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Liverpool - Lisandro Alonso

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Message par adeline Sam 15 Jan 2011 - 14:09

Liverpool - Lisandro Alonso Liverpool2

Pendant les deux tiers premiers tiers du film, j'ai ressenti le même genre d'agacement que devant Somewhere. L'impression que la durée des plans n'est pas nécessaire et ne crée rien. Mais le film n'a tellement rien en commun avec Somewhere que ce n'est pas la peine de continuer la comparaison.
Alonso filme un marin, Farrell. D'abord sur le paquebot où il travaille. Puis à Ushuaïa, où le paquebot fait escale. Farrell demande l'autorisation à son capitaine de descendre à quai durant l'escale. Il veut aller voir si sa mère, qui habite Ushuaïa, est encore vivante. Elle habite en fait dans l'arrière-pays d'Ushuaïa, près d'une scierie éloignée de tout.
Les plans sont longs. Les cadres inexistants. L'action tellement ténue qu'on pense qu'il n'y a pas d'action. Farrell est un personnage étrange. Il n'habite pas le plan, n'a aucune consistance. Ainsi, passent deux jours. La vie sur le bateau. La descente à Ushuaïa. On ne voit rien de la ville, sinon des conteneurs et des non-lieux, le port, une avenue, un resto qui pourrait être du monde entier. Des lieux déconnectés qui ne donnent aucune image de la ville, à tel point qu'on pourrait penser qu'il n'y a pas de ville. Puis Farrell prend un camion de la scierie, et monte vers le village où habite sa mère. Toutes les rencontres, avec le conducteur du camion, les autres passagers, sont laconiques, étranges, et les personnages semblent eux aussi déconnectés. Au village, Farrell demande où il peut se restaurer. On lui montre une cantine, où il rencontre les personnages importants de la fin du film sans qu'on puisse le deviner. Il passe la nuit dehors (on sait alors que le paquebot est en train de repartir. Le second lui avait donné moins de quarante-huit heures). Lorsqu'il est recueilli par le seul homme qui l'a reconnu dans le village, le film passe à un autre régime. C'est le village et ses habitants qui prennent le dessus, et tout ce qui précède commence à faire sens, comme si l'absence au monde de Farrell devait mener à un monde très présent. Farrell rencontre sa petite sœur, handicapée mentale, qu'il n'avait jamais vue, et sa mère, très vieille, qui ne le reconnaît pas. Puis il quitte le village et la scierie. Le film reste pourtant avec la famille de Farrell, et ce sont les plus belles scènes. La chasse au renard de l'homme qui avait reconnu Farrel, accompagné d'Analia la petite sœur. Le repas des brebis, étranges animaux qui fuient la nourriture. C'est un monde loin de tout, oublié, perdu. Des gens qui ne se parlent que très peu. L'histoire de Farrell et de sa famille n'est pas claire, car elle n'est pas dite.

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La fin se termine sur cet étrange plan, cadré de telle sorte que la tête d'Analia est coupée. Elle a entre les mains le porte-clé que son père lui a laissé avant de partir. Elle lui demandait de l'argent, seule phrase qu'elle lui adresse, et répète. Il lui en donne, et ce porte-clé. Un grand porte-clé, composé simplement du nom du paquebot, Liverpool. Alonso raconte que ça lui plaisait qu'il y ait quelque part dans le film la présence de l'Angleterre, alors que tout se passe justement face aux îles Malouines. Il voit le titre comme un leurre pour le spectateur, qui lui promet du foot ou des Beatles, et le mène à des années lumières de tout ça.


Une fameuse gorgée de poison parle d'inceste dans le scénario. La sœur de Farrell serait également sa fille. Mais le film ne dit rien de tel, et je pense que c'est une force de la fin du film de laisser Farrell quitter le village sans qu'on sache ni où il va, ni quelle a été son histoire au village. C'est le plus beau plan du film. Farrell s'enfonce dans le plan, la neige et la nature. A mes yeux, non seulement il ne retourne pas au paquebot, mais il quitte aussi encore un peu plus le monde des hommes, et s'enfonce encore un peu plus vers nulle part.

Alonso raconte que le monde du village, et toute la fin du film, c'est le documentaire. Le personnage de fiction quitte le film pour laisser la place au documentaire et aux vrais gens (même si aucun des acteurs, y compris celui qui joue Farrell, n'est professionnel). C'est fort de voir que le film se met aussi réellement à exister une fois qu'on est passé de ce côté-là du monde.

adeline

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