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Message par Invité Dim 22 Nov 2009 - 0:16

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Pourquoi les Spectres n'ont pas encore parlé de ce film ?

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Message par wootsuibrick Dim 22 Nov 2009 - 10:00

bah... j'en avais parlé à une époque, sur le forum des cahiers.
on peut retenter. lol


Dernière édition par wootsuibrick le Dim 22 Nov 2009 - 10:07, édité 1 fois
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Message par wootsuibrick Dim 22 Nov 2009 - 10:04

voyons voir si ça tient la route cette histoire de temps lolol

(...)

Oui, le travaille du temps... mais c'est loin d'être simple.
Sergio Leone, sa temporalité, je crois que c'est consciement un apport du cinéma japonais. Il le fait remarquer, je crois.

Le Wu Xia-Pian a été influencé par le chambara à une époque (années 60), même si étrangement, au niveau de la gestion du temps, en dehors du travail de King Hu, c'est quasi le contraire qui va se dévelloper dans l'industrie cinématographique hongkongaise (King Hu tournera ses oeuvres les plus importantes hors de cette industrie). Mais le cinéma de King Hu n'est pas plus japonais que chinois, il est même peut-être juste chinois.

Un guerrier, un homme se battant directement contre la mort, peu importe le lieu d'où nous le voyons, évolu dans des archetypes stables. Le temps du guerriers, sabreur, flingueur etc., est plus animal, ses codes sont plus primitifs. Lorsque les combattants de King Hu s'observent, ils ne s'observent pas juste parceque ceux de Sergio Leone s'observent aussi. L'observation avant l'affrontement est un temps brut. Les personnages de King Hu comme ceux de Sergio Leone gérent ce temps de l'affrontement. L'esthétique des films est en partit dû au choix, à différent degré, de prendre comme perspective dominante de la narration cette gestion du temps de l'affrontement. Chez Sergio Leone ce temps est peut-être plus chargé dramatiquement, moins brut, moins pur. Les personnages de Sergio Leone répondent au pathos d'une tradition dramaturgique occidentale. Chez King Hu la condition de l'action des personnages est vidé de son sens, soit du fait de l'absence de "profondeur" psychologique justifiant le désir, la volonté d'action (Raining in the mountain), soit du fait d'un désir d'action nécessité par l'oppression direct d'un système (Touch of zen). Les raffinements de la ruse n'ayant comme fin que l'efficacité de l'action, ils ne perdent rien de leur nature animale. Ce qui humanise le désir, et la forme de l'action déployé par les guerriers de King Hu ce n'est pas la raison psychologique de l'action, mais le contexte et la culture de leurs gestes. Dans Touch of zen, Hsu Feng ne désire pas venger son père, elle désire d'abord échapper à la mort en fuyant ceux qui la traque.

Mais aude-là de la volonté, du mouvement porté par les personnages peuplant ces oeuvres, la temporalité de King Hu rejoint une base plus fondamentale, une perspective de travail du temps commune à une longue tradition picturale, religieuse, en extrême orient. A l'opposé le travail de Sergio Leone semble avoir été comprit comme une déconstruction.

C'est peut-être un cliché de le dire, mais la modernité occidentale a peut-être rejoint la tradition extrême-orientale. La croyance en l'importance du travail de l'espace artistique par l'action, la multiplication des signes comme signe de richesse de sens, a été substitué à une croyance au travail d'un espace artistique plus sous l'emprise du vide. Cet espace moderne cherche moins intentionellement à porter le sens en le faisant évoluer en connivence avec des figures humaines, anthropomorphiques bourrées d'intentionalités. Les figures humaines qui s'agitent dans l'espace traditionnel du drame occidental sont à la hauteur de la porté du sens globale de l'oeuvre, elles portent même l'essentiel du sens. Leur narration porte la substance créant la temporalité de l'oeuvre, leur histoire est l'histoire de l'oeuvre. Dans la tradition asiatique que rejoignent les figures, formes de King Hu, des personnages s'agitent tandis que la temporalité que tend l'oeuvre relativise cette agitation. Les personnages les plus proche de la temporalité vers laquelle tend l'oeuvre, chez King Hu, sont ceux qui s'agitent le moins. Ces personnages qui évoluent essentiellement dans un espace sacré, portent en eux le mystère que tente d'atteindre le travail organisant l'espace de l'oeuvre.

