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La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana...

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Message par Invité Sam 10 Mar 2012 - 9:29

Un topic qui pourrait servir à lister les films favoris sur les fous,

à parler de la folie au cinéma,

du chaos sans être chaotique...
http://www.revue-chimeres.fr/drupal_chimeres/?q=node/344



Premier de la liste:

Saint-Anne, hôpital psychiatrique d'Ilan Klipper
Ce film-là m'a pas mal remué, il est disponible dans son intégralité sur Dailymotion:



c'est le Dr. Michel Fouillet qu'on voit dans ce film, je suis assez pour qu'on le fusille sur la place publique: http://www.arte.tv/fr/Comprendre-le-monde/Sainte-Anne--hopital-psychiatrique/3161512,CmC=3191526.html


La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana... GUATTARI

Important, Le journal de Léros, par Félix Guattari: http://www.revue-chimeres.fr/drupal_chimeres/files/18chi02.pdf



Entretien avec Nicolas Philibert sur La moindre des choses:
http://nicolasphilibert.fr/media/objets_telechargeables/La-Moindre-entretien.pdf
http://nicolasphilibert.fr/media/objets_telechargeables/MDC-Les-Cahiers-511.pdf
http://nicolasphilibert.fr/media/objets_telechargeables/MDC-Ils%20me%20disaient.pdf



La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana... Cutter%27s%20way
Cutter's way

La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana... Loana1
Ceci n'est pas une pipe.


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Message par Invité Sam 10 Mar 2012 - 14:51

Dans cette liste,

le Général Ripper, qui ne supporte pas qu'on souille ses précieux fluides corporels.

La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana... Ripper


J'en reviens à Guattari, je découvre ce texte, De Leros à La Borde:

Dans les années cinquante, la psychiatrie française avait la hideur qu'on lui connaît encore... Les psychotiques objets d'un système de gardiennage quasi-animal prennent nécessairement une allure bestiale, tournant en rond toute la journée, se frappant la tête contre les murs, criant, se battant, croupissant dans la crasse et les excréments. Ces malades, dont l'appréhension et le rapport à autrui sont perturbés, perdent peu à peu, dans un tel contexte, leurs caractéristiques humaines, devenant sourds et aveugles à toute communication sociale. Leurs gardiens qui n'avaient à cette époque aucune formation, étaient contraints de se retrancher derrière une sorte de cuirasse d'inhumanité, s'ils voulaient échapper eux-mêmes au désespoir et à la dépression.
Spoiler:

André, 53 ans d'asile:


La folie, un artefact:



J'en reviens aussi à Cutter, l'idéologue plein de schémas clé-en main, vraie machine à casser la pensée, vraie machine à catégoriser ; l'éternelle prise d'otage des autres, de toute forme d'autre...
Déjà dit je crois, un ours en peluche décède. (voir les extraits cités)






La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana... L%27origine%20du%20monde
L'origine du monde

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Message par Invité Sam 10 Mar 2012 - 17:11

Bonjour breaker.

Tentons de sérier les problèmes, autant que faire ce peu.




1) Quelques considérations générales sur la "folie":


La phrase, dans son contexte, était ironique et voulait surtout dire: il y a pas bcp de "fous" géniaux", la "folie" n'est pas intéressante (on tend parfois à la mythologiser), et même en prenant la position de "fou" censé inquiéter ma "rationalité" normative, tu ne parviendras pas à te rendre intéressant.


D'ailleurs, je ne cesse de dire que d'une certaine façon je ne crois pas à la "folie", surtout cette "folie" qu'on romantise, mythologise, esthétise, etc, dont on fait une cause rédemptrice. Dans un schéma binaire sujet-metteur en scène-objectivant/objet mis en scène-objectivé, sur lequel un Rancière pourrait dire certaines choses, là encore.

Il n'y a pas "la folie", il y a la misère, l'absence d’œuvre (comme disait Foucault).
Et certaines formes de son exploitation. Dont une certaine forme de regard prétendument généreux, compassionnel, qui enferme bien plus qu'il ne libère. Et je me méfie terriblement de pas mal de "documentaires" (y compris ceux qui sont faits dans une perspective "anti-psychiatrique"), qui sous couvert de rendre au sujet sa "dignité", de lui "rendre la parole" ou "le silence", l'objectivent dans une image et le réduisent indirectement à cette parole ou à ce silence. Les dispositifs de manipulation et domination existent, malgré, et derrière, des tas de bonnes intentions très généreuses.
Là encore, Rancière aurait été une occasion de "déplacer" un peu les pensées-réflexe et les habituels montages qui ne la signifient que trop bien.

Il n'y a pas "La Folie". Il y a tous les gens qui, pour des tas de raisons (dont la machinerie sociale, celle qui assigne des places, des positions, des définitions, des identités) sont séparés de leur puissance d'agir, de penser, de créer.

Guattari lui-même avait une certaine tendance à romantiser le "schizophrène", à en faire l'objet d'un "délire" poético-conceptuel. Quelque chose de l'hyper-signifiance lacanienne subsistait paradoxalement dans son arrachement au psychanalysme lacanien (qui pesa bcp dans sa formation). Et par la suite, Guattari continuera d'exercer dans le cadre institutionnel, fut-il anti-psychiatrique. Je ne suis pas sûr qu'il ait fait bcp de bien à tous ces "schizos" qui le fascinaient tant, comme "modèle" d'un risque de "folie" inquiétant, en l'excitant, sa rationalité à lui.
On peut donc se demander si les "schizos" de Guattari n'étaient pas d'une certaine façon des productions du "savoir" guattarien à leur sujet.

Deleuze a écrit, dans un petit texte sympa et marrant ("réponse à un critique sévère", 1973, in Pourparlers):

"les schizos, vrais ou faux, sont en train de me faire tellement chier que je me convertis joyeusement à la paranoïa".



Sur le plan de la "clinique", Foucault a bien montré que ce qu'on nomme "folie" est le produit d'un dispositif disciplinaire de gestion des corps et des têtes, permettant la production d'un savoir-pouvoir.


Mélanger, dans des montages associationnistes, la figure romantique (cinématographique, littéraire) du "fou" et le sujet observé dans le cadre "documentaire" de la clinique, par un Deligny, un Oury, ou autre, c'est une fois de plus opérer des inférences douteuses.




2) Quelques questions de méthode (au sujet de la "pédagogie"):


Tu confirmes, once again (était-ce nécessaire, apparemment t'en as un vif besoin), ta manière de bidouiller les propos des autres, dans ces éternels montages où tu ne démontres jamais que trois choses (à l'infini):

- une incapacité à lire correctement les énoncés, les miens en particulier (pas incapacité "en soi", bien sûr, mais comme fruit d'une décision de ne pas lire, entendre),

- un goût prononcé pour le prélèvement de bouts de phrases au détriment du sens général du texte (pas lu ou lu de travers: qu'en as-tu compris - du long post? Visiblement, pas grand chose. Comment lis-tu? Question vertigineuse)

- un goût prononcé pour les inférences aléatoires, cad des associations hasardeuses transformées en liens de causalité, qui n'existent en fait que dans ton esprit.

C'est ni un signe de "folie" ni de "génialité", ni "d'ignorance" ni de "savoir", juste une focalisation, du genre insistante, maniaque, ici sur ma petite personne. Une façon de "créer", si on veut, mais réactive, par procuration, sur le dos des autres (le mien, notamment, je veux dire mes énoncés, qui semblent autant de poisons dont il faudrait administrer la cure).

Le jour (lointain, peut-être) où tu commenceras par agencer une écriture où tu risques davantage l'expérience de penser que dans la délégation perpétuelle de cette expérience à des montages, ce sera certainement plus intéressant, courageux. A mon sens, bien sûr.
En attendant, il importe que tu élises des figures de baudruches soumises à un examen sévère, à la mesure de cet effort que tu ne t'accordes jamais de faire, mais que tu sembles attendre d'elles. Et si elles font cet effort, tu les accuseras de jouir perversement d'un "capital culturel" pour écraser l'humble. Un cercle vicieux bien bétonné.


Je devine bien des contresens, déjà là ou en préparation, et qui seront facilement bâtis par volonté de me prendre "aux mots".
Sentant poindre, à tort ou à raison, le xième retournement, par la démonstration ad hominem, que je suis l'incarnation de l'instituteur monomaniaque qui veut éduquer les ignares, tout en jouissant de les rabaisser, etc, et prouvant par là les dégâts du ranciérisme sur ces questions, je fais une petite précision au sujet du "maître ignorant".

La leçon du "maitre ignorant", ce n'est pas, s'il fallait le préciser, l'éloge d'un savoir ou d'une compétence immédiats, spontanés, par génération spontanée. C'est casser la distribution inégalitaire de l'accès aux connaissances, fondée sur l'idée que "l'égalité des compétences de n'importe qui" est un but à atteindre sur la base d'une inégalité première; et que cette égalité ne peut être établie qu'à l'arrivée. Au terme d'un processus de "progressivité" mesuré par le "savant".
L'égalité des compétences de n'importe qui est l'axiome, le présupposé de départ, et non d'arrivée. Cette égalité est vérifiable dans les résultats obtenus par chacun, selon sa confiance - et son exigence - dans sa propre capacité à connaître, sans la mesurer à la répartition inégalitaire entre le "maitre" et "l'ignorant".

