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La vie d'Adèle

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La vie d'Adèle - Page 4 Empty Re: La vie d'Adèle

Message par Borges Sam 19 Oct 2013 - 12:13

Aurais-je assez de patience, de délicatesse, pour répondre à mon ami Balournatique, en chuchotant comme dans les films de Grémillon, où les flics et les assassins sont des amis (à en croire Delorme) ?

Plus tard, sans doute...

Avant cela, je lui conseille de regarder, sans voile, la scène de rupture dans "Gueule d'amer", où Gabin devenu bête humaine, incapable de résister à ses pulsions, étrangle la salope de bourgeoise, et celle du film de AK, qui se joue au moins en deux temps...

Delorme devrait aussi faire cet exercice (école maternelle de la critique), il verra si tient encore son idée du réalisme des sentiments qui dépasse les oppositions de classe...

Faut voir les films, sans les purifier de tout ce qui ne concorde pas avec quelques clichés idéologiques... Quel progressisme, tout de même de la part de nos Cahiers : ils mettent de côté le communisme de Grémillon, et insistent sur son intérêt pour les sciences occultes : esprit es-tu là ?


Delorme, qu'il a pas du voir beaucoup de films de Grémillon, c'est une évidence, même pas un, en fait, si on s'en tient  au degré de généralité hagiographique de son texte, mais y a des moments d'audace, dans l'écriture, et dans la réflexion, dans la morale, et de jolies inventions : chez Grémillon les hommes ne tiennent pas "KO debout", mais "chaos debout", par exemple... Grémillon invente des rapports entre les gens encore jamais vus, des pères et des fils qui sont aussi collègues de travail ; c'est rien, on dira on a déjà vu ça... Mais que dire de ce passage parfaitement hallucinant : "Dans "La Petite Lise", le père revient du bagne et retrouve sa fille comme on retrouve une amante. Elle chuchote : "Papa, mon petit papa" tandis que la caméra s'éloigne dans l'escalier pour ne pas déranger ce couple d'amoureux qui ferme la porte sur eux"...

Une relation incestueuse heureuse entre un père et sa fille ? Je sais pas, pas vu ce film, mais si c'est le cas, ça c'est du cinéma, et de l'audace (et dire que Laura Palmer en faisait tout un traumatisme) ;

cette porte qui se referme, la caméra qui s'éloigne pour pas déranger, ça c'est de la délicatesse... On imagine ce que Ak aurait fait...

Question bête, de l'élève de seconde : on dit : "ce couple d'amoureux qui ferme la porte sur eux", ou "ce couple d'amoureux qui ferme la porte sur lui"?


Dernière édition par Borges le Sam 19 Oct 2013 - 12:47, édité 2 fois
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Message par Invité Sam 19 Oct 2013 - 12:19

Bidibule a écrit:

Pour moi, un film qui a vraiment "l'amour" au cœur de sa matière déborde la question du "couple" vers quelque chose de plus "impersonnel" (au sens de: n'en fait pas une histoire de personnes privées, avec tout le psychologisme que ça suppose et toutes ces petites affaires de libido qui m'ennuient considérablement - Brisseau and c°, doux jésus, pitié quoi), et donc traite l'amour comme un "flux" global, dirait Cassavetes, qui embrasse l'existence elle-même.../lol
ben oui embrasser l'existence est un minimum/minimorum cela va de soi.

Kechiche va plus loin il embrasse l'existence de cette belle jeunesse française ... et aussi de ce cette belle jeunesse tunisienne.

tu vas prendre un panard fou.

il aurait pu tout aussi bien appeler son film belle jeunesse, mais c'était pas libre.

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Message par Invité Sam 19 Oct 2013 - 13:50

Borges a écrit:
Aurais-je assez de patience, de délicatesse, pour répondre à mon ami Balournatique, en chuchotant comme dans les films de Grémillon, où les flics et les assassins sont des amis (à en croire Delorme) ?

Plus tard, sans doute...

Avant cela, je lui conseille de regarder, sans voile, la scène de rupture dans "Gueule d'amer", où Gabin devenu bête humaine, incapable de résister à ses pulsions, étrangle la salope de bourgeoise, et celle du film de AK, qui se joue au moins en deux temps...

Delorme devrait aussi faire cet exercice (école maternelle de la critique), il verra si tient encore son idée du réalisme des sentiments qui dépasse les oppositions de classe...

Faut voir les films, sans les purifier de tout ce qui ne concorde pas avec quelques clichés idéologiques... Quel progressisme, tout de même de la part de nos Cahiers : ils mettent de côté le communisme de Grémillon, et insistent sur son intérêt pour les sciences occultes : esprit es-tu là ?


Delorme, qu'il a pas du voir beaucoup de films de Grémillon, c'est une évidence, même pas un, en fait, si on s'en tient  au degré de généralité hagiographique de son texte, mais y a des moments d'audace, dans l'écriture, et dans la réflexion, dans la morale, et de jolies inventions : chez Grémillon les hommes ne tiennent pas "KO debout", mais "chaos debout", par exemple... Grémillon invente des rapports entre les gens encore jamais vus, des pères et des fils qui sont aussi collègues de travail ; c'est rien, on dira on a déjà vu ça... Mais que dire de ce passage parfaitement hallucinant : "Dans "La Petite Lise", le père revient du bagne et retrouve sa fille comme on retrouve une amante. Elle chuchote : "Papa, mon petit papa" tandis que la caméra s'éloigne dans l'escalier pour ne pas déranger ce couple d'amoureux qui ferme la porte sur eux"...

