un travail qui te prend de ton temps, et je respecte cela, sans la moindre ironie. Ceci t'empêche un peu de goûter les joies du net. Ce n'est pas du jeu qu'un chômiste, disposant d'une temporalité dilatée, inonde le forum des Spectres de ses tartines à répétition, et se croit autorisé à interpeler des développements qu'il considère à tort ou à raison hasardeux.
Et surtout, de quel droit prétend-il réagir à ces développements et exprimer son point de vue (d'une façon certes pas toujours impeccablement gentleman), dans un jeu d'action et de réaction qu'on appelle un "forum"?
Je ne cesse de dire par ailleurs qu'il n'y a pas de communication transparente, désambiguisée, purgée, assainie, univoque, etc, que c'est impossible, etc, et de dire qu'il y a constamment contamination, perméabilité, empiètement, projection, interférence, dispersion, dissémination.
Justement, c'est en connaissance de cela que je dis qu'il n'est pas absolument nécessaire d'en rajouter constamment une couche avec des énoncés à double sens, ambigus, dont on ne sait trop jamais s'ils sont une antiphrase, du lard et du cochon, entre chien et loup, etc. Sutout si on la prétention, ou du moins l'exigence revendiquée, d'énoncer des analyses un peu critiques, qui sortent un peu du flux permanent et chaotique de l'opinion.
Et surtout balancer une longue citation, sans explication, dans un contexte x qui ne peut que faire résonance et donner lieu à des interprétations les plus diverses.
Sachant cela, on peut, non pas fantasmer une pure transparence des âmes platonicienne, c'est une évidence, mais du moins éviter de "relancer" les malentendus en ayant l'air de vouloir y mettre fin.
L'émission de significations relativement non-ambigues, c'est possible. Ne serait que pour analyser le phénomène de l'ambiguité. On peut parler de chaos sans être chaotique. On peut parler d'opacité sans être opaque. On peut parler de dispersion sans être dispersé, etc, etc.
Sinon, le net n'est pas un outil assez ou pas assez performant, pour rendre possible, ou impossible, une communication à double-sens, à sens univoque, ou parfaitement incompréhensible. Aucun espace, virtuel ou non-virtuel, ne serait par nature lieu d'un sens univoquement partagé ou compris.
Le medium n'est pas en cause: ce genre de pratique énonciative est aussi le fait de n'importe quel contexte de communication.
Facile d'attribuer au medium, à sa nature de medium, une impossibilité de s'exprimer plus ou moins clairement, plus ou moins compréhensiblement.
Facile d'invoquer la nature du medium pour s'adonner, sans souci de réflexivité un peu critique, à l’interprétation des énoncés de ses interlocuteurs en termes "psychanalytiques".
Facile de se contenter de citations balancées à la diable, censément intéressantes "per se" (un Rotary Bot, sur fdc, fait ça très bien), ou censément faire sens parce qu'on aura procédé à quelques montages, raccords, s'éxonérant ainsi du labeur d'énoncer, analyser, argumenter, approfondir une recherche et en rendre compte.
Facile d'user du medium pour s'improviser spécialiste de tout et de n'importe quoi, s'accorder d'énoncer des calembredaines sur des questions et des champs qu'on ne maîtrise absolument pas. Et dans le but, par exemple, de rabattre leur caquet prétentieux à des interlocuteurs dont on estime, au mieux, que ce sont d'arrogants donneurs de leçon, à la limite, de bons cas (aggravés par un abus d'alcool ou autres substances propices aux états de conscience modifiée) pour une psychanalyse sauvage, et au pire, des pervers psychotiques.
Oui, le net permet tout ça, toutes ces joies. Mais tout ce qui est "hors-net" le permet également.
En l’occurrence, ce texte de Grothendieck, quelle que soit sa valeur intrinsèque, qu'aurait-il à nous dire, à nous révéler, au sujet du conflit connexe auquel il se trouve greffé et certainement pas par hasard?
Tu dis qu'il est parfaitement intéressant, entre clinique et critique, pour ceux qui y apprendraient quelque chose sur leur mode d'écriture ou la circulation de leur écriture dans les forums, etc?
Là encore, projection et détournement de sens tout à fait aléatoire, sur un fragment de texte dont ce n'est ni la fonction ni la destination.
Un texte de ce type ne dit rien en soi. Dégagé du contexte où il s'insère.
Ce qui est douteux, ce qui relève justement du fantasme d'une circulation transparente du sens, immédiate, c'est de croire qu'il se suffit à lui-même, et qu'il nous informe sur un phénomène précis.
