Bedside (Robert Florey, 1933)
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Bedside (Robert Florey, 1933)
Bob Brown, un opérateur de Rayons-X fêtard et joueur, part l’école médicale de Chicago dans l’espoir d’en ressortir médecin. Cependant, il finira sur la paille après avoir perdu l’argent de ses études dans une partie de Poker qui a mal tournée. Il décide d’acquérir un faux diplôme auprès de John Smith, un ancien médecin devenu héroïnomane, et ouvre son cabinet avec sa fiancée d’infirmière. Il réussit à rameuter de riches clients grâce à un agent de presse qui « gère » sa fausse carrière de médecin mondain.
Toutes ces histoires de maladies, de faux docteurs, de patients incurables, de fauchés et d’addictes, c’est évidemment la Dépression et l’Amérique malade. Cela m’a d’ailleurs fais penser, par certains points, aux films de Wellman de la même période (« Night Nurse » par exemple). « Bedside » est également une série B de la First National et l’équipe de tournage comprend plusieurs membres récurrents de l’équipe de Wellman (Hickox à la photo entre autre). Forley collabore pour ce film avec l'actrice et scénariste Lillie Hayward, qui a également travaillé avec Wellman sur "Frisco Jenny".
John Smith, l’ancien médecin drogué, est filmé tel un monstre. Son nom, très commun, c’est en quelque sorte l’américain moyen qui a basculé dans la déchéance après 1929. La drogue étant à ses yeux la seule échappatoire à la Crise, il se la procure en faisant chanter Brown. C’est de toute façon un film où tout le monde se trompe et se ment, comme s’il on voulait occulter l’implacable vérité.
Il y a un certains mépris pour les « starlettes », les chanteuses et le milieu du spectacle. Cela semble n’être pour Florey que poudre aux yeux dans une Amérique lessivée qui essaye, elle aussi, de se voiler la face à coups de comédies musicales et d’espoirs vains en des lendemains qui « chantent » justement.
Les patientes du charlatan Brown ne sont d’ailleurs très souvent que des malades imaginaires aisées ou alors des personnes souffrant de surpoids (aisance), de manque d’exercice ou se complaisant dans l’oisiveté. Il suffit de leur procurer des placebos ou autres conseils absurdes pour les guérir. Cependant, quand une vraie malade fera son apparition (une italo-américaine pauvre qui amène sa jeune fille souffrant de fièvre), Brown refusera de la prendre en consultation et l’enverrais auprès « de l’autre médecin au coin de la rue ». Pour Florey, la mère et l’enfant c’est « la vraie Amérique » que les charlatans ne peuvent évidemment pas remettre sur pieds. Brown prend finalement un assistant, le docteur Willey, qui lui sert de béquille quand des cas sérieux se présentes. Ce dernier travaille d’ailleurs sur une machine capable de « remettre sur pieds les personnes mourantes » à base de gros coups d’électricité. Ce sera le remède miracle qui sauvera une cantatrice dont Brown a totalement ratée l’opération. C’est le New Deal, suite auquel Brown finira enfin par reconnaître qu’il a entubé tout le monde. Comme dans beaucoup de film sur la Crise, il finira par être pardonné et ne sera pas dénoncé à la police ainsi qu’à l’ordre des médecins. Il finira par reprendre un nouveau départ, fauché, avec l’infirmière Grant. « Keep walkin’ America », le film s’ouvre d’ailleurs par un plan d’une jambe d’une patiente s’étant faite une entorse qui s’apprête à faire une radiographie.
C’est cette radiographie qui montrera ce problème que tout le monde veut nier. C’est Godard d’ailleurs qui faisait le parallèle entre la radiographie et le cinéma, nés tous deux en 1895.
Je ne connaissais d'ailleurs pas du tout Florey, franco-suisse ayant débarqué à Hollywood en 1921. Il a réalisé des films fantastiques chez Universal (dont une adaptation de Poe), ce qui transparait dans certains cadrages et idées de "Bedside", chez d'autres "monstres". C'est d'ailleurs drôle, le film semble s'être pas mal fait allumé par la presse lors de sa sortie car "personne n'y est sympathique".
Toutes ces histoires de maladies, de faux docteurs, de patients incurables, de fauchés et d’addictes, c’est évidemment la Dépression et l’Amérique malade. Cela m’a d’ailleurs fais penser, par certains points, aux films de Wellman de la même période (« Night Nurse » par exemple). « Bedside » est également une série B de la First National et l’équipe de tournage comprend plusieurs membres récurrents de l’équipe de Wellman (Hickox à la photo entre autre). Forley collabore pour ce film avec l'actrice et scénariste Lillie Hayward, qui a également travaillé avec Wellman sur "Frisco Jenny".
John Smith, l’ancien médecin drogué, est filmé tel un monstre. Son nom, très commun, c’est en quelque sorte l’américain moyen qui a basculé dans la déchéance après 1929. La drogue étant à ses yeux la seule échappatoire à la Crise, il se la procure en faisant chanter Brown. C’est de toute façon un film où tout le monde se trompe et se ment, comme s’il on voulait occulter l’implacable vérité.
Il y a un certains mépris pour les « starlettes », les chanteuses et le milieu du spectacle. Cela semble n’être pour Florey que poudre aux yeux dans une Amérique lessivée qui essaye, elle aussi, de se voiler la face à coups de comédies musicales et d’espoirs vains en des lendemains qui « chantent » justement.
