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Message par Invité Lun 27 Sep 2010 - 4:07

Ces militants qui jouent avec «Avatar» (MONDE DIPLOMATIQUE, Septembre 2010)


PAR HENRY JENKINS *

De la tribu indienne des Dongria Kondh, en lutte contre une compagnie minière britannique, aux Palestiniens des territoires occupés, de nombreux manifestants ont endossé l’identité des Na’vi, héros du film hollywoodien « Avatar ». Ce phénomène met en lumière le détournement de plus en plus fréquent, à des fins politiques, des références de la culture de masse.

EN FÉVRIER dernier, cinq activistes palestiniens, israéliens et internationaux défilaient dans le village occupé de Bilin, le corps peint en bleu à l’image des Na’vi, le peuple héros du film de science-fiction de James Cameron Avatar. L’armée israélienne a utilisé des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes contre ces manifestants à la peau azur, habillés de keffiehs et de foulards, et affublés de queues et d’oreilles pointues. Des images vidéo de l’incident, juxtaposées à des séquences empruntées au film hollywoodien, ont ensuite été diffusées sur YouTube. On y entend des personnages proclamer : « Nous allons montrer au Peuple du ciel qu’il ne peut pas s’emparer de tout ce qu’il veut ! Ceci, ceci est notre terre ! »

La fiction de James Cameron a fait couler beaucoup d’encre. Un critique de cinéma du Vatican y a vu une apologie du «culte de la nature (1) » et des militants écologistes, «la plus grande épopée jamais captée sur celluloïd à la gloire de l’environnement
(2) ». A gauche, beaucoup ont tourné en dérision les contradictions du film, qui à la fois condamne le colonialisme et reproduit les fantasmes de culpabilité des Blancs progressistes : ils l’ont rebaptisé «Danse avec les Schtroumpfs». Pour le militant de la communauté cherokee Daniel Heath Justice, le film attire l’attention sur le sort des peuples autochtones, même si Cameron simplifie à outrance les maux du colonialisme, en créant une représentation du complexe militaro-industriel qui donne beaucoup
à détester mais peu à comprendre (3). Cependant, chacune à sa manière, ces critiques rompent avec la vision d’une culture de masse triviale et insignifiante, dérivatif aux problèmes du monde réel.

Les manifestants de Bilin ont lié le combat des Na’vi pour leur éden à leurs propres tentatives de récupérer leurs terres (la vidéo diffusée sur YouTube insiste sur le contraste entre les forêts luxuriantes de Pandora et les terres arides et poussiéreuses des territoires occupés). L’imagerie plus grande que nature d’Avatar leur a offert une représentation de leur propre combat. Et, grâce à la puissante machine publicitaire hollywoodienne, ces images sont dorénavant reconnaissables dans le monde entier. La vue d’une étrange créature à la peau bleue se tordant de douleur dans la poussière, suffoquant sous les gaz lacrymogènes, a choqué, et a réactivé des messages que l’on préfère ignorer.

En s’appropriant Avatar, les militants ont neutralisé certaines des objections les plus couramment opposées au film. Des chroniqueurs conservateurs lui reprochaient d’encourager un sentiment antiaméricain; mais, dans la mesure où les images des Na’vi ont été reprises par des groupes protestataires dans le monde entier, le mythe a été recentré sur les incarnations locales du complexe militaro-industriel. A Bilin, il mettait aux prises les Palestiniens et l’armée israélienne; en Chine, les autochtones et le gouvernement de Pékin; au Brésil, les Indiens d’Amazonie et les compagnies forestières.