ça ne veut donc pas dire, là encore, "spontanéisme". On a accusé Deleuze de ce même spontanéisme quand il soustrayait le désir à la législation du symbolique. L'accusation de "désir spontané" (le plaisir, la fête...) est à Deleuze ce que l'accusation de "savoir spontané" (science infuse, autoconnaissance miraculeuse, etc) est régulièrement à Rancière.
C'est un processus, constructiviste. Aucun savoir n'est donné d'emblée, comme une évidence spontanée, sous la forme de la certitude sensible immédiate (dirait Hegel), personne n'est excepté d'une discipline qu'il exigera de lui-même, ni de l'erreur, du contresens, de l'illusion de comprendre. S'émanciper, c'est s'émanciper de la place, de la définition assignée, dans la distribution de savoir, comme de classe sociale. Et non "être émancipé" (par le savoir libérateur ou désaliénant d'un "maitre", ce qui redouble à l'infini la distribution ignorants/savants).

Et une fois encore, je ne me suis pas posé en "maitre" de quoi que ce soit: je sais plusieurs choses, d'un tout petit peu. Et j'essaie de ne pas trop parler de domaines qui m'échappent, et dieu sait combien ils sont nombreux.
Je ne me prends donc ni pour Jacotot ni pour Hegel, aux deux bouts de la chaine d'une représentation du savoir.

J'ai juste causé un peu de Rancière; j'ai dit ce qui m'intéressait là-dedans, j'ai donné des impressions de lecture. ça ne voulait certainement pas dire: lisez Rancière, il détient la vérité (surtout une vérité "en surplomb", je ne sais quelle théorie du "grand tout" - comme j'ai cru le lire, ce qui est encore un contresens).

Personne n'est censé lire Rancière s'il trouve ça mauvais, pernicieux, pervers, à dénoncer pour plein de motifs. Mais si on prétend dire de quoi il retourne, lui administrer son poison, si on se donne l'exigence de le lire un peu, alors, qu'on accepte, minimalement, d'entendre une critique si la lecture est fausse, à contresens, voire une façon de ne pas lire... Et sans recourir à la stratégie de bétonnage, qui consistera à dire: vous dites que je ne comprends pas? Vous m'accusez de faire des contresens? Autoritarisme! Rhétorique de soumission des personnes!


( Je découvre, ayant ouvert mon paravent le temps de répondre, que tu as ouvert un topic de liens contenant des textes de Rancière. C'est fort bienvenu, j'en ai profité abondamment aussi, et pour cela, je te remercie.

Cela suggérerait-il, éventualy, que mes interminables bavardages auraient réussi, bien malgré eux, à susciter un peu du désir de lire Rancière dans le texte, plutôt que d'asséner des ukases? Si tel était le cas, avec ou sans ma collaboration, c'est le genre de chose qui rend un peu content. )




3) Quelques questions de contresens (au sujet du lien entre esthétique et politique, notamment):


Rancière, ça ressort constamment de tes propos sur la question, serait censé "vouloir émanciper la classe ouvrière", se "proposerait" cette tâche.
C'est bien le contresens le plus massif et le plus entêtant.
Il ne se pose pas en émancipateur ni se propose de l'être, nulle part. Il dit juste que ceux qu'on assigne à la position sociale de "prolétaires" n'ont pas besoin de l'éclairage des "experts", qui leur expliqueront la logique de leur domination. Qu'ils connaissent parfaitement les ressorts de cette domination. Qu'ils sont les mieux placés, au contraire, puisqu'ils en font quotidiennement l'expérience, pour expliquer aux spécialistes qui théorisent pour eux la logique de domination et d'exploitation.
On le voit pas mal dans le film que P. Carles consacre à Bourdieu: le "révolutionnaire expert" donne à ceux qui l'écoutent le choix entre soit être des "abrutis", soit des consciences enfin politisées, "illuminées par la science sociale". Ceux, de la "masse non critique des exploités" qui trouveraient son discours pas terrible ni très efficient se voient presto tancés comme opposant à leurs propres intérêts une aliénation, une "servitude volontaire" faisant le jeu de ceux qui les dominent, etc.

Rancière dit juste que la dite "classe ouvrière" n'attend pas de ces experts le droit, l'autorisation d'être enfin, un jour, des "non-prolétaires", selon les conditions spécifiques posées par ces experts, selon une stratégie de lutte laissée à la seule compétence de ces experts. Qu'ils n'attendent pas ce droit à l'émancipation fixé à leurs bons soins par une élite d'avant-garde, pour s'émanciper eux-mêmes, de ces manceps, pour redéfinir d'autres partages du sensible que ceux qui leur sont imposés comme une "nature" ou "ethos" sociologique: d'un côté, ceux qui par "nature" ont le droit d'être oisifs: des poètes, des artistes, des glandeurs, des danseurs, des mondains, etc; de l'autre, ceux qui par "nature" ont le devoir d'être en lutte, travaillant sans relâche à leur "émancipation" toujours ajournée.

Et ça ne dit certainement pas: là est la solution de tous les problèmes, notamment de la domination économique.
ça ne dit pas: la révolution consiste à aller danser, ou à rogner sur ses nuits de récupération pour écrire de jolis poèmes, etc.
Ce que ça dit, c'est que ça déplace déjà toute une logique de place, une téléologie ou une eschatologie de la libération. Ce que ça dit, c'est que ce déplacement de la distribution du sensible a déjà une dimension révolutionnaire, en modifiant en profondeur la logique des privilèges perpétuée par les discours qui prétendent abolir ces privilèges. C'est se vivre dans un "devenir révolutionnaire" en acte, comme dirait Deleuze, et non dans une "histoire de la révolution", toujours à venir, toujours ajournée (dans et par le principe même d'une révolution comme téléo-logie).

Ce que ça dit, c'est que ce déplacement, décentrement, des positions, est en soi déjà plus révolutionnaire, comme acte. Par ce qu'il démantibule de l'ordre des divisions sociales. Par ce qu'il désarticule d'un concept de révolution comme "théorie - dialectique de l'Histoire. Cette division principielle des classes se trouve dupliquée dans la théorie du partage entre une avant-garde théoricienne et une masse pratiquant cette théorie. Elle est peut être inscrite au cœur et à l'horizon du programme révolutionnaire tel que défini par l'orthodoxie "marxiste", malgré ses bons vœux.

Ce que ça dit, c'est qu'à partir de ce déplacement, l'enjeu de toute révolution est non pas annulé, renvoyé à l'ordre des "loisirs", mais réagencé dans une logique qui menace politiquement bien plus les hiérarchisations du social, au point d'affoler eux-mêmes les tenants de l'intelligentsia révolutionnaire consacrée par la tradition de la praxis-théorique "marxiste", du modèle, devenu catéchistique, consacré par un ordre d'experts comme la seule manifestation cohérente ou pertinente de lutte sociale.

Ce que ça dit, c'est que la révolution s'acte, se vit et se pense autrement, en se passant du "surplomb" des méta-théories de l'émancipation des masses. Et cela, c'est bien ce qui horripile, obsède, terrifie, quelque part, la classe professionnalisée de élites éclaireuses: qui la dépossède du motif même de sa "compétence", de son "utilité". Il en va aussi de la distribution des savoirs, du "partage des tâches" entre les élites intellectuelles et les élites du pouvoir politique, de la légitimité des temples du savoir, des théories du savoir, de la critique, et de l'analyse de l'idéologie, où se sont formés les "révolutionnaires" auto-proclamés authentiques.




4) Quelques considérations sur l'opposition Rancière-Bourdieu:


Bourdieu avait certes opéré la critique fracassante de l'institution universitaire, en démontant la logique auto-reproductive de l'homo-académicus. Mais on est en droit aussi de se poser quelques questions, quand on constate que ça lui a aussi servi d'instrument de lutte pour occuper une position de pouvoir dans l'université, au nom de la science reine qui allait renvoyer toutes les autres au statut d'abstractions idéologiques.

Le "dernier Bourdieu", on le sait, descendit dans la rue, s'engagea plus "praxiquement" aux côtés des exploités. Rancière lui rend hommage, et dans sa préface (2006) à la réédition du "philosophe et ses pauvres". Le livre date de 1983. C'était l'époque de l'euphorie du retour du "socialisme", dont il perçut rapidement la logique d'appareil et de destruction systématique des idéaux du socialisme. Ceci expliquant le ton rageur du livre à l'égard de Bourdieu, car à l'époque, avec ou sans son consentement, Bourdieu inspira selon Rancière au gouvernement Mitterrand une réforme générale de l'enseignement qui consacrait, bien loin des leçons sur la "reproduction" des inégalités sociales, un programme pédagogique profondément inégalitaire, que Rancière analyse en détail dans ce livre.

Rancière, en 2006 donc, revient sur une certaine injustice du traitement réservé à Bourdieu. Il évoque cette tension, ce double-style du militantisme de Bourdieu, en des termes plus sympathiques:

" d'un côté la position du savant, attelé à la dénonciation interminable des faux-savants, demi-savants ou autres intermédiaires maléfiques empêchant la science de guérir l'ignorance; de l'autre, l'attitude de l'homme simplement intolérant au mépris qui fabrique des ignorants et faisant confiance à l'intellectuel collectif qui récuse les hiérarchies de la science et les démonstrations de la nécessité".