Les patientes du charlatan Brown ne sont d’ailleurs très souvent que des malades imaginaires aisées ou alors des personnes souffrant de surpoids (aisance), de manque d’exercice ou se complaisant dans l’oisiveté. Il suffit de leur procurer des placebos ou autres conseils absurdes pour les guérir. Cependant, quand une vraie malade fera son apparition (une italo-américaine pauvre qui amène sa jeune fille souffrant de fièvre), Brown refusera de la prendre en consultation et l’enverrais auprès « de l’autre médecin au coin de la rue ». Pour Florey, la mère et l’enfant c’est « la vraie Amérique » que les charlatans ne peuvent évidemment pas remettre sur pieds. Brown prend finalement un assistant, le docteur Willey, qui lui sert de béquille quand des cas sérieux se présentes. Ce dernier travaille d’ailleurs sur une machine capable de « remettre sur pieds les personnes mourantes » à base de gros coups d’électricité. Ce sera le remède miracle qui sauvera une cantatrice dont Brown a totalement ratée l’opération. C’est le New Deal, suite auquel Brown finira enfin par reconnaître qu’il a entubé tout le monde. Comme dans beaucoup de film sur la Crise, il finira par être pardonné et ne sera pas dénoncé à la police ainsi qu’à l’ordre des médecins. Il finira par reprendre un nouveau départ, fauché, avec l’infirmière Grant. « Keep walkin’ America », le film s’ouvre d’ailleurs par un plan d’une jambe d’une patiente s’étant faite une entorse qui s’apprête à faire une radiographie.
C’est cette radiographie qui montrera ce problème que tout le monde veut nier. C’est Godard d’ailleurs qui faisait le parallèle entre la radiographie et le cinéma, nés tous deux en 1895.
Je ne connaissais d'ailleurs pas du tout Florey, franco-suisse ayant débarqué à Hollywood en 1921. Il a réalisé des films fantastiques chez Universal (dont une adaptation de Poe), ce qui transparait dans certains cadrages et idées de "Bedside", chez d'autres "monstres". C'est d'ailleurs drôle, le film semble s'être pas mal fait allumé par la presse lors de sa sortie car "personne n'y est sympathique".
Dernière édition par Dr. Apfelgluck le Mar 9 Déc 2014 - 14:20, édité 1 fois
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: Bedside (Robert Florey, 1933)
Dr. Apfelgluck a écrit:
John Smith, l’ancien médecin drogué, est filmé tel un monstre. Son nom, très commun, c’est en quelque sorte l’américain moyen qui a basculé dans la déchéance après 1929.
Nom commun mais aussi très propre, historique et originaire; le nom de la communauté, si on veut, et du commun; le nom du fondateur de la communauté de Jamestown.
Un nom évidemment hyper symbolique, et qui peut donner à penser des choses avec ce film, que je connaissais pas
Borges- Messages : 6044
Re: Bedside (Robert Florey, 1933)
Exact, Borges !
C'est aussi le nom d'un médecin et chimiste américain du 19ième siècle. Ce fut l'inventeur du microscope à statif inversé.
Là encore, cela me rappelle ce que disait Godard dans l'interview "Godard est là" à propos de la caméra, des scénarios. Les scientifiques ont besoin d'observer, avec un microscope par exemple, avant de pouvoir écrire. Il dit ensuite qu'un réalisateur doit se servir de la caméra comme d'un microscope pour observer avant de pouvoir écrire "une histoire".
C'est aussi le nom d'un médecin et chimiste américain du 19ième siècle. Ce fut l'inventeur du microscope à statif inversé.
Là encore, cela me rappelle ce que disait Godard dans l'interview "Godard est là" à propos de la caméra, des scénarios. Les scientifiques ont besoin d'observer, avec un microscope par exemple, avant de pouvoir écrire. Il dit ensuite qu'un réalisateur doit se servir de la caméra comme d'un microscope pour observer avant de pouvoir écrire "une histoire".
Dr. Apfelgluck- Messages : 469
Re: Bedside (Robert Florey, 1933)
le thème, celui d'une médecin qui fait semblant de guérir des "Argan" de la bourgeoisie américaine, me rappelle un film de King vidor de 1938, au titre ... pompeux, "the citadel". C’est la version positive de Bedside, le mec se rachète en soignant une jeune fille pauvre d'origine italienne, personnage similaire au film de Florey; la dépression est plus lointaine et ça se passe en Angleterre lol. La critique de l'institution, des mœurs des médecins, sangsues de l'aristocratie, est plus aisée ainsi et le courage de l'individu auquel peut s'identifier le public américain permet d'amender l'inégalité constatée.
Invité- Invité
Re: Bedside (Robert Florey, 1933)
Dr. a écrit: Les scientifiques ont besoin d'observer, avec un microscope par exemple, avant de pouvoir écrire. Il dit ensuite qu'un réalisateur doit se servir de la caméra comme d'un microscope pour observer avant de pouvoir écrire "une histoire".
Pas très convaincant dans ce rapprochement Godard; il a une espèce de fascination scientiste pour les sciences, dures ou moins dures, les maths, l'histoire.
Borges- Messages : 6044
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