Une relation incestueuse heureuse entre un père et sa fille ? Je sais pas, pas vu ce film, mais si c'est le cas, ça c'est du cinéma, et de l'audace (et dire que Laura Palmer en faisait tout un traumatisme) ;

cette porte qui se referme, la caméra qui s'éloigne pour pas déranger, ça c'est de la délicatesse... On imagine ce que Ak aurait fait...

Question bête, de l'élève de seconde : on dit : "ce couple d'amoureux qui ferme la porte sur eux", ou "ce couple d'amoureux qui ferme la porte sur lui"?
quel rapport avec Adèle, Adeline ?   Wink

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Message par adeline Sam 19 Oct 2013 - 17:23

Hello slimfast, il ne faut pas chercher trop loin Wink:
Stéphane Delorme dans l'édito des cachiers du cinéma a écrit:La logique de ce numéro obéit à un montage entre deux cinéastes français, un montage qui a concentré toutes nos forces  : Abdellatif Kechiche, couronné de sa Palme d’or pour La Vie d’Adèle, et Jean Grémillon, l’éternel maudit du cinéma français.

Ne le cachons pas, le film de Kechiche nous a divisés, peut-être d’abord parce que le film lui-même est divisé. Deux chapitres s’offrent moins comme deux épisodes que comme deux moments d’une démonstration, à la manière de Kubrick, maître des films cassés en deux (Adèle le cite dans le film comme son cinéaste préféré). On suit d’abord pas à pas, mais comme dans une épopée, la vie amoureuse d’Adèle. Cette première heure et demie réserve de très beaux moments  : le coup de foudre au son d’un musicien de rue, une scène d’amour fantasmée qui évoque Black Swan, une longue discussion dans un bar. La scène de sexe de sept minutes vient tout engouffrer comme un trou noir au centre du film. Le chapitre 2 se replie sur le premier comme sa négation. Ce qu’on avait déjà compris, avec les scènes de repas, que les deux personnages «  ne sont pas du même monde  », prend toute la place. On pensait trouver le grand film lyrique que l’on appelle de nos vœux, et Kechiche s’affirmait à rebours comme un cinéaste naturaliste au sens le plus conscient  : le milieu social détermine tout et le milieu «  originaire  » des pulsions passe par l’obsession pour le sexe, la nourriture, les sécrétions.

Pour résoudre cette articulation décidément compliquée en France entre lyrisme et naturalisme, un retour historique peut être une solution, d’autant que Kechiche nous y invite tant son cinéma plonge dans les années 30 (La Graine et le Mulet). Prenons Gueule d’amour (1937)  : l’impossibilité de l’amour par-delà les classes sociales y est clairement définie. C’est le chapitre 2 du film. Mais il y a un chapitre 3, ce que Jean Grémillon appelle le «  réalisme des sentiments  ». Ce réalisme est contrarié chez Kechiche par le retour obstiné de la pulsion, comme la main sur le sexe dans la scène finale de rupture. Chez Grémillon à l’inverse, le sentiment devient le sujet, il ouvre une béance devant les personnages tétanisés, et c’est dans cet inconnu, lorsque le tapis est retiré sous les pieds des personnages, que l’on s’engouffre. Il n’y pas de continent noir (la violence de la pulsion, la violence des classes, et ce sentiment général chez Kechiche de déception) mais un sentiment commun d’appartenance dans l’exaltation ou la souffrance. C’est là que le lyrisme peut naître, lorsque le personnage a largué les amarres, qu’il n’est plus ni homme ni femme, ni amant ni ami, ni esclave ni maître, mais un être seul, ballotté par les vents. C’est ce saut que le cinéma français a du mal à faire, ce saut dans le néant, hors des déterminations sociales. Mais il faut pour cela une attention aiguë aux passions, une générosité infinie pour la faiblesse humaine. Et moins la volonté d’épuiser que d’aller au cœur des choses.

Il n’y a pas d’actualité précise sur Grémillon mais un faisceau d’indices qui depuis trois ans le font revenir toujours plus profondément dans nos esprits. Parution de ses textes remarquables sur le cinéma, éditions chez Gaumont de Daïnah la métisse, Pattes blanches et L’Amour d’une femme, édition en novembre de Lumière d’été. Si nous ne rassemblons pas maintenant ce faisceau en un événement Grémillon, si nous n’en faisons pas notre actualité la plus chaude et la plus urgente, il n’aura de nouveau toujours pas trouvé sa place dans les Cahiers et de nouvelles générations peut-être passeront à côté. On se souvient du dernier ratage, il y a dix ans, lorsque les salles de sa rétrospective à la Cinémathèque étaient restées à moitié vides. Systématiquement rater Grémillon c’est se refuser d’entrer dans ce que le cinéma français peut offrir de plus beau, de plus dur et de plus tendre : de meilleur.

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Message par Invité Sam 19 Oct 2013 - 19:06

ah ben je vais les acheter ; ça donne envie de cinéma et puis c'est vrai Kechiche divise : à part le battage de Borges y'a un silence assourdissant sur the forum.

il faut aussi rétablir la vérité : l'intérêt des cahiers pour Grémillon ne date pas de Delorme. La nouvelle vague aimait déjà Remorques : bon choix, film sublime. (jamais vu de Kechiche de cet acabit encore).

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Message par Borges Dim 20 Oct 2013 - 9:00

slimfast a écrit:

il faut aussi rétablir la vérité : l'intérêt des cahiers pour Grémillon (...) La nouvelle vague aimait déjà Remorques : bon choix, film sublime. (jamais vu de Kechiche de cet acabit encore).
ah, mais c'est précisément le problème; y a dans le numéro des Cahiers une discussion avec le faux jeton de Douchet sur les relations des Cahiers avec JG...(on ne l'a pas défendu parce qu'il n'en avait pas besoin, lol )

sur le blog de balournatique, un certain  Christophe (grand amateur de JG) dit des choses intéressantes...
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Message par balthazar claes Dim 20 Oct 2013 - 10:24

ben c'est formidable ce film, très éprouvant, très long, fait de vides et de longueurs. "Effacer le texte", je me demande bien ce que ça peut vouloir dire, mais je vois ça dans le film, des plages sans histoires, presque insupportables de silence.