Chez Sergio Leone la temporalité de l'oeuvre ne dépasse pas les personnages qui agissent. L'homme à l'harmonica chargé de pathos a un but très clair, il porte la narration. L'espace temps dans lequel évoluent les personnages d'Il était une fois dans l'Ouest débordent, mais les personnages comprennent ce débordement, ils tentent de le faire travailler dans leur sens.
L'oeuvre de Sergio Leone décrite ici ne répond donc pas à la définition de la modernité comme régime esthétique rejoignant la tradition esthétique extrême-orientale. Dans les films de Sergio Leone le vide travaille majoritairement comme suspensition du temps, il est un contre-temps, il n'est pas le temps dominant. Il est essentiel à l'approfondissement des figures qui peuplent l'espace du film, mais il n'est pas une fin à l'état du monde dans lequel elles évoluent.

Ainsi la temporalité de Sergio Leone rejoint celle de King Hu à une seule echelle : celle de la gestion qu'en font les personnages agissant. L'homme à l'harmonica choisit, par son mutisme, sa manière de poser des enigmes aux personnages adverses, de faire durer le suspens. Sa gestion de la temporalité domine la narration de l'oeuvre.

Dans A Touch of Zen le temps n'est pas totalement géré par les personnages portant le récit. D'ailleurs, à l'opposé, par principe, les personnages qui n'agissent pas, ceux qui se trouvent dans la temporalité sacré du zen, ne gérent pas le temps, mais l'accompagne.
On trouve donc deux types de personnages dans Touch of Zen et Raining in the mountain : ceux qui occupent le plus longuement l'espace narratif, qui sont ceux qui agissent, et ceux qui occupent moins cet espace, qui sont ceux qui ont fait, en grande partie, le choix de l'inaction.
La première catégorie de personnages est proches de la temporalité des personnages de Sergio Leone, la gestion des temps "vide" qu'opére ces personnages est stratégique, elle vise à mieux faire aboutir l'action. La seconde catégorie de personnages n'a pas d' équivalent dans le cinéma de Sergio Leone. Ces personnages sont ceux qui porte l'essence de l'oeuvre, du moins l'idéale qu'elle aimerait présenter. Ces personnages sont porteur d'une pureté du temps, cette dimension du temps est celle qu'accompagne, qui accompagne tout homme au delà de toute gestion intentionelle, ou même consciente, de sa substance. Ce temps concerne tout les êtres, il ne s'agit pas juste du temps des héros de Leone, ni celui des samouraïs de chambara et des chevaliers de wu xia-pian. C'est un temps qui dépasse la substance de l'action.
Mais il est possible de nuancer cette opposition en soulignant le fait que chez Sergio Leone ce temps existe. Ce temps se présente dans les rapports qu'ont les personnages avec la mort. La mort a un poid réel dans Il était une fois dans l'Ouest, mais les personnages tentent de dominer leur mort, leur désir d'action est lié à la mort. D'ailleurs il a souvent était dit que le personnage de l'Harmonica revenait de l'au-delà.

La différence entre la temporalité du cinéma de King Hu et celle du cinéma de Sergio Leone, c'est l'amplitude de l'ouverture de cette temporalité. Le temps de King Hu est peut-être plus ouvert, il se déploi au-delà du désir d'action des personnages. La temporalité fondamentale du cinéma de King Hu, du moins celle vers laquelle l'oeuvre a pour projet de tendre, se fait hors de portée de la volonté des personnages construisant l'action, la narration.


nb : Je comprend mal la classification de Leone dans la post-modernité. Lorsqu'il dit qu'Il était une fois dans l'Ouest c'est du cinéma-cinéma je ne capte pas. Le cinéma de Leone n'est pas plus du cinéma-cinéma que le cinéma d'Antonioni, du moins à mes yeux.
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Message par lorinlouis Dim 22 Nov 2009 - 10:15

JM a écrit:
Pourquoi les Spectres n'ont pas encore parlé de ce film ?