Il ne nous apprend rien, non seulement là-dessus, mais encore il ne nous apprend rien sur quoi que ce soit, car on ne voit pas bien quel sens, quelle intelligibilité s'en dégage. On ne saisit pas l'unité de signification d'un tel texte, qui est de l'ordre de la ratiocination.
C'est certainement très beau, très impressionnant, pour ceux que ça impressionne, mais ça veut franchement pas dire grand-chose.
Et une chose est sûre, ça n'éclaire rien, mais brouille plus encore, à propos du phénomène censé s'y raccrocher causalement, par analogie résonante.
Donc, à part encourager la machinerie sans fin des interprétations et des projections, je ne vois pas trop l'utilité de ce dispositif.
Ce n'est pas parce que Grothendieck est un grand génie des mathématiques qu'ipso facto, ses ratiocinations psycho-analytiques ont une vertu éclairante sui-generis dans un contexte de communication.
C'est quoi, ce scientisme, IQI?
Parce que G est un mathématicien, ça donnerait un crédit, une légitimité, à des ratiocinations obscures sur un domaine flou, entre psychanalyse solitaire et méditation? En quoi le fait d'être mathématicien offre une garantie à la pertinence d'une telle production textuelle?
En quoi l'intérêt littéraire de ce texte, même en invoquant Hölderlin, ou autre, a quelque chose à nous dire sur ce qui s'est passé ici? Parce que le monsieur est mathématicien? Allons. S'il était porteur de siphons ou amalgameur de quenouilles, ce texte passionnant (effacé entretemps) n'aurait ni plus ni moins de valeur.
C'est comme si je postais un texte de J.P. Petit, astrophysicien émérite, spécialiste de la mécanique des fluides, sur l'invasion de l'espace aérien par les petits-gris, et que le seul fait que J.P. Petit soit un scientifique émérite rende "très intéressantes", "super-passionnantes", ses inférences et réflexions au sujet des petits gris, de la technologie extra-terrestre, etc.
Puis que je place sa réflexion au sujet des petits gris dans un contexte d'échange forumique où un mec dit qu'il pense être surveillé par des petits-gris. En ajoutant: c'est un texte très intéressant, qui nous apprend quelque chose sur notre rapport aux petits-gris, et en plus, c'est le témoignage de première main d'un grand scientifique qui a fort souffert de la méchanceté des hommes, d'une kabbale montée par ses collègues contre lui. Etc etc.
Les réflexions et démonstrations de J.P. Petit sur ce sujet sont certainement hyper-intéressantes. Mais ce qui sera hyper-intéressant, ce sera ce que J.P. Petit nous apprendra non pas au sujet des petits-gris, mais à son propre sujet.
Dans la même logique, les réflexions proto-psychanalytiques de G. au sujet de l'offense, la rancune différée, sont certainement hyper-intéressantes. Mais ce qui sera hyper-intéressant, ce sera ce que G. nous apprend non pas au sujet de l'offense et de la rancune différée, mais à son propre sujet.
Comme candidat potentiel à la troisième édition de l'anthologie des "fous littéraires" (où on trouve des scientifiques éminents dans leur domaine, spécialistes du complot des farfadets par loisir, souffrance ou introspection, thématique les concernant personnellement et stimulant des graphopathies de plus de 1000 pages hyper-intéressantes).
Tout ça a bcp d'intérêt, et ça fait questionner le lien entre littérature et raison. Déraison interne ou externe à la raison, dans le débat entre Foucault et Derrida, peut-être. Mais c'était pas le sujet. Ni le contexte. Ni la portée.
Pour lui-même, ce texte n'a aucune efficience ou portée "psychanalytique" quelconque, qui semble être son objet:
non seulement parce que la clinique psychanalytique est un modèle contestable pour des tas de raisons, non seulement parce que ce modèle sert en l'occurrence à déplacer le phénomène dont il était question dans le champ de l'interprétation psychanalytique, mais encore parce que, même au titre d'un exercice psychanalytique considéré pour lui-même, ce texte n'est qu'une introspection pure, monologique, sans portes ni fenêtres, sans la moindre portée clinique possible en admettant une efficacité - douteuse - de la clinique psychanalytique.
IQI: Mon propos ne concerne donc pas la valeur en soi d'un tel texte. Qu'il soit intéressant, comme objet littéraire, à la "frontière" entre "folie" et "raison", tout ce qu'on voudra, mais ce n'était pas ma question.
