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Babylon - ismaël, Youssef Chebbi et Ala Eddine Slim (Tunisie - 2012)

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Message par adeline Jeu 12 Juil 2012 - 20:20

Grand prix de la compétition internationale du FID 2012.

Babylon - ismaël, Youssef Chebbi et Ala Eddine Slim (Tunisie - 2012) 3747287_300


Un extrait sur Vimeo :

https://vimeo.com/44331700

C'est très très fort.

adeline

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Message par adeline Ven 13 Juil 2012 - 18:48

Je n'ai pour l'instant vu aucun autre film de la compétition du FID cette année. J'en vois d'ailleurs très peu d'ordinaire, puisque, pour te répondre, slimfast, ce sont des films de festivals, rares sont ceux qui sortent en salle, et ils sont assez difficiles à voir pour la plupart. Je ne peux donc pas dire si c'était le meilleur film du festival, s'il mérite son prix, ou je ne sais trop quoi.
J'ai même eu du mal à le regarder. Il dure deux heures, et au bout d'une heure un grand moment de creux, de vide, d'attente et de rien se fait sentir. J'ai dû le reprendre le lendemain pour l'achever.

Mais ça n'en amoindrit pas sa force.

Tout commence dans le vent et le désert. Il y a des dunes, du sable, la végétation d'un climat aride, un scarabée et des fourmis. De terre semblent sortir les gigantesques engins de chantier qui viennent envahir ce paysage. On comprend vite qu'un camp de transit, ou de réfugiés, est en train d'être installé. Les choses se mettent alors rapidement en place. Des dizaines, des centaines, puis des milliers sans doute d'hommes arrivent, en voiture, en bus, en camionnettes ou à pied, de nuit comme de jour. Des tentes sont plantées. Il y a des organisations humanitaires, le croissant rouge, médecin du monde, le haut commissariat aux réfugiés. C'est brut.

Un carton en ouverture du film précisait le choix délibéré de ne pas sous-titrer le film. On ne comprend donc que ce qu'on comprend. Mais comme les gens parlent des dizaines de langues, ou plus, ou moins peut-être, on prend rapidement le pli.
C'est un choix très juste.

Le camp est monté, et la vie passe. Difficilement. Il n'y a guère à manger, les files d'attentes sont immenses, les animations assez penaudes, et surtout, le vent ne cesse jamais semble-t-il. Au cœur du film on sent le grand vide laissé en partage à tous ces hommes par une attente dont personne ne sait dire si et quand elle prendra fin, et à laquelle même les prières n'apportent pas de réponse.

Dans cette construction et cette installation du camp, la caméra est là comme les gens sont là. Surprise sans étonnement, à l'affut de ce qui se passe, mais sans être vraiment sûre de sa présence au monde dans ce lieu sans attache, transitoire, soumis au vent et à la pluie. Elle est partie prenante au même niveau que les réfugiés. Dans la durée, sans être jamais sûre de cette durée. Elle filme ce qui est : les partages de l'espace (journalistes, associations humanitaires, réfugiés, chacun de part et d'autre d'une barrière invisible et très présente), la solidarité, la débrouille. Il n'y a aucun mot pour dire autrement ce qui est, ou autre chose que ce qui est. On pense à Wiseman sans que ça soit juste : il n'y pas là la volonté de trouver les structures qui organisent ce qui n'est pas une institution, le regard distancié ne scrute pas pour dégager des logiques et les comprendre. On ne saura pas qui décide, qui organise, qui agit ceux qui sont agits. Il semble au contraire que tous soient agits de la même manière par quelque chose qui les dépasse, le vent peut-être, qui ne rend pas fou mais presque.

Au centre du film, lorsque l'attente se fait trop lourde, il y a la colère. Une séquence d'une folle intensité, où les hommes crient et hurlent une chose que je n'ai pas comprise, mais dans laquelle j'ai entendu le mot mort. Contre les gens des ONG, contre la caméra qui reste chaque instant au milieu d'eux, contre le vent.

Puis aussi brusquement que la colère était montée, le calme revient, et c'est le départ. En voiture, en bus, en camionnette, ils rejoignent un bateau militaire, qui les emmène de l'autre côté de la mer.

Dans le désert, les engins de chantiers reviennent. Il n'y a plus de tentes, les bennes sont emplies d'ordures qu'il faut étaler sur le sable, et le vent seul reste de cette Babylon éphémère.

Babylon évidemment pour Babel, et les langues, toutes les langues. Mais si dans ce film tellement de langues sont parlées qu'on ne sait plus les distinguer les unes des autres, pour autant jamais la compréhension ne fait défaut. On ne comprend aucune langue, ou seulement l'une ou l'autre, mais l'on comprend bien tout. Alors, la commune humanité au-delà des différences de langue ?
C'est que derrière ce film, qui ne nous dit rien du contexte, de la situation, de l'événement, il y a la guerre en Libye, et l'accueil en Tunisie de réfugiés de Libye, travailleurs venus du monde entier, par un pays à peine sorti et pas encore remis d'une révolution. Là où il n'y a rien, ils accueillent. Mal, pour pas longtemps, sans trop savoir, à l'égal de la caméra qui ne sait pas trop ce qu'elle doit filmer, mais qui filme quand même. C'est un accueil réduit à son schéma : le (pauvre) gîte, le couvert, de quoi se laver, et, peut-être, une solution pour le futur.

