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Une dangereuse méthode : surtout pas la peste

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Borges
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Message par Borges Mar 3 Jan 2012 - 12:07



des notes, des brouillons...

cronenberg ne nous apporte pas la peste...





Jung une fois rêva d'ossements et de crânes. Un os, un crâne n'existent jamais seuls. L'ossuaire est une multiplicité. Mais Freud veut que ça signifie la mort de quelqu'un. « Jung, surpris, lui fit remarquer qu'ily avait plusieurs crânes, pas juste un seul. Mais Freud continuait.

(D/G)

tout le film est là dans cette opposition du "un" (mono) et du "multiple" (poly), du juif et de l'aryen...


rapporté à son titre, le film le moins dangereux du monde, le moins risqué. Peut-être pas du monde, du cinéma de cronenberg. Un mec plutôt habitué aux risques, du sujet, de la mise en scène, du corps… ici, tout est effacé, discret, plat, sans intensité. Après les premières images de violence; la méthode l'emporte sur le danger.

Pas une seule image risquée dans ce film.

Où est le danger ? Dans l'inquiétante tranquillité des lieux, de l'image, du décor, de cette bourgeoisie...


On peut imaginer que cronenberg nous raconte ce qu’aurait été son cinéma, sans freud, sans la découverte de freud, sans la rupture freud, sans l’inconscient...

Aucune des contradictions du film n'est soulignée, aucune guerre ne les agite, ne les anime : le conscient - l'inconscient, la famille - l'aventure, le sexe et la reproduction, le réel et le rêve... la monogamie - la polygamie...

Un film sans guerre, sans différent ; sans ennemi véritable.

calme plat : l’un, sans le double. Ce qu’aurait été la vie du savant de la mouche, s’il n’avait pas été emporté dans sa métamorphose, par sa terrible machine (désirante)...

Jung est un peu emporté, mais pas tant que ça...

Ici, le danger de la méthode, c’est peut-être tout simplement l’affirmation de la méthode, du moi, du cogito, contre le malin génie, la surface contre le fond du lac...


on peut aussi dire ceci : le risque pour cronenberg, risquer son image, en allant du côté de freud, et non pas de Jung, et encore moins du côté de OG...

(Je note, le cinéma de cronenberg, c’est le contraire de la psychanalyse… il ne s’agit pas d’adapter l’individu au monde, juste le contraire)

tout le monde raconte que Jung apparaît plus sympa que freud, vieux et n'osant plus se risquer dans les chemins de l'inconnu ; peut-être ;

freud serait alors du côté de la méthode, jung du côté du danger...

une méthode dangereuse, synthèse disjonctive ; rencontre des contraires... l'un et le multiple, disais-je...



si freud c'est la méthode, jung le danger... le film lui dans sa mise en scène se situe du côté du vieux sage juif, rationnel, prudent, matérialiste... deux choix donc : du côté du personnage, on choisit le danger, du côté de la mise en scène la méthode...



C'est comme s'il s'agissait de montrer que la méthode finalement n'est pas si dangereuse que ça.

Mais de quelle méthode s'agit-il?
de la psychanalyse?

On sait que Freud s'est battu pour montrer que bien utilisée, elle ne représentait aucun danger, elle ne risquait pas d'engendrer des fous, des être amoraux... c'est pourtant ce qui arrive, ce qui se produit, au moins dans deux cas, celui de Jung, délivré de ses règles protestantes, échappant à la famille, à l'unité du mariage... plongeant dans la mythologie, le péché... c'est aussi ce qui arrive à otto gross, qui lui a ouvert la voie... Le multiple ici se résume dans un mot : la polygamie ; on sait que Jung la recommandait à ses jolies patientes, pour mieux les guérir...


Un film tourné depuis la mort ; comparable à B Lyndon

la psychanalyse c'est la cure par le bavardage... les critiques opposeront l'image et la parole, le dialogue, mais le film est beaucoup moins construit autour de cette opposition que depuis l'insistance de la lettre, dans les deux sens du mot… Lettres étranges, encre du générique... lettres échangées entre les personnages, texte avant le générique, où avant la fin nous apprenons la fin des personnages.


il y a bien entendu la parole, la cure par la parole, mais la parole est aussi dépassée dans la lettre, l'écrit.

C'est dans la lettre qu'est l'inconscient du film, son sujet.

Le générique et ses lettres étranges, illisibles, mystérieuses, comme dans le fameux test, échanges des lettres, et puis le texte avant le générique final, où est dit ce qui vient après l'image, après les images : le destin de ce qui est hors image : l'Histoire, les deux guerres, la mort… monstrueuse, pour trois des personnages, freud (mort en exil après la prise de pouvoir par les nazis), gross (mort en 1919, de faim) et spielrein (assassinée par les nazis dans une synagogue)

tout semblait se situer hors du monde, de l'Histoire...

le film est à l'image du lac suisse, plat, plaisant, tranquille, sans heurt, même dans les scènes un peu osées ; comme on dit. Puis l'Histoire arrive, mais après le film.

La lettre, l’écrit, après l’image, comme un triomphe de la lettre biblique, de freud, du juif, sur l’aryen… la lettre, l’interdit de la représentation, l’emporte sur le cinéma.

Le rêve de jung annonçait la première guerre, les craintes, les angoisses de freud, le nazisme..
« Laisse tomber le christ. Ne rêve pas du mariage du blond siegfried et de la jolie juive » dit-il à Sabina Spielrein (dont les initiales annoncent le destin : SS); « nous sommes juifs nous resterons toujours juifs. »

(jung, on le sait, se compromettra pas mal avec le nazisme, il ne dira rien je crois de l'extermination...)


tout se joue dans le différend, dans la différence, entre le mono et le poly, entre le juif et l'aryen… la raison matérialiste athée de freud, le polythéisme mystique, mythologique et charlatan de Jung ;

l'absent du film, l'époque, la société, l'histoire, les luttes des nations, des classes (ressentiment de freud à l'égard de son jeune fils spirituel, dont la femme riche lui permet de mener une vie de luxe... épisode du voyage vers les USA ; le fils voyage en première classe), les strates de l’histoire, de la préhistoire, l’orient vers où revient freud, les origines du monothéisme, en égypte, et de son côté, jung vers wagner, la mythologie aryenne…



“la race juive toute entière possède (…) un inconscient qui n’est comparable à l’inconscient aryen qu’avec certaines réserves. L’inconscient aryen a un potentiel plus élevé que l’inconscient juif »

(JUNG)




« Quand on parle de la rupture Freud-Jung, on oublie trop souvent le point de départ modeste et pratique : Jung remarquait que le psychanalyste dans le transfert apparaissait souvent comme un diable, un dieu, un sorcier, et que ses rôles débordaient singulièrement les images parentales. »

(d/g, l'antioedipe)


Jung rêva qu’Hitler était « le christ du diable », l’antéchrist, mais que, en tant que tel, il était néanmoins l’instrument de dieu. »






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Message par Borges Mar 3 Jan 2012 - 12:34

j'y pense : la recontre du scorsese et du cronenberg, deux espèce de voyage dans les origines : la psy et le cinéma... on a souvent lié les deux...
on pourrait ajouter le malick, dans la thématique, plus ambitieux, il revient à l'origine de tout, de l'univers, de la lumière...



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Message par Borges Mar 3 Jan 2012 - 12:40




derrida cite cette lettre "comique" de Ferenczi (le disciple fidèle, qui hélas n'a droit qu'à quelques secondes dans le film) à freud, dans "politiques de l'amitié" ; le film de cronenberg est un récit d'amitié, de communautés, et de ruptures... ceux qui ne comprennent rien au film, disent qu'il y a un terme de trop dans ces relations...





« Cher Monsieur le Professeur, Je vous remercie pour votre lettre détaillée. - Le comportement de Jung est d'une impertinence inouïe. Il oublie que c'est lui qui a demandé " la communauté analytique " des élèves et que l'on traite les élèves comme des patients. Mais dès qu'il s'agit de lui, il ne veut plus que l'on fasse valoir cette règle. L''analyse mutuelle est un non-sens, et aussi une impossibilité. Chacun doit être capable de supporter une autorité au-dessus de lui, dont il accepte les correctifs analytiques. Sans doute êtes-vous le seul qui puisse se permettre de se passer d'analyste ; ceci, en fait, n'est cependant pas un avantage pour vous, c'est-à-dire pour votre analyse, mais une nécessité : il se trouve que vous ne disposez pas d'un analyste qui soit votre égal, et encore moins supérieur, car vous pratiquez l'analyse depuis quinze années de plus que tous les autres et vous avez accumulé une expérience qui nous manque encore. — Malgré tous les défauts de l'auto-analyse (certes plus longue et plus difficile que l'analyse par un autre), nous devons attendre de vous la capacité de maîtriser vos symptômes. Les vérités que notre pratique confirme tous les jours, c'est bien vous qui les avez trouvées pour la plupart - et ce dans votre auto-analyse. Si vous avez eu la force de surmonter chez vous-même, sans guide (pour la première fois dans l'histoire de l'humanité) [Ferenczi souligne], les résistances que l'ensemble du genre humain oppose aux résultats analytiques, nous devons attendre de vous la force nécessaire pour venir à bout aussi de vos plus petits symptômes.

[...] J'ai, moi aussi, traversé une période de révolte contre votre " traitement ".


[...] Jung est le type même de l'agitateur et du fondateur de religion. Le père ne joue presque aucun rôle dans sa nouvelle œuvre, la communauté fraternelle chrétienne [Ferenczi souligne] y prend une place d'autant plus large. - Son livre [Métamorphoses et Symboles de la libido, paru dans le Jahrbuch, 1911 et 1912] a sur moi un effet terriblement repoussant ; son contenu comme sa forme me rebutent, ses subtilités inutiles, son caractère superficiel, son ton poétisant et doucereux, me le font détester. Pensez donc - je ne l'ai toujours pas lu jusqu'au bout. »

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Message par Invité Mar 3 Jan 2012 - 13:03

salut Borges,
j'y étais hier et j'ai vu à peu près le même film : plat, méthodique sans danger.
DC semble dérouler un programme décidé en amont du film et qui le vide de tout enjeu.

la première séquence - arrivée de Spielrein à la clinique - cite peut-être les motifs du début de Spider : véhicule+porte ou seuil.

le dernier plan - regard silencieux et immobile de Jung - reprend sans surprise les derniers regards de Mortensens dans A history of violence et Eastern promises.
on peut aussi le mettre en rapport avec le dernier regard de Shame, je crois.

deux derniers plans de A dangerous method. un plan moyen sur la voiture de Spielrein filant sur les bords du lac et mouvement de caméra sur une grue, élévation jusqu'à un plan large sur le lac. puis un plan moyen de Jung immobile devant le lac et travelling avant jusqu'au gros plan.
je déteste cette façon de filmer, je la trouve salement grossière.
mais il y a aussi la morale du film. d'un côté Spielrein est devenue mère et elle longe le lac (les eaux : maternité ? inconscient ? l'eau figure les deux chez Jung autant que chez Freud) : elle court à Vienne retrouver Freud. elle pleure de devoir quitter Jung qui préfigure déjà ce qui va venir, l'aryen, le nazi, etc... il faut choisir entre la barbarie nazi et la loi du père, étant bien entendu que la liberté brutale des désir est un boulot de crève la faim (Otto Gross).



Dernière édition par Stéphane Pichelin le Mer 4 Jan 2012 - 11:06, édité 1 fois

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Message par Borges Mar 3 Jan 2012 - 13:19


- "Et puis surtout, hein ! vous, Jung ne l'oubliez pas : il faut y tenir à cette théorie (sexuelle de la libido)
- Mais pourquoi" lui dit Jung
- Pour empêcher", dit Freud, le "Schlammflut", le flot de fange !
- Duquel ? - "De l'occultisme" lui dit Freud,

(Lacan, la logique de l'inconscient)

la raison de la mise en scène de cronenberg, tellement méthodique; fidélité au sens de freud, à cette injonction morale, politique, logique; l'injonction de la logique contre l'irrationnel, qui va ensuite monter en europe... très beau passage, lyrique, émouvant, de lacan (qui ne semble pas avoir pardonné à jung son voyage en première classe vers les USA, alors que freud et Ferenczi voyageaient en seconde) dans " écrits" sur le contexte où a résonné la parole de freud...



"
Bien des contingences sont nouées dans cette histoire, depuis que le premier son du message freudien a retenti avec ses résonances dans la cloche viennoise pour étendre au loin ses ondes. Celles-ci parurent s'étouffer dans les sourds effondrements du premier conflit mondial. Leur propagation reprit avec l'immense déchirement humain où se fomenta le second, et qui fut leur plus puissant véhicule. Tocsin de la haine et tumulte de la discorde, souffle panique de la guerre, c'est sur leurs battements que nous parvint la voix de Freud, pendant que nous voyions passer la diaspora de ceux qui en étaient les porteurs et que la persécution ne visait pas par hasard. Ce train ne devait plus s'arrêter qu'aux confins de notre monde, pour s'y répercuter là où il n'est pas juste de dire que l'histoire perd son sens puisqu'elle y trouve sa limite, - où l'on se tromperait même à croire l'histoire absente, puisque, déjà nouée sur plusieurs siècles, elle n'y est que plus pesante du gouffre que dessine son horizon trop court, - mais où elle est niée en une volonté catégorique qui donne leur style aux entreprises : anrustorisme de culture, propre aux États-Unis de l'Amérique du Nord."

(tout cela manque disais-je dans le film, mais on peut aussi dire que cette absence est elle-même inquiétude, devant ce qui monte, ce qui arrive...la défaite de freud, du père... la montée du nazisme, de l'occultisme, du spiritisme, en un sens le danger de la méthode était là, avoir libéré ces forces démoniaques... les profondeurs, le sang, la terre...)