Parce que les Spectres ont pris mandarin en Langue Vivante 3. Laughing

Je ne connais pas ce film. Mais merci pour la découverte, JM, Woot. Je vais essayer d'y jeter un coup d'œil. cyclops
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Message par Invité Dim 22 Nov 2009 - 10:45

Hello,

Oui, on en a déjà un peu discuté ailleurs.

J'ai revu le film hier soir et je pensais qu'il pourrait être intéressant de revenir sur la (non) présence de fantômes dans son film. Dans ce cas, plutôt que de tenter quelque rapprochement/écart avec Leone autour de la notion du temps chez les deux cinéastes, on pourrait comparer par exemple Tsui Hark avec le point de vue de King Hu, après avoir bien cerné celui-ci à partir de son film.

Il y a un dialogue important en début de film entre le lettré et le personnage qui traque Yang Hui-chen à propos des fantômes. Le lettré cite Confucius qui affirmait que les esprits n'existaient pas et l'autre lui répond qu'il suffit d'y croire pour qu'ils existent.

Par la suite, il semble que le cinéaste se place du côté de Confucius et ce pour plusieurs raisons. A chaque fois qu'il sera question de fantômes, il s'agira en fait de supercheries humaines pour tromper l'adversaire. C'est le stratagème de cloches et de pantins mis en place pour piéger le chef eunuque dans la maison et le parc abandonnés. C'est le mensonge du membre de l'armée qui, à la fin, poignarde le moine après avoir trompé sa vigilance en affirmant qu'il se sent coupable, qu'il voit des fantômes dans son sommeil parce qu'il a trop de sang sur les bras. On voit bien se profiler un seul usage des fantômes à des fins humaines trompeuses, mais deux types de "faux" fantômes : d'une part ceux qui répondent à une mise en scène, ceux fabriqués et mis en place stratégiquement dans le parc de la maison, d'autre part ceux qui répondent de la psyché, ceux des cauchemars du chef du gouvernement.

C'est un début, avant de reprendre ce qui me semble être le point de vue de Hu tout au long du film, et de reparler de la scène qui me semble cruciale, centrale, où le lettré découvre le massacre qu'à provoqué son stratagème fantomal..

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Message par wootsuibrick Dim 22 Nov 2009 - 10:51

Un des films qui aurait le plus influencé la workshop de Tsui Hark serait, Legend of the mountain de King Hu. Une belle romance fantomatique.
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Message par Invité Dim 22 Nov 2009 - 11:34

Je n'ai pas vu ce film de Hu. Il me semble en tout cas remarquable que le cinéaste ne privilégie pas dans "A Touch of Zen", tout en s'y intéressant, la piste des fantômes pour adapter une histoire qui, paraît-il, fait partie d'un recueil d'histoires avec des fantômes.

Contrairement à la première impression, le personnage central du film pour King Hu pourrait plutôt être le moine que la femme ou le lettré. C'est vers lui que s'opère la dernière bifurcation spectaculaire du récit, il semble synthétiser le point de vue de King Hu, il semble manquer quelque chose à tous les autres personnages. La transformation finale du moine en buddha révèle bien que le personnage du moine était "complet". Par exemple, après cette scène magnifique où le lettré reconnait avec horreur le massacre qu'a engendré son stratagème après en avoir rit à gorge déployée, le cinéaste paraît moins s'intéresser à ce personnage, qui disparait d'ailleurs d'un seul coup avec son fils, sans qu'on ne le revoit.

Maintenant je sais pas si il faut penser en ces termes, en terme de personnage principaux, woot' tu sembles plus penser à un partage égal des rôles dans le récit ?

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Message par wootsuibrick Dim 22 Nov 2009 - 11:53

Pour répondre à ta question je me cite. lol


On trouve donc deux types de personnages dans Touch of Zen et Raining in the mountain : ceux qui occupent le plus longuement l'espace narratif, qui sont ceux qui agissent, et ceux qui occupent moins cet espace, qui sont ceux qui ont fait, en grande partie, le choix de l'inaction.
La première catégorie de personnages est proches de la temporalité des personnages de Sergio Leone, la gestion des temps "vide" qu'opére ces personnages est stratégique, elle vise à mieux faire aboutir l'action. La seconde catégorie de personnages n'a pas d' équivalent dans le cinéma de Sergio Leone. Ces personnages sont ceux qui porte l'essence de l'oeuvre, du moins l'idéal qu'elle aimerait présenter. Ces personnages sont porteur d'une pureté du temps, cette dimension du temps est celle qu'accompagne, qui accompagne tout homme au delà de toute gestion intentionelle, ou même consciente, de sa substance.


Dernière édition par wootsuibrick le Mer 25 Nov 2009 - 10:40, édité 1 fois
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Message par wootsuibrick Dim 22 Nov 2009 - 11:53

mais bon, je crois plutôt qu'il y a trois type de personnages... Les guerriers, l'intellectuel stratège, et les moines.
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Message par Borges Dim 22 Nov 2009 - 13:26

Voici une discussion qui va très vite; un autre régime que celle sur Ozu.
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Message par Borges Dim 22 Nov 2009 - 17:31

Woot, en te centrant sur les personnages, tu négliges (je crois) la temporalité du mouvement de la conscience (le mouvement du tout) : des ténèbres (illusions, conscience privée, superstitions, et mise en scène...) à la lumière, à la révélation. Faut que je revois le film; c'est très loin de moi.
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Message par Borges Dim 22 Nov 2009 - 17:47

Confucius ne parlait pas de prodiges ou de manifestations paranormales. Le sage, l’homme de bien, met en garde contre ce type de manifestation et se refuse à troubler autrui avec de tels sujets. Le raisonnement remet les choses en place et replace le surnaturel dans l’ordre de la nature.

Léon Vandermeersch (1985) soutient que le surnaturel sauvage (celui des “esprits”, des “fantômes”) fut converti en surnaturel élaboré par les sages.

Le surnaturel converti est transformé en qi (matière-énergie cosmique), en yin et yang, en wunxing (cinq éléments ou cinq agents : terre, feu, bois, métal, eau), c’est-à-dire en forces agissant au plus profond de la nature, difficilement imaginables mais saisissables par la réflexion appliquée à la raison des choses.

Dans le surnaturel converti, la dimension de transcendance devient une dimension de profondeur dans l’immanence. Mais les Chinois diraient plutôt de “hauteur” jusqu’aux niveaux les plus essentiels du déploiement cosmique de ce qui est. Le sage tient un discours cosmologique, non religieux, et n’élabore pas le concept de transcendance, comme celui de divin. Le terme chinois de shenxue (théologie) renvoie à shen qui s’applique aussi bien aux âmes des êtres humains qu’à toutes sortes de déités. Il s’agit plutôt d’une individuation du surnaturel, du cosmologique, au niveau des “dix mille êtres”, c’est-à-dire du manifesté.


http://www.barbier-rd.nom.fr/espritcritiqueChine.html
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Message par Invité Lun 23 Nov 2009 - 13:02

Et puis il y a cette fin très frappante, le passage au négatif de la pellicule lorsque le moine se transforme en buddha. C'est très "expérimental", ça étonne dans un film de King Hu. Le film semble comme s'"enrayer", brutalement, tout s'arrête, comme si il ne pouvait rien y avoir après cela. Je pense à des fins aussi radicales que celle de "Two-Lane Blacktop" de Hellman, la pellicule qui brûle.

Ce passage, ce déchirement, est d'une violent incroyable, je trouve, alors que jusqu'à présent les scènes avec le moine nous offraient une symbiose "paisible" avec la nature.

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Message par wootsuibrick Lun 23 Nov 2009 - 15:34

J'ai le dvd sous la main. Je vais me revoir ça, puis tenter d'en reparler.
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Message par Invité Lun 20 Sep 2010 - 4:20

Tiens, pour l'anecdote, j'ai découvert l'autre jour sur Wikipédia que Jackie Chan a apparemment joué dans ce film, un de ses tout premiers rôles. Il a aussi joué dans "L'hirondelle d'or" de Hu.

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Message par Invité Lun 20 Sep 2010 - 15:04

JM a écrit:Il a aussi joué dans "L'hirondelle d'or" de Hu.

Pas un des gamins chanteurs quand même ?

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Message par Invité Lun 20 Sep 2010 - 23:26

Stéphane Pichelin a écrit:
JM a écrit:Il a aussi joué dans "L'hirondelle d'or" de Hu.

Pas un des gamins chanteurs quand même ?

Salut Stéphane,

Je sais pas du tout !

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