Au démarrage, il y a une tension frontale, une question violente, et le film s'épuise, et nous épuise, mais c'est comme s'il ne se rapprochait jamais de la question. Collé au nez d'Adèle, lui restant obstinément fidèle, il veut l'incarner mais pas la dénoncer, pas dire qui elle est. Le film, le temps, sculptent le bloc-Adèle, mais ne la traversent pas, ne la définissent pas, ne la dévoilent jamais.

Homosexuelle pas homosexuelle, lettrée ignorante, heureuse pleureuse, il lui arrive juste un processus, une histoire avec Emma, histoire dans laquelle le temps s'engouffre, le temps de sa vie. C'est une espèce de disparition, le passage du chapitre 1 au chapitre 2 ; la vie d'Adèle, qui était là, qui est passée, dont il ne reste que quelques tableaux. 3 heures qu'on est là, et on nous a escamoté le film, sous nos yeux, sans qu'on s'en aperçoive. Terrible, à quel point rien n'a eu lieu. 3 heures à filmer la morve et les ébats d'Adèle, et ça fait un film parfaitement pudique envers celle-ci...

Un début, et une fin ; mais pas de milieu. Interminable début, quand Emma et Adèle parlent pour la première fois dans le bar ; elles causent, elles causent, se regardent et se plaisent ; c'est insupportable, à quel point il ne se passe rien. Jamais deux choses à la fois : une espèce d'étirement de la présence, de slow motion. Le gros plan n'est pas seulement dans l'espace mais aussi dans le temps. Tout est "juste", le ralenti semble être le moyen de le vérifier ; phrases banales, regards compromettants sont décomposés, un temps pour les unes, un temps pour les autres. On est là, voyeurs modérés, lucides, contrôleurs de véracité. Une véracité quasi-"scientifique", le film ne suppose pas, n'interprète pas. Il n'y a rien à lire, seulement le sens littéral, minuscule, de la scène. On nous enjoint de remplir le reste de l'espace-temps avec de l'affect, celui qu'on voudra. On peut s'attacher à Adèle, souffrir de l'ennui, ou engouffrer sa vie personnelle là-dedans. C'est une manière de cinéma qui vise le choc du réel.

C'est bien, de faire ce porno anti-pornographique, ça rend des possibilités aux corps, c'est d'intérêt public. Adèle n'est pas une belle personne, l'objet de fantasmes : elle est, terriblement indifférente au cinéaste qui l'excède, au spectateur qui la regarde. Le spectateur se sent comme dans un aquarium, ridiculement enfermé derrière son hublot ; à se focaliser aussi longtemps sur la bouille d'Adèle, il en vient à pressentir physiquement les alentours où il n'est pas, et comme il est lui-même enchaîné au miroir de son imagination.

C'est un mélodrame, classiquement tire-larmes. Une jeune fille veut grandir, s'élever ; elle vit avec quelqu'un, quelqu'un d'assez perfide, qui joue de son avantage d'être moins floue, d'avoir une existence davantage définie par un certain bavardage.

Adèle ne sait pas parler, elle veut travailler avec des enfants car eux non plus ne savent pas encore. Elle est frappée, d'emblée, d'un certain fardeau d'inexistence, d'apesanteur. Cette apesanteur c'est une solitude, elle n'appartient à aucun groupe, elle n'a pas d'amis, sa famille lui est étrangère. Elle est comme endormie. Son histoire avec Emma c'est comme l'occasion pour elle de se voir, de s'apercevoir, de prendre sa mesure. C'est seulement après le film, après cette histoire, que sa vie pleine pourrait commencer, une vie en connaissance de cause. Mais c'est assez terrible parce que le vide qu'il y a dans cette vie est quelque chose qu'on ne peut pas vraiment combler, c'est sans fin.

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Message par Borges Dim 20 Oct 2013 - 10:51

Hi BC;
"effacement du texte", c'est de bataille, comme je disais; dans ce cas, le texte c'est tout l'horizon de sens, religieux, mythologique, des sentiments... dans lequel s'inscrivait avant Manet la représentation du nu féminin; ce que signifie le tableau de Manet (Olympia) ce n'est pas ces textes, antérieurs, mais leur effacement; bref, la femme est vraiment nue, mais pas elle seulement, si cela est possible, ce que je ne crois pas; ce sont ces vêtements de sens (le lyrisme, l'amour...) ce que Badiou appellerait la loi, que nos "amis" des Cahiers recherchent et tous ceux qui trouvent porno, ou pire, la séquence sexe, très plate,  au sens pictural du mot aussi


je ne sais pas si je dirais ce film magnifique; au fond, je n'ai pas d'idée sur sa valeur; c'est sans doute le plus important de l'année, pour bien des raisons...


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Message par Borges Dim 20 Oct 2013 - 11:36

Balourd à tics a écrit:

   Suite et fin.