(on dit que c'est lacan qui aurait inventé la fameuse phrase attribuée à freud : "ils (les usa) ne savent pas que nous leur apportons la peste"
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Message par Borges Mar 3 Jan 2012 - 13:31


hello SP :


l'eau du lac, de la mer (voyage vers les usa), de la "mare" où se jette Spielrein, de la baignoire pour les bains glacés...

faut voir ces différentes variations, dans le film, et surtout penser tout ça depuis l'eau wagnérienne du rhin, dont parlent jung et sabina S...

eau essentiellement immobile, inverse de celle de malick...
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Message par asketoner Mer 4 Jan 2012 - 13:02

Pourtant, c'est bien avec l'ouverture de L'or du Rhin que commence Le nouveau monde.
Mallick choisit le lyrisme (ou l'enthousiasme), et la critique point au fur et à mesure du film (tout ça n'est pas durable), tandis que Cronenberg opte immédiatement pour le doute : cet autre monde n'est peut-être qu'un lac très plat et très suisse, il n'y avait rien à découvrir, il n'y avait que des conquêtes.

Ensuite, on peut se demander : si le portrait que fait Cronenberg de Jung était une manière déguisée de parler de Godard (ce sentimentalisme fermé sur lui-même et justificateur, ces visions un peu forcées), que serait Freud ? Hollywood ?

(Et c'est toujours très stimulant de te lire)

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Message par Borges Mer 4 Jan 2012 - 14:07

hello asktoner, bienvenue;

(j'ai aussi pensé à godard et à son lac suisse, mais pas très longtemps...j'ai aussi pensé au lac de zarathoustra...jung admirait nietzsche...freud je crois prétendait ne l'avoir pas lu, s'en être toujours tenu à l'écart pour ne pas en subir l'influence...)


dans les entretiens que j'ai lus de cronenberg, wagner a deux fonctions, c'est

-d'une part, la figure romantique du génie, encore très marquante à l'époque; en ce sens, c'est un objet d'identification, pour freud, et jung (comme le sont CC et Galilée)...

-d'autre part, c'est l'antisémite, idole des nazis...

Dans la pièce, ou le script, je sais plus, quand SS demande à jung s'il aime wagner, ce dernier répond "la musique pas l'homme"... cronenberg, pour qui cette réponse (que font généralement ceux qui adorent la musique mais rejettent l'antisémitisme du mec) n'était pas vraisemblable, aucune raison que jung n'aime pas wagner, a modifié la réplique : » l’homme et la musique » ; laissant ainsi entendre que jung était antisémite (ce que pensait freud, d’ailleurs ; ce serait une des raisons de la trahison)


-lors de cette scène wagner : la discussion entre ss et jung n'est pas seulement théorique : SS demande à Jung de lui faire un gosse, un Siegfried juif-allemand, une synthèse des éléments sémites et aryens. Freud, lui, veut faire de Jung un fils en esprit... Le but est le même : relever l'élément juif dans l'élément aryen. Dans l'esprit de freud, stratégiquement, un aryen protestant doué riche et tout est une chance pour le développement de la psychanalyse ; les obstacles antisémites tomberaient, on ne verra pas dans la « nouvelle science », une affaire juive, de la superstition juive...

ça ne marchera pas évidement : "nous serons toujours des juifs", dira freud, après la rupture… SS épousera un juif, tout en regrettant de n'avoir pas eu de fils avec Jung...

Notons que freud et Sabina Spielrein doivent effacer tout élément "communautaire", toute appartenance, pour prétendre à la scientificité, c’est la condition de l’universalité de leurs discours...

Dominant, jung a moins de problème à se risquer dans l’irrationnel, dans la religion dominante...

Cronenber, juif et athée, comme freud, emploie la même méthode finalement, celle de la pure objectivité, de la neutralité, de la science… il ne prend pas parti entre les deux mecs,

(il avoue par contre avoir de la sympathie pour Otto, un précurseur des hippies, selon lui)


-au juif, à l'aryen, il faut ajouter l'américain, le pragmatique; c'est à william james que l'on doit le titre du film "a dangerous method"... en 1909, gravement malade, il assiste aux conférences de freud à l'université de clark; il aime pas trop freud, n'y comprend rien : "A man obsessed by fixed ideas. I make nothing in my own case with his dream theories, and obviously “symbolism” is a most dangerous mthod”

Freud de son côté, lors de ce voyage, dans un entretien avait rejeté une espèce de thérapie psychologique américaine où la religion joue un grand rôle parce que “dangereuse parce que non scientifique”; james, psychologue et religieux, avait de la sympathie pour cette méthode...

Il s'entendra bien avec Jung, parce plus religieux...

un film de notre temps finalement...


freud c'est le discours de la raison, de l'athéisme, contre la religion...idéologiquement

en terme de cinéma, je sais pas...il est vrai que hollywood n'a pas beaucoup hérité de jung, en dehors de kubrick, un juif, et de coppola...


marrant, cronenberg dit avoir vu le film de huston sur freud, à sa sortie, il sait même que sartre a bossé sur le scénario...












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Message par Borges Mer 4 Jan 2012 - 14:22

-chez malick : l'or du rhin fait sens aussi avec l'eldorado...la ruée vers l'or du nouveau monde... (je vais pas plus loin; je vais plus m'arrêter, sinon...)

-dans le cronenberg, y a aussi un discours sur la valeur, l'argent, masochisme, rétention, avarice, générosité, etc...la psychanalyse c'est aussi une histoire d'argent... la scène où SS paye Jung...comme je disais plus haut, y a une guerre des classes entre jung et freud... la très belle scène où à table jung se sert très généreusement... freud lui fait remarquer la présence de sa famille, que découvre un mouvement de caméra...la famille nombreuse à nourrir...jung s'était servi la part d'au moins trois personnes je crois...plus tard on apprendra que Otto est mort de faim...



-
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Message par Borges Ven 6 Jan 2012 - 9:05


Une dangereuse méthode : surtout pas la peste TOPTEN2012_tete


Une dangereuse méthode : surtout pas la peste 9k=

deux mondes : deux approches de la religion et de la science...Oedipe n'est pas absent du film de Malick, on l'avait dit...