J'en ai vu beaucoup des films qui se donnaient pour mission la noble tâche de rendre visible les réfugiés, les sans-papiers, les exclus. De leur donner la parole. De leur rendre un visage. Comme si ces gens, en dehors de l'espace médiatique, de l'espace d'une certaine forme de société, n'existaient pas aussi fortement que celui qui filme. Comme s'il fallait construire les visages, alors qu'ils sont, simplement, et que la caméra en les filmant ne peut rien leur rendre, rien leur donner qu'ils n'aient déjà. Ce qu'elle peut, c'est filmer. C'est déjà ça, et c'est peut-être déjà tout. Filmer du début à la fin de l'aventure, à hauteur de ceux qui la vivent, à leur épaule, à leur rythme.

adeline

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Message par Invité Sam 14 Juil 2012 - 9:56

___


Dernière édition par breaker le Sam 28 Juil 2012 - 15:47, édité 1 fois

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Message par adeline Sam 14 Juil 2012 - 11:22

Ah, merci Breaker, je n'avais pas vu leur site.

Même si je pense que l'extrait ne dit pas le film, où il y a sans doute des choses à critiquer aussi, ta critique me semble trop rapide.

C'est dans cette partie que j'ai décroché, celle des "animations", dont le ton, la manière mettent mal à l'aise. Pas le ton et la manière du film, le ton et la manière de la scène en elle-même, où le camp de réfugiés singe le camp de vacances, comme si les animations, le divertissement pouvaient avoir lieu, comme s'il était possible d'ouvrir la soupape pour ces gens qui exploseront quelques instants après, car leur situation est explosive.
Il faut lier les films publicitaires et cette séquence sur le fond : non pas pour dire que le film se comporte à l'égard des réfugiés et du camps comme à l'égard du camps de vacances, mais pour dire qu'il n'est pas possible de filmer ce moment-là sans rendre l'immense malaise qui en découle par sa similitude même avec les camps de vacance.
C'est une scène dans un tout, où le montage est fondamental, et la scène n'existe qu'en regard du reste du film.

Pour le vent, il est omniprésent, dans le son, dans l'image. Mais ça n'est pas un film sur le vent, même si sans la présence du vent il perdrait énormément. Je n'ai pas vu le film d'Ivens, mais je ne pense en effet pas que ça ait grand-chose à voir avec lui.

Pour le "sans étonnement", je voulais essayer de rendre une idée de la fatalité présente dans le film hors de la séquence de colère. Ce n'est pas un jugement de valeur, c'est une remarque sur le mode d'être au monde de l'ensemble des gens du film, mais je me trompe peut-être. Ils semblent "agis" par des forces qu'on n'arrive pas à définir. Mais peut-être qu'un film ne doit pas se contenter de rendre ce sentiment, peut-être qu'il aurait dû le dépasser, et s'étonner, lui, de la situation. C'est toujours la question, le cinéma doit-il rendre visibles, faire apparaître, rendre sensibles des choses, ou bien aller au-delà, les critiquer en même temps, les dépasser, les juger, leur ouvrir des portes, des échappées ? En ce sens, tu aurais bien raison de critiquer le film.

adeline

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Message par Invité Sam 14 Juil 2012 - 11:40

adeline a écrit:Ah, merci Breaker, je n'avais pas vu leur site.

Même si je pense que l'extrait ne dit pas le film, où il y a sans doute des choses à critiquer aussi, ta critique me semble trop rapide.

C'est dans cette partie que j'ai décroché, celle des "animations", dont le ton, la manière mettent mal à l'aise. Pas le ton et la manière du film, le ton et la manière de la scène en elle-même, où le camp de réfugiés singe le camp de vacances, comme si les animations, le divertissement pouvaient avoir lieu, comme s'il était possible d'ouvrir la soupape pour ces gens qui exploseront quelques instants après, car leur situation est explosive.

Bonjour, merci pour l'article, pas vu le film, mais c'est intéressant d'avoir un point de vue sur cet évènement (un pays en crise, en décrochage économique et divisé qui arrive à assumer l'accueil massif de réfugiés, alors qu'ici en Europe...).

Personnellement, les animations ne me choquent pas dans leur principe.
S'il n'y avait pas ces animations, la vie des réfugiés risqueraient fort de n'être plus que la représentation permanente de leur précarité et de leur inquiétude politique, et c'est cela que l'on trouverait alors satisfaisant.
Il y a un beau court métrage de Marcel Hanoun, "des Hommes qui ont perdu racine", déjà ancien, mais qui pose aussi le problèmes des animations dans un camp de réfugiés (en Autriche, après la répression de l'insurrection de Budapest), C'est un autre contexte mais on voit que certaines activités (des ateliers de broderies, des cours de langues) sont vraiment infantilisantes, vident l'évènement de sa signification politique. Les réfugiés en sont réduits à se comporter comme des écoliers ignorants, et perçus comme un problème: un vide inemployé qu'il faut combler, mais de la manière la plus économlque et la plus rentable possible. Mais en même temps les animations permettent de garder un lien dans le groupe, au niveau de la communauté premièrement, mais sans doute de manière plus décisive à un second niveau familial. Je pense que le film de Hanoun représente deux choses à la fois qu'il ne faut pas opposer: l'idée que l'on pourrait, en modifiant ces activités et cette organisation sociale, trouver un meilleur rapport à l'homme (plus humaniste, plus mature, plus intellectuel), mais aussi la nécessité de cet accueil, et de construire une organisation sociale, un ordre, autour de cette notion d'accueil. Peut-être qu'il y a quelque chose du même ordre dans Babylon.

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