   Dialogue de sourds avec Borges comme toujours. Bon d’abord je m’aperçois qu’on ne parle pas du même "objet a". Borges s’est arrêté au Lacan d’avant 1960, le stade du miroir, la métonymie comme "partie pour le tout", la relation spéculaire, le moi idéal et l’idéal du moi, "l’autre" confondu avec "l’objet a"... Mais peu importe. Ensuite il ne cesse de nous rabâcher que les cheveux c’est essentiel dans le film (il doit porter une moumoute, c’est pas Dieu possible). Et les autres d’essayer de repérer tout ce qu’il y aurait de chevelu, j’ai même craint que quelqu’un (slimfast?) nous sorte que les spaghetti bolognaise qu’Adèle semble bouffer tous les soirs à 18h, l’heure de Questions pour un champion, parce que papa est ouvrier et doit se coucher avec les poules, bref que les spaghetti c’était comme les cheveux... Or le seul truc qui importe, du moins au départ, c’est juste l’image des "cheveux bleus d’Emma", pas les cheveux en général, c’est pour ça que je dis que les cheveux on s’en fout. Ce que dit Borges sur cet objet partiel c’est très précisément ce qui est illustré dans la BD. Sauf que le film ne se réduit pas à ça, la robe bleue d’Adèle à la fin, sur laquelle insiste lourdement Borges (mais oui, on avait compris), ne signifie pas que le film est à voir uniquement sur le versant imaginaire. Qu’il court en filigrane tout du long, sûrement, qu’Emma ait quelque chose d’agalmatique pour Adèle, probablement, mais Kechiche ne s’en contente pas, c’est en ce sens que son film se démarque de la BD. Ne voir le film qu’à la lumière des cheveux bleus d’Emma, c’est un peu se voiler la face. Il n’y a pas que l’imaginaire. Chez Kechiche le réel du corps est là, et bien là. Hélas.

   PS. Le regard est le véritable "objet a" du film, et du cinéma de Kechiche en général.
-Là, je suis impressionné, épaté, par le balourd à tics ; notre lièvre de la critique a plusieurs années d'avance dans sa compréhension de Lacan ; je parle dans de vieilles catégories, il a déjà traversé le miroir ; mais mon pauvre balourd à tics, il s'agit pas d'une course, il s'agit pas de savoir qui est arrivé le premier à la dernière ligne, droite ou de travers, écrite par Lacan, au dernier mot qu'il aurait prononcé sur son lit de mort, ou juste pensé avant de rejoindre le territoires des ombres ; tu confonds, tu mélanges, tu te trompes de jeu ; on est dans la pensée esthétique, jeu libre de l'imagination et du concept ; y a pas de vrai, de faux, mais juste de l'intéressant, et de plaisir, plus ou moins pur, quand y a harmonie de la règle et de l'invention ; ce qui ne veut pas dire que l'on peut raconter n'importe quoi ; je vais pas te refaire le coup de la course dans Alice, ça lasserait certains. Que cela soit entendu : je ne suis pas assez prétentieux pour sprinter avec un gars qui a eu Buster Keaton pour entraîneur ; je me suis pas arrêté au Lacan d'avant 60, soudain trop fatigué ou plus en mesure de suivre, je te fais pas un exposé, niveau maternelle, sur l'évolution de la pensée lacanienne, je fais usage de certains concepts de Lacan, pour rassembler certaines choses dans le film de K... Que j'en fasse un usage, très libre, comme j'ai prévenu, ne t'interdit pas, si ça t'amuse, de préciser, de compliquer les choses et de nous expliquer comment on pourrait piger, saisir tout ça dans les catégories lacaniennes post 1960, à coup de schémas, de nœuds, d'anneaux, de bouteille, et de ce langage de pur mathème, sans quoi rien ne s'enseigne vraiment ; mais je te vois pas dans ce rôle, pas même dans celui d'Adèle apprenant aux débutant en Lacan à articuler quelques mots de son vocabulaire... Te relisant, je n'ai pas vu où dans tes réponses résiderait ton Lacan post 1960 ; tu ne dis rien de Lacan, tu répètes ce que je dis, pas plus, pas mieux, pas même dans l'idée sympa de m'aider à faire des progrès ; que tu connaisses rien à Lacan, c'est entendu, on ne va pas se battre pour ça, je m'en fous, et sans doute toi aussi.

Tu sais, pour ce que je dis du film, et de Lacan, j'ai pas besoin de relire tout Lacan ; le but du jeu, c'est pas de suivre à la trace les métamorphoses de l'objet a dans la pensée, la vie, et les écrits, et séminaires de Lacan, comme les chiens, les limiers qu'il décrit dans je me souviens plus lequel de ses textes.


- Tu ne dois pas te creuser la tête des années sur la pensée lacanienne, pour piger ce que j'ai écrit, tenté : par stade du miroir, imaginaire, tu dois juste piger : "effet produit par une image de complétude"... rien de plus ; cette image de complétude, elle est saisie par Adèle au niveau des cheveux bleus et courts d'Emma (élément, qui me vient là, à la mémoire : dans sa discussion avec son petit ami, elle dit ne pas aimer la musique hard chantée par des gars chevelus ; elle est saisie par l'image de Emma bien avant le regard qui se retourne, avant qu'elles ne se croisent, et se voient, si j'ai bonne mémoire)

A partir de là, ce qui m'importe, c'est d'organiser un certain nombre d'éléments dont le plus important est la relation de maitrise,  d'enfance, et le cours sur l'Antigone, où Antigone est une enfant...
"Vous êtes-vous aperçu qu'on n'en parle jamais dans toute la pièce qu'en l'appelant  (...) la gosse ?"
(Lacan, L'Ethique de la psy)



-pas lu la BD...(je lui préfère Tif et Tondu)

- Emma n'est pas agalmique, pour Adèle, c'est son malheur ; Emma n'est pas Sartre, elle ne produit pas de transformation sur son élève ; leur relation reste physique ; Adèle ne passe pas de son cul à son âme ; elle ne s'occupe que de son cul...

