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Lola - Brillante Mendoza (2009)

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Message par adeline Mer 19 Mai 2010 - 15:55

Le premier plan est marquant. Un long plan-séquence. Une vieille dame et son petit-fils achètent un cierge dans une église, puis marchent très longtemps avant de trouver l'endroit où l'allumer, dans le recoin d'une cour. La vieille dame s'y reprend à dix fois avant de réussir, après que son parapluie se fut retourné dix fois aussi. Le petit garçon donne la raison de cet acharnement en répondant à une question posée par un passant : son oncle a été poignardé à cet endroit, la veille.

Tout le début du film montre le voyage de cette grand-mère dans Manille, qui la mène de l'église, aux pompes funèbres, à la morgue, à la prison où elle s'enquière de l'enquête.
À la prison a lieu le passage de relais. Il y a une altercation, qui fait fuir cette vieille dame, inquiète pour son petit-fils qui y a assisté. Ils sortent de la prison, et croisent une autre vieille dame qui s'y rend, pour porter à manger à son petit-fils, emprisonné pour... le meurtre de la veille.

L'une doit enterrer son petit-fils, l'autre faire sortir le sien de prison.

Deux grands-mères (lola en filipino) sous la pluie.

Le film est un peu oppressant. Tourné caméra à l'épaule, très près de ses personnages physiquement, mais dans une assez grande distance de fait, il fonctionne comme une description un peu froide des rouages d’un fait divers, un meurtre, dans les quartiers pauvres de Manille.

Les deux grand-mères sont de beaux personnages. L’une (Lola Sepa), est plus fragile que l’autre (Lola Puring), mais elles sont toutes les deux assez têtues pour arriver à rassembler l’argent nécessaire à enterrer l’un des petits-fils, et à éviter à l’autre la prison ferme. Toutes les responsabilités leur incombent, elles ne sont entourés que d’enfants effacés (la fille de Lola Sepa), malades (le fils de Lola Puring), ou qui refusent de les aider (l’autre petit-fils de Lola Puring), ce qui est un peu dommage.

Il s’agit de trouver de l’argent, mais surtout les gens qui donneront cet argent (les voisins qui aident à rassembler la somme pour l’enterrement, le conseil de quartier qui n’aidera peut-être pas, les bureaux d’aide diverses dans les administrations, la famille, l’élu sollicité qui fera baisser le prix des pompes funèbres), et de convaincre d’accepter l’argent pour un accord à l’amiable qui annulera le procès, ce que réussit finalement à faire Lola Puring. Cette Lola Puring est roublarde, cela fait rire et c’est bien. Elle arnaque les clients de son petit stand de vente de légumes avec un système imparable. Elle aligne sur un journal une dizaine de billets de 20 pesos, qu’elle recouvre d’un autre journal. Un client lui donne un billet de 50 pesos. Elle fait glisser celui-ci sous le deuxième journal, lui rend la monnaie sur 20. Il râle, elle lui répond qu’il lui a donné un billet de 20, la preuve, elle n’a que des billets de 20 sous son journal. C’est parfait. Avec la télé mise en gage, les œufs de poules et les légumes de sa sœur vendu au premier venu, peu à peu, elle réunit la somme qui fera baisser la résistance de Lola Sepa, persuadée par sa fille qu’il vaut mieux accepter l’argent de Lola Puring que persister dans un procès qui ne fera pas revenir son petit-fils.

Étrange justice qui ne condamne pas un meurtrier car les parties passent un accord à l’amiable. Mais cet accord est dans l’ordre des choses : pour la famille de Lola Puring, un garçon en prison c’est presque comme un garçon mort. Alors, pourquoi tuer une deuxième fois ?

La lenteur du film, tourné essentiellement en plans-séquences, pourrait venir du rythme plus lent des personnes âgées. Je ne crois pas. Le filmage est très heurté, et ne s’accorde pas à la manière d’être des vieilles dames. C’est une volonté de réalisme, qui fera dire du film qu’il a une dimension documentaire.

Mais ce temps long et ces plans-séquences ne construisent pas une temporalité spécifique à ces vieilles dames. Ce qui se passe à Manille après le meurtre du petit-fils de Lola Sepa par Mateo, le petit-fils de Lola Puring, se résume un peu à un parcours du combattant de leurs grands-mères. Le meurtre est un prétexte ; c’est une bonne idée, mais il manque quelque chose au film pour le faire dépasser la simple chronique. Il manque peut-être l’autre côté de la médaille, une plus grande attention à ce qui fait tenir ces vieilles dames, elles qui tiennent tout. Le tout jeune petit-fils de Lola Sepa joue ce rôle, il l’aide, il est là, mais ça n’est pas assez. Elles ne sont pas seules contre tous, ces deux vieilles dames. Elles font partie d’un monde. Une partie de ce monde est constitué des obstacles qu’elles affrontent, une autre des gens qui les entourent. Et ces gens qui les entourent sont trop passifs.

Et puis, il a cette scène, au tribunal. Juste avant la première audience, Lola Sepa doit aller aux toilettes. Elle doit absolument. Sans doute une réaction d’angoisse. Elle met du temps, dans les couloirs du palais de justice, à les trouver. Une fois devant, celles-ci sont fermées. Lola Sepa reste figée, alors que sa fille arrive vers elle. Plan serré sur le visage de la vieille dame, qui dit assez ce qui se passe. Contre-champ sur le visage navré de la fille. Puis champ à nouveau, sur Lola Sepa. Et la caméra s’abaisse, pour montrer le pipi qui dégouline sur les jambes et les chaussures de la vieille dame. Cut, plan de la salle d’audience où Lola Sepa est à sa place. Inutile mouvement de caméra qui appuie sur la grande faiblesse de Lola Sepa, et ellipse qui annule le soutien nécessaire que sa fille lui a apporté à ce moment-là.

La caméra est collée à la vieillesse de ces femmes. Elle est si proche qu’elle détruit le reste du monde qui les entoure.

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Message par wootsuibrick Mer 19 Mai 2010 - 16:13

bel hasard. j'ai acheté John John cet après midi.
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Message par adeline Ven 21 Mai 2010 - 8:40

Coucou Woot,

alors, tu l'as vu, John John ? Il semblerait que les deux films soient assez proches, que Lola revient à une forme qu'avait John John, alors que Serbis et Kinatay étaient différents, plus crus.

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Message par wootsuibrick Ven 21 Mai 2010 - 11:27

Pas encore vu. Je vais regarder ça ce week-end.
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Message par Largo Sam 22 Mai 2010 - 16:05

Hello,

Juste deux mots en attendant ptet mieux parce que tes remarques m'ont donné envie de repenser au film :

Bon déjà, ton analyse de la scène des toilettes est très juste, c'est vrai qu'elle est maladroite...

Mais quand même :


La caméra est collée à la vieillesse de ces femmes. Elle est si proche qu’elle détruit le reste du monde qui les entoure

"détruire" je n'irai pas jusque là. Je suis d'accord pour dire que les personnages dans les deux familles n'existent pas suffisamment à l'écran, mais "le reste du monde qui l'entoure" on le voit et on le sent très bien. Je pense à la ville, le quartier sous les eaux, évidemment aussi les institutions, les réflexes de solidarité qui s'enclenchent dans le quartier...

Pour moi Mendoza est toujours aussi doué pour prendre un personnage et en faire une sorte d'éclaireur qu'il suit pour pénétrer dans les méandres de la villes, de la société etc. Toujours cette caméra comme une sonde pour creuser les différentes strates de cette grande fourmilière horizontale qu'est Manille.

Définitivement, c'est un des rares réalisateurs (au même titre qu'un Scorsese) à mon sens qui est parvenu à inventer une nouvelle manière de filmer la ville, sa ville.
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Message par Borges Sam 22 Mai 2010 - 16:54

La caméra est collée à la vieillesse de ces femmes. Elle est si proche qu’elle détruit le reste du monde qui les entoure

en fait, si on se base sur ce que le mec raconte, c'est précisément le but, montrer la solitude de ces deux femmes livrées à elles-mêmes, ne pouvant compter sur personne... il n'y a donc pas de monde pour les entourer, il y a pas de monde, pas de vraies solidarités, de liens... en lisant le message d'Adeline, j'ai un peu pensé au "trains sifflera trois "; je sais que ça n'a rien à voir...

Wink

le mec dans l'entretien avec positif insiste aussi sur la lenteur, et oppose ce film à un autre, où il a filmé des pickpockets, là tout va vite au contraire; deux idées de la ville, du temps, de l'espace...

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Message par wootsuibrick Mar 1 Juin 2010 - 19:19

Beaucoup aimé John John, que j'ai vu hier. J'aime particulièrement la manière dont les "thèmes" se révèlent, émergent de la matière assez brut du film.
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Message par Eyquem Mar 1 Juin 2010 - 21:02

Hello,
Pas aimé "Lola", en ce qui me concerne. Je n'y ai pas cru. C'est le long premier plan qui m'a mis d'entrée de mauvais poil, je crois, avec son insistance à filmer cette grand-mère qui n'arrive pas à allumer son cierge d'une main et tenir son parapluie de l'autre. J'ai trouvé qu'il y avait sans arrêt des effets très appuyés de ce genre. Un côté un peu Hugo, pour le dire vite.
Du coup, rien ne passe, dans les scènes fortes : la rencontre de la grand-mère et du meurtrier, la découverte du corps à la morgue.

Et je parle même pas du plan au tribunal, celui que tu décris, Adeline. Là, ça m'a vraiment déplu.
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Message par adeline Mer 2 Juin 2010 - 17:42

Hello Eyquem,

j'ai été durant le film toujours à deux doigts de le ressentir comme toi. Mais quelque chose a fait que j'ai quand même aimé, avec les réserves que j'ai dites, et il y en a d'autres. Le côté un peu Hugo je suis d'accord, et le fait qu'aucune scène ne sort vraiment du lot.
Le corps à la morgue c'est encore un problème. Je crois que la manière de filmer très proche des corps à ce moment-là (on suit Lola Sepa de si près qu'on ne voit la plupart du temps que son dos ou ses épaules, avec un mouvement de caméra constant assez dérangeant) étouffe plus qu'autre chose, et j'ai presque eu du mal à comprendre qu'on était à la morgue.

Il faudrait aussi voir comment il filme la ville. Il est dedans, il la décrit bien, mais c'est toujours très distancié, uniquement descriptif. C'est cette distance qui me gêne, le lieu commun de la ville fourmilière.

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Message par Eyquem Mer 2 Juin 2010 - 17:58

'soir Adeline,
j'ai été durant le film toujours à deux doigts de le ressentir comme toi. Mais quelque chose a fait que j'ai quand même aimé, avec les réserves que j'ai dites
Pareil, mais dans l'autre sens : j'étais à deux doigts d'aimer, mais il y avait toujours un truc pour me faire gigoter sur mon siège : "Ah non ! Ca, pas possible, il peut pas le faire !"

Faut que je rectifie donc : j'ai pas aimé, mais avec des réserves. Par exemple, j'aime bien la roublardise de la deuxième grand-mère ; elle oblige à adopter un autre regard que ce regard apitoyé que le tout premier plan (celui de la bataille contre le vent et la vieillesse) sollicitait d'une manière trop insistante.
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Message par adeline Jeu 10 Juin 2010 - 21:44

J'ai repensé au film, en parlant avec des amis qui n'ont pas vraiment aimé. La distance est complètement foirée, c'est ça le problème. La caméra est collée aux vieilles dames, il y a une grande proximité des corps. Pourtant, on est à une distance gigantesque de ce qu'elles ressentent, puisqu'on reçoit tout de la même manière. Rien ne passe dans les scènes fortes, parce qu'il passe la même quantité de choses dans toutes les scènes. Les effets sont vraiment des effets, ils ne semblent jamais être le déploiement normal du film.

C'est étrange, je ressens beaucoup de contradictions quand j'essaye de parler plus précisément du film. Il est lent, comme sans doute les déplacements des vieilles dames doivent l'être dans la ville, mais il n'a pas le rythme qui leur convient. Il est filmé d'une manière lente et coulée, mais il est pourtant heurté. Je regrette qu'on ne soit pas plus proche des personnages, de ce qu'ils ressentent, alors qu'on est toujours collé à eux. Je sais que les grands-mères sont seules et se battent, et je regrette le peu d'existence des familles autour d'elles, mais je ne sens pas leur solitude, je les trouve en même temps très entourées. Je trouve que la ville a une présence intense et qu'on comprend sa logique, cette société urbaine et son organisation, et pourtant je ne sens pas la ville, je ne sens pas les gens.

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Message par Invité Lun 5 Juil 2010 - 21:56

Hello,

Vu "Serbis" du même réalisateur, je crois. Pas aimé. J'ai retrouvé un peu tout ce dont vous parliez précédemment en effet.

La façon de filmer, je dirais que c'est une manière de faire de l'indiscrétion (nombreuses scènes où on nous demande de mater), c'est pourquoi je retiendrai tout particulièrement la scène du film avec l'avocat en train de manger avec le gamin et son père. Cette scène commence avec la caméra qui pique du nez dans l'assiette de l'avocat (?) puis bouge pour filmer la scène horizontalement et se termine sur une question du père à l'avocat : "vous portez une perruque ?". Elle me semble bien résumer le geste de Mendoza derrière la caméra.

Pour le reste, ce filmage à l'épaule coupe tout rapport du plan au temps. Le film se veut raconter les aventures de l'autre côté de l'écran d'un cinéma porno (sorte de cinéma dans le cinéma), il enchaine ainsi les scène de ménage, course-poursuite, scène de baise sans se douter une seconde que le cinéma ça n'est pas que ça. Le contre-exemple parfait serait le film de Tsai Ming Liang, "Goodbye Dragon Inn" dans lequel, au contraire, les quelques rares évènements les plus communs se déroulant dans le cinéma s'inscrivent dans le temps sans surenchère et boulimie d'"action".

Cinéma qui filme très proche des corps et qui n'a que ça pour centre d'intérêt pour ne pas dire "pour obsession". Spectateurs qui vous intéressez à ce qu'il pourrait y avoir entre les corps, ou autour d'eux, que le cinéma pourrait révéler, passez votre chemin !

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Message par wootsuibrick Mar 6 Juil 2010 - 5:21

JM a écrit:
Cinéma qui filme très proche des corps et qui n'a que ça pour centre d'intérêt pour ne pas dire "pour obsession". Spectateurs qui vous intéressez à ce qu'il pourrait y avoir entre les corps, ou autour d'eux, que le cinéma pourrait révéler, passez votre chemin !


je crois que si le sujet de wang bing pour à l'Ouest des rails, n'était pas aussi "gros", c'est un reproche qui aurait pu lui être adressé rien qu'à la vue de ses valeurs de plans, qui sont très proches de ce que j'ai vu de Mendoza (John John).
Je crois que face à cette manière de capter le réel, ce que tu cherches autour des corps, se révèle beaucoup à travers l'emploi d'indices...
sinon "passez votre chemin", c'est une formule un peu trop journalistique je trouve.


Dernière édition par wootsuibrick le Mar 6 Juil 2010 - 7:00, édité 1 fois
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Message par Invité Mar 6 Juil 2010 - 6:59

wootsuibrick a écrit:
JM a écrit:
Cinéma qui filme très proche des corps et qui n'a que ça pour centre d'intérêt pour ne pas dire "pour obsession". Spectateurs qui vous intéressez à ce qu'il pourrait y avoir entre les corps, ou autour d'eux, que le cinéma pourrait révéler, passez votre chemin !


je crois que si le sujet de wang bing pour à l'Ouest des rails, n'était pas aussi "gros", c'est un reproche qui aurait pu lui être adressé rien qu'à la vue de ses valeurs de plans, qui sont très proche de ce que j'ai vu de Mendoza (John John).
Je crois que face à cette manière de capter le réel, ce que tu cherches autour des corps, se révèle beaucoup à travers l'emploi d'indices...
sinon "passez votre chemin", c'est une formule un peu trop journalistique je trouve.

Je sais pas trop ce que veux dire "valeur de plan", qui fait très universitaire en cinéma je trouve, mais je vais quand même tenter de te répondre. En fait cette impression est tout autant dû à la manière de filmer de Mendoza qu'à son sujet même dont il se délecte visiblement et qui me conforte dans cette idée, peut-être me suis-je mal fait comprendre (ce qui me rassure quant à mon devenir-journaliste). Culs, seins, bites passent successivement devant la caméra du cinéaste, on mate, on aime se mater un peu trop longtemps dans la glace, on éclate un furoncle sur son cul, on pisse dans une bouteille, on se fait tailler une pipe, etc. Bien sûr, filmer en plan rapproché vis à vis des personnages n'est pas forcément signe, chez d'autres, d'une impossibilité de se détacher un peu de ceux-ci, autrement.

Mais c'est lié à ce que je constatais au niveau du temps je crois. Ici les personnages sont bien projetés dans un temps global (une journée) mais la durée locale de chaque séquence de ce tunnel de séquences fonctionne en toute autonomie, elles se suffisent totalement à elles-mêmes du point de vue de la durée. Pourquoi? Parce que c'est les mouvements des personnages, avec la caméra qui se colle aux corps, qui font les plans et que rien ne semble exister autour, et que c'est un système de filmage qu'applique très scrupuleusement BM sans se poser de question.

Je ne me souviens pas d'un tel tremblé de l'image chez WB qui hurle "eh oh oubliez pas que je suis là, derrière la caméra", je me souviens de quelque chose de beaucoup plus posé même si filmé "caméra à l'épaule". Et j'ai pas encore vu WB foutre un tictac en bruitage d'un seul coup pour montrer que, là, il y a le temps qui passe (bonjour le symbole lourdingue, bien un truc de publicitaire ça : le film en est plein, je ne sais pas si c'est ce que tu appelles des "indices" ? J'appellerais plutôt ça des "preuves à charge").

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Message par wootsuibrick Mar 6 Juil 2010 - 7:07

J'avoue que durant la vision de A l'Ouest à aucun moment je n'ai oublié la présence de Wang Bing et ce n'est pas du tout une affaire de procédé stylistique, "genre ce plan est une marque déposée", c'est juste dû à sa manière d'approcher les gens qu'il filme, on sent que ce n'est pas à la caméra et aux spectateurs qu'ils s'adressent, mais bien à Wang Bing.
Le problème de Mendoza avec ce procédé de caméra à l'épaule, c'est qu'il est un procédé justement, et que le réel passe par le prisme de la fiction, d'une fiction écrite.

L'autre problème c'est qu'on ne parle pas du même film de Mendoza... John John, n'est pas aussi glauque et démonstratif que ce dont tu me parles là.
Le sujet a un potentiel "sensationnel", qui n'apparaît jamais dans le cadre des images.

sinon désolé du ton que j'ai prit sur ma dernière phrase à ton encontre. Juste besoin d'un peu provoquer, pour exciter un peu mon désir d'en découdre. Problème hormonal passager lol.
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Message par Invité Mar 6 Juil 2010 - 8:12

wootsuibrick a écrit:J'avoue que durant la vision de A l'Ouest à aucun moment je n'ai oublié la présence de Wang Bing et ce n'est pas du tout une affaire de procédé stylistique, "genre ce plan est une marque déposée", c'est juste dû à sa manière d'approcher les gens qu'il filme, on sent que ce n'est pas à la caméra et aux spectateurs qu'ils s'adressent, mais bien à Wang Bing.

Le problème de Mendoza avec ce procédé de caméra à l'épaule, c'est qu'il est un procédé justement, et que le réel passe par le prisme de la fiction, d'une fiction écrite.

Oui, bien sûr, la question n'est pas de savoir si le réalisateur est là ou pas derrière la caméra, ce qui est une évidence, mais elle se trouve plutôt dans sa manière de se comporter avec sa caméra et ce(ux) qu'il filme. Mendoza,lui, c'est comme quand tu prends le volant pour la première fois, je sais pas si ça t'est déjà arrivé de conduire, tu sais pas trop quoi faire avec le volant alors tu avances sur une ligne droite en te croyant obligé de le gigoter un peu dans tous les sens, de manière désordonnée, parce qu'on t'a foutu ce truc dans les mains et que tu te dis qu'il doit bien falloir en faire quelque chose. Il y a d'un côté un cinéaste qui semble très (trop?) sûr de son petit effet (travelling avec les personnages répétés à outrance, caméra collée aux corps) et de l'autre un cinéaste qui semble franchement quasiment novice et incapable de trouver des solutions intéressantes, de s'adapter aux situations de son scénario plutôt que d'adapter les situations à son système de filmage. Oui, c'est clairement un problème de procédé d'enregistrement qui vient buter contre un procédé de fiction, d'écriture.

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Message par balthazar claes Mar 6 Juil 2010 - 11:38

Wootsuibrick a écrit:J'avoue que durant la vision de A l'Ouest à aucun moment je n'ai oublié la présence de Wang Bing et ce n'est pas du tout une affaire de procédé stylistique, "genre ce plan est une marque déposée", c'est juste dû à sa manière d'approcher les gens qu'il filme, on sent que ce n'est pas à la caméra et aux spectateurs qu'ils s'adressent, mais bien à Wang Bing.

salut,

mais est-ce un reproche, pourquoi faudrait-il critiquer cette présence assumée ? Il m'a semblé aussi que WB est très présent, et que c'est justement ce qui lui donnait la possibilité de filmer autant, et des choses souvent dures, de plain pied avec ceux qu'il filme.

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Message par wootsuibrick Mar 6 Juil 2010 - 12:32

BC, je ne reproche pas ça à WB, ni à Brillante Mendoza. Il me semble juste que le problème que pointe JM à mon goût se pose à ce niveau...


JM, encore une fois pour ce que j'ai vu de John John le procédé documentaire ne m'a pas semblé être foireux. où alors il va falloir que je fasse mon autocritique.
Poser un oeil dans un viseur de caméra (parallèle avec le volant du conducteur débutant), monter des images je vois à peu près ce que c'est. Je fais ça depuis dix ans (après vient la question de l'ouvrier et de son violon, mais là faut bien dire ce qui est, j'en ai un peu rien à cirer). sinon je regarde des films autant que toi. La manière dont tu amènes ta critique, pourrait me faire croire que je ne vois rien, que mon oeil sur le travail de Mendoza est défaillant. Cela est peut-être possible en effet. C'est possible...

La question sur le Mendoza que j'ai vu, c'est plutôt quelque chose du genre, personnages de fiction/ captation de l'espace, de l'environnement des personnages, documentaire. Et là j'y ai vu quelque chose d'intéressant. Dans le sens où la narration semblait naître à partir d'indices qui semblaient émerger de l'environnement des personnages.
Plus que des tremblotements de caméra volontaires pour faire "style", j'y ai vu un choix de filmer avec les moyens d'une prise de vue directe. Les actions qu'il fait apparaître fonctionnent comme au présent, ce qui permet de fondre le rythme de la fiction des personnages principaux, avec le rythme de l'environnement "documentaire", réel.
Tout en gardant une identification aux personnages, viscérale, en restant proche d'eux. ce qui est assez différent du procédé d'un Jia Zhang Ke à partir de Platform (par exemple), où les personnages semblent flotter dans leur environnement.
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Message par Invité Mar 6 Juil 2010 - 13:29

Hello BC,

Dans "A l'ouest des rails" il y a en effet un jeu à trois : filmeur, caméra, filmés, tout à fait absent dans le film de BM que j'ai vu. Je maintien le lien avec WB même si je vois pas du tout où ça nous mène, mais sait-on jamais. La présence du cinéaste est affirmée dans le cas de WB qui se place en "interlocuteur", en revanche BM brouille avec ses effets sa connivence avec les personnages, tout en revendiquant une présence de tous les instants derrière la caméra pour dire "attention, c'est du cinéma" mais surtout "c'est mon cinéma" (ce qu'on appelle un "effet de signature"). Et l'effet de pellicule qui crame, à la fin du film, ne veut pas dire autre chose.

wootsuibrick a écrit:
La question sur le Mendoza que j'ai vu, c'est plutôt quelque chose du genre, personnages de fiction/ captation de l'espace, de l'environnement des personnages, documentaire. Et là j'y ai vu quelque chose d'intéressant. Dans le sens où la narration semblait naître à partir d'indices qui semblaient émerger de l'environnement des personnages.
Plus que des tremblotements de caméra volontaires pour faire "style", j'y ai vu un choix de filmer avec les moyens d'une prise de vue directe. Les actions qu'il fait apparaître fonctionnent comme au présent, ce qui permet de fondre le rythme de la fiction des personnages principaux, avec le rythme de l'environnement "documentaire", réel.

oui, il y a bien ça dans "Serbis", c'est ce que j'appelle un tunnel de séquences : une chèvre qui est lâchée dans une salle de cinéma et tout le monde la poursuit bien sûr en plan séquence, un voleur poursuivi par un flic s'introduit dans le cinéma et tout le monde le poursuit, un type mange, on filme ce qu'il mange avant de le filmer en train de manger, la mère arrive dans le cinéma je le suis en plan séquence dans les couloirs, une heure plus tard un oncle arrive dans le cinéma et je le filme exactement pareil, au même endroit en plan séquence, etc, etc ... ces répétitions inutiles ici me font dire qu'il y a moins là une volonté documentaire sur l'environnement qu'une impuissance à prendre les choses par différents bouts compte tenu du fait que l'approche d'une scène est très souvent identique car collée au personnage qui est au centre de son écriture (même quand cela n'apporte plus rien, par exemple quand une configuration du réel a déjà été mise à jour).

Mais bon c'est moi qui doit avoir un problème avec ce genre de cinéma. Je sais pas si tu te souviens mais j'avais émis plus ou moins les mêmes critiques à propos d'un film de Lodge Kerrigan qui s'appelle "Keane".

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Message par wootsuibrick Mar 6 Juil 2010 - 13:43

JM a écrit:(même quand cela n'apporte plus rien, par exemple quand une configuration du réel a déjà été mise à jour).


Je ne comprend pas très bien cette parenthèse. Peux tu m'expliquer plus...

Je ne pense pas que ce soit juste toi qui ai un problème avec ce genre de cinéma, car en l'occurrence, il me semble que sur ce post, c'est moi qui est en minorité.
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Message par Invité Mar 6 Juil 2010 - 16:50

Ce que je veux dire concerne un peu précisément le film dont je parlais et encore plus précisément les scènes répétées que j'évoquais. C'est-à-dire que l'approche de la chambre de la mère qui semble se trouver au tréfonds du cinéma par les plans séquences dans les divers couloirs labyrinthiques je trouve ça pas mal une fois, la première, mais la seconde, avec un autre personnage comme "appât", je trouve que ça fait déjà trop, il n'y a plus comme tu disais cette impression un peu documentaire de découvrir la configuration du lieu où se déroule l'action, juste un procédé qui tourne à vide.

Je ne sais pas qui a vu ce film par ici mais en tout cas je crois que "Serbis" a été plutôt pas mal reçu par la critique en France dans l'ensemble.

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Message par Invité Mer 7 Juil 2010 - 6:24

Mais là encore c'est pas tant le fait qu'il y a répétition que le fait que cette répétition n'a, à mon sens, pas de "valeur" qui me déplait. Dans un film comme Elephant (GVS) par exemple, la répétition, assumée (et se plaçant aussi dans le sillon de plusieurs personnages), apporte une profondeur (temporelle) à l'action, tout en "quadrillant" l'espace du lycée dans lequel elle se déroule. C'est non moins un dispositif, mais celui-ci a le bénéfice de faire travailler un peu les affects des spectateurs.

bon sang, oui, un peu de légèreté, contre cette infâme lourdeur mendozienne !

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Message par wootsuibrick Mer 7 Juil 2010 - 14:09

Je n'ai pas trouvé John John lourd... à vrai dire, son dernier quart d'heure je l'aurai bien vu dans un drame populaire... que ce soit série sud américaine ou autre. lol
du moins au niveau de la charge affective premier degré que ça dégageait.
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