Dernière édition par Borges le Ven 6 Jan 2012 - 11:31, édité 2 fois
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Message par Borges Ven 6 Jan 2012 - 10:04

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcQWQKuYeyrzKuxsWVKNhvLtscgTYcwVw09efTJX3kSl4-vHwvxf6w

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRqsilymq-KXwcsveVZ9FI5AHlRwwBbe7rL69ecTlFQQUQlqm35

j'aime beaucoup le rapprochement de ces deux images; il me semble dire bien des choses; lesquelles? ça reste à dire, penser... on pourrait penser, essayer de penser que la mise en scène du film est là : il s'agit pour cronenberg de faire venir le sphinx sur les devants de la scène , dans le malade, à l'avant du plan, alors que le psy lui occupe la place du sphinx, celui qui sait, et pose les questions; non, pas vraiment, c'est mal dit, c'est pas du tout de ça qu'il s'agit...

c'est nul comme perception

jung occupe la place du sphinx, freud a le sphinx derrière lui, c'est autre chose...

le sphnix, c'est bien entendu l'égypte, dont a triomphé oedipe, en résolvant la question de l'homme...

et alors?
je sais pas

cronenberg dit que la psy a inventé un mode de relation qui n'avait jamais existé jusque là dans l'histoire de l'humanité : celle de l'analyste et de l'analysé, en terme de découpage de l'espace, et de la mise en scène du dialogue, il s'agit de parler à quelqu'un qui ne vous voit pas... que vous ne voyez pas... fin du face à face...

là, sur l'image, dans la scène d'où elle est tirée, Jung ne voit rien des déformations du visage de SS, de ces désarticulations, de cette mâchoire qui s'avance...

je ne sais pas si c'est une nouvelle relation, ou s'il faut la replacer comme le fait foucault dans la suite de la pastorale chrétienne, cette obsession du sexe, du désir...parler du pipi et du caca...masturbation, en ce sens, ce serait moins une histoire juive, qu'une histoire chrétienne, finalement...

la psy n'a pas du tout libéré une parole refoulée mais soumis les gens à une obligation de dire, de se révéler, de parler de leurs sales petits secrets (la masturbation, c'est la grande affaire de SS)

penser ce film avec celui de NM, nous avons un pape...ceux qui ont inventé l'injonction de révéler le sale petit secret refusent de s'y soumettre...la place du souverain; c'est un peu ce que dit la lettre cité par derrida (cf plus haut), freud, le père, le souverain n'a pas à être psychanalysé...



Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRqsilymq-KXwcsveVZ9FI5AHlRwwBbe7rL69ecTlFQQUQlqm35


nous parlions de wagner, de la volonté de freud d'avoir une descendance aryenne : rappelons avec wiki que Sigmund Freud est né Sigismund Schlomo Freud et que Siegmund est un personnage essentiel de la tétralogie de wagner...c'est le père de siegfried...


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Message par Borges Ven 6 Jan 2012 - 10:32

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRqsilymq-KXwcsveVZ9FI5AHlRwwBbe7rL69ecTlFQQUQlqm35

freud et son cigare devant, le sphinx derrière... progrès de l'humanité; on passe du blanc au noir; le noir de quel deuil, demanderait baudelaire?

Depuis la fin du Moyen Âge, périodiquement, le noir caractérise le vestiaire masculin. L'étude de John Harvey en cherche les raisons à travers un foisonnement de sources picturales et littéraires, sans négliger les contextes politiques et religieux qui ont pu établir le règne du noir. C'est au XIX e siècle que la conscience en apparaît, sous une forme problématique : pourquoi les hommes (et non les femmes, nous y reviendrons) optent-ils pour la couleur du deuil ? « Symbole terrible », pour Alfred de Musset. Théophile Gautier déplore cette mode « si triste, si éteinte, si monotone ». L'habit noir « n'est-il pas l'habit nécessaire de notre époque, souffrante et portant jusque sur ses épaules noires et maigres le symbole d'un deuil perpétuel ? », écrit Baudelaire. « Nous célébrons tous quelque enterrement ». Le noir, à l'image de la mort, nivelle ; et selon Baudelaire, voilà pourquoi l'habit noir exprime l'esprit de la démocratie. Pourtant, ce ne sont pas les Français mais les Anglais, pas la bourgeoisie mais la haute société qui lancent le noir, celui du smoking, repris ensuite pour les redingotes. Les dandys des années 1820, recherchant dans le noir un air d'élégance et de distinction, seront copiés par les gentlemen : le noir deviendra alors la couleur de la classe dominante. Ce n'est pas la première fois dans l'histoire occidentale que le noir s'associe au pouvoir (...) Durant les périodes où le noir a dominé, les hommes en noir étaient au service d'un pouvoir d'une gravité mortelle », le XX e siècle en fournissant l'exemple « le plus extrême et le plus odieux ».

http://clio.revues.org/index115.html




Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcQWQKuYeyrzKuxsWVKNhvLtscgTYcwVw09efTJX3kSl4-vHwvxf6w

la femme est en blanc; couleur du sphinx (dont un peu de l'animalité); c'est aussi un peu son attitude, son maintien; ce qui s'affirme, tente de venir à la surface, c'est "l'animalité", celle dont avait triomphé oedipe...


là il faudrait parler de l'hystérique...



mais regardons encore à nouveau cette image, qui dit à la fois le progrès, la certitude du triomphe de la raison, de la civilisation, sur l'animalité, le mélange de l'homme et de l'animal, mais aussi, faisons attention au prolongement de la tête du sphinx vers celle de freud...la continuité...la tête du sphinx est remplacée par celle de freud...on n'échappe pas à la puissance du mythe...

on le verra tout à l'heure

enfin, peut-être


Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRqsilymq-KXwcsveVZ9FI5AHlRwwBbe7rL69ecTlFQQUQlqm35

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Message par Borges Ven 6 Jan 2012 - 11:57

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRR0KJ5QKLO Ck719jyQzjnPGWM9j9RvNPPy3a_svtFj8uv74a0Lg

on se souvient du moment où jung demande à ss ce qu'elle a éprouvé quand, enfant, son père la "fessait" : du plaisir, jouissance sexuelle, réussit-elle à dire...c'est une des grandes énigmes du film...celle qui annonce le mal pour le mal, peut-être sans jouissance, celui de l'extermination nazie...cette image dit-elle quelque chose dans ce sens...



S’il y a quelque chose d’irréductible dans la vie de l’être vivant, dans l’âme, dans la psyché […], et si cette chose irréductible dans la vie de l’être animé est bien la possibilité de la cruauté (la pulsion, si vous voulez, du mal pour le mal, d’une souffrance qui jouerait à jouir de souffrir d’un faire-souffrir ou d’un se faire-souffrir pour le plaisir), alors aucun autre discours — théologique, métaphysique, génétique, physicaliste, cognitiviste, etc. — ne saurait s’ouvrir à cette hypothèse. Ils seraient tous faits pour la réduire, l’exclure, la priver de sens. Le seul discours qui puisse aujourd’hui revendiquer la chose de la cruauté psychique comme son affaire propre, ce serait bien ce qui s’appelle, depuis un siècle à peu près, la psychanalyse.
(derrida)

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRqsilymq-KXwcsveVZ9FI5AHlRwwBbe7rL69ecTlFQQUQlqm35Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRR0KJ5QKLO-Ck719jyQzjnPGWM9j9RvNPPy3a_svtFj8uv74a0Lg

comparer les positions, celle de ss, celle du sphinx...

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRxLu_xletsiSRf-fH7mhIDvKiB0KzrwT2z2IuhLAbYZxD9MZa_Vw

les deux hommes en noir et la sphinge/le sphinx; la grèce et l'égypte, à vienne...

