Les aventures de Tintin (Spielberg)
4 participants
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
le monde est dans une bulle. La mer, dans une flaque d'eau sur un trottoir parisien. Une main en gros plan suggère la silhouette de dunes dans le désert.
Spielberg, afin de passer d'un chapitre à l'autre, use de ses stratagèmes stylisés, comme si l'entourage immédiat des personnages n'était pas raccord avec l'au-delà, qu'il y avait une frontière invisible qui collerait, un double formel, à la technique utilisée pour le film, motion capture (donc quelque chose de la captation, de l'enregistrement du réel) et recréation sur l'espace vert et vierge des décors en image de synthèse.
Cette césure peut peut-être se comprendre aussi par le biais des deux personnages principaux (ni Tintin, ni Milou) :
Le reporter Tintin est le pivot, le point d'équilibre idéal entre deux formes de la puissance :
d'un côté le machiavélisme feutré, létal, méphistophélique de l'homme de l'ombre, Sakharine, la planification méticuleuse, méthodique, une vision non pas du créateur, mais d'un manipulateur qui réordonne les éléments du réel à son profit, comme les pièces sur un échiquier, fixe les bordures du cadre à l'aide de sa canne-épée, un alter ego potentiel du réalisateur qui réinvente lui-même une mythologie; c'est la première partie, avec le pick pocket cleptomane.
de l'autre, l'art proprement du conte, de l'invention du récit, des événements, des péripéties, comme un torrent atteint de délire qui délivre des attaques incessantes de la mort, l'outrepasse, une corne d'abondance aux vapeurs alcooliques, Haddock, un créateur omnipotent et chancelant, un drunken master lol, qui sait que le monde se trouve au fond d'une bouteille, le désir et le manque, terreaux de l'émerveillement, de la « sublimation » du passé, s'y nichent aussi sûrement que la mémoire de Shéhérazade et de la lame du bourreau (les personnages font escale à Baghar, dans un Orient mêlant l'homme qui en savait trop et Indiana Jones) .
Haddock c'est ce qui déborde, surgit hors de l'écran, un delirium tremens qui sauve le présent, en assure le continuité, jusqu'à l'explosion (la scène de duel au pied d'une ligne de poudre noire filant jusqu'à la sainte-barde).
C'est peut être aussi pour cette raison qu'il ne peut supporter la voix de Bianca Castafiore, elle aussi capable de passer la frontière invisible ou transparente qui sépare le point d'attention maximal du spectateur et ce qui l'entoure, brise les parois de verre de l'aquarium.
Enfin je ne sais pas trop, c'est écrit rapidement ... je n'ai pas les idées très claires sur ce film, et je connais pas trop Tintin en fait, je suis plus fort en Captain america ... lol…
Faudrait aussi parler de la transmission de l'argent, Hergé apparaissant au début dans l'habit d'un caricaturiste qui croque Tintin pour quelques pièces, ce doit être à Montmartre.
Spielberg, afin de passer d'un chapitre à l'autre, use de ses stratagèmes stylisés, comme si l'entourage immédiat des personnages n'était pas raccord avec l'au-delà, qu'il y avait une frontière invisible qui collerait, un double formel, à la technique utilisée pour le film, motion capture (donc quelque chose de la captation, de l'enregistrement du réel) et recréation sur l'espace vert et vierge des décors en image de synthèse.
Cette césure peut peut-être se comprendre aussi par le biais des deux personnages principaux (ni Tintin, ni Milou) :
Le reporter Tintin est le pivot, le point d'équilibre idéal entre deux formes de la puissance :
d'un côté le machiavélisme feutré, létal, méphistophélique de l'homme de l'ombre, Sakharine, la planification méticuleuse, méthodique, une vision non pas du créateur, mais d'un manipulateur qui réordonne les éléments du réel à son profit, comme les pièces sur un échiquier, fixe les bordures du cadre à l'aide de sa canne-épée, un alter ego potentiel du réalisateur qui réinvente lui-même une mythologie; c'est la première partie, avec le pick pocket cleptomane.
de l'autre, l'art proprement du conte, de l'invention du récit, des événements, des péripéties, comme un torrent atteint de délire qui délivre des attaques incessantes de la mort, l'outrepasse, une corne d'abondance aux vapeurs alcooliques, Haddock, un créateur omnipotent et chancelant, un drunken master lol, qui sait que le monde se trouve au fond d'une bouteille, le désir et le manque, terreaux de l'émerveillement, de la « sublimation » du passé, s'y nichent aussi sûrement que la mémoire de Shéhérazade et de la lame du bourreau (les personnages font escale à Baghar, dans un Orient mêlant l'homme qui en savait trop et Indiana Jones) .
Haddock c'est ce qui déborde, surgit hors de l'écran, un delirium tremens qui sauve le présent, en assure le continuité, jusqu'à l'explosion (la scène de duel au pied d'une ligne de poudre noire filant jusqu'à la sainte-barde).
C'est peut être aussi pour cette raison qu'il ne peut supporter la voix de Bianca Castafiore, elle aussi capable de passer la frontière invisible ou transparente qui sépare le point d'attention maximal du spectateur et ce qui l'entoure, brise les parois de verre de l'aquarium.
Enfin je ne sais pas trop, c'est écrit rapidement ... je n'ai pas les idées très claires sur ce film, et je connais pas trop Tintin en fait, je suis plus fort en Captain america ... lol…
Faudrait aussi parler de la transmission de l'argent, Hergé apparaissant au début dans l'habit d'un caricaturiste qui croque Tintin pour quelques pièces, ce doit être à Montmartre.
Invité- Invité
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
Et en effet, de la part d'une césure il n'y a rien qui ne soit en apparence plus normal, mais en fait le sommet de l'étrangeté que d'être comprise par un biais. Il faudrait creuse cela.
C'est un peu comme quand une apocope ouvre sur une béance.
C'est un peu comme quand une apocope ouvre sur une béance.
Invité- Invité
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
Regarder "Tintin" peut être mauvais pour le cerveau. VOUS ÊTES PREVENUS !
C'est une étude scientifique tout ce qu'il y a de sérieux qui le montre (vous savez que je ne cite que des études scientifiques sérieuses) :
http://continuityboy.blogspot.com/2011/07/neural-signature-of-uncanny-valley.html
Quand un humain bouge comme un humain et ressemble à un humain, pas de problème : le cerveau reconnaît que c'est un humain.
Quand un robot bouge comme un robot et ressemble à un robot, pas de problème : c'est un robot.
Mais quand un robot bouge comme un humain et ressemble à un humain, le cerveau voit rouge (cf imagerie ci-dessus) car il n'aime pas les imposteurs.
En conclusion :
1) ok
2) ok
3)
C'est une étude scientifique tout ce qu'il y a de sérieux qui le montre (vous savez que je ne cite que des études scientifiques sérieuses) :
http://continuityboy.blogspot.com/2011/07/neural-signature-of-uncanny-valley.html
Quand un humain bouge comme un humain et ressemble à un humain, pas de problème : le cerveau reconnaît que c'est un humain.
Quand un robot bouge comme un robot et ressemble à un robot, pas de problème : c'est un robot.
Mais quand un robot bouge comme un humain et ressemble à un humain, le cerveau voit rouge (cf imagerie ci-dessus) car il n'aime pas les imposteurs.
En conclusion :
1) ok
2) ok
3)
Eyquem- Messages : 3126
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
A moins que j’aie dormi (ce qui m’est arrivé plusieurs fois au cours de la projection), je ne crois pas que Spielberg ait repris la scène du mirage de la bouteille de champagne.
Pour moi, une des scènes les plus fortes, les plus angoissantes de tous les albums de Tintin qui me terrifiait vraiment quand j’étais enfant.
Hergé disait l’angoisse de mourir de soif comme Chaplin avant celle de mourir de faim.
Drôle et terrifiant à la fois.
A coté les péripéties du petit reporter dans le film de Spielberg paraissent bien pâles.
Pour moi, une des scènes les plus fortes, les plus angoissantes de tous les albums de Tintin qui me terrifiait vraiment quand j’étais enfant.
Hergé disait l’angoisse de mourir de soif comme Chaplin avant celle de mourir de faim.
Drôle et terrifiant à la fois.
A coté les péripéties du petit reporter dans le film de Spielberg paraissent bien pâles.
gertrud04- Messages : 241
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
Terrifiant surtout.
Le crabe aux pinces d'or joue sur tous les ressorts de l'illusion, du faux-semblant, de l'apparence et du caché. Le karaboudjan n'est plus le karaboudjan, les boîtes de crabe ne contiennent pas de crabe, Tintin se travestit, Haddock est aveuglé par l'alcool puis par le désert, Les Dupondt sont dupés par Allan et par Omar Ben-Salaad...
Trouble dans les sens, il n'y a plus un seul repère viable dans ce monde mouvant. On perd tout de vue.
Ah! non, il y a Tintin, il est détective, il voit clair, il dessille le sens et fait éclater l'illusion. Retour à un réel serein où l'apparence colle à la chose.
Peut-être manque-t-il un accessoire à Tintin: des lunettes.
Le crabe aux pinces d'or joue sur tous les ressorts de l'illusion, du faux-semblant, de l'apparence et du caché. Le karaboudjan n'est plus le karaboudjan, les boîtes de crabe ne contiennent pas de crabe, Tintin se travestit, Haddock est aveuglé par l'alcool puis par le désert, Les Dupondt sont dupés par Allan et par Omar Ben-Salaad...
Trouble dans les sens, il n'y a plus un seul repère viable dans ce monde mouvant. On perd tout de vue.
Ah! non, il y a Tintin, il est détective, il voit clair, il dessille le sens et fait éclater l'illusion. Retour à un réel serein où l'apparence colle à la chose.
Peut-être manque-t-il un accessoire à Tintin: des lunettes.
Kardinal- Messages : 2
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
kardinal, tu me donnes envie de me reponger dans l'album.
Je précise que si j'ai cité le crabe au princes aux pinces d'or c'est que Spielberg l'utilise dans son film notamment la séquence dans le désert (sans la scène du mirage).
Je précise que si j'ai cité le crabe au princes aux pinces d'or c'est que Spielberg l'utilise dans son film notamment la séquence dans le désert (sans la scène du mirage).
gertrud04- Messages : 241
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
Le film est un hideux naufrage et un éprouvant enchaînement de montagnes russes dépourvu de sens ; ont-ils pensé à l'interdire aux épileptiques ? Dans la salle un gosse riait encore de bon coeur, au bout d'une heure et demie de toboggans et de glissades en simili-relief. Bon, alors d'accord, c'est un film pour les enfants, eux, leurs yeux et systèmes nerveux tout neufs.
Mais tout de même les visages de Haddock, des Dupondt, le museau de Milou sont d'une angoissante laideur, avec ces "vrais" yeux au milieu de la figure en plastique, pris dans la contradiction qu'il y a à vouloir concilier le cartoon et le réalisme. Ça ne ressemble à rien que de déprimant et vain. Haddock a un nez d'alcoolique : qui avait besoin de cette touche de vérisme, dans un océan de cascades virtuelles toutes plus insensées les unes que les autres ? Bon : le gosse riait précisément au moment où Haddock décide de jeter des bouteilles d'alcool sur son adversaire au lieu de les boire. Il comprenait manifestement, il riait en toute connaissance de cause, et généreusement, de ce gag au sujet de la rédemption d'un alcoolique. C'est curieux. La mocheté perturbe moins les gosses que les adultes, ils n'ont rien contre le kitsch.
C'est quand même comme si toute la laideur refoulée dans le tintin de Hergé ressurgissait dans celui de Spielberg. On a changé la ligne claire en une éprouvante cacophonie (sauf dans le générique).
Le mélange mal assorti de plusieurs tomes différents, avec des rajouts sortis de nulle part et des raccourcis mal ficelés, compose une histoire sans intérêt, avec des morceaux de bravoure injustifiés, ça ne tient pas, ça prend l'eau, c'est inregardable.
C'est spécial, ce mélange de fidélité dévote et de trahison sans vergogne, on se demande ce que ça veut dire et à qui ça peut servir. On se dit que sans doute Spielberg est devenu bien vieux, et qu'on entre dans la phase gâteuse de son travail, qu'il n'est plus en phase avec les critères du blockbuster actuel, un format dont il a été un éminent fondateur il y a quelques décennies. On se dit que le truc part de l'idée de faire l'éloge de la culture européenne mais lui fait un vilain tombeau. Il s'agit in fine d'aller casser du matériel (virtuel, mais onéreux) dans le Maghreb, on peut dédicacer le film à Kadhafi.
Mais tout de même les visages de Haddock, des Dupondt, le museau de Milou sont d'une angoissante laideur, avec ces "vrais" yeux au milieu de la figure en plastique, pris dans la contradiction qu'il y a à vouloir concilier le cartoon et le réalisme. Ça ne ressemble à rien que de déprimant et vain. Haddock a un nez d'alcoolique : qui avait besoin de cette touche de vérisme, dans un océan de cascades virtuelles toutes plus insensées les unes que les autres ? Bon : le gosse riait précisément au moment où Haddock décide de jeter des bouteilles d'alcool sur son adversaire au lieu de les boire. Il comprenait manifestement, il riait en toute connaissance de cause, et généreusement, de ce gag au sujet de la rédemption d'un alcoolique. C'est curieux. La mocheté perturbe moins les gosses que les adultes, ils n'ont rien contre le kitsch.
C'est quand même comme si toute la laideur refoulée dans le tintin de Hergé ressurgissait dans celui de Spielberg. On a changé la ligne claire en une éprouvante cacophonie (sauf dans le générique).
Le mélange mal assorti de plusieurs tomes différents, avec des rajouts sortis de nulle part et des raccourcis mal ficelés, compose une histoire sans intérêt, avec des morceaux de bravoure injustifiés, ça ne tient pas, ça prend l'eau, c'est inregardable.
C'est spécial, ce mélange de fidélité dévote et de trahison sans vergogne, on se demande ce que ça veut dire et à qui ça peut servir. On se dit que sans doute Spielberg est devenu bien vieux, et qu'on entre dans la phase gâteuse de son travail, qu'il n'est plus en phase avec les critères du blockbuster actuel, un format dont il a été un éminent fondateur il y a quelques décennies. On se dit que le truc part de l'idée de faire l'éloge de la culture européenne mais lui fait un vilain tombeau. Il s'agit in fine d'aller casser du matériel (virtuel, mais onéreux) dans le Maghreb, on peut dédicacer le film à Kadhafi.
balthazar claes- Messages : 1009
Re: Les aventures de Tintin (Spielberg)
Bon. Alors.
Je ne comprends pas la mansuétude critique qui généralement a accompagné ce film, d'une absence d'intérêt alarmante.
J'étais parti plein de bonne volonté et tout, sans trop me braquer (d'autant que le générique est assez réussi, en effet, sa musique aussi), mais déjà, en tant que bon connaisseur des histoires de tintin, je ne peux pas ne pas dire qu'il n'y a rien strictement rien de l'univers des albums de Hergé dans ce patchwork fagoté n'importe comment. Pendant tout le métrage, sur ce point, on imagine constamment une équipe de scénaristes réunis en braintrust d'entreprise pour aligner quantité de "raccords" bidons puisant superficiellement dans des tas d'éléments épars des albums, les tricoter en une intrigue à deux balles, arroser le tout d'une espèce de sauce médiane annulant toute forme de saveur, sans parler d'une espèce d'humour calibré-standardisé-fadouille.
Une chose est sûre, l'argument "tintin" est un pur cache-misère. Quel rapport au juste avec Le secret de la licorne et Le trésor de R. le R? Pourquoi ne pas s'être contenté de l'histoire racontée dans ces deux albums, même au prix de moult raccourcis ou montages? On nous présente ça comme une sorte d'hommage truffé de références, mais faudrait ptêt voir à pas trop prendre les cons pour des imbéciles. On nous vante un peu partout l'habileté d'un scénario puisant astucieusement dans les albums, avec des jeux de renvois que les vrais "connaisseurs" apprécieront. Or rien, donc, de l'univers de Hergé, ou de son esprit, ou du concept de ses personnages, encore moins de son style d'humour, n'existe a minima, jamais. Quant aux références, appelons ça des gimmicks publicitaires. Le scénario qui nous est livré est d'une pauvreté affligeante, aux connexions logiques totalement artificielles. Rien n'existe, tout est spielberguisé. Et spielberguisé, on sait un peu ce que ça veut dire: le spielberguisme, c'est l'art du gimmick, du clin d'oeil insistant, tout est dans l'arc-réflexe stimulus-réponse pavlovien. Plus l'anéantissement pur et simple de toute forme de singularité, l'énucléation radicale, à la base, de toute forme de personnage existant, que ce soit de chair et d'os, de caoutchouc, ou de pixel. Spielberg a cette particularité, jamais démentie de film en film, d'infantiliser tout objet dont il s'empare, à un rare degré de bêtise standardisée (proche de l'enfance, pour qui confond "état d'enfance" et "état de bêtise"), d'uniformisation dans le vacuum d'un marshmallow, ou suppositoire, incolores, indolores et insipides, y a plus rien à espérer de ce côté là. Même du coté du Spielberg "dépressif" et "noir", qui n'est guère plus dense si on gratte d'un demi-millimètre derrière le spectacle bien agencé.
Du secret, de la licorne, du fantôme de Haddock, de Moulinsart, du Karaboudjan, il ne subsiste plus rien, pour le redire, et ce n'est pas un mince exploit d'être parvenu à vider à ce point de sa substance le monde de tintin, rendu ici à une bimbeloterie de carte postale qui irrésistiblement fait penser à ce qu'a pu faire Woody Allen dans son imbitable et post-gériatrique Midnight in Paris.
Il n'y a rien de tintin dans ce vacuum intersidéral, faut vraiment insister là-dessus, pour les vendus de fdc, par ex, qui nous ont fait part de leur émerveillement de voir se concrétiser leur cher rêve d'enfant.
S. aurait adapté le Crasmeustache, ou Gil Jourdan, Ric Hochet, Michel Vaillant, ou Blake & Mortimer, Tif & Tondu, Boule & Bill, Gaston Lagaffe, Spirou & Fantasio, Chaminou et le Khrompire, Les Tuniques bleues, tout ce qu'on veut, le résultat aurait été du pareil au même: du bidon, des persos-prétextes, des décors-prétextes, vidés de toute substance, qui n'existeraient pas davantage, qui ne signaleraient aucun monde, aucun agencement, aucun imaginaire, s'agitant juste en vain dans un squelette d'intrigue inutile, un reader digest expédié ou une sorte de mégaremix, farci de rebondissements, de cascades, de courses-poursuites parfaitement ennuyeux, sans aucune, vraiment aucune espèce d'intérêt. Même le plus mauvais Harry Potter a plus de cachet, de singularité, et les persos plus de consistance, c'est dire.
Prenez par ailleurs un bon film d'action, filmé par un mec qui sait faire ça, prenez, je sais pas, moi, les Jason Bourne de Greengrass, l'action y est au moins intéressante, et c'est ce qu'on est en droit d'attendre. Pourquoi est-elle intéressante, palpitante? Parce qu'on s'intéresse à l'enjeu, au sens de ce qu'on regarde, on est impliqué dans quelque chose qui est de l'ordre du sens, et de la narration. Ce Tintin est rempli d'actions jusqu'à la couenne, mais rien n'a jamais aucun sens: nada, l'ennui, tout y est vu, revu et rerevu mille fois, que du stéréotype. Spielberg ne sait pas raconter et n'a rien à raconter, contrairement à ce que ne cessent de nous dire ses admirateurs: c'est tout sauf un conteur. Il n'a pas de monde.
Bien sûr, c'est du Indiana Jones "survitaminé", pour qui en douterait encore. Cette vieille rengaine marketing que l'on nous vend depuis des décennies: Spielberg a "ressuscité", selon la formule hypnotique devenue méthode Coué, "l'âge d'or" du film d'aventures épique et glamoureux hollywoodien, etc etc, en s'inspirant des aventures de Tintin. Et éventuellement de Philippe de Broca, de ses "tribulations d'un chinois en chine". Dit-on. Dans les milieux cinéphiles autorisés. C'est son foyer secret de sensiblité, ça et l'inénarrable "powésie de l'enfance", bien entendu. Nuts. Indiana Jones... Allez quoi, comme on dit à Bruxelles. Pas de ça, Lisette. Ce rutabaga mou et constamment emmerdifiant, instantanément ringard dès sa sortie. Aimez-vous tant les caramels mous, par la barbe du prophète? Faut vraiment être né, comme dit Deleuze, au milieu du désert, le désert des eighties, pour vouer un culte nostalgique à cette soupasse languissante.
Donc ok, c'est Indiana Jones. Aucun esprit ne souffle ici, jamais. C'est un alignement de séquences blètes, obligatoires, au tarif syndical, après dégraissage de tout ce qui aurait pu présenter un intérêt, même minime. L'humour, par hasard et par malchance? Pitié, c'est mauvais, lourd, même et surtout quand ça se voudrait léger, en clin d’œil. On sent parfaitement que S. et sa team ne comprennent strictement rien à l'humour hergéen, aux persos de Hergé: ils transforment automatiquement tout en mauvais slapstick, dans un faux esprit "britannique" qui n'a rien à faire là.
Tintin est une sorte d'abstract pour Hergé, on le sait, mais les autres, Haddock, les Dupondt, Nestor, ou la Castafiore, etc, ont ceci de particulier qu'ils inventent leur typologie propre. Or, la grossière erreur, la première, celle dans laquelle tomberait tout faiseur sans talent, c'est, comme ici, de les accorder à des stéréotypes préexistants: je ne dis pas les stéréotypes que seraient devenus ces personnages "universellement" connus, à travers le temps et l'espace. Car stéréotypes, il ne le sont jamais devenus, pour les lecteurs qui sont entrés dans cet univers. Ils étaient et sont restés, et c'est là un des mystères de l'art hergéen, des types singuliers, inscrits dans une généalogie singulière, de l'ordre de l'intime, peut-être même du privé, tant le lecteur a investi ces personnages de ses propres agencements généalogiques personnels. D'autant que d'albums en albums, ils changent, contrairement à tintin (et encore, pour lui, ça se discute aussi), ils ne restent pas figés dans leur typologie: ils traversent des crises, des remises en question, etc. Les Dupondt, c'est bien plus que simplement deux policiers rondouillards et passablement idiots. Y a en tout personnage des aventures de tintin comme un rébus, une crypte, je ne reviens pas là-dessus, on en avait déjà parlé. Ici, que voit-on? Des stéréotypes énucléés, là encore, non seulement de toute leur généalogie (ce qui serait encore excusable, dans la logique d'un scénario "synthétique" - qui ne synthétise rien du tout), mais encore de toute forme d'intensité personnelle.
Le cheminement intérieur de Haddock est concassé menu, par l'idée scénaristique désastreuse de fondre en un seul motif des éléments du Crabe aux pinces d'or et du Secret de la licorne. Le lien à son ancêtre, à son double, ainsi qu'à ceux de Rackham, "réincarné" dans un personnage secondaire falot, Sakharine (avec les traits de Spielberg: ah cet art du clin d’œil baltringue, comme la houpette de tintin devenue aileron de requin et autres friandises pour fans gâtiques. Faut absolument réciter sa filmo, roublardise d'un fétichisme marchand. C'est L'Oreille cassée qu'il aurait dû adapter): autre trouvaille nulle de scénariste soi-disant futé, qui transpose absurdement une gigantomachie des Héroïcs US façon Batman contre le Joker, et se battant à coups de grues-queues de dinosaures sans doute, en hommage à Jurassik Park. Sinon, c'est du sous-sous Pirates des Caraïbes.
Sans oublier le speech de psychologie pour cadres commerciaux qui n'en veulent, asséné par le vieux loup de mer, un monologue admirable sur la lose et la win, face au mur on l'enfonce mon ptit gars, laisse personne dire que t'es un raté. Et pour sûr, le film n'hésite pas à enfoncer tous les murs, par crainte de ne pas divertir son public-cible de 0 à 7 ans. Dernière entourloupe: l'annonce de la poursuite d'une soif "inextinguible" (hohoho) d'aventures pleines d'explosions et de cascades en tous genres, car le véritable trésor est caché, ultime révélation, en pleine mer. Alors que le message profond des deux albums, c'était, déjà: "nous avons cherché de par le monde un trésor qui a toujours été ici, sous nos yeux". Soit une dérision, un trouble, jetés sur la possibilité même d'une aventure, et que parachèveront L'Affaire Tournesol et surtout Les Bijoux de la castafiore, dé(con)structions minutieuses du concept même de "péripétie" ou d'intrigue.
Mais c'est qu'il y a des biffetons à tirer, si possible. J'imagine la suite: L'Etoile mystérieuse, entre le remake de "the thing" et le remake de "poltergeist", quelque chose dans ce goût-là. Une purge. Réalisée par JJ Abrams, qui connaît par cœur les petits trains électriques si merveilleux de papa Noël-Spielguy, au point de les astiquer pieusement et servilement.
Milou ne sert strictement à rien. Dans les albums (où lui aussi évolue), il formait avec Tintin un binôme psychique "fusionnel". Là, voir et entendre Tintin parler à Milou comme un idiot parlerait simplement à son chien, qui de son côté couine de ci de là, c'est juste ridicule. La castafiore est catastrophiquement ratée, et l'Idée scénaristique de son intervention (le rossignol milanais, arme secrète pour briser la vitre incassable abritant la maquette), non pas "ingénieuse" mais bête à pleurer. Etc etc.
Le tout plombé, faut-il s'étonner (pardon Gertrud), par l'assommante partition musicale de John Williams, inséparable compagnon de route de Spielberg en matière de concassage d'ambiance dans d'insipides cascades d'arpèges rebattus, de motifs conditionnés entendus 50.000 fois. Williams étant au son ce que Spielberg est à l'image, et l'union des deux ce que Skinner est à la psychologie causale: synthétisant tout ce qu'il y a de plus pavlovien dans la musak de films hollywoodiens, une véritable scie. Je ne dis pas que J. Williams n'a pas fait un bon score dans sa vie. Je dis juste qu'il en a fait 90% de trop.
L'animation, alors? Même pas. Y a tous les défauts récurrents de l'usine Dreamworks. De jolis décors, ça et là, d'accord. Mais principalement: de l'esbroufe visuelle, de la pyrotechnie, aucune poésie picturale, de la vitesse, aucune densité. Les mouvements corporels des personnages sont toujours aussi bizarrement chaloupés, impuissants à peser dans l'espace. Un gros problème de gestion de la physique, toujours le même depuis les Zemeckis, qui, finalement, s'en sortaient bien mieux, avec des univers plus riches, plus habités (Beowulf). Les expressions faciales motion-capturesques sont toujours aussi limitées, réduites à quelques grimaces stéréotypées. Même le moins bon Pixar (Cars, par exemple, dont je suis pas fan), tout y existe cent fois plus.
Je n'en finirais pas d'énumérer tous les éléments qui font de cette pseudo-aventure-hommage à tintin un petit film convenu, insignifiant, livré du bout des lèvres comme on enfile des perles de verroterie, sans émotion, sans passion, sans esprit.
La seule séquence que j'ai vraiment goûtée: celle concernant le kleptomane. Le gag du portefeuille relié à la veste par l'élastique incassable, puis la visite des Dupondt dans son intérieur aux étagères remplies de portefeuilles. C'était pas mal, ça. Mais là encore, fallait plomber par un gag consternant de nullité : une dame est assommée sur le trottoir, des petits oiseaux sortent de sa tête, et voilà que se radine de derrière une boutique un mec à casquette, au sourire niais et inexpressif, avec un filet pour attraper les oiseaux. C'est censé amuser quelqu'un ? Qu'il se fasse connaître, sans mentir.
La bibliothèque était jolie, le paquebot bien modélisé. Lé début était chouette, qui prenait un peu son temps, juste un peu, jusqu'à l'arrivée redoutée des pan-pan et tout le capharnaüm.
Je ne comprends pas la mansuétude critique qui généralement a accompagné ce film, d'une absence d'intérêt alarmante.
J'étais parti plein de bonne volonté et tout, sans trop me braquer (d'autant que le générique est assez réussi, en effet, sa musique aussi), mais déjà, en tant que bon connaisseur des histoires de tintin, je ne peux pas ne pas dire qu'il n'y a rien strictement rien de l'univers des albums de Hergé dans ce patchwork fagoté n'importe comment. Pendant tout le métrage, sur ce point, on imagine constamment une équipe de scénaristes réunis en braintrust d'entreprise pour aligner quantité de "raccords" bidons puisant superficiellement dans des tas d'éléments épars des albums, les tricoter en une intrigue à deux balles, arroser le tout d'une espèce de sauce médiane annulant toute forme de saveur, sans parler d'une espèce d'humour calibré-standardisé-fadouille.
Une chose est sûre, l'argument "tintin" est un pur cache-misère. Quel rapport au juste avec Le secret de la licorne et Le trésor de R. le R? Pourquoi ne pas s'être contenté de l'histoire racontée dans ces deux albums, même au prix de moult raccourcis ou montages? On nous présente ça comme une sorte d'hommage truffé de références, mais faudrait ptêt voir à pas trop prendre les cons pour des imbéciles. On nous vante un peu partout l'habileté d'un scénario puisant astucieusement dans les albums, avec des jeux de renvois que les vrais "connaisseurs" apprécieront. Or rien, donc, de l'univers de Hergé, ou de son esprit, ou du concept de ses personnages, encore moins de son style d'humour, n'existe a minima, jamais. Quant aux références, appelons ça des gimmicks publicitaires. Le scénario qui nous est livré est d'une pauvreté affligeante, aux connexions logiques totalement artificielles. Rien n'existe, tout est spielberguisé. Et spielberguisé, on sait un peu ce que ça veut dire: le spielberguisme, c'est l'art du gimmick, du clin d'oeil insistant, tout est dans l'arc-réflexe stimulus-réponse pavlovien. Plus l'anéantissement pur et simple de toute forme de singularité, l'énucléation radicale, à la base, de toute forme de personnage existant, que ce soit de chair et d'os, de caoutchouc, ou de pixel. Spielberg a cette particularité, jamais démentie de film en film, d'infantiliser tout objet dont il s'empare, à un rare degré de bêtise standardisée (proche de l'enfance, pour qui confond "état d'enfance" et "état de bêtise"), d'uniformisation dans le vacuum d'un marshmallow, ou suppositoire, incolores, indolores et insipides, y a plus rien à espérer de ce côté là. Même du coté du Spielberg "dépressif" et "noir", qui n'est guère plus dense si on gratte d'un demi-millimètre derrière le spectacle bien agencé.
Du secret, de la licorne, du fantôme de Haddock, de Moulinsart, du Karaboudjan, il ne subsiste plus rien, pour le redire, et ce n'est pas un mince exploit d'être parvenu à vider à ce point de sa substance le monde de tintin, rendu ici à une bimbeloterie de carte postale qui irrésistiblement fait penser à ce qu'a pu faire Woody Allen dans son imbitable et post-gériatrique Midnight in Paris.
Il n'y a rien de tintin dans ce vacuum intersidéral, faut vraiment insister là-dessus, pour les vendus de fdc, par ex, qui nous ont fait part de leur émerveillement de voir se concrétiser leur cher rêve d'enfant.
S. aurait adapté le Crasmeustache, ou Gil Jourdan, Ric Hochet, Michel Vaillant, ou Blake & Mortimer, Tif & Tondu, Boule & Bill, Gaston Lagaffe, Spirou & Fantasio, Chaminou et le Khrompire, Les Tuniques bleues, tout ce qu'on veut, le résultat aurait été du pareil au même: du bidon, des persos-prétextes, des décors-prétextes, vidés de toute substance, qui n'existeraient pas davantage, qui ne signaleraient aucun monde, aucun agencement, aucun imaginaire, s'agitant juste en vain dans un squelette d'intrigue inutile, un reader digest expédié ou une sorte de mégaremix, farci de rebondissements, de cascades, de courses-poursuites parfaitement ennuyeux, sans aucune, vraiment aucune espèce d'intérêt. Même le plus mauvais Harry Potter a plus de cachet, de singularité, et les persos plus de consistance, c'est dire.
Prenez par ailleurs un bon film d'action, filmé par un mec qui sait faire ça, prenez, je sais pas, moi, les Jason Bourne de Greengrass, l'action y est au moins intéressante, et c'est ce qu'on est en droit d'attendre. Pourquoi est-elle intéressante, palpitante? Parce qu'on s'intéresse à l'enjeu, au sens de ce qu'on regarde, on est impliqué dans quelque chose qui est de l'ordre du sens, et de la narration. Ce Tintin est rempli d'actions jusqu'à la couenne, mais rien n'a jamais aucun sens: nada, l'ennui, tout y est vu, revu et rerevu mille fois, que du stéréotype. Spielberg ne sait pas raconter et n'a rien à raconter, contrairement à ce que ne cessent de nous dire ses admirateurs: c'est tout sauf un conteur. Il n'a pas de monde.
Bien sûr, c'est du Indiana Jones "survitaminé", pour qui en douterait encore. Cette vieille rengaine marketing que l'on nous vend depuis des décennies: Spielberg a "ressuscité", selon la formule hypnotique devenue méthode Coué, "l'âge d'or" du film d'aventures épique et glamoureux hollywoodien, etc etc, en s'inspirant des aventures de Tintin. Et éventuellement de Philippe de Broca, de ses "tribulations d'un chinois en chine". Dit-on. Dans les milieux cinéphiles autorisés. C'est son foyer secret de sensiblité, ça et l'inénarrable "powésie de l'enfance", bien entendu. Nuts. Indiana Jones... Allez quoi, comme on dit à Bruxelles. Pas de ça, Lisette. Ce rutabaga mou et constamment emmerdifiant, instantanément ringard dès sa sortie. Aimez-vous tant les caramels mous, par la barbe du prophète? Faut vraiment être né, comme dit Deleuze, au milieu du désert, le désert des eighties, pour vouer un culte nostalgique à cette soupasse languissante.
Donc ok, c'est Indiana Jones. Aucun esprit ne souffle ici, jamais. C'est un alignement de séquences blètes, obligatoires, au tarif syndical, après dégraissage de tout ce qui aurait pu présenter un intérêt, même minime. L'humour, par hasard et par malchance? Pitié, c'est mauvais, lourd, même et surtout quand ça se voudrait léger, en clin d’œil. On sent parfaitement que S. et sa team ne comprennent strictement rien à l'humour hergéen, aux persos de Hergé: ils transforment automatiquement tout en mauvais slapstick, dans un faux esprit "britannique" qui n'a rien à faire là.
Tintin est une sorte d'abstract pour Hergé, on le sait, mais les autres, Haddock, les Dupondt, Nestor, ou la Castafiore, etc, ont ceci de particulier qu'ils inventent leur typologie propre. Or, la grossière erreur, la première, celle dans laquelle tomberait tout faiseur sans talent, c'est, comme ici, de les accorder à des stéréotypes préexistants: je ne dis pas les stéréotypes que seraient devenus ces personnages "universellement" connus, à travers le temps et l'espace. Car stéréotypes, il ne le sont jamais devenus, pour les lecteurs qui sont entrés dans cet univers. Ils étaient et sont restés, et c'est là un des mystères de l'art hergéen, des types singuliers, inscrits dans une généalogie singulière, de l'ordre de l'intime, peut-être même du privé, tant le lecteur a investi ces personnages de ses propres agencements généalogiques personnels. D'autant que d'albums en albums, ils changent, contrairement à tintin (et encore, pour lui, ça se discute aussi), ils ne restent pas figés dans leur typologie: ils traversent des crises, des remises en question, etc. Les Dupondt, c'est bien plus que simplement deux policiers rondouillards et passablement idiots. Y a en tout personnage des aventures de tintin comme un rébus, une crypte, je ne reviens pas là-dessus, on en avait déjà parlé. Ici, que voit-on? Des stéréotypes énucléés, là encore, non seulement de toute leur généalogie (ce qui serait encore excusable, dans la logique d'un scénario "synthétique" - qui ne synthétise rien du tout), mais encore de toute forme d'intensité personnelle.
Le cheminement intérieur de Haddock est concassé menu, par l'idée scénaristique désastreuse de fondre en un seul motif des éléments du Crabe aux pinces d'or et du Secret de la licorne. Le lien à son ancêtre, à son double, ainsi qu'à ceux de Rackham, "réincarné" dans un personnage secondaire falot, Sakharine (avec les traits de Spielberg: ah cet art du clin d’œil baltringue, comme la houpette de tintin devenue aileron de requin et autres friandises pour fans gâtiques. Faut absolument réciter sa filmo, roublardise d'un fétichisme marchand. C'est L'Oreille cassée qu'il aurait dû adapter): autre trouvaille nulle de scénariste soi-disant futé, qui transpose absurdement une gigantomachie des Héroïcs US façon Batman contre le Joker, et se battant à coups de grues-queues de dinosaures sans doute, en hommage à Jurassik Park. Sinon, c'est du sous-sous Pirates des Caraïbes.
Sans oublier le speech de psychologie pour cadres commerciaux qui n'en veulent, asséné par le vieux loup de mer, un monologue admirable sur la lose et la win, face au mur on l'enfonce mon ptit gars, laisse personne dire que t'es un raté. Et pour sûr, le film n'hésite pas à enfoncer tous les murs, par crainte de ne pas divertir son public-cible de 0 à 7 ans. Dernière entourloupe: l'annonce de la poursuite d'une soif "inextinguible" (hohoho) d'aventures pleines d'explosions et de cascades en tous genres, car le véritable trésor est caché, ultime révélation, en pleine mer. Alors que le message profond des deux albums, c'était, déjà: "nous avons cherché de par le monde un trésor qui a toujours été ici, sous nos yeux". Soit une dérision, un trouble, jetés sur la possibilité même d'une aventure, et que parachèveront L'Affaire Tournesol et surtout Les Bijoux de la castafiore, dé(con)structions minutieuses du concept même de "péripétie" ou d'intrigue.
Mais c'est qu'il y a des biffetons à tirer, si possible. J'imagine la suite: L'Etoile mystérieuse, entre le remake de "the thing" et le remake de "poltergeist", quelque chose dans ce goût-là. Une purge. Réalisée par JJ Abrams, qui connaît par cœur les petits trains électriques si merveilleux de papa Noël-Spielguy, au point de les astiquer pieusement et servilement.
Milou ne sert strictement à rien. Dans les albums (où lui aussi évolue), il formait avec Tintin un binôme psychique "fusionnel". Là, voir et entendre Tintin parler à Milou comme un idiot parlerait simplement à son chien, qui de son côté couine de ci de là, c'est juste ridicule. La castafiore est catastrophiquement ratée, et l'Idée scénaristique de son intervention (le rossignol milanais, arme secrète pour briser la vitre incassable abritant la maquette), non pas "ingénieuse" mais bête à pleurer. Etc etc.
Le tout plombé, faut-il s'étonner (pardon Gertrud), par l'assommante partition musicale de John Williams, inséparable compagnon de route de Spielberg en matière de concassage d'ambiance dans d'insipides cascades d'arpèges rebattus, de motifs conditionnés entendus 50.000 fois. Williams étant au son ce que Spielberg est à l'image, et l'union des deux ce que Skinner est à la psychologie causale: synthétisant tout ce qu'il y a de plus pavlovien dans la musak de films hollywoodiens, une véritable scie. Je ne dis pas que J. Williams n'a pas fait un bon score dans sa vie. Je dis juste qu'il en a fait 90% de trop.
L'animation, alors? Même pas. Y a tous les défauts récurrents de l'usine Dreamworks. De jolis décors, ça et là, d'accord. Mais principalement: de l'esbroufe visuelle, de la pyrotechnie, aucune poésie picturale, de la vitesse, aucune densité. Les mouvements corporels des personnages sont toujours aussi bizarrement chaloupés, impuissants à peser dans l'espace. Un gros problème de gestion de la physique, toujours le même depuis les Zemeckis, qui, finalement, s'en sortaient bien mieux, avec des univers plus riches, plus habités (Beowulf). Les expressions faciales motion-capturesques sont toujours aussi limitées, réduites à quelques grimaces stéréotypées. Même le moins bon Pixar (Cars, par exemple, dont je suis pas fan), tout y existe cent fois plus.
Je n'en finirais pas d'énumérer tous les éléments qui font de cette pseudo-aventure-hommage à tintin un petit film convenu, insignifiant, livré du bout des lèvres comme on enfile des perles de verroterie, sans émotion, sans passion, sans esprit.
La seule séquence que j'ai vraiment goûtée: celle concernant le kleptomane. Le gag du portefeuille relié à la veste par l'élastique incassable, puis la visite des Dupondt dans son intérieur aux étagères remplies de portefeuilles. C'était pas mal, ça. Mais là encore, fallait plomber par un gag consternant de nullité : une dame est assommée sur le trottoir, des petits oiseaux sortent de sa tête, et voilà que se radine de derrière une boutique un mec à casquette, au sourire niais et inexpressif, avec un filet pour attraper les oiseaux. C'est censé amuser quelqu'un ? Qu'il se fasse connaître, sans mentir.
La bibliothèque était jolie, le paquebot bien modélisé. Lé début était chouette, qui prenait un peu son temps, juste un peu, jusqu'à l'arrivée redoutée des pan-pan et tout le capharnaüm.
Invité- Invité
Sujets similaires
» Des animaux et des couleurs (chez Spielberg)
» De "Lincoln" en particulier et de Spielberg en général
» That's My Soul (Music): Munich (2005) de Spielberg
» De "Lincoln" en particulier et de Spielberg en général
» That's My Soul (Music): Munich (2005) de Spielberg
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum