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Près du Vietnam

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Message par Dr. Apfelgluck Sam 8 Mar 2014 - 18:27


Ces derniers temps, j'ai réussis à me procurer diverses copies de films nord-vietnamiens (de fiction ou documentaire de propagande), tous tournés en plein pendant la guerre.
Le visionnage est une expérience très étrange. Ils sont tous en vietnamiens sans sous-titres, et inutile de préciser que je ne maîtrise absolument pas ce langage.
Qui plus est, la bande son saute à plusieurs reprises sur plusieurs films. Et pourtant, ce sont parmi les films les plus universelles que j'ai pu voir. J'ai toujours eu l'impression de tout comprendre, voir même avoir le senti d'avoir déjà vu le film par le passée. Je n'en connais ni les titres ou les réalisateurs, mais j'ai eu l'impression d'une sorte de "redécouverte". Comme si je retrouvais ce que le cinéma me faisait ressentir quand j'étais gamin. Même si ce ne sont parfois que des films de commande pour la propagande, tourné avec de la pellicule soviétique, on a vraiment l'impression que les acteurs savent qu'ils sont également des "acteurs actifs" de l'Histoire qui s'écrit en même temps que le film. Un a d'ailleurs été tourné lors de véritables bombardements de l'opération "Rolling Thunder". C'était d'ailleurs un des désirs du Godard maoïste, tourner au Vietnam pendant de vrais combats.
Evidemment, la compréhension instinctive de ce genre de films était recherché par la propagande qui les faisaient diffuser dans les villages isolés, les projetants sur une vulgaire toile de tente qui devenait alors lucarne sur l'Histoire en train de s'écrire sur celluloide.
Ces films sont également grandement instructifs. On y apprend à installer des pièges, recycler des bombes non-explosées, s'organiser, s'armer etc...
Fait marquant, il n'y a d'ailleurs jamais de portraits d'Ho Chi Minh, de Giap. Cela se passe généralement toujours dans des villages dont la population est déplacée et parquée par les troupes sud-vietnamiennes, montrées comme encore pires et plus démoniaques que les forces américaines. Quand ils sont présents à l'écran, les américains (joués très probablement par des soviétiques, qui fournissaient aussi la pellicule et le matos, car plus proches physiquement de l'Oural que de la Californie), ils agissent toujours dans l'ombre.
Autres plans très frappants, dans une production de 1966. Après une opération "Search & Destroy", un soldat vietnamien qui assiste les américains tue un vieillard blessé quasiment de la même manière que la "célèbre" scène d'exécution filmée lors de l'offensive du Tet deux ans plus tard. C'est très troublant.
Pour l'anecdote, un ami qui aimait bien Woody Allen m'avait dit qu'il l'avait renié après avoir découvert qu'il avait un photogramme de cette exécution encadré comme un élément "décoratif" chez lui.
Autre détail : alors que chez Kubrick les soldats notent "Born To Kill" sur leur casques, les vietnamiennes inscrivent "Free" sur leurs chapeaux.
Les femmes dans ces films sont d'ailleurs toutes des saintes. Elles subissent les pires tortures, brimades, viols, mais sont toujours héroïques. C'est d'ailleurs tout le temps grâce à elle que la population des villages se révolte contre l'armée.
Techniquement, c'est parfois d'une audace assez poussée dans les cadrages et mises en scène. Ce sont généralement des films avec beaucoup de mouvement. Les vietnamiens sont souvent montrés allant de l'avant, dans des travellings parfois très élaborés. Pour les américains et sud-vietnamiens "traites", c'est au contraire des plans figés, fixes. Parfois décadrés "à la Hitchcock".
Cela rejoint encore ce que disait Godard, à propos des plans des vietnamiens en pleurs dans le documentaire de Santiago Alvares. Ils filment toujours les vietnamiens ensemble, en groupe, jamais en plans séparés. "Le spectateur peut choisir", pour reprendre ses mots.
Quand il y a champs/contre-champs, en général les deux personnages finissent par ne plus s'entendre, se séparer. Ou alors un des deux devient un traître. C'est toujours l'unité qui fait la force à l'écran.
La nourriture est aussi un symbole fort, car c'est toujours par elle que les personnages arrivent à résister. Ils cachent des messages dans des bouts de pains, dissimulent des munitions dans des bols, cachent des choses dans des sacs de riz. Dans une scène, une prisonnière veut jeter la gamelle que lui tend un de ses gardiens. A ce moment, une co-détenue l'en empêche. Elle utilisera un des services pour écrire des slogans sur les murs, ce qui déclenchera une émeute.
Les enfants sont également très présent. Dans ce même film de prison, c'est un enfant qui redonne de l'espoir aux prisonnières. Conscient de cela, le directeur prétextera devoir le faire vacciner par le docteur de la tôle afin de le tuer. Là aussi, cela fait écho à la scène de "Apocalypse Now" quand Kurtz raconte l'anecdote sur les vaccinations par les américains dans les villages. Après leurs départs, les vietcongs firent éruption dans le village afin de couper tous les bras des enfants vaccinés où la piqure fut faite.

Il y a encore beaucoup de choses à dire là dessus. Je le ferais surement plus tard, quand cela sera moins "à chaud".
Dr. Apfelgluck
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Message par Borges Sam 8 Mar 2014 - 18:40

Dr. Apfelgluck a écrit:Il y a encore beaucoup de choses à dire là dessus. Je le ferais surement plus tard, quand cela sera moins "à chaud".

Hi;
On attend
Wink


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Message par Dr. Apfelgluck Dim 9 Mar 2014 - 12:06

Les films les moins intéressants de cette collection sont ceux où l'action se situe pendant la guerre d'Indochine. Ils n'ont pas la force de ceux qui capturent l'Histoire "en direct". Cela pourrait être une sorte d'illustration de "Pourquoi recréer, alors que tout est déjà là ?".  Par dérive, cela me fais penser aux images que nous avons de la bataille de Dien Bien Phu. On les voit dans quasiment tous les documentaires. Il s'agit en fait d'images tournées par des opérateurs soviétiques après la bataille. Les vietnamiens y rejouent les assauts et les prisonniers français sont obligés de revivre leur défaite.
Après la guerre d'Indochine, l'industrie du cinéma vietnamien s'est d'ailleurs violemment fragmentée en deux courants. Au sud, les studios de Saïgon réalisaient des films imitant les productions hongkongaises et produisaient en général des films d'exploitation. Au nord, les productions de Hanoï quand à elles ne juraient que par le style "documentaire" et le cinéma-vérité. Hanoï fut d'ailleurs la première ville du pays à créer une école de cinéma, en 1959.
En 66, Godard voulait à la base tourner "La Chinoise" avec une caméra vidéo. Dans mon stock, je suis tombé sur plusieurs films de Hanoï tournés en vidéo datant de 72-75. L'un de ceux là est une histoire d'amour, apparement entre un nord et une sud-vietnamienne, tourné en plein pendant la chute de Saïgon en avril 1975. Le pays a été réunifié à l'écran et hors des salles.
A noter que c'est la fin de la guerre qui fera basculer les studios de Hanoï dans le réalisme socialiste, qui n'était pas en "application" pendant la guerre.

Dans son segment dans "Loin du Vietnam", Godard dit que pour illustrer la guerre il voulait montrer un corps de femme ravagé par une bombe à billes. Mais il conclut que finalement, c'est impossible de vraiment parler du Vietnam quand on ne reçoit pas de bombes réellement sur la tête, comme dans les productions de Hanoï.
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Message par Invité Sam 15 Mar 2014 - 15:30

hello doc,
j'avoue que cette irruption du cinéma vietnamien dans la conscience d'un monde de cinéma heureusement parcellaire mais dont je croyais à tort cerner les horizons _ du moins ... majoritaires semble t il, m'a pas mal intrigué.
Pour me convaincre de la nécessité d'accompagner le fil de cette histoire peu connue, peu étudiée _ petite france, que tu as dénouée avec la précision d'un archiviste babylonien Smile je me suis mis à l’œuvre, celle en particulier de Pham ky Nam;
cinéaste vietnamien qui a réalisé en 63, pour le studio de Hanoï, un film qui se situe dans le contexte de l'Indochine: Chi Tu Hâu Bai Sau (La jeune femme de Bai Sao).
Un officier français à la tête d'un contingent de l'armée nationale vietnamienne bombarde un village côtier de pêcheurs; Les villageois s'enfuient mais l'officier prend une des femmes au piège et la photographie avant de la violer. Il est représenté comme un amateur d'art et un sadique.
L'usage de la photographie en vue d'humilier et de détruire: cela semble avoir été une composante du "génie" de l'armée coloniale française:
http://nguyentl.free.fr/html/photo_resistance_fr.htm
Pham ky Nam est très inspiré par le cinéma russe: cette idée du cadre en mouvement qui symbolise le mouvement de l'histoire jamais fixe, toujours à bâtir? le film a gagné un prix a Moscou. Les mouvements d'appareil sont beaux; on pense à la caméra émotionnelle d'Ouroussevski.
Et puis les liens à l'écriture entre les vagues des images, au début, et l'idée du temps qui efface les marques sur le sable tout en en esquissant de nouvelles; les blessures sont recouvertes d'autres plaies;
et le film accompagne le récit de cette jeune femme, récit qui est entrelacé comme les mailles du tricot qu'elle confectionne à un moment, nouer les affres d'une existence impossible et la lutte nécessaire, émancipatrice.
Son enfant est kidnappée, affamée: on retrouve la symbolique relevée par le doc, le pain et l'enfance.
L'héroïsme des femmes qui portent l'avenir en leur sein, la puissance "hypnopompique" de l'avenir.
Ce n'est pas encore le cinéma-vérité dont parle le doc mais il y a un affrontement entre deux conceptions de l'art: l'une qui réduit l'être à l'état d'image, on le dépossède, et l'autre qui accompagne le mouvement de libération.

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Message par Dr. Apfelgluck Dim 11 Mai 2014 - 8:36

J'ai continué mon cycle "cinéma nord-vietnamien en temps de guerre" avec "Em bé Hà Nôi" (la fille de Hanoï en français, je crois du moins) de Hai Ninh.
Vu également de façon "brute", sans sous-titres et en qualité pas terrible terrible comme les autres. Ce film semble avoir une solide réputation au Vietnam, vu qu'il est souvent cité comme un des chefs-d’œuvre du cinéma local. Il semble être très populaire et rediffusé régulièrement. Il a également été primé à Moscou en 1975 ainsi qu'au troisième festival du film vietnamien à Haiphong. Car oui, même si la guerre fait rage le ministère de la culture du nord-vietnam a créé, en août 1970, ce festival qui se cramponna à exister pendant tout le reste de la durée du conflit. Historiquement tenu à Hanoï, il fut déplacé exceptionnellement en 1975 à Haiphong à cause des bombardements. Pour le nord-vietniam, il était vital de garder le cinéma et la production locale en activité. Il fallait toujours plus de films.

Pour en revenir au film, c'est un des rares qui fut tourné plusieurs années après les actions se déroulant à l'écran. En effet, tourné entre la fin 1974 et 1975, il montre les bombardements de l'opération aérienne "Linebacker II" (ou "Christmas Bombing Raids") s'étant tenu du 18 au 29 décembre 1972. Cette série de bombardements massifs sur Hanoï et ses environs fut la réponse de Nixon au nord-vietnam qui avait quitté la table des négociations et refusait dès à présent tout dialogue avec les USA et le sud Vietnam. Ces raids de plus de cent B-52 furent parmi les plus meurtriers de la guerre, tuant des milliers de civils en 12 jours.
Sortit alors que la débandade et le retrait des troupes US se pointait à l'horizon, "Em bé Hà Nôi" est en quelque sorte le pied de nez final du Vietnam nord à Nixon.
Film d'enfants dans des ruines, j'ai lu qu'il a été plusieurs fois décrit comme étant le "Allemagne année zéro du Vietnam". Référence totalement à côté de la plaque, à mon avis, car dans la "fille de Hanoï" les enfants sont les ultimes survivants et la fin promet la future réunification des deux Vietnam. Évidemment, les parents morts sont tous héroïques : le père soldat impatient d'en découdre et la mère, infirmière, meurt en sauvant les enfants d'un hôpital en flammes. Comme dans beaucoup d'autres films de la période, les enfants vietnamiens sont sacrés. C'est la nouvelle génération à sauver à tout prix, celle qui va enfin voir la paix.
Le film est une succession de flashbacks, souvenirs de la vie de famille de la petite fille avant les bombardements. Après ces derniers et la perte de ses parents, elle ère entre les colonnes de civils en exode, allant à contre-sens de ces derniers. Elle veut retourner à Hanoï voir les restes de sa maison et espérer assister à une sorte de résurrection de ses parents. Un soldat de l'armée du nord-vietnam, responsable d'une batterie de missile anti-aérien, la prendra sous son aile et voyagera avec elle. C'est lui qui sera finalement, à défaut de ses parents, sa véritable protection, bouclier contre les dangers du ciel. Le ciel est d'ailleurs le premier plan du film. La petite fille ne se séparera jamais de son violon, c'est son arme de résistance et la dernière pièce physique de l'appartement ayant survécu aux bombardements. Elle a même le don de faire taire les pleurs des bébés en leur jouant une comptine dédiée à l'oncle Ho (véridique). Lors de son périple sur la longe ligne routière, cordon ombilicale entre elle et Hanoï, elle est d'ailleurs habillée de noir tel les guérillas vietcongs.

Esthétiquement, le film est dans les canons des productions de Hanoï d'alors. C'est filmé à la sauvette, dans la rue, caméra à l'épaule. Il y a une séquence assez saisissante où la fille voit passer une colonne d'aviateurs américains fait prisonniers. C'est très intense et ils sont montrés comme étant, eux aussi, des victimes de la guerre. Motif récurrent dans ces productions.
Le mouvement perpétuel est toujours présent, il est rare de ne pas avoir de séquence contenant au minimum un traveling. Certains plans sont régulièrement filmés à hauteur d'enfant.
L'architecture est un des sujets récurrents du film. La mère de la petite fille, d'après ce que j'ai compris, était architecte avant la guerre et dessinait des plans de futures quartiers d'habitations à bâtir. A la fin du film, après la présence incessante de débris à l'écran, la petite fille retrouve sa sœur au milieu de ce quartier d'habitation flambant neuf, immaculé. C'est évidemment un rêve, la séquence étant montée de façon très onirique. La vision d'un Vietnam réunifié et reconstruit. Ce rêve venant après une séquence de bataille où le militaire protecteur de la petite réussit à dégommer plusieurs B-52 grâce à ses tirs de batterie DCA.

Sur certains points, le film m'a fait un peu penser à "Subarashiki nichiyobi" de Kurosawa où la musique classique est également source de résistance dans un Tokyo d'après-guerre en ruine. Surtout cette scène magnifique de l’amphithéâtre.


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Message par adeline Dim 11 Mai 2014 - 9:01

Dr., c'est passionnant ! Où trouves-tu les films ? Sur le net, dans des bibliothèques, dans un fonds secret d'archives ?
J'imagine que tu as vu "17e parallèle" de Marceline Loridan-Ivens et Joris Ivens ? Comme tu parlais de Godard et du fait d'être réellement sous les bombes…

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Message par Dr. Apfelgluck Dim 11 Mai 2014 - 9:25

adeline a écrit:Dr., c'est passionnant ! Où trouves-tu les films ? Sur le net, dans des bibliothèques, dans un fonds secret d'archives ?
J'imagine que tu as vu "17e parallèle" de Marceline Loridan-Ivens et Joris Ivens ? Comme tu parlais de Godard et du fait d'être réellement sous les bombes…

Une petite partie est trouvable sur le net (quelques-uns sur Youtube, mais ca reste assez marginal). Comme je l'avais précisé, j'ai eu un DVD avec plusieurs films en Divx dessus (en qualité aléatoire). A ma connaissance, mais je peux me tromper, il n'y a rien de traduit en français. Ces films sortaient très rarement du nord-vietnam et n'étaient pas à la base destinée à l'exportation. Certains ont été exploités en URSS et en Hongrie, mais là encore cela reste souvent des exceptions. Etant de formation bibliothécaire et archiviste, il est vrai que parfois j'ai un peu plus de "facilité" et d'adresses pour trouver ce que je veux, on va dire.
J'ai quelques souvenirs du film des Ivens, mais un peu fugaces. C'est un des rares occidentaux (exceptés les soviétiques, évidemment) a avoir filmé la guerre depuis le point de vue du Nord-Vietnam. Quand Schoendorffer y va, c'est pour filmer des américains. Bon il faut dire aussi que Hanoï, comme le mentionnait Godard, distribuait les autorisations au compte-goutte et nombres de personnes se virent refuser l'autorisation de venir filmer au nord-vietnam. Ils avaient dit à Godard que son projet de film "ne desservirait pas le Vietnam" et qu'ils étaient de ce fait opposé à sa venu.
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Message par sokol Ven 23 Mai 2014 - 14:21

un des plus beaux papier (le plus beau ??) que j'ai lu, concernant le cinéma !

MILLE MERCI !

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Message par Dr. Apfelgluck Jeu 29 Mai 2014 - 8:27

"Canh dong hoang" de Hong Sen Nguyen.

Pendant la guerre du Vietnam, un couple et son enfant vivent au milieu d'un fleuve dans la "zone interdite" entre le Nord et le Sud Vietnam. Ils partagent une partie de leur récolte avec un groupe de vietcongs cachés dans le secteur et qui sont poursuivit par les hélicoptères de l'armée américaine.

Sortit en avril 1979, un mois après la fin du premier conflit sino-vietnamien et tourné pendant ce dernier, ce film est un peu la "réponse filmée" du Vietnam à la toute puissante Chine qui s'est retirée humiliée après 3 semaines de combat. Il a d'ailleurs été récompensé au festival de Moscou, dont on connait la situation conflictuelle avec la Chine d'alors. Le parallèle avec la guerre du Vietnam est vite choisie, les américains remplaçant les chinois. Ce qui éclairerait sur le fait que, dans le film, les troupes US sont interprétés par des acteurs asiatiques et que les caractéristiques physiques de ces derniers sont à peine gommés à l'écran. C'est une sorte de mutation, les agresseurs américains couplés aux agresseurs chinois qui veulent fouler la terre vietnamienne. Cette dernière est présentée comme étant une sorte d'Eden, Adam et Eve devenant le couple résistant qui vit en parfaite harmonie avec la nature.
Comme dans "Em bé Hà Nôi", le danger provient toujours du ciel et reste dans le ciel. Les soldats US qui arrive à poser pied à terre sont déjà morts avant d'y parvenir. Quand au seul hélicoptère qui pourra se poser, il est en feu. Tout est mis en oeuvre pour que l'ennemi ne souille pas l'Eden. Mais tout ce qui tombe du ciel peut être recyclé. Ainsi, le parachute d'une fusée éclairante est utilisée afin de confectionner des habits pour l'enfant du couple. Le matériel du "Mal" est détourné de ses fonctions principales, ultime pied de nez du film.
Cependant, c'est la premières fois dans ces films que je vois un couple central qui parfois bat de l'aile. Ils résistent évidemment ensemble, mais la mécanique et la communication semble parfois un peu bancale.
Dans la première partie du film, la femme est passive (ce qui est rare dans ce type de production) et c'est l'homme qui s'occupe de ramener la nourriture, de cuisiner, de surveiller l'enfant. Elle est également présentée comme une mauvaise mère. A un moment, l'enfant perd une tasse, avec laquelle il s'amusait, dans la rivière et tombe dedans à son tour en essayant de la reprendre. La mère, distraite, ne s'est rendu compte de rien. Ce sera le père qui sauvera l'enfant des eaux avant de gifler assez durement la femme. Les choses ne seront plus jamais pareilles après cet incident, les enfants étant sacralisés comme dans les autres film de Hanoï. C'est la génération qui verra la paix. Dans ces films les adultes ont le droit de mourir, pas les enfants.
Un peu plus tard, comme pour se faire pardonner, c'est la mère qui part récolter de la nourriture pendant que le père est au foyer avec l'enfant.
Surgit alors un hélicoptère US qui se met à poursuivre la femme avant d'ouvrir le feu. Lorsque le père entend les coups de feu, il hésite. Faut-il aller sauver sa femme ou rester avec l'enfant afin de le protéger ? Il choisira finalement la dernière solution, allant se cacher avec le petit. Quand la mère revient sauve, elle sait qu'elle a encore fauté. Aller récolter de jour est dangereux, l'homme lui ne part que la nuit.
Le foyer est également des plus instable. En effet, ils doivent constamment changer de place à cause des attaques des hélicoptères. Le couple n'a jamais de lieu sure où aller se réfugier. Le vrai foyer stable sera enfin trouvé à la fin du film : une communauté de combattants vietcongs ! Le femme rentra également dans "le droit chemin", elle va rejeter finalement la passivité pour rejoindre la guérilla et se battre. Ce n'est que là qu'elle deviendra une bonne mère, en "faisant son devoir". Elle devient alors la femme qu'elle a jalousée, une combattante vietcong qui ne laissait pas de marbre son mari. Plus de maison maintenant, mais un abri et des tunnels.
On assiste parfois à quelques séquences "de l'autre côté", chez les américains (chose qui se passe quasiment jamais dans les films unilatéraux occidentaux sur le sujet). Sur la base des hélicos, on s'ennuie ferme. Les pilotes tuent le temps en organisant des fêtes et en écoutant du rock'n'roll (une version vietnamienne de la reprise de "Black Magic Woman" par Santana). Alors que pour la guérilla, au sol, le Vietnam est la terre sacrée de laquelle ils tirent tout, pour les pilotes ce n'est juste qu'une vague carte accrochée au mur. On monde strié et une succession de points. A la fin du film, un des pilotes reçoit un courrier de sa femme. Ce dernier contient une photo d'elle avec son enfant, elle vient d'accoucher. Le pilote est heureux mais se saoule finalement d'ennui, le lendemain il repart en mission. Il finira tué par le mère vietnamienne, après avoir lancé une roquette qui sera fatale pour le père. Un des derniers plans du film montre la photo du pilote en train de brûler dans les flammes de l'hélicoptère abattu. Les deux enfants, le vietnamien et l'américain, sont tous deux orphelins. La fin est presque surréaliste : le mère, tenant l'enfant et le fusil en bandoulière, s'éloigne dans les rizières avec au loin la fumée de l'hélicoptère. Le tout avec des cadrages et une musique hispanisante qui rappelle furieusement la fin d'un western spaghetti ! La femme vengeresse s'en va au loin, comme le cow-boy retournant seul dans le désert. Esthétiquement, le film sort un peu des "canons" des productions d'Hanoï tournée pendant la guerre. Pas beaucoup de long plans-séquences ou de caméra à l'épaule, mais un montage assez vif. Le film semble avoir été tourné sur du matériel soviétique des années 50.
On retrouve également un instrument de musique qui ne quitte jamais le couple tout le long, une guitare. Là encore, comme dans "Em bé Hà Nôi", elle est un outil de résistance. Elle traîne toujours à côté d'un fusil et d'une photo de tonton Ho.


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Message par Maya Mer 18 Juin 2014 - 13:12

merci très interéssée et intéressant ( d'autant plus que je suis allée au vietnam l'an passé) en ce moment un pannel du cinema vietnamien à la cinémathèque de Paris
Sans rapport mais si vous allez au Vietnam passez au musée des souvenirs de la guerre" superbe expo photo très poignante et impressionnante qui dit beaucoup sur la guerre tant du coté des civils que des soldats !!!
beau boulot en tout cas merci à vous !!!!

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Message par Maya Mer 18 Juin 2014 - 13:17

par contre quand on voit comment le Vietnam évolue, pays communiste mais où l'on peut voir fleurir des "KFC" , des "starbucks", une jeunesse (celle qui en a les moyens ) qui se connecte à "Facebook" ,internet, des blockbusters américains à gogo on est frappée par le contraste entre ces films et le Vietnam d'aujourd'hui, Ho Chi Minh du moins et d'autres villes au Vietnam

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Message par Maya Mer 18 Juin 2014 - 13:25

Par contre je n'ai pas vu le film de Godard et j'aimerais bien le voir aussi!

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Message par Dr. Apfelgluck Mar 6 Jan 2015 - 15:57

Phương án ba bông hồng

Deux jeunes filles de Saïgon organisent, avec la complicité d'un enfant vendeur de journaux, "leur résistance" dans la ville alors quadrillée de barrages par les forces sud-vietnamiennes : attentats à la bombes contre des stations Esso, attaques contre des collaborateurs avérés de l'impérialisme américain, exécutions de trafiquant de drogues etc...
Une des deux finira cependant par être capturée et exécutée. Ce qui n'empêchera pas la survivante du duo de continuer les actions, partant à la fin dans une guerre contre le trafique de drogue organisée par l'armée avec une mère ayant perdue sa fille victime d'une overdose d'héroïne.
Encore plus que dans tous les autres films cité précédemment, c'est à nouveau une histoire de femmes et enfants héroïques. Les hommes présents dans le films, excepté le jeune vendeur de journaux, ont tous des rôles à connotations péjoratives : militaires, policier à la solde du régime du sud-vietnam, collabos, trafiquants de drogues, playboys du dimanche, pleutres. Il n'y a que les femmes qui savent encaisser les coups, rebondir, réagir à ce qui se passe autour d'elles, s'organiser et finalement lutter. C'est les seules qui "voient la lumière", comme la mère de la jeune héroïnomane décédée qui passera du stade d'amie du régime à résistante.
La meilleure solution pour les deux filles de passer incognito, c'est de s'occidentaliser. A chaque fois qu'elles partent en action, elles s'habillent à l'occidentale et se parent de lunettes de soleil (symbole récurrent des sympathisants américains dans ce genre de production). Ceux qui en portent ont généralement une vision troublée, se cache de tout le bordel dont ils sont témoins. Il y a d'ailleurs une séquence où une des deux filles se pare d'un t-shirt avec le Surfeur d'argent avant d'aller poser une bombe en chevauchant un scooter à toute allure. Les connaisseurs de l'univers Marvel (dont je ne fais pas parti, mais je pense à Erwan) y verront surement quelque chose. Au contraire, quand elles portent le traditionnel habit noir vietnamien et laissent leurs longs cheveux noirs détachés, elles ont des problèmes aux postent de contrôle. La jeunesse vietnamienne occidentalisée à l'écran est montrée comme immature, brutale, obsédée et sans aucun respect pour les aînés et la jeunesse (deux composantes importante du cinéma de propagande de Hanoï, presque divinisée dans certains films). Un des "méchants" porte autour de son cou une croix catholique et se réfugie dans la bigoterie dès que cela tourne mal. L'opposé de la jeune fille, qui continue malgré la mort de son amie.

Dans le film, la photographie c'est la mort. Les deux jeunes filles ont la hantise de se faire photographier : c'est évidemment finir par avoir son portrait dans les fichiers des renseignements et de la police. La fille capturée, avant de se faire exécuter, se fera photographier sous tous les angles par la presse qu'elle finira par insulter de toutes ses forces avant la salve fatale. Dans son ancienne chambre, son amie résistante enlève ses affaires pour les remplacer par un portrait d'elle. Dans une autre scène, on voit une des jeunes filles piquer une photo d'enfance de l'autre. Cette dernière semble gênée et lui ordonne de lui redonner la photo avant de la cacher. Pareil chez la mère de la jeune droguée, le seul souvenir de sa fille morte c'est une photo d'elle qui trône sur sa table de nuit. Les vietnamiens collaborateurs, eux, n'ont dans leurs chambres ou bureaux que des photos pornos occidentales. Quand aux journaux de la propagande sud-vietnamienne, que vend le jeune enfant, ils servent aux deux filles à cacher leurs bombes.
Le film se termine d'ailleurs d'une manière ambigüe. Alors que c'est un film en perpétuel mouvement, comme une bonne partie des films dont j'ai parlé plus haut, le dernier plan du film est un photogramme figée de la jeune fille et la mère, sa nouvelle compagne de luttes, sur un scooter. Cela annonce t-il que la mort violente, à laquelle elles n'ont cessées d'échapper, va finalement les rattraper ? On entend d'ailleurs au loin le bruit des bottes des militaires partis à leur recherche après l’exécution du dealer.
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Message par Maya Lun 12 Jan 2015 - 15:43

Bonjour Désolée je suis un peu hors sujet mais quand j'étais au musée des souvenirs de la guerre au Vietnam, Ho Chi Minh, j'étais surprise par une scène.je voyais 2 touristes occidentaux , se faire prendre en photo, posant à coté d'un avion de chasse qui était en exposition
j' ai trouvé cette scène insolite, anachronique, le temps qui passe la guerre est un lointain souvenir pour la majeur partie des gens , des personnes qui avaient du mal à s 'imaginer ce que ces avions semaient la mort. c 'est difficile de se mettre à la place des autres et quand on a vécu ça c'est impossible d'être à notre place. je ne sais pas pourquoi je raconte ça mais j'avais juste besoin de partager ce moment
vu de prés ce n'est pas la même chose que de le vivre, de prés ou de le vivre tout simplement.

Maya

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Message par Dr. Apfelgluck Mer 14 Jan 2015 - 11:13

Bonjour Maya,

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Message par Maya Jeu 15 Jan 2015 - 13:33

Merci pour les photos!

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Message par Maya Jeu 15 Jan 2015 - 13:56

Je ne sais pas si on peut accéder aux photos mais j'ai ajouté un lien "Le musée des souvenirs de la guerre".

https://www.facebook.com/maya.feugere/media_set?set=a.10151552181506766.1073741832.543341765&type=3


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Message par Maya Jeu 15 Jan 2015 - 14:03

Hier à la bibliothèque je suis tombée sur un livre de photos

http://blogs.mediapart.fr/blog/michel-puech/010914/la-guerre-du-vietnam-vue-par-ceux-du-nord

j'ai aussi en tête le nom d'un autre photographe David Griffith Jones


Maya

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Message par Maya Jeu 15 Jan 2015 - 14:09

En complément des critiques et articles en ligne, des photos de Griffith jones , attention âmes sensibles !

http://www.magnumphotos.com/C.aspx?VP3=SearchResult&ALID=2K7O3RP3N9U#/SearchResult&ALID=2K7O3RP3N9U&VBID=24PVHEL7FHXQ&PN=1


Encore merci ! je ne connassais pas du tout ces films.

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Message par Dr. Apfelgluck Dim 24 Juin 2018 - 19:53

Wiki a écrit:Operation Wandering Soul was a propaganda campaign exercised by U.S. Forces during the Vietnam War.

The operation played off the belief of many Vietnamese in the "wandering soul":

   "It is the Vietnamese belief that the dead must be buried in their homeland, or their soul will wander aimlessly in pain and suffering. Vietnamese feel that if a person is improperly buried, then their soul wanders constantly. They can sometimes be contacted on the anniversary of their death and near where they died. Vietnamese honor these dead souls on a holiday when they return to the site where they died."[1]

U.S. engineers spent weeks recording eerie sounds and altered voices – which pretended to be killed Viet Cong – for use in the operation, with the intended purpose of instilling a sense of turmoil within the enemy, the desired result being for the soldier to flee his position. Helicopters were sometimes employed to broadcast recordings,[2] in which the voices called on their "descendants" in the Viet Cong to defect and cease fighting.

The extent of the operation's success is unknown. The Viet Cong usually encountered return fire if they reacted to the recordings, thus nullifying the intended outcome of the operation.

A partir de 3:50


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