Sans aller jusqu’à se peindre en bleu, des intellectuels comme la romancière indienne Arundhati Roy et le philosophe slovène Slavoj Žižek ont profité de débats autour d’Avatar pour rappeler la situation critique des tribus autochtones indiennes Dongria
Kondh, qui tentent d’empêcher l’accès à leurs territoires sacrés, convoités pour leurs ressources en bauxite. L’Amérique n’est donc pas l’unique «empire du mal » sur la planète Terre. Des critiques de gauche craignaient que l’accent mis sur les protagonistes humains blancs du film n’offre aux spectateurs l’occasion d’une identification facile. Mais c’est le costume bleu des Na’vi que les contestataires cherchent à revêtir.

De fait, les « militants “Avatar” » ne font qu’exploiter un très vieux langage de la protestation populaire. Dans son essai devenu un classique, « Woman on Top » (4), l’historienne de la culture Natalie Zemon Davis nous rappelle qu’à l’aube de l’Europe moderne les contestataires masquaient leur identité derrière des jeux de rôles, portant des costumes de peuples, réels (les Maures) ou imaginaires (les Amazoniens), perçus comme une menace pour la civilisation. Dans le Nouveau Monde, les bons citoyens de Boston perpétuèrent cette tradition en se déguisant en Amérindiens pour jeter des cargaisons entières de thé dans le port de la ville. Et à La Nouvelle-Orléans, les Noirs des Etats-Unis formaient leurs propres tribus indiennes du Mardi- Gras en recourant à l’imagerie du Wild West Show de Buffalo Bill pour exprimer leur quête de respect et de dignité – une coutume récemment remise en lumière par David Simon dans sa série « Treme », diffusée sur HBO.

Dans son livre Dream, le militant Stephen Duncombe affirme que la gauche américaine a adopté un langage rationnel, froid et élitiste, qui s’adresse à l’esprit plutôt qu’au coeur (5). Proscrivant le vocabulaire trop sophistiqué de la plupart des discours politiques, elle pourrait puiser sa force émotionnelle dans des récits déjà appréciés par un public de masse.

IL Y A PEU, une équipe de chercheurs de l’école Annenberg de communication et de journalisme de l’université de Californie du Sud a dressé une liste de groupes ayant réinvesti la culture pop pour défendre la justice sociale. Elle s’est plus particulièrement intéressée à la « culture participative » : à la différence des médias de masse, le numérique a permis à un grand nombre d’utilisateurs de s’approprier les moyens de communication et de détourner la culture à leurs propres fins. Les récits partagés constituent la base de réseaux sociaux puissants et génèrent des espaces où l’on peut débattre d’idées, produire des connaissances et créer une culture. Dans ce processus, les fans acquièrent des compétences et bâtissent une infrastructure locale afin de partager leurs perspectives sur le monde. De même que, dans les sociétés de chasseurs, les jeunes s’amusent avec leurs arcs et leurs flèches, dans une société de l’information, ils s’entraînent au maniement de cette dernière.

Le fondateur de l’Alliance Harry Potter, M. Andrew Slack, qualifie ce phénomène d’«acupuncture culturelle», suggérant que son organisation aurait identifié un « point de pression » vital de l’imaginaire commun, qu’il voulait relier à des préoccupations sociales plus larges. L’Alliance Harry Potter a déjà sensibilisé plus de cent mille jeunes dans le monde aux guerres en Afrique, aux droits des travailleurs et au mariage gay, levé des fonds pour Haïti ou pour faire campagne contre la concentration des médias. Le jeune Harry Potter, avance M. Slack, a compris que le gouvernement et les médias mentaient au public afin de cacher le mal tapi en leur sein, et a formé avec ses camarades l’armée de Dumbledore pour changer le monde. Il a donc demandé à ses disciples quels maux de ce monde celle-ci devait combattre. Dans le Maine, par exemple, l’Alliance a organisé une compétition entre les diverses maisons de Poudlard – l’école de sorcellerie que fréquente le jeune magicien –, dans laquelle les
participants devaient réunir le plus grand nombre d’électeurs pour un référendum sur l’égalité des droits dans le mariage. Cette approche ludique du militantisme permettrait par ailleurs de mobiliser des jeunes qui se sentent exclus du processus politique.
DE TELLES initiatives peuvent paraître cyniques (renoncement au pouvoir de la raison pour convertir les masses) ou naïves (attachement à des mythes plutôt qu’à la réalité). Mais il y a toujours un moment où l’on s’arrache aux réconforts de l’imaginaire pour se confronter aux difficultés de la situation sur le terrain.

Ce « militantisme » ne requiert pas forcément que l’on se peigne en bleu; il exige que l’on fasse preuve de créativité face aux images diffusées par les médias. La droite recourt également à ce genre de démarche. Aux Etats-Unis, le dessin animé Dora the Explorer, qui raconte les aventures imaginaires d’une petite fille latino-américaine et de son singe, a été détourné par les deux camps politiques pour illustrer les conséquences de la nouvelle loi sur l’immigration votée en Arizona. Les membres ultraconservateurs des Tea Parties ont utilisé une caricature représentant le président Barack Obama sous les traits du Joker, le méchant dans The Dark Knight, l’un des films de la série Batman, comme une arme dans leur bataille contre sa réforme de la santé.

De telles analogies ne rendent évidemment pas compte des subtilités de ces débats politiques, de même que l’on ne saurait réduire les différences entre le Parti républicain et le Parti démocrate à celles qui séparent les éléphants des ânes – leurs emblèmes respectifs, héritage des bandes dessinées politiques d’une autre époque. Avatar ne peut faire justice au vieux combat pour les territoires occupés, et la vidéo sur YouTube ne peut se substituer à un discours informé sur la question. Mais l’aspect spectaculaire et «participatif» de ce militantisme fournit à certains nouveaux venus à la chose politique l’énergie
émotionnelle nécessaire à la poursuite du combat. Et pourrait les mener à d’autres formes d’action.

(1) Federico Lombardi, L’Osservatore Romano, 10 janvier 2010.

(2) Harold Linde, «Is Avatar radical environmental propaganda?», Mother Nature Network, 4 janvier 2010, www.mnn.com
(3) « Guest Blogger : Daniel Heath Justice on “Avatar”», First Peoples, 20 janvier 2010, www.firstpeoplesnewdirections.org
(4) Natalie Zemon Davis, « Women on top : Symbolic sexual inversion and political disorder in early modern Europe », dans
Barbara Babcock (sous la dir. de), The Reversible World : Symbolic Inversion in Art and Society, Cornell University Press, Ithaca, 1978.
(5) Stephen Duncombe, Dream : Re-imagining Progressive Politics in an Age of Fantasy, The New Press, New York, 2007. Lire l’extrait paru dans Manière de voir, no111, «Culture, mauvais genres», juin- juillet 2010.

* Ancien directeur du programme d’études comparées des médias au Massachusetts Institute of Technology (MIT), doyen du département de communication, journalisme et arts du cinéma à l’université de Californie du Sud. Auteur notamment de Fans, Bloggers and Gamers : Exploring Participatory Culture, New York University
Press, 2006.

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Message par Eyquem Jeu 30 Aoû 2012 - 1:53




Qui n’a pas de main
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Message par wootsuibrick Dim 25 Mai 2014 - 17:39

Borges a écrit:Je pense (suis-je le seul? le premier? )que la machine et le devenir-machine de l'homme sont une donnée constitutive de la  guerre, depuis qu'il y a la guerre.

La guerre, c'est l'homme, la bête et la machine, au moins.

La guerre?

Qui?
Quoi?


J'ai vu le dernier Robocop aujourd'hui et ce que tu soulignes là me semble au centre de ce film... Et pour en revenir aussi à ce topic y a aussi une situation du film Robocop, le réveil de Murphy dans le corps de Robocop, qui est très proche de celle où le héros de avatar se réveille en homme bleu.
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Message par wootsuibrick Lun 26 Mai 2014 - 13:43

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