Balournatics a écrit:
Il n’y a pas que l’imaginaire. Chez Kechiche le réel du corps est là, et bien là. Hélas.
-Et tu voudrais que l'on te prenne au sérieux, quand tu causes Lacan, mais mon gars, y a aucune opposition entre l'imaginaire et le corps, l'imaginaire, c'est d'abord le corps, et la couleur... (relis ce qu'il dit des parades animales) ; et le réel, chez Lacan, c'est pas le corps, au sens biologique... lamentable...  et une fois de plus, je parle de la relation Adèle-Emma quand je cause imaginaire, je réduis pas le film à cette seule catégorie.

- Comme tu ne connais pas un minimum le Lacan des années 1950, je dois moi-même faire ma propre critique, indiquer les limites de ce que je dis, tenter de construire, d'ébaucher, d'esquisser, sans chercher nécessairement à ce que cela  me mène quelque part : ce qui ne marche pas dans cette affaire, c'est que l'identification imaginaire est toujours agressive ; on admire l'autre, on veut l'être, mais pour cela il faut prendre sa place, le remplacer. Rien de tel dans ce cas ;  on a une relation de soumission absolue ; pas d'agressivité, de lutte ; on ne voit chez Adèle aucune volonté de prendre la place d'Emma, comme on peut le voir dans "All About Eve", où l'admiration est rivalité, volonté de se substituer à l'autre. Adèle est une enfant soumise : pas de guerre des classes, des mondes, des goûts ; devant l'ironie méprisante d'Emma, elle ne se bat pas pour faire reconnaître la valeur de Bob Marley. Adèle, c'est un corps, qui se donne, et nourrit,  comme la mère dans "La Graine et le Mulet". Ni lutte, ni perfectionnement (je veux pas écrire, je veux pas être autre chose qu'institutrice ; je baise, je mange, je bosse, je suis heureuse...). Ça ne peut pas aller très loin comme relation, pour Emma, qui ne peut rien foutre avec elle de sublimant, ni discuter, théorie, art, ni lutter. On ne peut pas passer sa vie au lit, et avoir honte de l'objet de son désir à chaque fois que l'on passe du privé au public ; double honte, honte de son monde pour Adèle quand elle le voit avec le regard d'Emma, et honte d'Emma quand elle voit Adèle avec le regard de son monde, de ses amis...

-Balourdnatics on s'en fout de l'objet a, en soi, que cela soit le regard, le nez, les fesses, la bouche, ou les cheveux... L'essentiel, c'est ce que le terme permet de rassembler et de signifier du film. Ceux qui veulent pas piger, comme disait Lacan 1960, presque 1961, on peut les renvoyer à leurs "lubies de résistance, à leurs idées butées, à leur bêtise de naissance, à leurs oignons quoi… qu’ils se débrouillent !"
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Message par Invité Dim 20 Oct 2013 - 12:15

Balourd à tics a écrit:

   Suite et fin.

Et les autres d’essayer de repérer tout ce qu’il y aurait de chevelu, j’ai même craint que quelqu’un (slimfast?) nous sorte que les spaghetti bolognaise qu’Adèle semble bouffer tous les soirs à 18h, l’heure de Questions pour un champion, parce que papa est ouvrier et doit se coucher avec les poules, bref que les spaghetti c’était comme les cheveux...
là tu confonds. je suis juste exaspéré par la manière dont Kéchiche utilise les cheveux  d'Adèle, toujours en train de les tripoter (Adeline n'a pas manqué de le souligner) ou comme dans le très long panoramique en classe, au début, où une mèche gênante, qu'elle doit supporter, impassible, lui barre le visage (il est tyrannique, ce Kéchiche).
Pour certaines jeunes filles la touffe de cheveux est essentielle comme moyen d'affirmation/protection. J'en côtoie tous les jours dans mes classes et d'ailleurs j'ai les cheveux très longs, rien que pour les emmerder. Mais pour ta gouverne, sache que ce n'est pas bon à manger (elle sont d'ailleurs épilées).

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Message par Borges Lun 21 Oct 2013 - 17:44

Balournatique 21 octobre 2013 13:14 a écrit a écrit:Eh bien j’ai lu, c’est consternant...

   Il devient pathétique le pauvre Borges… maintenant il fait les questions et les réponses, au moins on gagne du temps, c’est déjà ça... mais mon vieux, j’en ai rien à foutre de Lacan et de l’objet a, c’est toi qui en a parlé le premier, et si j’ai rebondi c’est parce que tu racontais que les cheveux lors de la première rencontre entre Adèle et Emma fonctionnaient comme objet a, et que je me suis aperçu que ta conception d’objet a, un poil vieillotte, renvoyait au premier Lacan. C’est tout... Et si je donne l’impression de reprendre certaines choses que tu dis, c’est pas que je me les réapproprie (ça me ferait mal), c’est juste pour résumer ce que tu racontes ailleurs, qu’on sache un peu de quoi on parle... Pour le reste, t’es tellement aveuglé que tu lis de travers comme toujours. Je n’ai jamais opposé imaginaire et corps, je n’ai jamais dit que le réel c’est le corps, j’ai juste parlé de réel du corps, ce qui n’a rien à voir.

   Bien sûr que le corps c’est d’abord l’imaginaire, bien sûr que tu parles de la relation Adèle-Emma, en plus évoquer le stade du miroir quand il s’agit d’homosexualité, on peut pas dire que tu te foules beaucoup, mais ce que tu dis n’a pas grand intérêt dans la mesure où ce n’est visiblement pas ce qui intéresse Kechiche, ce n’est pas ce qui fait la singularité du film (qu’on ne peut nier). Tu reproches à ceux qui n’aiment pas le film de n’exprimer que leur dégoût, mais toi tu te gardes bien de te confronter à la question, celle du corps dans ce qui vient aussi cerner un réel, entre le voile de l’esthétique et l’obscénité, ce que j’évoquais à travers la construction Olympia/Origine du monde, qui fait que non seulement Olympia desserre les cuisses mais qu’en plus on lui ait retiré sa "toison noire", féline, que Manet avait représenté à ses pieds. Moi aussi j’espérais que tu allais développer, quitte à me contredire, ce qui n’est pas grave s’il y a un vrai dialogue, mais non, t’en es incapable.

