Le Bandit/Naked Dawn (E. G. Ulmer)
2 participants
Le Bandit/Naked Dawn (E. G. Ulmer)
Magnifique western de série B (en tout cas à très petit budget). J'aurais été sûr qu'Erwan ou Dr. Apf en aurait déjà parlé ici.
On pense à Bunuel et à un film mexicain que j'ai vu l'an dernier qui m'a beaucoup marquée, Macario, de R. Gavaldon dont le chef-opérateur est Figueroa. Peu importe tout ça.
J'étais surprise de bout en bout. Par le style du film et par la manière dont le scénario s'écrit. Par les évolutions des personnages, la force des enjeux, la simplicité de la mise en scène aussi, la beauté des sentiments, de la morale. Bertrand Tarvernier, dans le bonus du dvd, veut absolument trouver une filiation européenne et allemande au film, alors que j'ai plutôt senti de manière forte des choses du cinéma mexicain.
Quelqu'un l'a vu ?
On pense à Bunuel et à un film mexicain que j'ai vu l'an dernier qui m'a beaucoup marquée, Macario, de R. Gavaldon dont le chef-opérateur est Figueroa. Peu importe tout ça.
J'étais surprise de bout en bout. Par le style du film et par la manière dont le scénario s'écrit. Par les évolutions des personnages, la force des enjeux, la simplicité de la mise en scène aussi, la beauté des sentiments, de la morale. Bertrand Tarvernier, dans le bonus du dvd, veut absolument trouver une filiation européenne et allemande au film, alors que j'ai plutôt senti de manière forte des choses du cinéma mexicain.
Quelqu'un l'a vu ?
adeline- Messages : 3000
Re: Le Bandit/Naked Dawn (E. G. Ulmer)
hello Adeline,
je n'ai plus ce beau film à la fleur de la mémoire aussi m'est il difficile d'en parler en profondeur, si cela est possible. J'aime beaucoup le cinéma d'Ulmer, cette joie insatiable et débordante, juvénile, des personnages, bravaches, qui accompagne la mort et l’exil. Il y a un panneau au début du film indiquant le nom de la localité: matamoros, matamores.
La terre n'a plus guère que l'attrait de la poussière du départ. Ils coupent les amarres et laissent le bateau désirer au large. Vengeance, fuite de la culpabilité, désir pour une femme, le mouvement du film s'inscrit contre les rentes de l'immobilisme social ou celui du territoire, contre l'idée d'un établissement, d'une propriété, contre le confort de connaitre à l'avance le futur du présent. L'homme ne peut guère que penser à l'image suivante, jusqu'à la 23è image; tout dilapider et vivre pauvrement, comme des princes sans royaume.
Ses acteurs semblent toujours s'amuser, prendre du plaisir.
Ulmer a réalisé l'un des meilleurs vieux universal avec Bela Lugosi et Boris Karloff, le chat noir.
J'ai vu quelque uns de ses films des années 40 et 50. Au delà de Détour assez connu, il y en a de formidables. Petits budgets, mais comme le dit Manuel dans le film, "We manage with very little."
je n'ai plus ce beau film à la fleur de la mémoire aussi m'est il difficile d'en parler en profondeur, si cela est possible. J'aime beaucoup le cinéma d'Ulmer, cette joie insatiable et débordante, juvénile, des personnages, bravaches, qui accompagne la mort et l’exil. Il y a un panneau au début du film indiquant le nom de la localité: matamoros, matamores.
La terre n'a plus guère que l'attrait de la poussière du départ. Ils coupent les amarres et laissent le bateau désirer au large. Vengeance, fuite de la culpabilité, désir pour une femme, le mouvement du film s'inscrit contre les rentes de l'immobilisme social ou celui du territoire, contre l'idée d'un établissement, d'une propriété, contre le confort de connaitre à l'avance le futur du présent. L'homme ne peut guère que penser à l'image suivante, jusqu'à la 23è image; tout dilapider et vivre pauvrement, comme des princes sans royaume.
Ses acteurs semblent toujours s'amuser, prendre du plaisir.
Ulmer a réalisé l'un des meilleurs vieux universal avec Bela Lugosi et Boris Karloff, le chat noir.
J'ai vu quelque uns de ses films des années 40 et 50. Au delà de Détour assez connu, il y en a de formidables. Petits budgets, mais comme le dit Manuel dans le film, "We manage with very little."
Invité- Invité
Re: Le Bandit/Naked Dawn (E. G. Ulmer)
Oui, "we manage with very little" pourrait être une belle description du style du film. Ce n'est pas un grand film, il n'est pas époustouflant, la mise en scène n'est pas mirobolante, ce n'est pas grandiose. Mais c'est un grand petit film qui porte parfaitement ses ambitions, aussi haut que possible. Un film rond, complet, dont les circonvolutions de scénario construisent un monde ouvert, où les gens ne sont pas enfermés dans leur être et leurs défauts, mais peuvent emprunter les chemins d'esquive que la vie leur offre.
