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Joël Séria

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Message par Borges Sam 30 Mar 2013 - 9:10

Baudouin II de Barvaux a écrit:Je conçois aisément qu'on ne raffole pas de Howard Hawks... Mais de là à trouver de l'intérêt aux horribles chromos franchouillards de Joël Séria, qui sentent la moustache, le béret, l'érotisme égrillard de voyageur de commerce et le phallocratisme de surveillant-chef du rayon poissonnerie... (Bertrand Blier à côté c'est du Bergman).

Pour moi, ça a tout à voir avec Max Pecas, à ceci près que Pecas c'est à la limite moins condescendant dans la stéréotypie.
Je ne vois aucune "ethnographie précise dans les détails" dans les films de Joël Séria. Au contraire, que du gros cliché sociologique qui tache.

On est loin, très loin, loin à l'infini, de Pialat. En quoi ce serait ethnographique? Parce qu'il y a du papier peint façon Orange mécanique dans toutes les pièces?

Il n'y a aucun mérite, à la base, à "donner de la profondeur aux beaufs", parce que le "beauf", déjà, ça n'existe pas, c'est une construction de stéréotype, méprisante et infantilisante, inventée on le sait par Charlie Hebdo dans les 70s, Cabu en particulier.

Le cinéma de Joel Séria me semble très bien représenter la mouvance Charlie Hebdo, qui contrairement à l'antienne rebattue ("subversion libertaire"), a toujours eu un vieux fond anar de droite franchouillard.

Dans une célébration soi-disant "rabelaisienne" du bien vivre, il s'agissait toujours de représenter des figures du "petit peuple" dans un schéma spontanéiste très déterminé, porté sur le cul, la bombance, la bonne chaire, la gouaille, la gaudriole, etc. Dans ce petit théâtre de guignol, il s'agissait alors d'opposer à cette "authenticité" du "peuple" tout son envers répressif représenté par les Curés, Les Notables, les Flics, etc. Siné et Wolinski se firent une spécialité de ça. Même Reiser, qui avait du talent, n'a pas échappé à ce folklorisme d'épinal.

Quand je dis que Joel Séria est la quintessence de cet esprit anar de droite -franchouillard, y a qu'à observer sa filmographie.

ça commence avec une charge éléphantesque contre les institutions religieuses teintée de polissonneries (un érotisme égrillard de cureton défroqué). C'est l'époque des discours sur la "libération sexuelle". Une libération très phallocrate, bien entendu, puisqu'ici on sert à la louche le fantasme éculé des petites collégiennes perverses et des petites culottes à froufrou. Dans une reprise fort prisée, à l'époque, de l'anticléricalisme (vaguement empruntée à Bunuel), "l'érotisme transgressif" (trop bon fantasme pour les curés, disait Deleuze) n'est pas tant une façon d'échapper au catholicisme qu'une exacerbation bouffonne de ses composantes névrotiques et fétichistes: soubrettes en chaleur, prêtres lubriques et toute la sainte quincaillerie.

"Mais ne nous délivrez pas du mal" indique la puissance du programme libérateur: ce n'est pas tant qu'on veuille en finir, malgré les apparences, avec le catéchisme opposant le Bien (la chaste pureté) au Mal (le vice concupiscent). Il s'agit bien plutôt de perpétuer cette opposition et de la consacrer, car c'est au contraire cette opposition qui stimule, émoustille, sans laquelle la chair semblerait bien triste et terne. Bref: érotisme de curé. La "transgression" fonctionne bien souvent sur ce mode de renversement dialectique pauvre, ne cessant en vérité d'être habitée par un ordre premier dont elle est censée se débarrasser. Je l'avais déjà évoqué: à propos de tout un versant "surréaliste" ou "proto-surréaliste" morbide dont l'athéisme d'apparence consiste plutôt en une longue et masochiste plainte sur la "mort de dieu".

Ainsi du théâtre de la cruauté d'un Artaud, ses vivifiantes et rebelles odes au "caca", qui ont bien besoin de l'être suprême et du jugement de dieu pour en finir, croit-on, avec ces derniers. Si le programme nietzschéen de "transmutation des valeurs" est anti-platonicien, ça ne consiste pas, rappelait là encore Deleuze, à simplement inverser les valeurs, mettre le bas à la place du haut et le haut à la place du bas; opération qui consiste juste à reproduire le dualisme et l'opposition, simplement en échangeant ou en permutant les places.

Ensuite, ça se poursuit avec une galerie de portraits de "ploucs provinciaux" hauts en couleur et au verbe "truculent", tantôt représentants en parapluie tantôt bouchers, se jetant, pour échapper à leur quotidien sinistre, dans la quête éperdue de bigoudènes dévergondées, de salopes flamboyantes et de gros culs à la Rubens dans lesquels ils aimeraient se tremper la moustache comme dans une choucroute garnie, s'exclamant à tout bout de champ: "ah ce cul, ce cul!". Je ne vois pas tellement de différence, donc, au bout du compte et tout bien considéré, entre "les galettes de Pont-Aven", et "Mon curé chez les nudistes".

Le résultat: un cinéma ringardissime, déjà à son époque, ne pouvant émoustiller que des comptables, des notaires et des pharmaciens, quand les sex-shops fermaient à 22h.

On ne voit pas trop bien ce qui dans ce cinéma poussif pourrait susciter quelque passion, fût-elle "ethnographique", sauf à titre de catalogue des poncifs sociologiques les plus débilitants de la France Pompidolienne et giscardienne.
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Message par Invité Sam 30 Mar 2013 - 12:56

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Dernière édition par supercool le Lun 15 Avr 2013 - 12:30, édité 1 fois

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Message par Borges Sam 30 Mar 2013 - 13:16

salut supercool;

-j'ai essayé d'extraire ce message de Jerzy de vos différends; et je crois qu'il a un contenu qui échappe aux circonstances à son origine...

-très honnêtement, pour les films du jeune simon, cette histoire des cahiers, c'est une fiction un peu trop étrange...et je marche pas non plus à :" je voudrais bien votre avis sur mes films"...


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Message par Invité Sam 30 Mar 2013 - 14:36

ah oui tout à fait raison, la méfiance est déjà de mise sur le forum alors à l'exterieur... Couper, déplacer, c'est justifié pour un forum qui a de la gueule et ne pas arriver le matin sur des inepties qui ne tiennent pas debout. C'est l'avis d'Adeline et c'est le mien aussi.

Par contre je suis toujours dans l'attente d'une réponse : Baudouin dit Séria ringard. Il a déjà dit Rohmer ringard : comment peut on arriver à qualifier des cinémas si dissemblables, à l'opposé du spectre d'un même qualificatif ? Ce grand écart ne laisse pas de me surprendre.

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