   Toi tu préfères te réfugier dans le vieux Lacan, le stade du miroir, la complétude... c’est plus confortable, tu peux y plaquer tes concepts, mais tout ça (l’image et la fonction des cheveux bleus) on le trouvait déjà dans la BD (c’est pour cela que j’en ai parlé, sinon là aussi j’en ai rien à foutre), à la limite pas la peine de voir le film pour en parler. Parler du Kechiche, questionner le film, c’est au contraire aller au coeur même de ce qui fait problème chez lui, dans sa manière de filmer, et ça touche au corps, oui le corps vivant (si le film s’appelle la Vie d’Adèle c’est pas pour rien - je sais, dire ça c’est aussi con que de rappeler qu’à la fin la robe d’Adèle est bleue), donc à la jouissance, sauf que chez Kechiche il y a aussi quelque chose de mortifié, qui renvoie à la pulsion (pas celle de Deleuze, celle-là je te la laisse). Et pour ça, il faut descendre de ses hautes sphères de maître autosatisfait, qui jouit de ses propres paroles, il faut accepter de mettre les mains dans la merde... se confronter à ce qui est là, sur l’écran, et non interpréter, à partir de ce qui existe sur le papier, et qu’on pourrait appliquer à n’importe quel film qui traiterait le même sujet...

Eh bien, j'ai lu, c'est passionnant...

- C'est d'accord, je suis dépassé. On ne va plus discuter de ta maîtrise de Lacan. On disait qu'en nous promenant dans le jardin de l'autre Borges nous avions bifurqué dans un univers où tu étais l'Autre de Lacan post 1960 et bien au-delà. Dans cet univers y avait plus d'objet a antérieurs à 1960, plus d'objets a vieillots, crados, rien que des objets a post 1960, jeunes, fringants, en super forme, et d'autres encore plus épatants, des objets b, c, d... z ; tout un alphabet que les gens peuvent parcourir comme  dans une bd fameuse...

"I hold these truths to be self-evident..." ce sera le début de ma déclaration de dépendance à ton savoir.

voilà, c'est dit.


Balournatique a écrit:Et pour ça, il faut descendre de ses hautes sphères de maître autosatisfait, qui jouit de ses propres paroles, il faut accepter de mettre les mains dans la merde... se confronter à ce qui est là, sur l’écran, et non interpréter, à partir de ce qui existe sur le papier, et qu’on pourrait appliquer à n’importe quel film qui traiterait le même sujet...
-ok, ok, comme j'ai dit, je vais plus me cacher derrière le vieux lacan; je vais redescendre,   te laissant la maitrise totale des airs (que tu te donnes) dans ton superbe ballon...

- Jouir de ses paroles, plus ou moins propres, nous le faisons tous.

"La sublimation est la satisfaction de la pulsion, et cela sans refoulement. En d'autres termes — pour l'instant, je ne baise pas, je vous parle, eh bien ! je peux avoir exactement la même satisfaction que si je baisais. C'est ce que ça veut dire. C'est ce qui pose, d'ailleurs, la question de savoir si effectivement je baise."

(Lacan)

(C'est l'une des questions de "La Vie de Adèle", la jouissance, et féminine en plus... L'allusion à Lacan est presque évidente dans le film... Chez AK, y a pas que des corps, y a des mots, beaucoup de mots, et un grand plaisir à parler, une jouissance de la parole, dans les deux sens du mot...)

- "Mettre les mains dans la merde" ; est-ce une manière de nous dire et redire que le film de AK c'est de la merde ou une subtile allusion à la merde comme objet a (elle est souvent nommée, dans les séminaires des bonnes années, avec la voix, le regard, et le vide, dont se nourrit l'anorexique, ce qui ne risque par d'arriver aux personnages de AK...)  

- Dans "La Graine et le Mulet", je crois me souvenir, y a un gosse sur un pot...



- L'écran ? Mais qu'est-ce que l'écran, dans l'horizon qui m'intéresse ici, celui de l'imaginaire ? Lacan l'explique dans un séminaire post 1960, dans un passage où il distingue les relations humaines et animales à l'imaginaire, à la séduction, à la parade, et tout ça : "La différence entre l'homme et l'animal"  "Seulement le sujet — le sujet humain, le sujet du désir qui est l'essence de l'homme — n'est point, au contraire de l'animal, entièrement pris par cette capture imaginaire. Il s'y repère. Comment ? Dans la mesure où il isole, lui, la fonction de l'écran, et en joue. L'homme, en effet, sait jouer du masque comme étant ce au-delà de quoi il y a le regard. L'écran est ici le lieu de la médiation."

(Derrida, on le sait a beaucoup interrogé les présupposés classiques, humanistes, métaphysiques, de la différence que trace Lacan entre l'homme et l'animal... ma question : que voit un singe sur un écran quand on lui projette "La Vie d'adèle" ? Des corps réel ? Certainement pas ; pas plus que nous...)  


