Sarah Vanagt : Boulevard d'Ypres et autres films
Sarah Vanagt : Boulevard d'Ypres et autres films
Des quelques films que j'ai vus de Sarah Vanagt (Boulevard d'Ypres, Little Figures, History Lesson, The Corridor), la plupart traitent de ce que l'Histoire (de la Belgique et de ce qui y est lié, donc la RDC, le Rwanda) laisse dans le présent. À la fois dans les lieux, et chez les gens. Chez les enfants dans ses premiers films, que je n'ai pas vus, et, dans Boulevard d'Ypres, chez les adultes.
Aucun de ses films n'est parfait, ou grandiose, ou sublimissime, mais ils sont enthousiasmants, pleins d'idées. Certains moments sont fulgurants, certaines idées aussi, même si dans les moyens métrages (Boulevard d'Ypres et Little Figures) se fait souvent sentir une sorte de manque, de "pas assez" osé, des imprécisions ou inadéquations. Je crois qu'elle a surtout fait des installations dans des expositions, et je me demande si le manque que je ressens n'a pas à voir avec le fait de passer d'une œuvre se composant d'une séquence hyper forte passée en boucle (Money Exchange, History Lesson) ou non (Baby Elephant) à un film à la durée et à la narration closes.
Dans Boulevard d'Ypres, il est surtout question de la manifestation de l'Histoire dans un lieu, et comment les gens qui y vivent la portent et en témoignent. Aux habitants du lieux, commerçants, résidents, qui sont étrangers, ou non, sans-papiers, ou non, la réalisatrice demande de raconter des histoires. A la troisième personne. Durant tout le film, on se doute que les gens racontent plus ou moins leur histoire, mais on ne sait jamais si ça n'est pas plutôt l'histoire de leur cousin, ou une invention. Et ces histoires sont racontées dans un hangar en train d'être vidé, sur les murs duquel sont projetées des images de régiments français de tirailleurs (d'Afrique du Nord ou d'Afrique de l'Ouest) datant de la Première Guerre mondiale. Et le film se déploie ainsi, l'Histoire se glissant en couches superposées, se déclinant en petites histoires, comme si la bataille d'Ypres elle-même se rejouait sur le boulevard d'Ypres.
Dans Little Figures, une petite fille arrivée comme réfugiée du Rwanda, et deux petits garçons, l'un d'origine philippine, l'autre marocaine, jouent les rôles des trois statues qu'on trouve sur une des grandes places de Bruxelles : la reine Elisabeth, le roi Albert et Godefroy de Bouillon. La manière dont les statues sont filmées est magnifique, en longs plans séquences glissant autour de la pierre qu'on l'on croirait toucher, les skateurs sur la place ne savent rien de ces statues, et elles s'interpellent d'un bout à l'autre de la place, rejouant une histoire dépassée avec des voix enfantines. C'est assez fort.
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