Concernant l'ouvrage "La misère du monde":

[...] Mais les 900 pages d'entretiens qui précèdent [le post-scriptum scientiste imposant une fois de plus un diagnostic "médical", la science sociale désoccultant les conditions de la misère, posant que la souffrance réside dans l'ignorance de ses propres causes] permettent au lecteur de tirer une tout autre leçon: la première souffrance est précisément celle d'être traité en souffrant. Et si le sociologue peut apporter quelque bien à celui qui est assis en face de lui, ce n'est pas en l'éclairant sur les causes de sa souffrance mais en écoutant ses raisons et en les donnant à lire comme des raisons et non comme l'expression d'un malheur [et s'y réduisant]. Le premier remède à la "misère du monde", c'est la mise au jour de la richesse dont [le témoignage] est porteur. Car le mal intellectuel premier n'est pas l'ignorance, mais le mépris. C'est le mépris qui fait l'ignorant et non le manque de science. Et le mépris ne se guérit par aucune science mais seulement par le parti-pris de son opposé, la considération.
Cela, Bourdieu n'a, en un sens, jamais cessé de le dire lui-même. En 1985, il commentait un rapport demandé aux professeurs du Collège de France sur les moyens de réformer l'enseignement. Or ses commentaires ramenaient les diverses propositions détaillées par le rapport à deux points essentiels. Ce qu'il fallait combattre, c'était, disait-il, "l'effet de verdict" et "l'effet de hiérarchisation".

Rancière dit alors que rien n'est plus proche selon lui des formules de l'émancipation intellectuelle jacotiste. Pourtant, lors d'un colloque, Bourdieu fit une communication, raconte-t-il, juste après lui, et crut nécessaire de prévenir l'auditoire contre toute méprise: "vous pourriez croire que ce que je vais dire, c'est la même chose que ce qu'a dit Monsieur Rancière. Mais attention, ce n'est pas du tout la même chose, ce que je vais dire: c'est même exactement le contraire".
Témoignage (ranciérien, certes) de la lutte ou guerre sans merci que Bourdieu livrait aux philosophes, au nom de la "science reine" à imposer dans l'Institution. Et dans sa passion violente, constante autant qu'ambivalente, pour la philosophie. Car, comme on l'a rappelé, il ne cessait par ailleurs de faire référence aux philosophes...




5) quelques considérations sur la démocratie des experts/militants ("progressiste") versus la démocratie des ignares/consommateurs ("régressive").


Pour en revenir, plus généralement ici, à l'ordre des experts. Cette peur panique de la perte de ce privilège symbolique, de ces prérogatives, va de pair avec la "haine" de l'indétermination d'un "démos" anarchique, sans archè, suggère Rancière. Haine que cette peur réactive, dont cette peur révèle qu'elle était bien peut-être, cette haine, au cœur de pas mal de ces théories de la "libération" (sous la forme de la critique des "masses aveugles", "inconscientes" ou autres).

A mon sens, l'analyse de Rancière de la dimension intrinsèquement politique de l'affect esthétique, loin donc d'annuler les motifs réels de toute action révolutionnaire commune, l'alimente. Elle réactive la dimension politique au cœur de toute révolution, qui est une révolution contre les agencements donnés du social.

Cette révolution couve, et pas sous cette forme "gentillette" à laquelle voudraient la circonscrire ceux qui théorisent contre ça le montage réactionnaire et contre-révolutionnaire d'un "peuple", "atomisé", "massifié", s'abrutissant dans l'esthétique, la consommation symbolique, etc. Occupations "passives" qui sont traditionnellement le privilège des classes dominantes. Et que tout ça l'empêche de penser (à sa condition).

Or, c'est bien plutôt le contraire: c'est bien parce qu'elle pense, et de façon très claire, sa condition assignée, et la refuse, que cette "masse" informe et sans "information" - selon la litanie des haut-parleurs de la critique du "spectacle" - considère comme légitime cette conquête du régime de la valeur symbolique réservé aux classes possédantes.
Rien de plus actif que cette apparente "passivité". Ce retournement révolutionnaire se traduit par des luttes, physiques, non-contrôlables, non-gérables, une violence active, désordonnante. Un fameux bordel, dont les élites penseuses ont à cœur de nous expliquer, encore et toujours, qu'il est le signe inquiétant d'une régression, d'une involution de l'ordre social, d'un effondrement de la Culture, de l'Art, de ce qu'il y a de plus beau, de plus précieux, de l'Humanité elle-même, etc.

C'est une révolution active, appelée à s'étendre, qui s'étend, et qui ne se prononce plus sous la bannière du mensonge du "progrès" des socio-démocraties vers plus d'équité, de partage, de justice économique et sociale. Ce baratin là ne fonctionne plus.
Ainsi, l'investissement politique de la sphère de l'expérience de l'esthétique, comme lieu anomique et a-disciplinaire où on s'émancipe sans autorisation des partages esthétiques fondant les partages sociaux, n'est pas l'indice d'un refuge dans l'individualisme, un déni du social, mais une redéfinition révolutionnaire du social. Elle rejoint les grandes aspirations révolutionnaires et fraternelles d'un Schiller et autres.

Et on veut à tout prix étouffer ce mouvement politique d'émancipation, en administrant la "théorie" de l'individualisme consumériste anti-sociétal. Mais ce mvt, qui est une révolution en acte, n'est pas et ne sera particulièrement "pacifique". C'est et ce sera une prise d'assaut des forteresses de l'ordre symbolique. Il est le levier d'une lutte active, pas du tout passive, contre les forces économiques dominantes, non leur "caution" d'on ne sait quel "divertissement consumériste aliénant". Il attaque bel et bien une propriété et un capital réels et matériels.

Car le capital réel et matériel (financier, foncier, spéculatif, etc) sert à entretenir et à se réserver le capital symbolique (d'oisiveté, de consommation de valeurs symboliques, esthétique). La propriété du capital matériel n'a t-elle pas pour but fondamental de se réserver la jouissance du capital non-matériel que procure ce capital matériel? Aussi la remise en cause collective radicale des partages sociaux et économiques du privilège de l'expérience esthétique (définalisée, détéologisée, universel sans concept...) s'attaque tout naturellement et tout logiquement aussi à la propriété privée, oligarchique, du capital matériel.

Le rabâchage du "divertissement consumériste aliénant" est justement la théorie clé-en-main à laquelle recourent ces forces de privatisation oligarchique pour perpétuer la fiction utile du clivage entre les passifs (dominés, peuple "laborans") et les actifs (dominants, oligarchie s'adonnant au plaisir définalisé), etc. Ce paradigme a vécu. Il a eu son heure symbolique, qui galvanisait quelques strates du champ intellectuel.
(Aujourd'hui, il ne sert plus à grand chose. Sinon, comme le montre Rancière, à occuper une position nostalgineuse et grand seigneur, de dandy catastrophiste et un poil cynique, diagnostiquant l'aliénation générale de tous, depuis sa conviction plaisante d'être un phare de la critique, îlot abandonné au milieu de la mer et battu par les vents. Émettant quelques signaux bouleversants que seuls quelques irréductibles iconoclastes, formant l'internationale folklorique désunifée du paternalisme condescendant, parviennent encore à capter.)

Si on ne comprend pas la portée politiquement révolutionnaire du déplacement des logiques consacrées et cadenassées par l'idéologie "progressiste", on ne comprend pas le lieu opératoire dont les analyses de Rancière sont une traduction sur le plan "philosophique".




6) Quelques questions de miroirs, mon beau miroir (à intérêt plus restreint), incluant un médaillon sur Loana:


Ici encore, un chouette topic, ce n'est certainement pas douteux. Avec un beau titre, qui dit bien l'exigence de démasquer mes "contradictions". Mais faut encore prouver que je me contredis. Je réfléchis pas mal avant d'écrire quelque chose, même si ça apparaît comme une connerie. Je pense, qu'on me l'accorde ou non, à bcp d'objections possibles et par avance, dont je tiens compte dans mes énoncés. Encore faut-il ne pas atomiser ces énoncés, les démembrer, pour utiliser l'une contre l'autre des parties qui ont l'air de se contredire.

Or, aucune contradiction, là encore. Et je revendique la justesse de ce beau titre de topic: il s'agit bien de ça, que ça plaise ou pas. Tout à fait. Il s'agit, sous ton chef, à la fois de "mythologiser" la figure du "fou", de l'exclu, du pauvre, du marginal, tout en conspuant de son mépris les petites gens, les gens du commun, les petits qui essayent de "profiter" du système, dira-t-on, et qui ne brillent pas par l'exceptionnalité exemplaire de leur misère, de leur exclusion, etc. Ce sont une fois encore, dans la démonstration, et en quelque sorte, les "pauvres" des pauvres. Leurs tragédies personnelles sont à ce point ridicules qu'il faut s'en gausser par des plaisanteries sévères et méritées, et fines ("confondre ses pilules et ses smarties", ouarf ouarf ouarf, tellement trop marrant).

Pour le côté normateur, ou normatif, tu confirmes donc, et largement: ton mépris pour les petites gens (les "gogos" du spectacle) mesure leur valeur à toute une série d'exclus, de pauvres, de "fous", etc, qui leur sont opposés en médaillons qui feraient "honte", par anti-thèse, incarnations de la misère vraie, dignes de la compassion vraie. Figures que tu iconises, instrumentalises constamment, pour parler en leur nom, nous infliger en leur nom on ne sait quelles leçons d'éthique, bien culpabilisantes, etc. C'est très catholique, et c'est de pire en pire.

Bref, bizeness as usual.


En attendant, et pour le reste, que des trucs réchauffés, la tambouille habituelle.
Tu nous édifies, c'est bien, par des documents, des images et des vidéos choisies, qui "signifient" si bien par elles-mêmes que l'évidence du lien de causalité entre elles n'a même pas besoin d'être débattu, questionné.
Et que de trucs qu'on connaît bien, et depuis longtemps. Tant mieux si ça te donne l'impression que tu défriches des terres nouvelles, redécouvres le fil à couper le beurre ou la poudre à explosion.