-moi, je sais pas du tout ce qui intéresse AK, le mec qui a fait le film, dont on peut écrire la biographie (à la grande indifférence d'Adèle, qui s'en fout des bios, et des théories...), le AK imaginaire (celui que l'on admire et déteste), ou symbolique (auteur). Dans son entretien avec les Cahiers, il dit que dans les scènes de bouffe ce qui l'intéresse, c'est pas le corps, mais l’âme ; et dans "La Vénus noire", ce qui intéressait la fille, c'est qu'on arrête de s'intéresser à son corps, pour qu'elle puisse enfin exister en tant qu'artiste, comme chant, comme souffle, âme, comme fiction...

-Après avoir revu le film, on causera de cette scène qui t'intéresse tant, si ça m'intéresse encore de causer de ce film... D'ici là, j'attends deux choses de toi, ce sera ta mission, si tu l'acceptes, que tu nous expliques ce que tu entends par "réel du corps", à ne pas confondre avec la réalité du corps, ou le corps de la réalité, ou le corps du réel... et ce que tu entends par pulsion chez AK, et en quoi cette pulsion est liée au mortifère (il ne s'agit bien entendu pas de la pulsion de mort)...


PS2: jamais Lacan n'a séparé l'objet a du manque, donc de l'incomplétude de l’être humain ; et je crois avoir dit que l'objet spéculaire ne devait pas être confondu avec l'objet a (dans une fable qu'il raconte je sais plus où il dit que c'est un truc qui s'est détaché de notre corps à la naissance, et après quoi nous courons toute notre vie, sans jamais le saisir, croyant parfois le percevoir ici ou là...)
PS3 : comme tu le vois, je prends le soin de te citer pour te répondre...
PS4 : j'ai pas lu la bd
PS1: Lacan ne m'intéresse pas plus que ça (je suis pas Zizek ; ça remonte à loin, à longtemps, ma passion pour lui, ce qui ne veut pas dire que je le trouve dépassé, bien au contraire)

PS : par PS, faut entendre PlayStation...

(Je croyais pouvoir jouer avec et contre toi à "la vie d'adèle", mais comme ton niveau est assez bas, pour le moment, je joue contre moi (presque même) ; faisant comme tu l'as remarqué judicieusement les questions et les réponses ; définition de la pensée, selon un vieux penseur antique amateur de banquet)

La vie d'Adèle - Page 4 37theballoonatic



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Message par Borges Lun 21 Oct 2013 - 18:33

Balournatique a dit... 12 octobre 2013 21:03 a écrit:Hé hé... j'imagine que la vision d'Adèle a dû être un grand moment de répugnance jubilatoire, mais ne m'en dites pas plus, je vais voir le film tout à l'heure ou demain.
Voilà, résumé l'esprit de la critique de  balourdnatique, et de ses potes : "répugnance jubilatoire"... la répugnance du gars qui  plonge ses mains dans la merde, et jubile...

comme quoi, on ne voit pas les films sur les écrans, on le voit bien avant, dans les textes, les discussions, les attentes... Le balournatique est allé voir le film comme les spectateurs du salon des refusés, en s'attendant à jubiler de la répugnance que devait lui procurer le film...

(on sait que c'était aussi le sujet de "la vénus noire"; une vénus (jubilation) noire (répugnance) ne peut procurer qu'une répugnance jubilatoire aux esthètes; le ciel est à eux; n'est-ce pas balloonatic...? pauvre keaton, pauvre grémillon... Avec des amis comme ça, pas besoin d'ennemis... )

jubilation, on sait que c'est le mot de lacan pour décrire la joie du gosse se voyant idéalisé dans le miroir;  l'écran de cinéma comme miroir inversé de ce qu'on s'imagine être : je ne suis pas cette merde, quelle jubilation, je bouffe pas comme eux...je suis une âme, pas un corps vulgaire...
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Message par Invité Lun 21 Oct 2013 - 20:24

je suis largué, je comprends vaguement de quoi tu parles mais pas à qui tu parles.

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Message par Borges Lun 21 Oct 2013 - 20:31

slimfast a écrit:je suis largué, je comprends vaguement de quoi tu parles mais pas à qui tu parles.
Hi

tout à fait d'accord, j'ai aussi ce sentiment; la personne à qui je parle jouit d'un degré d'existence assez minimal, on pourrait presque dire qu'elle n'existe pas, et que je perds mon temps à essayer de lui donner une certaine consistance, une certaine densité...

mais en même temps, elle existe : c'est delorme, les cahiers, et ceux qui les suivent...

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Message par Invité Lun 21 Oct 2013 - 20:41

c'est un peu triste tu ne trouves pas de dresser un siège et n'avoir plus que ça en tête.
Je me demande si le jeu en vaut la chandelle, pour les spectres, pour nous ?

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Message par Borges Mar 22 Oct 2013 - 8:20

slimfast a écrit:c'est un peu triste tu ne trouves pas de dresser un siège et n'avoir plus que ça en tête.
Je me demande si le jeu en vaut la chandelle, pour les spectres, pour nous ?
Hi;
Tu as parfaitement raison; au fond, tout ça est assez con...
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Message par py Mar 22 Oct 2013 - 21:47

Je me suis imaginé Kechiche leur dire "On va la refaire, cette fois vous vous mettez des bonnes claques sur les fesses, pour voir". Non mais qu'est-ce que ça vient faire là ce geste qui (à ma modeste connaissance en la matière) n'est guère pratiqué que dans les pornos masculistes et par les pornophiles?
Une semaine ou dix jours, je ne sais plus, de tournage, de torture, pour se taper le cul? Il déconne Abdel...
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Message par Eyquem Mer 23 Oct 2013 - 8:58

Une tribune de Kechiche:

http://www.rue89.com/rue89-culture/2013/10/23/abdellatif-kechiche-a-ceux-voulaient-detruire-vie-dadele-246826
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Message par Borges Mer 23 Oct 2013 - 9:37