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRJAm6hpNlHESZQ5N2g3H_F9koRUrtnBYpJTBw1lr4ohYMlsscLLA

ils sont habillés, en noir, elle est "nue"; pq?

pour les mêmes raisons que sur ce tableau?

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRMX65kyAi2RDSi2IihQEybOqnFlBYxyCyi-sdsBX57wsfW1XyP





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Message par Borges Ven 6 Jan 2012 - 12:11

Stéphane Pichelin a écrit:
le dernier plan - regard silencieux et immobile de Jung - reprend sans surprise les derniers regards de Mortensens dans A history of violence et Eastern promises.
on peut aussi le mettre en rapport avec le dernier regard de Shame, je crois.

pour moi, il cite surtout, une autre histoire de fils et de père, dans ma mémoire de cinéphile...
Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcTB_O2h4srrGXbg7Fj048F2x4PfHDBQfhsdBCzpB3LzWyQTRUBGUne dangereuse méthode : surtout pas la peste 2Q==

le contraire de ceci :


Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcQzZ1hNDhXSVPIH5CSQHSY5vV27o5tSYqM2AKhxNHRRogxeGXB8

(le refus de la prise de pouvoir, du trône, de l'assise souveraine)

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Message par IQI Sam 7 Jan 2012 - 8:54

Salut Borges,

Juste une question "conne" en passant - ca fait un peu people : dans le libé d'hier, ils parlent de Derrida comme d'un ami de Bourdieu, il me semblait que c'était pas tout à fait ça?

Pas vu le film, je vois plus rien du tout....

Donnez moi dix raisons de préférer des mauvais films à - pour partie, la lumière réelle.

Et dernier point technique, il devait pas adapter Cosmopolis de Delillo?

IQI

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Message par wootsuibrick Sam 7 Jan 2012 - 9:27

IQI a écrit:
Donnez moi dix raisons de préférer des mauvais films à - pour partie, la lumière réelle.

Aucune raison, que ce soit pour les mauvais films, ou pour le cinéma tout court...
L'humanité d'avant le cinéma était elle pire que celle de pendant le cinéma?
ça m'amuserait de croire que l'image à aspirer l'âme, nous faisant perdre 21 grammes avant même notre mort.
Il semblerait que nous pesons moins, que nous avons perdu notre aura dans un constant devenir image,
image mécanique, chimique, numérique etc.
Nos ancêtres avaient bien raison d'avoir peur de se faire prendre en photo, l'image aurait due rester production de l'esprit et de la main,
et non devenir vol de la lumière par procédé scientifique.
Heureusement que le cinéma expérimental et les procédés réflexifs de l'art, sont là pour nous sauver!
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Message par Borges Sam 7 Jan 2012 - 12:46


hello iqi;

sans nous engager dans la question, déconstruction, de l'ami(e), des amitiés, de l'amitié... je sais pas, je crois pas... dans ma tête, les amis de derrida, parmi ceux que je connais, qui ne furent pas seulement des amis privés, ce fut plutôt Jlnancy, PLlabarthe, levinas, blanchot...

Derrida et bourdieu avaient pas mal de choses en commun, et tout pour les séparer...

ils se sont connus à Louis le grand ; internes tous les deux, donc des "prolos de la khagne"... Proximité politique et philosophique, aussi; avant de s’orienter vers la sociologie, bourdieu projetait de faire une thèse sur husserl...

en 1957/59, pendant leur service militaire en algérie , ils sont très proches; le couple derrida dînera souvent chez bourdieu...

(amusant : la femme de derrida raconte que derrida se plaignait que les chiens de la caserne lui aboyaient dessus parce qu'ils le prenaient pour un Arabe...)


-Après "glas", un des livres les plus audacieux de derrida, bourdieu lui écrit une lettre de félicitation : « je me dis parfois que si je faisais de la philo, je voudrais faire ce que tu fais »

Après ce fut plus aussi rose, l'admiration devient rivalité; bourdieu attaque la lecture que fait derrida de kant; malgré son souci d'échapper à la pure philosophie, d'en sortir et tout, pour bourdieu, derrida fait encore de la philosophie; il reste dans les limites de la censure du champ philosophique; pas une vraie transgression...

Derrida répondra, bien entendu, à cette lecture... sur le mode c'est pas moi, c'est toi : bourdieu veut élever la sociologie au rang de science reine, lui faire quitter la place subordonnée de simple science régionale; il rêve d'avoir le dernier mot, le sens dernier, la place hégémonique, de réduire la philosophie à sa dimension empirique (habitus, champ, institution...)...

c'est un peu le même problème qu'avec foucault et sa lecture du cogito...

Eribon, proches des deux, raconte que bourdieu était hanté par derrida… il le considérait comme son seul égal comme son seul rival… bourdieu lui aurait dit : "il y a toujours quelqu’un dans sa propre génération qu’on considère depuis le début comme son rival, moi c’est derrida »


Après Kant, le goût pur et le dégoût, il y aura l'affaire heidegger et le nazisme, en 1988 ;

Bourdieu attaque les heideggeriens, leur demande de se positionner; derrida bien entendu répond, dans libération, dit que les méthodes de lecture des textes philosophiques de bourdieu sont insuffisantes; bourdieu est préheidegerrien; il faut dépasser l’opposition de la lecture interne et de la externe,

(ce que bourdieu dit avoir réussi, contrairement à derrida)

derrida dit n’avoir pas répondu aux attaques dans « la distinction » « par réflexe de fidélité ou de pudeur dans l’amitié blessée (me voici libéré de ma réserve par cette dernière agression ».

Bourdieu dit que tout ça c’est triste, qu’il regrette que les choses aient pris de telles proportions, il regrette si ses mots ont pu blesser derrida, au nom de leur vieille amitié.


spectres de marx et la misère du monde, les rapprochent;Ils vont se retrouver dans les années 1990, dans des actions politiques; immigration, guerre en algérie... ils fondent avec d'autres le parlement international des écrivains (après l'assassinat de tahar Djaout),


Bourdieu essaye de faire élire derrida au collège de France, où derrida voudrait bien entrer ; fortes résistances; en dehors, de yves bonnefoy, personne ne veut de derrida, si je me souviens bien; bourdieu veut la jouer finement...pour faire admettre derrida, il propose une doublée entrée, derrida et un "ennemi" de derrida : bouverese; hélas, bouverse réusit; derrida, pas.
*
Le pauvre ne réussit même pas à présenter un projet officiel ; "je me suis fait avoir comme un con" dira bourdieu ; derrida, lui, qui supporte pas cette grosse blessure narcissique, la deuxième après son échec à Nanterre, en voudra à bourdieu de l'avoir attiré dans ce « guépier » ;

Dans« esquisse pour une auto analyse", on trouve de nombreuses "piques" contre derrida, et la philosophie en général...

pas de vrais amis, je pense; un grand philosophe ne peut pas avoir comme ami un grand sociologue; il s'agira toujours de savoir qui détient la "vérité"...quelle "science" est reine...


mais c'est l'ami qui décide qui est ou n'est pas son ami :


C'était un très vieil ami, avec lequel j'aurai tant partagé ! Notre amitié a été une relation toujours intense, et très riche, tendue, parfois difficile il est vrai. Je suis bouleversé par cette nouvelle. Nous nous sommes connus en khâgne à Louis le Grand en 1949, puis nous étions ensemble à l'École Normale, il n'était pas encore sociologue alors, nous parlions de philosophie, surtout de Leibnitz et de Heidegger. Nous nous sommes retrouvés en Algérie, où je faisais mon service, lui faisait ses débuts de sociologue. Mais nos échanges ont véritablement repris à la fin des années 60, lorsqu'il a mis en chantier son projet de refonte de la sociologie, en inaugurant un travail qui intégrait la philosophie pour produire une "sociologie de la sociologie". C'était, dans le monde entier, une grande et originale figure de la sociologie contemporaine.

Il avait l'ambition de rendre compte de tous les champs de l'activité sociale, y compris les champs intellectuels, et y compris la sienne propre. Cette construction "hypercritique", autour d'un de ses mots préférés, "objectiver" (analyser et rendre objectif ce qui est à l'œuvre dans toute pratique spontanée) est au centre de sa démarche, et en fait le prix. Nous avons eu des débats, et des des désaccords, sur son approche du champ philosophique, mais nous nous sommes souvent retrouvés côte à côte dans des projets militants, en particulier à propos de la situation des immigrés. Parmi ces actions communes figurent la fondation du Parlement des écrivains à Strasbourg en 1994. À partir de 1995, l'intellectuel engagé qu'il a toujours été a pris sur les luttes sociales des positions radicales, assez solitaires. Je me suis senti assez proche au moins de ce qui l'inspirait, même si nous n'avions pas les mêmes gestes et si nos façons d'approcher les choses ne se ressemblaient pas. Mais je perds un témoin et un ami irremplaçable."





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Message par Eyquem Dim 8 Jan 2012 - 2:27

Hello,
Borges a écrit:Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcTB_O2h4srrGXbg7Fj048F2x4PfHDBQfhsdBCzpB3LzWyQTRUBG

Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Images?q=tbn:ANd9GcRqsilymq-KXwcsveVZ9FI5AHlRwwBbe7rL69ecTlFQQUQlqm35
Dans le mythe, le sacrifice d'Oedipe libère la cité de la peste qui la ravageait. Ici, c'est l'inverse, la catastrophe est à venir : le rêve de Jung promet pour bientôt une pluie de feu qui ravagera l'Europe.

(Est-ce que le mot de Lacan, "Ils ne savent pas que nous leur apportons la peste", faisait aussi référence à la peste dans Oedipe ? Est-ce qu'il ne jouait pas déjà sur ce renversement par rapport au mythe oedipien ?)


C'est intéressant, tout ce que tu dis sur ce jeu des places et des changements de place.
Pour continuer le rapprochement avec Oedipe, le mythe se construisait précisément sur cette confusion des rôles et des places : par son parricide, Oedipe s'installait à la place du père ; par son inceste, il confondait en Jocaste la mère et l'épouse. Il était à la fois l'égal de son père (puisque mari de Jocaste) et l'égal de ses enfants (qui sont aussi ses frères et soeurs). C'est ce que prédit Tirésias à Oedipe qui ne sait pas encore quelle révélation l'attend : "Viendront une foule de malheurs qui te feront l'égal de toi-même en te faisant l'égal de tes enfants".

"L'identification d'Oedipe avec son propre père et ses propres enfants, l'assimilation en Jocaste de la mère et de l'épouse, rendent Oedipe égal à lui-même, c'est-à-dire en font un agos, un être apolis, sans commune mesure, sans égalité avec les autres hommes, et qui se croyant égal au dieu se retrouve finalement égal à rien."
(c'est dans un article génial de Vernant, dans Mythe et tragédie : "Ambiguïté et renversement ; sur la structure énigmatique d'Oedipe-roi" : Oedipe y apparaît comme le monstre quasi-divin et quasi-bestial grâce auquel la cité se délimite elle-même comme pleinement humaine. Vernant cite Aristote : un être qui est en dessous de l'humanité, proche des bêtes, ou un être qui est au-dessus, presque un dieu, un tel être n'est pas "politique", ne peut pas faire partie de la cité ; il est "comme un pion isolé au jeu de dames", il est sans mesure, il ne se définit que par rapport à lui-même - c'est le statut même d'Oedipe.)

Dans le film, le danger semble toujours venir avec la confusion des rôles et des places : en couchant avec sa patiente, Jung aurait confondu les places, tiendrait la position impossible de l'amant et du médecin ; en couchant avec un aryen, Sabina aurait commis une erreur selon Freud ; en s'associant à Freud, Jung pense devenir son collègue avant de s'apercevoir qu'il est maintenu au rang d'étudiant. Etc.


Devenir, comme Oedipe, le fils de soi-même, c'est un des "rêves" des personnages cronenbergiens. Qu'on pense à Brundlefly (proposant à la fin de La Mouche de faire fusionner le père, la mère et l'enfant, en un seul être). Ou à la piéta qui clôt Faux Semblants.

A dangerous method, c'est le film d'un ratage : aucune "fusion au niveau génétique/moléculaire" n'a lieu. Chacun à la fin est renvoyé à son rôle, son identité, sa place. On se dit : c'est à ce prix, peut-être, qu'une cité humaine est possible (mais la promesse de cataclysme, à la fin, ne permet pas d'en être si sûr...)



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Message par Borges Dim 8 Jan 2012 - 13:13

Dans le mythe, le sacrifice d'Oedipe libère la cité de la peste qui la ravageait. Ici, c'est l'inverse, la catastrophe est à venir : le rêve de Jung promet pour bientôt une pluie de feu qui ravagera l'Europe.

(Est-ce que le mot de Lacan, "Ils ne savent pas que nous leur apportons la peste", faisait aussi référence à la peste dans Oedipe ? Est-ce qu'il ne jouait pas déjà sur ce renversement par rapport au mythe oedipien ?)

hello eyquem;

t'imagines bien que lacan a oedipe en tête en prêtant ces mots à freud, lui-même bien entendu s'est identifié à oedipe...

pas simple de savoir ce que signifie apporter la peste dans le film...

A travers l’énoncé, il y a identification, freud se met à la place d’oedipe, ou plutôt puisque la phrase ne serait pas de freud, lacan lui fait jouer, lui fait tenir le rôle d’oedipe apportant la peste à la ville dont il sera roi, mais sans le savoir, puisque il passera son temps à chercher le coupable.

La différence se joue donc au niveau du savoir, de la conscience : freud sait ce qu’il apporte en Amérique ( à un moment dans le film il s'identifie à C.Colomb); il sait qu’il apporte la peste, ce qui le distingue de oedipe, qui, sûr de son savoir, ignorait qu’il était le jouet d’un destin qui dépasse son savoir, sa conscience, sa prétention à la maîtrise, sa démesure... Ce qui rapproche freud de oedipe, c’est la passion du savoir, la confiance dans la raison, une sorte de démesure scientifique… la foi dans la raison, dans les lumières, dans la lumière; croyance propre à l'époque avant la catastrophe de la première guerre mondiale; le film met en scène cette croyance, celle de freud et de son époque, il est extraordinairement lumineux; on ne voit finalement rien du monstrueux, des traumatismes, des rêves et des cauchemars; tout cela se passe dans la parole, a son lieu dans la parole; c'est un film un peu rohmerien en un sens; puissance de la parole, narration, que ne vient jamais authentifier l'image...cette mise en scène de la lumière, de la méthode, se comprend mieux quand on compare le film de cronenberg à celui de huston sur freud. Ce pari de la méthode, mais pour en montrer la vanité, l'écroulement, c'est assez étonnant...pas une seule image de rêve, cela aurait pourtant permis à cronenberg de faire du cronenberg...

retour à la peste : Cronenberg semble s’être inspiré du passage des écrits où lacan rapporte ce mot, qu’il attribue à jung : dans le texte, comme dans le film, la présence de la statue de la liberté est essentielle ; la peste, c’est l’inverse de la statue de la liberté éclairée, l’inverse donc de la liberté, des lumières , d’une démocratie fondée sur l’idée humaniste de l’homme maître de sa vie, de son destin...

(la peste est dans les mots, pas dans l'image, dans le calcul des apparences, le soin des façades...)

Freud pense qu’il va mettre à mal cette prétention, en ce sens, il n’est pas oedipe (vainqueur des monstres) mais plutôt la voix des dieux qui punissent le savoir démesuré fondé sur l’ignorance de l’inconscient, du sujet du désir, de la mort, car c’est cela finalement que signifie la peste, comme le dit lacan… la vérité générale, abstraite, « Tous les hommes sont mortels» n'a, du fait même de ce « tous » à proprement parler aucun sens

(on s’en excepte toujours, dans le « tous », "tous" c’est pas moi, mais personne, or, la mort n’est pas un événement universel, c’est ce qui m’arrive à moi, ma possibilité la plus propre, sur quoi d’ailleurs se termine le film : la mort des héros, chacun la sienne)

« Tous les hommes sont mortels» n'a, du fait même de ce « tous » à proprement parler aucun sens
tant que la peste ne s’est pas propagée à Thèbes, pour que ce « tous » devienne quelque chose d'imaginable et non pas de pur Symbolique; il faut que chacun se sente concerné en particulier par la menace de la peste… "

sais pas, parce alors là c’est la peste portée aux usa, finalement, comme le dit lacan, ils s’en sont bien arrangé, transformant la psychanalyse en technique de management, d’adaptation des individus aux exigences de la société ; il n’a pas porté la peste aux usa ; c’est le moins que l’on puisse dire ; la psy a été facilement dé, dans son image, son idée de l’homme…



"Ils ne savent pas que nous leur apportons la peste", et n'en sauront rien ; c'est l'idée de lacan. Les américains ont normalisé la psychanalyse ; la peste que freud pensait apporter fut bientôt "la proie de médications et de médiations qui en limitèrent les beaux ravages" ; sous les effets de l'anhistorisme, du behaviorisme, de l'individualisme, de la norme du "moi" maître en la demeure, de la maîtrise donc, "la pratique psychanalytique dans la sphère américaine s'est ravalée (...) à un moyen d'obtenir le "success" et à un mode d'exigence de la "happiness" ".

"C'est là le reniement de la psychanalyse, celui qui résulte chez trop de ses tenants du fait pur et radical qu'ils n'ont jamais rien voulu savoir de la découverte freudienne et qu'ils n'en sauront jamais rien, même au sens du refoulement."

Aux usa la découverte freudienne est devenue une simple psychologie du moi, une egopsychology, visant l’adaptation de l’individu aux idéaux de l’americain way of life : "idéal de l'individu autonome adapté au monde et gouvernant ses pulsions (norme du genital love) avec un analyste incarnant cet idéal (cf la relation du psy et de la star, dans "la nuit américaine", de FT)."

"Dans cette conception, le patient est un partenaire de la cure, il est supposé par-delà ses symptômes actuels vouloir sa guérison, c' est-à-dire vouloir rejoindre un état de vie harmonieux. L'idéologie du moi identifie le sujet de l'inconscient au moi qu'elle désire produire; ce qu'il désirera au terme de la cure, et c'est bien entendu cette personne épanouie et vivant harmonieusement avec ses semblables que le psychanalyste incarne ou prétend incarner; pour lacan, le sujet du désir n'est en rien ce personnage convenu et civilisé."



la peste viendra d'ailleurs finalement... de la pulsion de mort... la peste brune
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Message par Borges Dim 8 Jan 2012 - 13:40

Dans le mythe, le sacrifice d'Oedipe libère la cité de la peste qui la ravageait. Ici, c'est l'inverse, la catastrophe est à venir : le rêve de Jung promet pour bientôt une pluie de feu qui ravagera l'Europe.

-peut-on vraiment dire qu'Oedipe s'est sacrifié? il s'est découvert "responsable sans l'être" et il "s'est exilé sans s'exiler", devenant "pharmakon" : un être sacré et une abjection...c'est dans cette place de l'exclu que freud rejoint oedipe...avec tous les juifs assassinés...

-ce qu'il y a de tragique dans le destin de freud, dans le personnage du film, et de comique, c'est qu'il est un peu comme oedipe, très prétentieux, très confiant dans la raison, la science, le savoir...il croit apporter la peste (une peste qu'il peut guérir, bien entendu, là il joue les dieux, à appolon) mais la peste on ne l'apporte pas... elle vient seule, elle est amenée par la puissance du destin, de l'histoire...et elle va balayer avec la première guerre mondiale les prétentions du sujet maître de sa vie, de la vie...toutes les illusions humanistes...freud est aussi aveugle qu'Oedipe, il sait pas d'où va venir la véritable peste : la peste brune... à la fin du film on nous dit que OG est mort de faim en 1919; famine et peste sont très proche en latin : limos et loimos; les dieux les envoient souvent ensemble...(cf vernant)







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Message par Eyquem Dim 8 Jan 2012 - 14:23

salut Borges,
Borges a écrit:-peut-on vraiment dire qu'Oedipe s'est sacrifié?
C'est l'interprétation qui est faite de la scène où il s'aveugle. Dans la tragédie de Sophocle, cette scène n'est pas vue, elle est racontée par un serviteur : le récit qu'il en fait insiste sur cette dimension sacrificielle, en soulignant qu'en se crevant les yeux, Oedipe fait couler le sang en abondance :
Rouge, le sang giclait de ses prunelles sur sa barbe ; ce n'était pas un suintement sanguinolent qu'elles laissaient perler, mais une pluie pressée et noire, une grêle sanglante qui l'inondait.
(Oedipe-roi)
Le texte grec organise une série d'oppositions :
-d'un côté, la petite quantité (stagôn : perler), le suintement (mydaô : mouiller, moisir, pourrir), le sang d'un meurtre (phonos : sang répandu par un crime, un sacrifice)
- de l'autre, la grande quantité (ombros : une pluie d'orage), le sang frais (haima : le sang qui coule dans les veines)

Le serviteur raconte qu'Oedipe se frappe les yeux à coups répétés. Par là, le roi ouvre la voie au sang frais, au sang qui coule en abondance. Ce flot de sang, dit le commentateur, s'apparente à un sacrifice, dans lequel Oedipe est à la fois la victime et l'exécutant. C'est ce sang frais qui coule à flots qui fait la réussite du sacrifice grâce auquel la cité est régénérée.
(dans la version d'Euripide, version qui a été perdue, Oedipe était aveuglé par ses serviteurs : le final prenait la forme d'un meurtre collectif. La description de Sophocle produit le même effet en décrivant les coups répétés qu'Oedipe se donne à lui-même)
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Message par Eyquem Dim 8 Jan 2012 - 14:50

Oedipe : en voilà un qui a suivi une most dangerous method. Enquêteur méthodique, il n'avait pas la moindre idée du danger auquel il s'exposait en cherchant qui était le meurtrier de Laïos...

En fait, la question serait : quel est le rapport entre la méthode et le danger ? Est-ce que le danger préexiste à la méthode ? Ou est-ce que c'est la méthode elle-même qui crée le danger ?

Si Oedipe n'avait pas mené son enquête, il n'aurait rien su de ce qu'il était. Il aurait été aux yeux des hommes, et à ses propres yeux, un roi d'exception - tout en étant, aux yeux des dieux, le pire des hommes, mais il n'en aurait strictement rien su - et qu'est-ce qu'un danger, un abîme, dont on ignore tout, dont on n'imagine même pas l'existence ?






Dernière édition par Eyquem le Dim 8 Jan 2012 - 14:55, édité 1 fois
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Message par Borges Dim 8 Jan 2012 - 15:13

oui, je vois, mais c'est pas très important en terme de lecture sacrificielle, cet aveuglement faut plutôt le voir comme la punition de la démesure du savoir, de la vision, le fameux oeil en trop (moi qui pensait tout voir, j'étais un pauvre con d'aveugle; les non dupes errent- ceux qui s'imaginent tout savoir, contrôler, ceux qui sont dans l'illusion de la maîtrise); le vrai sacrifice, c'est l'exil du roi, devenu une souillure...bouc-émissaire (pour girard, oedipe n'a rien fait de ce qu'on lui reproche; et en terme de responsabilité il n'a rien fait)...

(je savais pas que chez homère oedipe meurt tranquillement sur son trône, et que ce sont les tragiques qui en ont fait un errant, un exilé...)


"ce qui est tragique dans l'histoire d'oedipe dit vernant, c'est ce personnage qui veut absolument savoir et qui en menant son enquête jusqu'au bout découvre qu il y a en lui deux faces contradictoires: Oedipe le savant, le roi, l'homme de bonne volonté, l'être qui a sauvé Thèbes et en même temps, une pourriture innommable, le responsable des malheurs, de Thèbes, un moins que rien, un bouc émissaire. L'égal aux dieux est exclu de la cité comme un bouc émissaire, comme chaque année les "pharmakoi" à Athènes, comme si le corps social devait à la fois se purger par le haut et par le bas. C'est en ce sens que ce savoir est tragique, car il n'aboutit pas à la connaissance mais à la prise de conscience radicalement problématique de l'homme. L'homme ne peut pas être défini, l'homme n'a pas une essence, l'homme est un monstre, une énigme qui n'a pas de réponse. Il est la réponse même que la Sphinge a demandée à OEdipe, celui qui a deux pieds, trois pieds, quatre pieds en même temps, le chaos"

oedipe croyait s'en tirer, assurer la royauté, la souveraineté de l'homme, et se découvre finalement un monstre : mari et père, père et frère...roi et souillure, le plus haut et le plus bas, le plus savant et le plus aveugle...une énigme, et non pas la solution à l'énigme..

et cela le film de cronenberg est très fort...dans la manière dont il met en relation sans y insister, sans même nous le dire, le destin de freud (du juif) et celui d'oedipe; c'est aussi pour cela qu'il ne choisit pas vraiment entre freud (la raison) et jung (la religion), il y a un au-delà, un destin, qui va faire du génie, un exilé..le bouc-émissaire de la peste brune...et puis, comment ne pas être ému par le destin de SS, jusque dans ses initiales; celle à qui freud reprochait d'avoir terminé son travail sur le christ, de rêver encore à ce que lui sait, sent désormais impossible, est fusillée par les nazis dans une synagogue...

comme dit joyce, "Un Juif grec est un Grec juif "

Oedipe fut le plus juif des grecs; et oedipe roi est une tragédie juive, finalement...(c'est deleuze qui disait ça?)




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Message par Eyquem Dim 8 Jan 2012 - 15:27

Oui, c'est dans Dialogues, p52. Est-ce un hasard : à la même page, il est aussi question de C.Colomb dont tu parlais plus haut.
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Message par Borges Dim 8 Jan 2012 - 15:29

Eyquem a écrit:Oedipe : en voilà un qui a suivi une most dangerous method. Enquêteur méthodique, il n'avait pas la moindre idée du danger auquel il s'exposait en cherchant qui était le meurtrier de Laïos...

En fait, la question serait : quel est le rapport entre la méthode et le danger ? Est-ce que le danger préexiste à la méthode ? Ou est-ce que c'est la méthode elle-même qui crée le danger ?

Si Oedipe n'avait pas mené son enquête, il n'aurait rien su de ce qu'il était. Il aurait été aux yeux des hommes, et à ses propres yeux, un roi d'exception - tout en étant, aux yeux des dieux, le pire des hommes, mais il n'en aurait strictement rien su - et qu'est-ce qu'un danger, un abîme, dont on ignore tout, dont on n'imagine même pas l'existence ?






oedipe, c'est la tragédie de la démesure du savoir; oedipe passe son temps à se vanter de tout savoir, tout seul, par sa seule méthode, par ses seuls moyens... sa seule intelligence... l'histoire d'un mec qui croyait au savoir, aux lumières, à la raison, et qui croit par elle seul venir à bout de toutes les énigmes...ce qu'il y a de freudien, c'est que au moment, où il raisonne, s'imagine maître de sa recherche, de son discours, au moment où il raisonne avec clairvoyance, il est complètement aveugle, parce que par derrière, il y a des forces qui le dépassent et qui s'amusent à le manoeuvrer..."

(vernant)

la méthode et le danger : le danger, c'est l'illusion de la méthode, l'illusion du savoir, de l'humanisme, de la lumière, de la transparence, l'illusion que la mise en scène de cronenberg rend en ne montrant que le plus civilisé de la société suisse, et viennoise...


(ces gens vivent dans l'illusion de la méthode, celle du sujet cartésien)





Borges
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Une dangereuse méthode : surtout pas la peste Empty Re: Une dangereuse méthode : surtout pas la peste

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