Et au cas où on douterait encore que 9/10è de tes préoccupations actuelles, sur le forum, sont centrées sur une volonté de "démontrer" quelque chose au sujet de ma petite personne, on aura du mal à soutenir encore que ce n'est pas le cas.


Je réponds une nième fois, c'est logique: refusant de me laisser définir par tes montages: tu ne feras pas de moi ce salaud, ce sale type, cet intello abstrait, que tu rêves visiblement de faire.



7) En guise de conclusion provisoirement définitive:


Le point 6 relève d'une maniaquerie obsessionnelle subjectiviste, peu nourrissante sur le plan idéel des idées objectives, je le concéderai aisément.

J'ai commencé à éditer mon post, dans un esprit de rigueur (parfois revanchard, mais à part Jésus, qui ne l'est point un chouïa?), avec aussi la volonté de l'enrichir d'un peu de "contenu", et alors que tu écrivais une réponse que je n'ai pas, je le confesse, consultée.
Par peur de me ramasser à nouveau quelques énoncés susceptibles de ternir ma zénitude égale, cette bonhommie coutumière, cette gentillesse timide, au bord de l'effacement, que chacun-chacune s'accordera à reconnaître comme mes principaux traits de caractère.
Donc, veuille m'excuser: mon post aussitôt édité (45 fois, quand-même), j'ai remis mon écran de protection, par pure lâcheté autant que par fatigue, et afin de bien dormir ton mon saoul cette journée du dimanche.


Dernière édition par jerzy P le Dim 11 Mar 2012 - 4:21, édité 46 fois

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Message par Invité Sam 10 Mar 2012 - 18:23

je ne te hais point, Jerzy
et j'ai bien profité de ton savoir,
mais trop souvent tu projettes des trucs de ton anus paranoïde que tu appelles "énoncés" ; et tu m'en reproches tel un phénix des pets une incapacité de lecture... Je n'ai jamais souhaité inquiéter ta rationalité normative!, je voulais juste que tu modères tes pets doctorants sur les personnes, et surtout la mienne en l'occurrence.

deudiou, le temps d'écrire trois lignes t'en as rallongé de vingt!
Et je regrette pour les insultes. Mais bon, je doute que ça te convienne.

breaker a écrit:

La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana... Loana1
Ceci n'est pas une pipe.


Franchement quoi, je fais pas un bon gagman?

Et Loana est passé par Saint-Anne, elle ressemble plus tellement à ça aujourd'hui. Carnage de la psychiatrie asilaire.


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Message par Invité Sam 10 Mar 2012 - 18:41

Jerzy a écrit :

. Re: La majorité des fous sont inintéressants et tu n'aimes pas les petites gens, tu te moques de Loana...
par jerzy P Aujourd'hui à 18:11

.La phrase, dans son contexte, était ironique et voulait surtout dire: il y a pas bcp de "fous" géniaux", la "folie" n'est pas intéressante (on tend parfois à la mythologiser), et même en prenant le position de "fou" censé inquiéter ma "rationalité" normative, tu ne parviendras pas à te rendre intéressant.

D'ailleurs, je ne cesse de dire que d'une certaine façon je ne crois pas à la "folie", surtout cette "folie" qu'on romantise, mythologise, esthétise, etc, dont on fait une cause rédemptrice. Dans un schéma binaire sujet-metteur en scène-objectivant/objet mis en scène-objectivé, sur lequel un Rancière pourrait dire certaines choses, là encore.

Il n'y a pas "la folie", il y a la misère, l'absence d’œuvre (comme disait Foucault).
Et certaines formes de son exploitation. Dont une certaine forme de regard prétendument généreux, compassionnel, qui enferme bien plus qu'il ne libère. Et je me méfie terriblement de pas mal de "documentaires" (y compris ceux qui sont faits dans une perspective "anti-psychiatrique"), qui sous couvert de rendre au sujet sa "dignité", de lui "rendre la parole" ou "le silence", l'objectivent dans une image et le réduisent indirectement à cette parole ou à ce silence. Les dispositifs de manipulation et domination existent, malgré, et derrière, des tas de bonnes intentions très généreuses.
Là encore, Rancière aurait été une occasion de "déplacer" un peu les pensées-réflexe et les habituels montages qui ne la signifient que trop bien.

Il n'y a pas "La Folie". Il y a tous les gens qui, pour des tas de raisons (dont la machinerie sociale, celle qui assigne des places, des positions, des définitions, des identités) sont séparés de leur puissance d'agir, de penser, de créer.

Guattari lui-même avait une certaine tendance à romantiser le "schizophrène", à en faire l'objet d'un "délire" poético-conceptuel. Quelque chose de l'hyper-signifiance lacanienne subsistait paradoxalement dans son arrachement au psychanalysme lacanien (qui pesa bcp dans sa formation). Et par la suite, Guattari continuera d'exercer dans le cadre institutionnel, fut-il anti-psychiatrique. Je ne suis pas sûr qu'il ait fait bcp de bien à tous ces "schizos" qui le fascinaient tant, comme "modèle" d'un risque de "folie" inquiétant, en l'excitant, sa rationalité à lui.
On peut donc se demander si les "schizos" de Guattari n'étaient pas d'une certaine façon des productions du "savoir" guattarien à leur sujet.

Deleuze a écrit, dans un petit texte sympa et marrant ("réponse à un critique sévère", 1973, in Pourparlers):

"les schizos, vrais ou faux, sont en train de me faire tellement chier que je me convertis joyeusement à la paranoïa".



Sur le plan de la "clinique", Foucault a bien montré que ce qu'on nomme "folie" est le produit d'un dispositif disciplinaire de gestion des corps et des têtes, permettant la production d'un savoir-pouvoir.


Mélanger, dans des montages associationnistes, la figure romantique (cinématographique, littéraire) du "fou" et le sujet observé dans le cadre "documentaire" de la clinique, par un Deligny, un Oury, ou autre, c'est une fois de plu opérer des inférences douteuses.




Tu confirmes, once again (était-ce nécessaire, apparemment t'en as un vif besoin), ta manière de bidouiller les propos des autres, dans ces éternels montages où tu ne démontres jamais que trois choses (à l'infini):

- une incapacité à lire correctement les énoncés

- un goût prononcé pour le prélèvement de bout de phrases au détriment du sens général du texte (pas lu ou lu de travers: qu'en as-tu compris? Visiblement, pas grand chose. Comment lis-tu? Question vertigineuse)

- un goût prononcé pour les inférences aléatoires, cad des associations hasardeuses transformées en liens de causalité, qui n'existent en fait que dans ton esprit.

C'est ni un signe de "folie" ni de "génialité", juste une focalisation, du genre insistante, maniaque, ici sur ma petite personne. Une façon de "créer", si on veut, mais réactive, par procuration, sur le dos des autres (le mien, notamment, je veux dire mes énoncés, qui semblent autant de poisons dont il faudrait administrer la cure).

Le jour (lointain, peut-être) où tu commenceras par agencer une écriture où tu risques davantage l'expérience de penser que dans la délégation perpétuelle de cette expérience à des montages, ce sera certainement plus intéressant, courageux. A mon sens, bien sûr.
En attendant, il importe que tu élises des figures de baudruches soumises à un examen sévère, à la mesure de cet effort que tu ne t'accordes jamais de faire, mais que tu sembles attendre d'elles. Et si elles font cet effort, tu les accuseras de jouir perversement d'un "capital culturel" pour écraser l'humble. Un cercle vicieux bien bétonné.

Ici encore, rien que des trucs réchauffés: tu nous édifies, c'est bien, de trucs qu'on connaît bien, et depuis longtemps. Mais tant mieux si ça te donne l'impression que tu défriches des terres nouvelles, redécouvres le fil à couper le beurre ou la poudre à explosion.


Et pour le côté normateur, tu confirmes aussi, largement: ton mépris pour les petites gens sans intérêt (ou conformistes, etc. Loana ici comme symbole du méprisable) est mesuré à toute une série d'exclus, de pauvres, de "fous", etc, placés en médaillons qui feraient "honte", par anti-thèse, figures que tu iconises, instrumentalises constamment, pour parler en leur nom, nous infliger en leur nom on ne sait quelles leçons d'éthique, bien culpabilisantes, etc. C'est très catholique, et c'est de pire en pire.

Bref, bizeness as usual.

Et au cas où on douterait encore que 9/10è de tes préoccupations sur le forum sont centrées sur une volonté de "démontrer" quelque chose au sujet de ma petite personne, on aura du mal à soutenir encore que ce n'est pas le cas.


Je réponds une nième fois, refusant de me laisser définir par tes montages: tu ne feras pas de moi ce salaud, ce sale type, cet intello abstrait, que tu rêves visiblement de faire.


Mais je te laisse t'amuser, tu me rends dingue.

Adios, je me remets en mode "safe", pour protéger mon intégrité mentale.


c'est un beau post, Jerzy.

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Message par Invité Sam 10 Mar 2012 - 21:56

Oui, mais moins beau, car j'ai réédité entretemps, pour esspliker mieux, et plus.

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Message par Invité Dim 11 Mar 2012 - 8:40

jerzy P a écrit:ma zénitude égale, cette bonhommie coutumière, cette gentillesse timide, au bord de l'effacement, que chacun-chacune s'accordera à reconnaître comme mes principaux traits de caractère.

ah oui quand même, et moi qui pensais être un bon gagman.

Dans un topic que tu as ignoré, je parlais des ouvriers fixés dans un ordre de discours du travailleur-soldat, en m'appuyant sur des extraits de films militants de la période Mai 68. Notamment Oser lutter oser vaincre de Jean-Pierre Thorn, que j'illustrais avec cette citation de Rancière:



A voir apparaître ces pancartes sur le chemin qui disait conduire à la vérité cachée de l'atelier, le désir est venu de faire demi-tour, de revenir en compagnie de ceux que l'on avait croisés d'abord : ceux qui cheminaient en sens inverse, désertant ce que l'on dit être leur culture et leur vérité pour aller vers nos ombres ; ces ouvriers rêveurs, bavards, versificateurs, ratiocineurs, sophisticailleurs, dont les carnets font écran à l'échange en miroir de la réalité concédée et de l'apparence gardée, dont la voix de fausset fait dissonance au duo de la vérité muette et de l'illusion contrite...

J'en disais bien des choses que tu dis ici, mais ta zénitude égale lit très peu les interventions des autres, et ça donne ce bordel que t'écris avec ces effets de verdict, que j'ai essayé connement de stopper avec l'insulte.


salut.

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Message par balthazar claes Dim 11 Mar 2012 - 10:05

Oui, mais moins beau, car j'ai réédité entretemps, pour esspliker mieux, et plus.

Oui, mais Rancière définit précisément l'explication comme l'instrument adéquat de « la vieille », la méthode pédagogique qui part de l'inégalité.

L'explication rallonge le chemin de la compréhension du fait que le triangle a trois côtés ; elle est supposée nécessaire en vertu de la différence posée entre l'intelligence du maître et l'intelligence de l'élève ; elle enclenche la spirale régressive de l'explication de l'explication...



Voici par exemple un livre entre les mains de l'élève. Ce livre est composé d'un ensemble de raisonnements destinés à faire comprendre une matière à l'élève. Mais voici maintenant le maître qui prend la parole pour expliquer le livre. Il fait un ensemble de raisonnements pour expliquer l'ensemble de raisonnements que constitue le livre. Mais pourquoi celui-ci a-t-il besoin d'un tel secours ? Au lieu de payer un explicateur, le père de famille ne pourrait-il pas simplement donner le livre à son fils et l'enfant comprendre directement les raisonnements du livre ? Et s'il ne les comprend pas, pourquoi comprendrait-il davantage les raisonnements qui lui expliqueront ce qu'il n'a pas compris ? Ceux-ci sont-ils d'une autre nature ? Et ne faudra-il pas dans ce cas expliquer encore la façon de les comprendre ?

La logique de l'explication comporte ainsi le principe d'une régression à l'infini : le redoublement des raisons n'a pas de raison de s'arrêter jamais. Ce qui arrête la régression et donne au système son assise, c'est simplement que l'explicateur est seul juge du point où l'explication est elle-même expliquée. Il est seul juge de cette question par elle-même vertigineuse : l'élève a-t-il compris les raisonnements qui lui enseignent à comprendre les raisonnements ?

Du coup votre essplikation, dans la mesure où justement Rancière lui sert de support ou de prétexte, tend à se réduire au second sens du terme : altercation, dispute, bagarre. Et "De la guerre en philosophie", il se trouve que c'est de BHL.

tu ne feras pas de moi ce salaud, ce sale type

Si untel se sent obligé d'expliquer qu'il n'est pas ce salaud, ce sale type, pendant que l'autre se voit contraint de répliquer en expliquant à son tour qu'il n'est pas ce salaud, ce sale type, mais la réplique ne satisfait pas le premier qui se voit à nouveau amené à expliquer qu'il n'est pas ce salaud, ce sale type... on est manifestement tombé dans le cercle vicieux du ressentiment et de la faiblesse, "je suis bon parce que tu es mauvais", on est dans le règne du consensus comme identification du sujet qui a peur... Et le public de ces intéressants échanges se nourrit de cette peur et s'excite, et se tient prêt à son tour à interpréter tout énoncé comme offense, ce qui par voie de conséquence rend impossible l'hypothèse de l'émancipation, ne parlons pas de l'hypothèse communiste, et fait au contraire triompher un régime terroriste des échanges.





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Message par balthazar claes Dim 11 Mar 2012 - 11:40

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Message par Invité Dim 11 Mar 2012 - 23:32

Bidouillages sémantiques téléphonés, et analogies douteuses que voilà, balthazar.

(Mais d'abord, bonjour. Pardon.)


Ce que j'appelle ici improprement ou non, des "explications", c'est surtout une autre façon de poursuivre un commentaire, et tout commentaire, questionnement, entretien, sont en quelque sorte infinis, sans fin. Comme processus.

Inutile dès lors de me rendre prisonnier d'une contradiction (en apparence) logique; de l'ordre de la régression à l'infini (explications d'explications d'explications qui creusent le fossé entre l'émetteur et le récepteur). C'est le jeu attendu du "tel est pris qui croyait prendre", ou de "l'arroseur arrosé", mais les ficelles sont un peu grosses et voyantes. Aussi permets-moi de les exhiber. Quitte, bien sûr, à ce que tu utilises ce matériau pour te livrer à la phase qui suit, logiquement, dans ce jeu: lui appliquer le même traitement.


(Tu parles, dans l'autre topic, d'un jeu. Tu poses que tout cela est en définitive un jeu, dont tu définis la règle. Cette règle établit que je joue ce même jeu que toi, j'ignore lequel, à vrai dire. Penser, réfléchir, clarifier, s'expliquer, creuser une question, s'encourager à un peu de rigueur dans la réflexion, c'est peut-être un jeu, pour toi, pour qui trouve que c'est de l'ordre du jeu. Tu ne sembles d'ailleurs pas t'y amuser bcp, à ce jeu. Je veux dire, on ne sent pas tellement la joie. On ne sent pas tellement l'implication, non plus, l'investissement du joueur. C'est joué, oui, si on veut, mais plutôt du bout des lèvres, un pied dedans, un pied dehors.

Si c'est un jeu, l'important est de participer, dirait Coubertin. Alors, tu participes. A ceci que tu définis comme un jeu. Mais pourquoi forcément un jeu? Il y a une réponse possible, parmi d'autres: ce serait un jeu, pour toi, parce qu'au fond, tu ne trouves pas un intérêt fondamental à ce qui tente de se raconter ici. Il y a certainement autre chose, de l'ordre de la nécessité, d'un non-jeu, qui réclame davantage ton énergie. Dans cette hypothèse, je comprends que tu joues de temps à autre, au petit jeu des mots. Tout ça, c'est des mots, c'est pas très important. En s'amusant un peu avec les mots, en mobilisant un peu de virtuosité rhétorique, cette fameuse rhétorique que tu m'attribues, qui définit en gros mes propos, on peut "démontrer" un peu tout et son contraire.

Mais pour moi, ce n'est pas tellement un jeu. Je ne m'amuse pas particulièrement à cela. Les joies (limitées) et les désagréments (abondants) que me procurent mes interventions ne sont pas de l'ordre de la gratification du joueur, mais de celles, plus platement existentielles, de celui qui a le sentiment, jamais confirmé, d'être compris, lu, ou pas, soutenu, ou pas soutenu, accueilli, ou congédié, dans un esprit de vérité. J'appelle esprit de vérité l'exigence d'une nécessité de sens qui ne se réduit pas à une joute verbale.)



Jouons, donc, mais sérieusement, avec rigueur, en essayant de ne pas nous payer de mots. Essayons d'accorder un minimum d'importance aux problèmes, aux questions, que les mots servent à agencer.


Les ficelles sont un peu grosses et voyantes, disais-je. A quoi joues-tu, sincèrement?


(en allant plus ou moins du contresens le plus "simple" au contresens le plus "complexe" - et en s'écartant délibérément de toute méthode, viable ou non viable, ou imitation réussie ou ratée de "maitre ignorant", puisque là n'est pas mon but)


Premièrement: Parce que je me livre à un commentaire explicatif sur "le maître ignorant", tu saisis cette occasion (qui fait le larron) pour m'expliquer que je n'applique pas la leçon du "maître ignorant". Mais ou ai-je prétendu l'appliquer? Et au nom de quoi je devrais, par mon énoncé, l'appliquer, accomplir performativement le geste ou la décision du "maitre ignorant"?
Je ne suis pas en train de démontrer, par l'exemple, la pertinence de la leçon du "maître ignorant". Évitons de faire d'une analogie douteuse le modèle d'une équivalence douteuse, à tout le moins.

C'est aussi jouer sur les classiques paradoxes, non de logique, mais de langage, un pur jeu d'esprit, une mignardise de l'esprit, rien d'autre.

Expliquer qu'on ne peut pas expliquer quelque chose, sauf à accroître l'incompréhension: mais ça, il faut bien que tu me l'expliques. Et que je te dise en retour que ton explication n'explique rien du tout. Voir plus bas, le tour de passe-passe de ce jeu de langage. ***

C'est du même ordre que de me dire que je ne peux pas expliquer la théorie de la relativité, parce que tout ce que je pourrais en dire serait relatif. Et plus radicalement encore, expliquer que l'idée même d'une théorie de la relativité est en soi contradictoire. On ne peut théoriser le relatif.

C'est du même ordre que l'éternel paradoxe de Zénon démontrant qu'Achille ne rejoindra jamais la tortue. On ne peut pas l'expliquer par un discours, parce que le discours, c'est du temps, et le temps c'est une distance mathématique: il faut donc tenir compte de la distance qui sépare Achille et la tortue, puis tenir compte de la moitié de la distance qui l'en sépare, puis de la moitié de cette moitié, et ceci dans une régression à l'infini.

Le but de la démonstration de Zénon, en fait, rappelons-le: c'est de soutenir le point de vue de Parménide sur l'identité à soi de l'Etre ou de l'Un, comme essence pure. On ne peut pas dire autre chose que: l'Etre est". Parce que l'Etre, c'est l'essence identique à elle-même, fixe, éternelle, de tout ce qui est. Dès qu'on commence à parler d'autre chose, on est dans un discours sur l'Etre, donc on se contredit, on sombre dans le temps du discours, et parler dans le temps, c'est parler dans la distance avec l'Etre, c'est une erreur.


C'est du même ordre que de démontrer, par un jeu de et sur les mots, la fausseté du système par lequel Hegel prétend décrire le développement de la saisie totale du réel par le concept, depuis la certitude sensible immédiate non-conceptuelle. En disant, par exemple: si c'était vrai, Hegel devrait déduire de son système la plume qui a servi à l'écrire.
Il y a bien des manières de contester la pertinence du système hégélien, mais celle-ci est certainement la plus idiote. Elle a fait pourtant florès. Étonnant, non?

Etc.


Il importe de te rappeler, là encore, le "jeu de langage" *** qui gouverne ta "démonstration":


tu t'inscris toi-même dans ce "jeu de langage", qui consiste, rappelons-le, à y participer tout en se situant hors du jeu: en l'occurrence, fixer, depuis la position d'un énonciateur placé dans l'apparence d'une neutralité axiologique, quels sont les discours, des uns et des autres, ressortissant d'une bonne explication, d'une mauvaise explication, d'une explication contradictoire ou d'une explication non-contradictoire, d'une explication efficace ou inefficace. A partir d'une situation x, d'un contexte x, qui n'est pas exemplaire d'une situation y, d'un contexte y.

Bien sûr, la pratique d'un tel jeu de langage comporte cette clause: que tu n'incluras pas ton propre énoncé dans le jeu de cette démonstration, que ton énoncé échappe en quelque manière à la contradiction que tu relèves.

Car si tu appliques à ta propre explication/démonstration de la contradiction inhérente à mon explication (l'engageant dans une régression à l'infini) ce même traitement, tu devras nécessairement prendre acte de la contradiction inhérente à ton explication (l'engageant de la même manière dans une régression à l'infini).




- Deuxièmement, parce que tu appliques à mon propos la grille d'une situation, d'un contexte, qui sont une situation, un contexte d'enseignement où un prof enseigne une matière à un élève.

Or nous ne sommes pas dans ce contexte, du tout. Pour le redire.
Nous sommes dans un contexte d'interlocution, sur un forum. Et la dynamique des échanges, altercations, actions, réactions, accusations, justifications, conflits d'interprétation, etc etc, sont le lot de ce forum comme de bien d'autres. C'est un lieu de conflits de sens, d'interprétations, d'usages du langage, de régimes de phrases, de logiques et de jeux de langage, sujets d'un différend permanent (comme dirait Lyotard). Différend qui a bien sûr lieu aussi dans un contexte particulier, celui d'une école, dans le rapport prof-élève, bien sûr. Mais là encore, comparaison n'est pas raison.



Pour les uns, c'est plus de l'ordre d'un jeu gratuit, pour les autres, ça peut être un jeu aussi, mais moins gratuit; pour d'autres encore, ce n'est pas forcément un jeu, plutôt une tentative de dire quelque chose, quelque part, quelque part où on se sert des mots, pour échapper au laminage de la vie par les forces qui nous commandent de substituer aux mots qui interrogent, cherchent, des mots d'ordre qui laminent, assignent, font gagner ou perdre.

Mon commentaire, s'il se veut (s'espère) clarifiant, avec du contenu, c'est avant tout pour clarifier mes idées, que je l'écris.
J'espère bien sûr que d'autres, des lecteurs, présents ou absents, interpellés directement ou indirectement, puissent trouver ça intéressant, mais je ne réclame pas la maîtrise ou le contrôle d'un tel processus: ça m'échappe de toute façon, et en fait quiconque ce qu'il voudra.
J'ai tartiné là-dessus à l'envi, récemment encore: sur la dissémination du sens dans un espace plurivoque, et tu semblas trouver cela pertinent. Mais voilà que, patatras, ça t'échappe à nouveau. Et tu retrouves avec joie cette dilection pour l'application située de théorèmes insituables... La mémoire, Balthazar, la mémoire...

On est donc pas dans une logique d'enseignement. Pour le redire. Dans un contexte d'enseignement spécifique, on ne verra personne se livrer, comme je le fais, à des paraphrases perpétuelles, émises, dans le doute, et l'angoisse, de ne pas être "compris", de ne jamais échapper au soliloque de l'idiot, plein de bruit et de fureur, émettant des signes qui ne signifient potentiellement rien pour personne, sans garantie ni rien. Ou parfois, un peu, quand-même. C'est pas grand chose mais ça fait du bien.
Si je faisais ça, dans un tel contexte, je peux assurer que si on ne me foutait pas à la porte de l'établissement séance tenante, avec moult plaintes légitimes adressées à la direction, je me foutrais moi-même à cette putain de porte.

ça fait sens, ce que je dis? Ou peut-être.



- troisièmement et surtout, parce qu'à ce compte là, si on s'avise d'appliquer ce genre de démonstration "logique" à tout phénomène d'émission ou de lecture de signes plus ou moins suivie, continue, on peut dire, dans le même ordre, qu'il est inutile d'acheter des livres, de lire des livres, de voir des films, d'écouter de la musique, d'écouter les gens parler, dans un cours, un séminaire, une conférence, etc etc, d'écouter sur youtube un cours ou une conférence de Deleuze, Bourdieu, ou Rancière, etc, de scanner des textes, de les loader. On peut même dire, en définitive, qu'il est inutile d'écrire, de parler, de penser, d'ouvrir la bouche, d'écouter, de tendre une oreille, etc.

A ce compte, on peut absolument se passer de n'importe quel intercesseur dans n'importe quel domaine que ce soit, et postuler qu'on revient directement à la source première, pure, évidente, immédiate, non-médiée, non-altérée, de phénomènes de sens de plein de natures différentes.

Et nous retrouvons ici, ô joie, la problématique-tik-tik, déjà dûment abordée, du "hors-champ", ou du "hors-texte". Faut suivre, aussi. Mais si on veut pas suivre, ben... on suit pas. Tout simplement. Et on accuse pas les autres de ne pas vouloir les suivre, parce qu'on a pas envie. On est libre. Tout le monde doivent être libres, et égaux devant l'envie de ne pas suivre.
Inutile d'invoquer les échecs, avérés, saillants, cinglants, de la pédagogo? pédagogo? Pédagochnik. Et même dans un contexte non pédogaga, non pédogogo? Non pédophilique. Plutôt zoophilique: avec sodomisation de mouches à la clef.



- Quatrièmement, et en conséquence, selon cette "logique", on reviendra à un platonisme non critique, en se passant aisément de la critique par Derrida de ce qu'il nommait le "phonocentrisme":
on soutiendra que tout livre, toute explication, tout commentaire, tout phénomène d'écriture, sur n'importe quel support, n'importe quel sujet, émis par un scripteur/locuteur quelconque, creusent de facto un écart redoublant à l'infini la médiation entre production de signes et réception de signes. En opposant à cette médiation l'idée d'un accès pur, immédiat, spontané, de quiconque, à un ensemble de signes constitués dans la présence de leur vérité.

Autant faire le procès, dès lors, de toute unité de sens possible représentée par n'importe quel régime de signes: non seulement objet-livre, objet-film, objet pictural, sonore, etc etc, mais encore tout système réglé de signes tel que alphabet, grammaire, solfège, lois de la perspective, etc.

Ce jeu d'esprit, sur et avec les mots, est certes plaisant, donc, divertissant, et impressionnera quelque impressionnable qui excipera aisément de ce genre de "cure" de logique non-contradictoire administrée à tel type de "poison" d'une logique contradictoire, mais hélas, ça n'est qu'un jeu sur et avec les mots, dont il importe de déplier la logique sous-jacente, implicite. Elle est très simple; la comprendre ne réclame qu'un peu d'honnêteté intellectuelle, une suspension provisoire du plaisir de la contradiction.

cela ressortit, donc, très simplement, de cette habituelle doxa platonicienne, que Derrida nomme "phonocentrisme": cette image, ce schéma tant partagé par l'évidence du "bon sens", de la distance entre l'Idée pure (la figure géométrique du triangle, dans ton exemple, dans son évidence pure et manifeste), se communicant directement dans la transparence des âmes, et sa copie impure, ses analogons, altérant dans l'écriture ((dispersive, désarrimée de l'instance propriétaire énonciative) le contenu de cette Vérité.

A quoi cette sophistique logique peut aboutir, en gros, sinon à cette métaphysique du "spontanéisme", de la "génération spontanée", dont il était question plus haut?


Tu te sers donc d'une interprétation "platonisante" de mon commentaire/explication pour la soumettre à l'analogie avec le schéma logique inégalitaire de la situation prof/élève.

Cette analogie est non pertinente, comme établi plus haut (question de logique, de contexte, question du caractère médiat de tout phénomène de sens, etc), mais encore pas du tout exemplative du problème posé par Jacotot dans le commentaire/explication qu'en propose Rancière: l'égalité est l'axiome, le présupposé de départ. C'est en vertu de ce présupposé de la compétence de n'importe qui de comprendre qu'un triangle est une figure à trois côtés qu'il trouvera le chemin de l'explication de cette figure.
Mais cette donnée n'est pas une évidence immédiate, spontanée, de l'ordre de la certitude sensible immédiate de "l'ici et du maintenant".

Mais encore, plus fondamentalement, l'exemple de la définition d'un triangle comme figure géométrique à trois côtés "n'enseigne", convenons-en, pas grand chose d'une part, et ne constitue pas, d'autre part, un exemple probant d'un problème de connaissance conceptuelle, qui se déroule dans la temporalité du signe.

L'exemple plus probant, dans la dimension de cette temporalité discursive au sens large, serait la capacité de lire et comprendre un texte quelconque, toujours selon le présupposé de départ: l'égalité de compétence de n'importe qui à en saisir le contenu.
Ce présupposé énonce ceci: le processus de compréhension résulte, non comme évidence spontanée ou immédiate, mais comme mise en œuvre médiatisante, d'outils que le lecteur rassemblera, selon les méthodes qu'il se donnera, pour accomplir ce processus.
ça ne veut pas dire, nécessairement, qu'un outil adjacent, du type "commentateur", représenté par un enseignant quelconque, est un outil à proscrire. Il est cet outil au même titre que n'importe quel outil.

Ce qui importe, dans l'idée égalitaire de l'apprentissage, c'est que cet outil, qu'il soit objet-livre, manuel, professeur ou tout autre type de médiation, d'abord n'est pas le propriétaire du processus, ensuite n'est à ce titre légitimé d'aucun effet de verdict ou de hiérarchisation du processus, et enfin ne mesure pas à l'arrivée une égalité conquise, depuis une situation d'inégalité première. Non: le ou les outils occasionnels, intercesseurs, permettent éventuellement de corroborer, vérifier, par l'usage de ces derniers mis en œuvre, l'égalité première, l'axiome non négociable de la capacité du lecteur à atteindre lui-même cette intelligibilité par cet usage.


- Cinquièmement, et en conséquence, autant confondre alors égalité de tout et indifférence de tout; postuler que tout s'indifférencie dans l'évidence spontanée, sans écart ni temporalité, du tout donné d'emblée, here and now ("la nuit où toutes les vaches sont grises", disait Hegel).

Autant soutenir qu'entendre et apprécier n'importe quelle musique, par exemple, dépend de la même évidence spontanée, celle d'une sensibilité déjà conquise, formée, une fois pour toutes, naturelle, spontanée, qui n'a nul besoin de faire "travailler" l'oreille pour saisir et apprécier, (être affecté) par le processus d'une partition de Shostakovich, ou de Schoenberg, ou de Steve Reich, ou d'une comptine de l'enfance, ou d'un bon speed-metal rock de Motörhead, ou de Sonny Rollins, ou Sharrock, ou des chants grégoriens, etc.

Soutenir que tous ces styles de musique sont directement et pleinement accessibles, sans aucune médiation temporalisante, sur une même fréquence sonore indifférenciée. A un tel point d'indifférenciation qu'on ne pourrait même pas différencier ce qui, éventuellement les distinguerait les unes des autres. En dehors des intervalles de silences, lesquelles participeraient, sans distinction possible, à cette même fréquence continue. The Big note.

Or il y a un travail de différenciation qu'opère l'oreille, dans le temps; la sensibilité de n'importe qui se travaille. N'importe qui est susceptible d'apprécier un quatuor de Shostakovich, ou un morceau rock de Motörhead, ou le Youki de Gotainer, ou la messe de nostre dame, en vertu de l'égalité principielle de tout auditeur devant n'importe quel phénomène musical.
Pas du tout donc selon le schéma d'une inégalité première, principielle, de tout auditeur, face à ces phénomènes musicaux, phénomènes qu'il pourrait éventuellement conquérir progressivement en fonction d'un apprentissage fixé par un maitre (comme on l'enseigne dans les conservatoires): dont un maitre en musique sanctionnera l'égalité conquise - ce qui postpose effectivement, à l'infini, l'égalité convoitée de tout un chacun devant ces musiques, en posant à l'horizon toujours reporté du processus technique de maitrise, l'accès à ces musiques, à leur pratique autant qu'à leur jouissance.

Je ne suis pas passé par l'enseignement d'un maître de solfège, pour travailler ma sensibilité, à partir d'outils-intercesseurs que je me suis donné, dans un travail accompli sans examinateurs, autodidacte mais plein de "tutorials" divers appelés à moi par ma curiosité, et dont le résultat n'a pas été sanctionné, ou validé, par un professionnel de la profession.
Et je m'autorise pourtant à dire que je suis en mesure d'apprécier pleinement un quatuor de Shostakovich, ou le Youki de Gotainer, ou No class de Motörhead, ou la 10è de Beethoven de Pierre Henri.
Sans me sentir tenu de contester qu'un certain type de savoir, de technique, de maitrise ont par ailleurs permis l'élaboration de ces morceaux. Du genre "solfège" ou autres règles de notation ou de composition, voire un refus de toute règle de composition, et d'exécution, ce qui est extrêmement rare, concédons-le: même la sonate clavier fermé de Cage a sa règle de composition et d'exécution, quelque part. Au niveau du vécu.
Sans me sentir non plus tenu de les hiérarchiser dans une "histoire dialectique de la musique (façon Adorno) ou en fixant sur une échelle évolutive les musiques qui seraient "primitives", "réactionnaires", "nouvelles", "impures", "pures", "vulgaires", "nobles", etc etc.




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Ces 5 points, dûment argumentés, t'apparaissent-ils comme cohérents, justes, fondés en raison, pertinents, rigoureux, logiques, de bon sens, précis, explicitants, ludiques, divertissants, agaçants, susceptibles de lever quelque obstacle épistémologique, d'exhiber, éclairer, mettre au jour, en quelque manière, les contresens gouvernant possiblement ce genre de "démonstration logique" expliquant la contradiction de toute explication, mais que j'ai eu l'outrecuidance de ne pas trouver si éclairant?

Et sans que tu te sentes, en quelque façon, par là, méprisé, tenu sous un manceps, soumis à une logique inégalitaire, infantilisé, heurté, atteint au nerf d'une sensibilité à fleur de peau et farpaitement légitime?

Me trompé-je du tout au tout, comprenant de travers, commettant un contresens massif dans la saisie de ta démonstration?

Pouvais-je, en quelque façon, faire plus bref, moins illustratif, moins redondant, plus allusif, plus subtil, moins pataud, moins condescendant, moins cuistre, plus énamouré, plus humble, plus oblatif, bref d'une manière qui t'agrée davantage?

Ou bien cet effort d'expli..., pardon, de réflexion soumis à ta vigilante attention était en quelque façon inutile, superfétatoire, vain, inepte, inapproprié, par le fait même que je n'ai fait là qu'énoncer des évidences, des truismes, que tu avais toi-même par ailleurs parfaitement considéré, compris, intégré, formalisé, déplié? Au point que tu t'amuses toi-même d'avoir machiné, monté, conçu, bricolé, élaboré, agencé, une explication-gag, un paradoxe plaisant, divertissant, drôlatique, paraphrastique, antiphrastique, émoustillant, étonnant?

Faudrait inventer de nouveaux mots qui n'existent pas dans le dico. Je suis à court de synonymes.



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- J'ai envie de lire le Bavard de René-Louis des Forêts. Ou du Julien Gracq. Un balcon en forêt, peut-être. Mais je crains de me faire chier. Ou alors, enfin, lire Proust. Comme ça, je pourrai dire (je ne sais pas encore à qui, mais je pourrai): "relisez Proust", ou "tiens, cet été, j'ai relu La recherche". ça en jette pas mal.




Il est temps d'aller dormir. Contrairement à Loana, j'ai pas de pilules, ni de smarties, mais j'en ai nul besoin. Car je suis dans l'ombre qui précède la lumière, non sous les sunlights qui précèdent l'ombre.
Par contre j'ai du kawa.
Donc, je dormirai un peu plus tard que prévu. C'est pas grave, d'aller dormir plus tard. J'ai bien le temps. Cher ami humain hasardeux, Balthazar, et toute la smala. De cinq ou six personnes. Plus les muets. Terminons par une citation attendue de Michaux: "muet, gardé par deux sourds, attend un signe". Hihi. Hi. Hi.



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Et ultimement, cher Balthazar ami mais aussi administrateur, je réitère ma demande, précédemment formulée: qu'il soit un effet de ta bonté de me restituer la fonction "supprimer son profil". Dans l'optique d'archiver, à mon rythme, quelques trucs, puis de prendre congé sans tambours ni trompettes, s'il m'en prend l'envie. Estimant que j'en ai fait plus qu'assez, en qu'en faire plus, à ce stade, ce serait au détriment de ma bonne santé.

Je continuerai à lire les interventions de certains, stimulantes, et dont j'apprends bcp. Et sans me sentir tenu d'apporter mon grain de sel, qui tend à devenir une avalanche de sel (mauvais signe), presque une source de souffrance.

J'aimerais passer moins de temps à m'expliquer, et davantage à lire des livres que je ne me suis pas donné le temps de lire.


Merci d'accéder à cette demande.



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Pour tous les autres, un grand merci. Je conserve les meilleurs souvenirs. J'ai énormément appris, retenu, des tas de choses très précieuses. Dans une expérience de forum de plusieurs années, qui fut riche en émotions diverses.


J'aurais voulu conclure sur une note plus sympathique, ce n'est pas le cas. Tant pis. Y a pas nécessairement une bonne façon, une façon élégante, classieuse, de s'en aller. Je pars sans classe. Voilà. C'est pas grave. lol


Dernière édition par jerzy P le Lun 12 Mar 2012 - 18:07, édité 5 fois

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Message par Invité Lun 12 Mar 2012 - 13:23

à plus Jerzy,
au plaisir de te lire; de nouveau, à nouveau

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Message par Borges Lun 12 Mar 2012 - 16:25

hi Jerzy, certains disent que mourir est impossible; comme partir c'est un peu mourir, partir c'est un peu impossible. Il te faut donc continuer même si tu peux pas. Un forum, c'est pas quelques individualités réunies c'est un agencement collectif d'énonciation, un ensemble de rapports, qui aident à penser, écrire, et le reste. Qui touche à ces rapports décompose nécessairement le tout ouvert, (plus fort que ses parties, généralement, quand on passe pas son temps à se détruire) qu'ils sont, qu'ils forment, agrandit la tristesse, diminue la puissance d'agir. Les possibilités de ton écriture présente se font dans ces rapports, que nous sommes tous, ce n'est pas en quittant le forum que tu écriras autrement, c'est quand tu auras trouvé un autre mode d'écriture supérieur à celui des forums que tu écriras; ou comme le disait spinoza ce n'est pas quand nous avons renoncé aux plaisirs finis du monde que nous commençons à aimer dieu, c'est quand nous aimons dieu que les plaisirs que nous tirions des choses finies perdent tout intérêt...

(faut arrêter de s'expliquer dans des polémiques pour s'expliquer avec les choses à penser; comme disait deleuze y a ceux qui expliquent et ceux qui pensent, quand on pense on a pas trop le temps d'expliquer ce qu'on pense... )

je dis ça, je dis rien, car comme disait lew griffin chacun de nous sait ce qui est bon pour lui...


Wink
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Message par Invité Lun 12 Mar 2012 - 17:46

Merci Erwan.


Salut Borges,

une fois de plus, c'est très vrai, ce que tu dis là.



Je vais méditer là-dessus. J'ai réédité mon post, en remplaçant le vœu d'une "autre écriture" par celui de "plus de lectures".

J'ai vraiment envie de lire Proust. Pour pouvoir lire aussi, ensuite, les analyses de Deleuze, ou de Jean-Pierre Richard.

Quand je vois les 2400 pages du volume "quarto", l'entreprise s'annonce titanesque, presque impossible. Lol

Bon, en attendant d'y voir plus clair, je vais me coucher. J'ai une nuit de retard, ou d'avance, je sais plus. Very Happy

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Message par balthazar claes Mar 13 Mar 2012 - 0:55

Hello Jerzy,

D'accord a priori sur les 5ou 6 points. Je te ferai remarquer que de ton propre aveu tu n'avais pas lu rancière avant le mois dernier ; alors excuse-moi d'avoir voulu participer à la dispute en insistant sur une notion qu'il m'est arrivé d'essayer de transmettre à toutes sortes de gens il y a des années de ça.

D'autre part je n'ai pas touché à ton compte, c'était une boutade quand j'ai dit que je l'avais fait, et qui me paraissait transparente. Tu nous lis tous un peu trop dans le sens de la méfiance. Cela dit il n'est pas imossible que le fameux bouton ait sauté pour une raison qui m'échappe.

balthazar claes

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Message par Invité Mar 13 Mar 2012 - 3:21

Bonjour balthazar,


tu me rappelles des choses du passé.

Y a des années de ça, j'enseignais, dans une école qui formait de futures institutrices de primaires (les 3/4 étaient analphabètes, c'était étonnant), de futurs profs de gym (les 3/4 étaient hyper-exigeants, pointilleux, sur tous les probs de réflexion, et c'était pas tellement étonnant).
J'enseignais, dans ce contexte. J'avais pas bcp de temps pour penser (pour moi-même, je veux dire). Je consacrais donc tout mon temps à expliquer deux ou trois trucs que je pensais avoir compris, et que je trouvais intéressants, à tort ou à raison. Tout mon temps y passait, donc: en plus du cours oral, je rédigeais le syllabus qui allait avec, au fur et à mesure.
Crois-moi ou non: tout le monde, je dis bien tout le monde, avait compris toutes mes explications. Et était content - en pluche.
(Mais c'était une école - un espace, un contexte donnés x, j'y faisais un boulot pour lequel j'étais payé, je gagnais ma croûte, quoi. On fait pas ça forcément par plaisir, à la base. Mais quand on est payé, ça augmente graduellement le plaisir. C'est un plaisir désintéressé qu'est soutenu par un intéressement bien concret)

Alors, je te jure, elles et ils ne juraient plus que par la "philosophie" (alors que dans le programme, c'était le cours considéré traditionnellement comme le plus inutile et surtout le plus chiant).
Surtout "Kant". Z'étaient fascinés par Kant, enfin, ce que j'en racontais. Y se proclamaient tous et toutes kantiens. Une formule avait envahi l'établissement, comme un début d'épidémie. On se passait le mot, d'un air entendu: "y a pas de savoir absolu, la science est limitée, nous sommes tous finis, t'façon". Je causais de Derrida, aussi. Tout le monde adorait ça également: cette idée que le sens de plein de trucs, voire de tous les trucs, était définitivement remis à plus tard, ajourné. Aux rares qui comprenaient pas, les autres leur disaient: "t'as pas compris, mec, c'est la différAnce, le fait de différer, tu vois? Tu peux pas fixer le truc". Des audacieux venaient me voir après les cours: "mais alors, euh... la prof de "méthodo de la péda", là, c'est un peu une grosse conne, non?". Je répondais: "pas du tout! Et restez poli, je vous prie".

Plusieurs voulaient même changer de branche. Si si. Y en a une, une vraie fane de mon cours, très investie et tout, qu'a bifurqué: de la filière sport à l'école du cirque. Une chouette nana, (j'en étais platoniquement bleu, je crois bien), devenue jongleuse, ou funambule, je sais plus trop. A cause de "Kant". Sans déconner: c'est elle-même qui me l'a dit, avant de partir pour le cirque. Personne d'autre savait qu'elle partait pour le cirque. Elle me l'a dit à moi, parce que j'étais son préféré.

Y en avait une autre, dans les "instits", une dure à cuire, qu'avait initié une rivalité sans merci. Elle prétendait avoir lu, quand elle avait 15 ans, cad 3 ans auparavant, toute la Critique de la raison pure. Je pouvais pas lutter. J'avais beau dire: "ouaih, non, je te crois pas", elle répondait, impertinente (oui monsieur, elle faisait la répondeuse): "vous n'avez pas à me croire ou pas, c'est la réalité". "Et dans quelle édition?" "Comment ça, dans quelle édition. Dans celle qu'on achète! Et puis d'ailleurs, Kant, c'est facile à comprendre, parce que c'est dépassé". "Ah tiens, c'est dépassé, et pourquoi ça?" "Parce que Nietzsche a démontré qu'il s'était trompé". "Ah non, ça c'est pas vrai qu'il l'a démontré". "Si si, c'est vrai. Kant, c'est dépassé, et vous aussi êtes dépassé". "Non non, ne l'écoutez pas, les autres, je vais vous expliquer maintenant pourquoi Nietzsche n'a pas bien compris Kant. Et c'est très mystérieux, ça... bizarre en fait, qu'il ait pas bien compris Kant...Pourquoi... Parce que, s'il l'avait bien compris, il aurait vu, dans la Critique de la raison pure, des idées très nouvelles, très osées, qui justement annonçaient des tas de choses que Nietzsche voulait dire lui-même... ah, mais lesquelles? mhh... Revenons à cette affaire de la bouteille de fanta de Sylvie, la semaine dernière... Rappelons-nous... Comment nous percevions la bouteille, ça dépendait de quoi... Et c'était quoi encore, une vision de cette bouteille tout à fait impossible dans la réalité?... Tiens, Françoise, tu veux bien me prêter ta bouteille?" "Oh non, monsieur s'il vous plait, j'ai soif", "mais si, c'est pour la science, je te la rendrai après", "oui mais c'est du sprite", "c'est pas grave, ça marche aussi avec du sprite", etc etc etc...



C'était le moment "je redore un peu mon ego", si tu permets. Merci.




[...] en insistant sur une notion qu'il m'est arrivé d'essayer de transmettre à toutes sortes de gens il y a des années de ça.

Intéressant, ça: remplacer le mot "explication" par le mot "transmission".
C'est pas mal, "transmettre", ça sonne bien. Comme quand on parle de notions, de valeurs, qui se transmettent, s'héritent.

Héritage, transmission... Bourdieu dira ce qu'il veut, mais ça se rapproche bien mieux de la notion "d'émancipation", je trouve. Non? Ah oui... y a pas photo.
Y a même plus besoin "d'expliquer", en gros.

C'est sacrément révolutionnaire, comme changement de paradigme. Lol? Ben oui... lol.



D'autre part je n'ai pas touché à ton compte, c'était une boutade quand j'ai dit que je l'avais fait, et qui me paraissait transparente. Tu nous lis tous un peu trop dans le sens de la méfiance. Cela dit il n'est pas imossible que le fameux bouton ait sauté pour une raison qui m'échappe.


Oui, pardon, j'avais confondu une transparence et une apparence...

C'était sans doute transparent, le genre de chose qui se transmet directement dans la transparence des âmes, mais je n'avais pas saisi cette pure évidence, jusqu'à ce que tu veuilles bien me l'expliquer.
Une transparence expliquée est encore plus immédiate, du coup. Merci.



Oui, ce bouton a disparu.

Où est passé mon bouton? Je veux mon bouton. Ren-dez moi mon bou-ton.

Y a -t- il dans la salle un spécialiste en boutons, un maître es bouton?

Qu'on ne vienne pas m'expliquer que mon bouton a toujours été une apparence-transparente dans ma tête (comme mes légendaires tisanes suivies de suppos), par pitié Laughing


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