Les trois soeurs du Yunnan (Wang Bing)
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Les trois soeurs du Yunnan (Wang Bing)
A rich film is not an advertisement. It says something about human existence, about the basic things in our life. Three Sisters is set in a poverty-stricken environment, but the film as a whole is not about poverty, it is about the lived experience of the girls' existence. (Wang Bing)
http://newleftreview.org/II/82/wang-bing-filming-a-land-in-flux
Quelle vie.
Je ne sais pas trop quoi dire sur ce film, sinon que j'ai regardé ça sans cligner des yeux, pendant deux heures trente. Regarder ces gamines manger des pommes de terre, conduire les bêtes au pâturage, marcher ensemble au milieu des montagnes, faire l'inspection des poux, ramasser du crottin, des pommes de pin, du fourrage, ça a quelque chose d'hypnotique.
Le film donne le sentiment d'avoir saisi l'essence du quotidien de ces filles: il ne manque rien, on a tout vu, on a fait le tour, en 2h30, de la totalité de ce qui fait leur monde, leur vie de tous les jours, leur affairement quotidien. Et pourtant, certains aspects nous échappent: où est partie la mère? que fait le père, à la ville? pourquoi, dans un si petit village perdu au milieu des nuages, où tout le monde semble se connaître, les habitants sentent-ils la nécessité de mettre des cadenas à leur porte?
Le film donne une très forte présence aux choses et aux êtres: on n'est pas près d'oublier cette cour, immuablement boueuse, ces trois cochons, ce chien toujours planté à la porte, ce vent qui souffle sans discontinuer dans le micro, cette montagne aux versants pelés; on croit sentir, au début, le froid et l'humidité nous tomber sur les épaules, et la fumée qui s'échappe du foyer nous piquer les yeux. C'est con de le dire, mais ce ne sont pas tous les films qui font exister ainsi ce qu'ils filment.
On se dit sans cesse au début que ce n'est pas possible de vivre dans des conditions pareilles, mais ce n'est jamais ce que le film dit lui-même, qui saisit le quotidien de ces enfants du point où ceux-ci le vivent: c'est ainsi, c'est leur existence de tous les jours, le monde où ils vivent, et voilà tout. D'un côté, on soupire quand on entend les enfants se plaindre que le lit où ils dorment est tout mouillé, quand on les voit se coucher avec les habits qu'ils portent des mois durant, remplis de poux, dans une pièce remplie de fumée, qui doit être glaciale à en juger par les couches de couvertures. De l'autre, dans le plan final, quand on voit les deux gamines marcher contre le vent pour rejoindre le village, en se tenant bras dessus bras dessous, avec cet ample travelling avant qui les suit de loin pour embrasser à la fois les enfants, la montagne, et le vent, on comprend ce que Wang Bing veut dire quand il dit que ce qui l'intéressait, ce n'était pas la pauvreté, mais "l'expérience vécue de l'existence des petites".
On apprend des choses étonnantes dans les entretiens. Par exemple, cette montagne, toute rase, qui s'impose si fortement dans notre esprit, ce n'est pas la "vraie" montagne. L'image qui m'en reste, c'est celle-ci:
Mais en vérité, c'est ce qu'il n'y a plus qu'il faut voir aussi:
http://newleftreview.org/II/82/wang-bing-filming-a-land-in-flux
Quelle vie.
Je ne sais pas trop quoi dire sur ce film, sinon que j'ai regardé ça sans cligner des yeux, pendant deux heures trente. Regarder ces gamines manger des pommes de terre, conduire les bêtes au pâturage, marcher ensemble au milieu des montagnes, faire l'inspection des poux, ramasser du crottin, des pommes de pin, du fourrage, ça a quelque chose d'hypnotique.
Le film donne le sentiment d'avoir saisi l'essence du quotidien de ces filles: il ne manque rien, on a tout vu, on a fait le tour, en 2h30, de la totalité de ce qui fait leur monde, leur vie de tous les jours, leur affairement quotidien. Et pourtant, certains aspects nous échappent: où est partie la mère? que fait le père, à la ville? pourquoi, dans un si petit village perdu au milieu des nuages, où tout le monde semble se connaître, les habitants sentent-ils la nécessité de mettre des cadenas à leur porte?