J'ai été frappée par la manière dont les personnages sont construits. On les découvre peu à peu, chaque phrase dévoilant une face différente de leur personnalité, qui les rend plus complexes, plus épais, plus intéressants. D'un instant à l'autre celui qu'on sentait bon et simple devient retors et avide, alors qu'il n'est en fait qu'un être tiraillé par des désirs différents ou emporté dans un tourbillon d'émotions qui le submergent. Il peut se racheter l'instant d'après, par un aveu ou la bonté d'autrui.
Et le personnage de Santiogo qui "dilapide tout et vit pauvrement, comme un prince sans royaume" comme tu le dis si bien, est beau, de la beauté que la pure bonté peut donner aux gens, surtout lorsqu'elle persiste malgré les épreuves, les désillusions et le cynisme ambiant.
J'ai été frappée par la manière dont les personnages sont construits. On les découvre peu à peu, chaque phrase dévoilant une face différente de leur personnalité, qui les rend plus complexes, plus épais, plus intéressants. D'un instant à l'autre celui qu'on sentait bon et simple devient retors et avide, alors qu'il n'est en fait qu'un être tiraillé par des désirs différents ou emporté dans un tourbillon d'émotions qui le submergent. Il peut se racheter l'instant d'après, par un aveu ou la bonté d'autrui.
Et le personnage de Santiogo qui "dilapide tout et vit pauvrement, comme un prince sans royaume" comme tu le dis si bien, est beau, de la beauté que la pure bonté peut donner aux gens, surtout lorsqu'elle persiste malgré les épreuves, les désillusions et le cynisme ambiant.
adeline- Messages : 3000
Re: Le Bandit/Naked Dawn (E. G. Ulmer)
J'ai lu des choses sur Ulmer dans les vieux Cahiers, des trucs pas toujours super intéressants, des banalités sur la mise en scène, et le manque de sous...
A chaque fois on le lie au cinéma allemand, à travers Murnau, avec qui il avait bossé. Mais dans un entretien avec les Cahiers, pour lui Murnau n'était pas "allemand" contrairement à Lang : "Lang est vraiment un cinéaste allemand, tandis que Murnau avait un esprit très universel, très cosmopolite. C'était l’un des cinéastes les plus cultivés qui soient. A cette époque, il n’existait pas un seul cinéaste aussi instruit que lui. Il avait étudié en Angleterre, il était diplômé d'Oxford."
Entretien auquel Godard (cinéaste) fait (peut-être) une (étrange) allusion, dans un autre entretien des Cahiers : "A l’étranger, les Cahiers ont une influence énorme. Or, tout le monde est d’accord là-dessus : quand on va à l ’étranger, on voit des gens qui vous disent "Freda, vous croyez que c’est sérieux !". On a déjà eu du mal à leur faire admettre que des types comme Ray et Aldrich avaient du génie, mais quand ils voient des interviews de gens comme Ulmer, ils abandonnent ! Je suis pour la politique des auteurs, mais pas n’importe laquelle, je trouve que vouloir ouvrir la porte à tout le monde absolument est une chose très dangereuse. L’inflation menace.
L’important n’est pas de vouloir à tout prix découvrir quelqu’un. Le côté snob du jeu de la découverte, il faut le laisser à l'Express. L’important est de savoir discerner qui a du génie et qui n’en a pas, d’essayer, si on peut, de définir le génie ou de l’expliquer."
A chaque fois on le lie au cinéma allemand, à travers Murnau, avec qui il avait bossé. Mais dans un entretien avec les Cahiers, pour lui Murnau n'était pas "allemand" contrairement à Lang : "Lang est vraiment un cinéaste allemand, tandis que Murnau avait un esprit très universel, très cosmopolite. C'était l’un des cinéastes les plus cultivés qui soient. A cette époque, il n’existait pas un seul cinéaste aussi instruit que lui. Il avait étudié en Angleterre, il était diplômé d'Oxford."
Entretien auquel Godard (cinéaste) fait (peut-être) une (étrange) allusion, dans un autre entretien des Cahiers : "A l’étranger, les Cahiers ont une influence énorme. Or, tout le monde est d’accord là-dessus : quand on va à l ’étranger, on voit des gens qui vous disent "Freda, vous croyez que c’est sérieux !". On a déjà eu du mal à leur faire admettre que des types comme Ray et Aldrich avaient du génie, mais quand ils voient des interviews de gens comme Ulmer, ils abandonnent ! Je suis pour la politique des auteurs, mais pas n’importe laquelle, je trouve que vouloir ouvrir la porte à tout le monde absolument est une chose très dangereuse. L’inflation menace.
L’important n’est pas de vouloir à tout prix découvrir quelqu’un. Le côté snob du jeu de la découverte, il faut le laisser à l'Express. L’important est de savoir discerner qui a du génie et qui n’en a pas, d’essayer, si on peut, de définir le génie ou de l’expliquer."
Borges- Messages : 6044
Re: Le Bandit/Naked Dawn (E. G. Ulmer)
si l'on veut pratiquer l'inflation, sans prétendre à son génie , il y a la conversation qu'eut Ulmer avec Bogdanovich: de nombreux extraits, historiquement intéressant, sont accessibles sur googlebooks. Il faut tout de même savoir que Ulmer avait réécrit la légende de ses débuts, comme de nombreux cinéastes.
who the devil made it
who the devil made it
Invité- Invité
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum