Je renierai ma mère
Je renierai ma mère
En voyant Nevada Kid de Hathaway avec McQueen, on est en peine de sentir la nécessité qu’il y a eu à faire ce film. Déploration de fin de règne des studios, fin de période de la réaction politique protofasciste.
On follow l’errance de McQueen,
on voit les deux mouvements qui l’anime,
la vengeance du meurtre de ses père et mère et en parallèle, un certain apprentissage intellectuel et culturel, la formation d’un impossible qui oriente plutôt qu’il n’annule la violence.
Un Candide de l’Amérique qui découvre l’alphabet dans l’épuisement d’un barillet, douilles vides, chez un marchand d’armes itinérant, figurant des lignes commerciales et morales reliant tout un continent.
Tout déplacement est un désir caché pour l’autre en soi qui se décale peu à peu dans le temps et l’espace. Et vient le temps d’une rencontre qui nous échappe. (B to B) Qu’a-t-on perdu vraiment ?
N’est ce pas là ce qui fait retour ? à la fin?
La leçon prodiguée au spectateur est celle d’un discernement, tuer est une affaire d’éducation.
A la limite, du voyage, de l’errance, au bout de l’aiguillon, il faut oublier les motifs, les recouvrir d’un habit civilisé afin de mieux manier les gestes et les mots.
C’est le passage de la barbarie à la civilisation.
J’ai omis de signaler que le personnage est le fruit d’une union métisse.
Le plan dure quelques secondes, si peu qu’on en est troublé. Un acteur de Fuller, Park row, le père entravé, une femme en habit d’indienne, ligotée, Martin Landau en nazillon qui veut l’écorcher vivante. Une histoire de peau …
Cette scénographie laisse insatisfait.
La femme est trop jeune pour être la mère de Steve McQueen.
C’est du moins ce que je me suis dit à ce moment là. C’est comme une brèche dans la croyance du spectateur. Dans la mienne.
On pourrait ajouter que, au début du film, les futurs assassins, trois visages de la mort, rencontrent McQueen ; ce dernier leur indique bien naïvement la pauvre mine à proximité de laquelle vivent ses parents.
Il est donc une pièce à peine articulée dans la mise à mort.
Si, à la manière de the searchers, il pénètre dans le trou noir de la modeste cabane familiale, il en brûle les restes dans les flammes jusqu’à ce que plus rien ne soit visible, il convient peut-être d’interroger ce disparaître.
A un autre moment, il accompagne une indienne s’étant prostituée dans une ville de l’ouest ; (dans le film les femmes sont toutes rabaissées, anéanties.) Retour vers une image idyllique d’un campement des indiens des plaines.
Elle, éprise de McQueen, veut le garder près d’elle.
Lui, aussi inaccessible qu’un philosophe, se bat avec la lecture d’un livre pour enfants.
Signe d’un éloignement inéluctable de l’héritage maternel et d’un retour au monde de l’ouest et de ses circulations monétaires, mortelles.
On pourrait aller plus loin, être un peu radical, en suivant le fil des indices, et exposer crûment la morale de la fiction.
Tuer, renier, effacer, c’est l’origine inatteignable d’un beginning, ici une mère, indienne, épouse d’un homme qu’il s’agit aussi de remplacer.
Comme père de substitution, le père violent, le titan, l’assassin, qu’il ne pourra abattre à la fin, signe de son accession à la vraie humanité, blanche.
Ainsi le film crée un dispositif qui fait coïncider la mission civilisatrice de l’Amérique avec un acte de vengeance d’un crime tout en instituant, dans le même temps, au souffle près, ce crime comme une nécessité fondamentale et comme le désir secret de toute l’architecture mentale et économique, masculiniste.
Si on revient un peu en arrière, sur le déficit de croyance que j’évoquais, il faudrait à la limite décrire strate à strate les différenciations dans la matière de la fiction. Que cette scène inaugurale du meurtre de l’indienne et de son époux, leur union pouvant faire penser à l’idée que l’Amérique étasunienne a pu naître grâce aux relations des premiers migrants avec les communautés indiennes, soit si proche des prémisses d’un conte, d’une fable, qu’elle s’éloigne si fort d’une empreinte historique réelle, pour ne laisser qu’une trace de trace … disons le fétiche d’un petit sac fait en peau humaine.
On follow l’errance de McQueen,
on voit les deux mouvements qui l’anime,
la vengeance du meurtre de ses père et mère et en parallèle, un certain apprentissage intellectuel et culturel, la formation d’un impossible qui oriente plutôt qu’il n’annule la violence.
Un Candide de l’Amérique qui découvre l’alphabet dans l’épuisement d’un barillet, douilles vides, chez un marchand d’armes itinérant, figurant des lignes commerciales et morales reliant tout un continent.
Tout déplacement est un désir caché pour l’autre en soi qui se décale peu à peu dans le temps et l’espace. Et vient le temps d’une rencontre qui nous échappe. (B to B) Qu’a-t-on perdu vraiment ?
N’est ce pas là ce qui fait retour ? à la fin?
La leçon prodiguée au spectateur est celle d’un discernement, tuer est une affaire d’éducation.
A la limite, du voyage, de l’errance, au bout de l’aiguillon, il faut oublier les motifs, les recouvrir d’un habit civilisé afin de mieux manier les gestes et les mots.
C’est le passage de la barbarie à la civilisation.
J’ai omis de signaler que le personnage est le fruit d’une union métisse.
Le plan dure quelques secondes, si peu qu’on en est troublé. Un acteur de Fuller, Park row, le père entravé, une femme en habit d’indienne, ligotée, Martin Landau en nazillon qui veut l’écorcher vivante. Une histoire de peau …
Cette scénographie laisse insatisfait.
La femme est trop jeune pour être la mère de Steve McQueen.
C’est du moins ce que je me suis dit à ce moment là. C’est comme une brèche dans la croyance du spectateur. Dans la mienne.
On pourrait ajouter que, au début du film, les futurs assassins, trois visages de la mort, rencontrent McQueen ; ce dernier leur indique bien naïvement la pauvre mine à proximité de laquelle vivent ses parents.
Il est donc une pièce à peine articulée dans la mise à mort.
Si, à la manière de the searchers, il pénètre dans le trou noir de la modeste cabane familiale, il en brûle les restes dans les flammes jusqu’à ce que plus rien ne soit visible, il convient peut-être d’interroger ce disparaître.
A un autre moment, il accompagne une indienne s’étant prostituée dans une ville de l’ouest ; (dans le film les femmes sont toutes rabaissées, anéanties.) Retour vers une image idyllique d’un campement des indiens des plaines.
Elle, éprise de McQueen, veut le garder près d’elle.
Lui, aussi inaccessible qu’un philosophe, se bat avec la lecture d’un livre pour enfants.
Signe d’un éloignement inéluctable de l’héritage maternel et d’un retour au monde de l’ouest et de ses circulations monétaires, mortelles.
On pourrait aller plus loin, être un peu radical, en suivant le fil des indices, et exposer crûment la morale de la fiction.
Tuer, renier, effacer, c’est l’origine inatteignable d’un beginning, ici une mère, indienne, épouse d’un homme qu’il s’agit aussi de remplacer.
Comme père de substitution, le père violent, le titan, l’assassin, qu’il ne pourra abattre à la fin, signe de son accession à la vraie humanité, blanche.
Ainsi le film crée un dispositif qui fait coïncider la mission civilisatrice de l’Amérique avec un acte de vengeance d’un crime tout en instituant, dans le même temps, au souffle près, ce crime comme une nécessité fondamentale et comme le désir secret de toute l’architecture mentale et économique, masculiniste.
Si on revient un peu en arrière, sur le déficit de croyance que j’évoquais, il faudrait à la limite décrire strate à strate les différenciations dans la matière de la fiction. Que cette scène inaugurale du meurtre de l’indienne et de son époux, leur union pouvant faire penser à l’idée que l’Amérique étasunienne a pu naître grâce aux relations des premiers migrants avec les communautés indiennes, soit si proche des prémisses d’un conte, d’une fable, qu’elle s’éloigne si fort d’une empreinte historique réelle, pour ne laisser qu’une trace de trace … disons le fétiche d’un petit sac fait en peau humaine.
Dernière édition par 에르완 le Jeu 16 Juin 2022 - 18:36, édité 2 fois (Raison : pcq)
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