Le film donne une très forte présence aux choses et aux êtres: on n'est pas près d'oublier cette cour, immuablement boueuse, ces trois cochons, ce chien toujours planté à la porte, ce vent qui souffle sans discontinuer dans le micro, cette montagne aux versants pelés; on croit sentir, au début, le froid et l'humidité nous tomber sur les épaules, et la fumée qui s'échappe du foyer nous piquer les yeux. C'est con de le dire, mais ce ne sont pas tous les films qui font exister ainsi ce qu'ils filment.
On se dit sans cesse au début que ce n'est pas possible de vivre dans des conditions pareilles, mais ce n'est jamais ce que le film dit lui-même, qui saisit le quotidien de ces enfants du point où ceux-ci le vivent: c'est ainsi, c'est leur existence de tous les jours, le monde où ils vivent, et voilà tout. D'un côté, on soupire quand on entend les enfants se plaindre que le lit où ils dorment est tout mouillé, quand on les voit se coucher avec les habits qu'ils portent des mois durant, remplis de poux, dans une pièce remplie de fumée, qui doit être glaciale à en juger par les couches de couvertures. De l'autre, dans le plan final, quand on voit les deux gamines marcher contre le vent pour rejoindre le village, en se tenant bras dessus bras dessous, avec cet ample travelling avant qui les suit de loin pour embrasser à la fois les enfants, la montagne, et le vent, on comprend ce que Wang Bing veut dire quand il dit que ce qui l'intéressait, ce n'était pas la pauvreté, mais "l'expérience vécue de l'existence des petites".
On apprend des choses étonnantes dans les entretiens. Par exemple, cette montagne, toute rase, qui s'impose si fortement dans notre esprit, ce n'est pas la "vraie" montagne. L'image qui m'en reste, c'est celle-ci:
Mais en vérité, c'est ce qu'il n'y a plus qu'il faut voir aussi:
On peut voir dans le film que les montagnes sont totalement pelées. Or, autrefois, elles étaient couvertes de forêts tropicales. Quand j’ai parlé avec les villageois les plus âgés, ils me parlaient des sangliers et des serpents en abondance dans une nature luxuriante, un pays presque de légende rasé par la main de l’homme. D’une part pour gagner en surface agricole, mais aussi parce que le bois du Yunnan est commercialisé partout en Chine. C’est également une zone riche en cuivre, très important notamment pour la fabrication des pièces de monnaie et, au fil des siècles, on a pris le bois pour alimenter le feu des fonderies.
http://next.liberation.fr/cinema/2014/04/15/ceux-qui-travaillent-le-plus-ne-possedent-rien_998149
Dernière édition par Eyquem le Dim 11 Mai 2014 - 13:10, édité 1 fois
Eyquem- Messages : 3126
Re: Les trois soeurs du Yunnan (Wang Bing)
Hello GM,
J'ai vu que tu mettais 2 sur 6 à ce film.
2, pas plus?
J'ai vu que tu mettais 2 sur 6 à ce film.
2, pas plus?
Eyquem- Messages : 3126
Re: Les trois soeurs du Yunnan (Wang Bing)
Vu les deux premières minutes... happé... malheureusement la copie que j'ai est assez pixelisée... si quelqu'un ici a la gentillesse de m'indiquer le moyen de le voir en bonne qualité...
j'ai été bouleversé par à l'ouest des rails.
j'ai été bouleversé par à l'ouest des rails.
Re: Les trois soeurs du Yunnan (Wang Bing)
Eyquem a écrit:Hello GM,
J'ai vu que tu mettais 2 sur 6 à ce film.
2, pas plus?
Il faut que je le revoie, oui
GM- Messages : 95
Re: Les trois soeurs du Yunnan (Wang Bing)
wootsuibrick a écrit:si quelqu'un ici a la gentillesse de m'indiquer le moyen de le voir en bonne qualité...
Hello Woot, j'imagine que la copie que tu as est l'une de celles de KG… Sinon il est là-bas, notamment une version reprise d'une diffusion sur la rai tre avec des sous-titres anglais ajoutés.
adeline- Messages : 3000
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