Eyquem a écrit:Une tribune de Kechiche:

http://www.rue89.com/rue89-culture/2013/10/23/abdellatif-kechiche-a-ceux-voulaient-detruire-vie-dadele-246826
faudrait comparer la réception critique, politique, idéologique de trois films : "la vie d'adèle", "l'inconnu du lac", "et holy motors"...
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Message par adeline Sam 9 Nov 2013 - 13:32

Une chronique sur La Vie d'Adèle, par une sociologue militante queer, retwitté par La revue des livres. C'est plein de contresens et on n'a vraiment pas vu le même film…

https://soundcloud.com/marie-helene-bourcier/chronique-mh-bourcier-la-vie

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Message par DB Sam 9 Nov 2013 - 16:49

adeline a écrit:Une chronique sur La Vie d'Adèle, par une sociologue militante queer, retwitté par La revue des livres. C'est plein de contresens et on n'a vraiment pas vu le même film…

https://soundcloud.com/marie-helene-bourcier/chronique-mh-bourcier-la-vie
C'est aussi très vulgaire, loin d’être fin et très inexact.

Ou alors le film est vu avec de sacrées œillères.
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Message par Invité Sam 9 Nov 2013 - 16:52

le coup des prothèses est très rigolo, noyé dans le reste.

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Message par glj Dim 5 Jan 2014 - 23:15

Retour à la vie d'adèle. C'est un recit d'apprentissage, il résume en fait ce qu'est le cinéma pour kechiche : un lieu ou l'on zoom pour voir l'autre vivre sa singularité et qui nous pousse par cette singularité à prendre du recul. C'est l'esprit de marivaux, son souffle, pris dans un autre souffle, celui de la crudité contemporaine.
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Message par adeline Ven 24 Jan 2014 - 20:11



Cette scène, c'est la plus belle du monde.
En sortant du film, j'avais en tête cette musique, préparée platement par la vision de la bande-annonce (où elle accompagnait alors plusieurs moments, notamment une manifestation). Après avoir vu le film, elle est restée si profondément en moi que je l'ai écoutée en boucle. Mais la musique a tout perdu en quelques écoutes, réduite à un squelette rythmique et une voix mécanique. Et puis, j'ai revu la scène (sur le facebook des Spectres Wink). Tout est revenu, dans un grand flot d'émotions. Bouleversement.
Pourquoi cette petite scène est-elle si forte ?
Pourquoi Adèle qui danse est-elle si émouvante, pourquoi semble-t-elle renfermer en elle tous les possibles de la vie, toute l'intensité des émotions à vivre ?
Quelques pas de danse réservés et déliés. Les joues rondes qui pourraient rougir. Les lèvres qui forment les mots distraitement, en articulant à peine, un souffle seulement. Toute d'intériorité, en même temps souriante et dans le mouvement des amies qui l'entourent. Présente, timide, sans séduction mais enrobant tout de la pureté de ses mouvements. Elle est la grâce non feinte, évidente, naturelle. Le montage est magnifique. Un aller-retour discret. Un moment on est à l'épaule d'Adèle, dans sa danse, jamais si près qu'on soit dans son intimité, mais assez proche pour sentir ce qui la meut, puis on la voit de loin, entre les têtes et les bras flous de ceux qui l'entourent, on la devine souriante, elle nous apparaît puis disparaît, on est le regard de l'autre, des autres, de la vie, ce qui l'attend, ceux qui l'attendent, lointains et si proches. Moments très courts, on la retrouve, dansant avec deux amies, connivences fortes des années de jeunesse, de profil, de face. Et puis elle ouvre les bras, tourne, il n'y a plus qu'elle mais le monde ne disparaît pas, un tourbillon tranquille, elle est en elle-même, elle est présente aux autres, présente à nous mais aussi mystérieuse et inaccessible.
Le dernier plan, large, sur la petite maison de la banlieue lilloise, avec le séchoir à linge en avant plan. Le monde d'Adèle, si fort, si émouvant, infini et riche comme l'univers, cette fête toute simple, son anniversaire, c'est la vie, la vie des gens qui sont là, simplement, et c'est magnifique.
Les légères ellipses du montage sont admirables. Le premier plan, Adèle entre dans la musique, c'est une introduction, mouvement lent, peu de rythme, les bras d'Adèle sont la rivière. Elle est la seule à être dans le glissement de la musique, autour d'elles, les autres filles sautillent. On est avec elle dans l'espace retiré qu'elle crée entre elle et la musique. Deuxième plan, légère ellipse, sans doute une autre prise. La coupe arrive au moment du changement de rythme, ''I I follow'', Adèle colle à la musique d'un plan l'autre, légère discontinuité des mouvements, nous sommes dans un temps différents de celui de la musique, différent de celui de la fête. Puis les plans se succèdent à nouveau sans ellipse, il y a sans doute deux caméras qui filment Adèle de face et de profil, la musique et elle forment un seul corps. Juste avant qu'elle ne commence à tourner, les coupes instaurent à nouveau des fines ruptures. Adèle nous tourne le dos, on la retrouve de face, elle tourne on ne sait plus qui l'entoure. Et le regard timide qu'elle jette un instant à celui ou celle qui est devant elle, avant que ses yeux retombent rougissant, n'est destiné à personne. Ou peut-être est-il destiné à tout le monde, à tous ceux qui l'entourent.
Filmer ainsi une fête, la danse, comme un aller-retour pudique entre le monde intérieur d'Adèle et sa présence aux autres, chacun se nourrissant de l'autre, c'est une belle idée de l'art.


Dernière édition par adeline le Sam 25 Jan 2014 - 14:53, édité 3 fois

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Message par incubé Ven 24 Jan 2014 - 21:01

c'est magnifique.

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