Ma remarque, pour me répéter puisque bis repetitas non solum utilia sunt sed placet, c'est qu'il ne recèle, considéré pour lui-même, aucun lien de causalité qu'on s'efforce de suggérer pour "éclairer" l'agression et le conflit résultant. Ce prétendu éclairage ne pouvant que s'offrir comme une relance à exploiter: notamment parce qu'il suggère, obliquement, sans en avoir l'air, de "psychanalyser" le bazar.
D'autant qu'on espère ou espérait en avoir fini, avec ce bazar.
C'est quand-même simple à comprendre.
Placé dans une apparence de neutralité désituée, non seulement il ne l'éclaire pas, mais il est "offert" comme montage, dispositif pour interpréter, des façons les plus diverses, le conflit sous un angle pyschanalytique débridé, qui plus est borderline. Contribuer à psychologiser plus encore l'agression et le motif de cette agression.
Ma précision était de contester cette psychanalysation et cette production d'analogies douteuses.
Et si le "net" n'est pas, et pas plus que n'importe quel espace d'échange, le lieu "approprié" pour une dynamique de style psychanalytique, la citation d'un long texte de nature non-dialogique, au contenu flou, n'est pas des plus appropriés non plus.
C'est quand-même pas chinois ce que je raconte.
* * * *
Pour le reste, Balthazar, tu confonds "parole pure et d'airain" avec souci de clarté. C'est pas tout à fait la même chose. Preuve en est: même en tentant d'être le plus clair possible, on est encore compris de travers.
Maintenant, on peut arrêter ces bisbilles stimulantes, aussi. C'est une éventualité intéressante.
Je conçois que mes tartines t'indisposent, même quand je cause cinéma. En tant que membre co-fondateur et canal historique des Spectres du cinéma, tu es resté fidèle à un événement qui a ouvert la porte de tes perceptions.
Depuis cet événement notable, tu t'es fait assez discret. De temps à autre, un bon texte, il est vrai. Quelques citations intéressantes, un bel herbier, qui nous donnent à penser, pauvres mortels s'adonnant au vacarme du blabla.
Peu de dialogisme, pas mal de boulot administratif sur le feu.
En tant que paranoïaque, j'ai remarqué que tu étais plus présent sur le forum quand j'y suis plus présent. Parce que tu tends à t'ennuyer, à "bailler", quand je ne suis pas là. Et ça, je peux comprendre: parce que je suis un mec divertissant.
Et tu es sans doute assez occupé, tu as un travail qui te prend de ton temps, et je respecte cela, sans la moindre ironie. Ceci t'empêche un peu de goûter les joies du net. Ce n'est pas du jeu qu'un chômiste, disposant d'une temporalité dilatée, inonde le forum des Spectres de ses tartines à répétition, et se croit autorisé à interpeler des développements qu'il considère à tort ou à raison hasardeux.
Et surtout, de quel droit prétend-il réagir à ces développements et exprimer son point de vue (d'une façon certes pas toujours impeccablement gentleman), dans un jeu d'action et de réaction qu'on appelle un "forum"?
Dernière édition par jerzy P le Mer 15 Fév 2012 - 17:08, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: les joies du net
Jerzy,
je note avec soin tes observations qui me paraissent pour la plupart pertinentes. Et je trouve tes textes intéressants, combien de fois faudra-t-il te le répéter ? Mais tout de même arrête s’il-te-plaît d’annoter mon parcours, mon comportement et mes petits travers. Et je me permettrais d’ajouter, sur une note plus acide que tu voudras bien mettre sur le compte de la fatigue nerveuse, que tu n’es pas vraiment le seul chômeur paranoïaque du wouèbe.
Bien cordialement
je note avec soin tes observations qui me paraissent pour la plupart pertinentes. Et je trouve tes textes intéressants, combien de fois faudra-t-il te le répéter ? Mais tout de même arrête s’il-te-plaît d’annoter mon parcours, mon comportement et mes petits travers. Et je me permettrais d’ajouter, sur une note plus acide que tu voudras bien mettre sur le compte de la fatigue nerveuse, que tu n’es pas vraiment le seul chômeur paranoïaque du wouèbe.
Bien cordialement
balthazar claes- Messages : 1009
Re: les joies du net
Balthazar, enfin, et cher ami!
Voilà comment j'aime t'entendre parler.
Je prends acte de ta doléance légitime et je te fous une paix royale.
Merci,
et toute ma reconnaissance.
Voilà comment j'aime t'entendre parler.
Je prends acte de ta doléance légitime et je te fous une paix royale.
Merci,
et toute ma reconnaissance.
Invité- Invité
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