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L'"Apocalypse" selon Georges Didi-Huberman

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Message par Borges Jeu 24 Sep 2009 - 15:18

Je copie/colle ici le texte posté par Eyquem; pour le rendre un peu plus visible, lisible; pensable, et à discuter.



En mettre plein les yeux et rendre « Apocalypse » irregardable

par Georges Didi-Huberman



Les images nous rendent l’histoire visible. Elles assument un rôle crucial dans notre façon de comprendre ce qui s’est passé, ce qui se passe autour de nous. Un rôle crucial, cela veut dire  : à la croisée des chemins, donc pour le meilleur ou pour le pire. C’est en cela que les images – y compris les images du passé – sont toujours des objets politiques et, même, des actes politiques  : des prises de position. Tant il est vrai qu’une image ne vaut que par la position qu’elle occupe dans un montage où interviennent, bien sûr, d’autres images choisies à propos, mais aussi des mots, des pensées, des prises de position ¬devant l’histoire.


La série télévisée Apocalypse nous rend « visibles » un certain nombre de documents relatifs à la Seconde Guerre mondiale. Nous les rend-elle regardables, ¬« lisibles », pensables, compréhensibles pour autant ? Quelle est donc sa position  ? Les réalisateurs, les producteurs et les directeurs de programme se sont ¬contentés d’adopter une posture typique du monde commercial, l’autocélébration  : projet « pharaonique », émission « miracle », « révélation » de l’histoire… On a remonté des archives visuelles en leur restituant, dit-on, « une qualité d’image tout simplement époustouflante  ! De quoi convaincre tout le monde  ! » (dixit Daniel Costelle, l’auteur du commentaire). La chaîne de ¬télévision, de son côté, a réussi la prouesse de transformer une « commémoration » – le soixante-dixième anniversaire du déclenchement de la guerre – en cet « événement » nommé prime time.


Mais de quel événement parlons-nous  ? Et de quoi veut-on nous ¬convaincre  ? Avant tout de la puissance même dont se targue la machine télévisuelle. Les réalisateurs nous disent avoir fabriqué un objet capable de « carrément séduire un jeune public », de « bluffer » les spectateurs par leurs techniques de traitement de l’image, en sorte que, devant les archives remontées, colorisées, sonorisées, « les jeunes vont s’éclater » ( redixit Daniel Costelle). Au même moment, le film s’autoproclame en voix de la vérité, débutant sur ces mots qui vont faire date dans l’histoire de l’immodestie  : « Ceci est la véritable histoire de la Seconde Guerre mondiale. » On comprend qu’il n’y ait pas, au générique, un seul nom d’historien de premier plan (comme Raul Hilberg avait pu assumer son rôle de chercheur dans Shoah de Claude Lanzmann). Les historiens sont en général bien trop modestes – et respectueux – devant leur objet pour oser croire « bluffer » qui que ce soit ou prétendre « convaincre tout le monde » avec leurs hypothèses.


Les trois premières minutes d’Apocalypse forment un cocktail parfaitement stéréotypé de mort (pour « bluffer »  ?), de haine (dont Mathieu Kassowitz, l’auteur du film du même nom, nous ressassera le motif à longueur d’épisodes) et de sexe (pour « s’éclater »  ?)  : cadavres dans la rue, sang, flammes, plus le récit du viol d’une femme allemande qui se termine par le dicton « mieux vaut avoir un Russe sur le ventre qu’un Américain au-dessus de la tête ». Les trois dernières minutes, quant à elles, débitent un montage qui fera se succéder les ruines d’Hiroshima, une vision de camp, l’héroïsation des cameramen, le retour de Rose – petite fée de toute la série, comme le « petit chaperon colorisé », rouge comme il se doit, de la Liste de Schindler – et enfin un vrai baiser sur la bouche ¬digne du meilleur cinéma américain. C’est sans doute ainsi que l’on veut « carrément séduire un jeune public ». C’est ainsi que le « jeune » spectateur en aura plein les yeux.


En mettre plein les yeux  : c’est le contraire exactement de donner à voir. Mais l’appareil télévisuel, nous en faisons l’expérience chaque jour, fonctionne à la surenchère et à l’autosatisfaction  : nous avons réussi à placer huit cents plans par épisode, nous avons reconstitué les couleurs, nous avons ajouté les sons absents des images originales… Autant dire que les documents de l’histoire deviennent des confettis dans un montage qui veut ressembler à un feu d’artifice d’images. Les réalisateurs ont bien anticipé la possible polémique avec les puristes du document. Mais il ne s’agit pas de purisme, justement  : rien n’est pur en ce domaine, et toute image – dès sa prise de vue – est le résultat d’une opération technique, d’une médiation, donc d’une manipulation. La question est de savoir ce qu’on veut faire de nos mains qui manipulent  : étouffer les images ou bien les traiter avec tact. Il s’agit aussi d’avoir l’honnêteté minimale de ¬reconnaître les limites de ce qu’on fait. Pourquoi prétendre restituer la « vérité en histoire » tout en reconnaissant vouloir nous « séduire » et nous « bluffer »  ? Bluffer, cela veut dire impressionner – la guerre est impressionnante, de toute façon –, mais cela veut aussi dire mentir.


Que la colorisation d’Apocalypse ait été obtenue par des procédés nouveaux et performants n’entre pas en ligne de compte dans ce débat. Ce qui compte est l’acte, et son résultat. Coloriser, technique vieille comme le monde, n’est rien d’autre que maquiller : plaquer une certaine couleur sur un support qui en était dépourvu. C’est ajouter du visible sur du visible. C’est, donc, cacher quelque chose, comme tout produit de beauté, de la surface désormais modifiée. Ainsi rend-on invisibles les réels signes du temps sur le visage – ou les images – de l’histoire. Le mensonge ne consiste pas à avoir traité les images mais à prétendre qu’on nous offrait là un visage nu, véritable, de la guerre, quand c’est un visage maquillé, « bluffant », que l’on nous a servis.


François Montpellier, le technicien de colorisation d’Apocalypse, admet lui-même que son traitement des images consiste, je le cite, à « unifier, dans une même continuité visuelle, des documents provenant parfois de sources différentes ». Mais la continuité visuelle n’est qu’un choix esthétique et narratif parfaitement ¬arbitraire, tous les monteurs le savent bien. La véritable histoire, quant à elle, n’est faite que de discon¬tinuités, ne serait-ce que parce qu’elle a été regardée, vécue, enregistrée selon des points différents. ¬Apocalypse, au contraire, veut nous faire croire qu’un seul ¬cinéaste, avec le même sens des couleurs, aurait tout vu à la fois en tous les points du globe. Pourquoi voit-on partout ce même ciel bleu pâle des cartes postales rétros  ? Pourquoi l’Ange bleu devient-il tout jaune ? Pourquoi le cadavre flottant dans la mer, à Omaha Beach, se découpe-t-il sur un beau fond outremer (la mer était peut-être verte et Samuel Fuller, qui était sur place, raconte que l’eau près du rivage était toute rougie du sang des morts)  ? Pourquoi coloriser Dachau et pas Auschwitz  ? Pourquoi diviser ¬Buchenwald en noir pour certains plans, en couleurs pour d’autres  ? Pourquoi l’enfer atomique est-il vert et mauve comme dans un film de science-fiction  ? En justifiant le renoncement à coloriser les images de la Shoah pour « ne laisser aucun doute sur leur authen¬ticité » et pour que « personne ne puisse y trouver matière à supercherie », les auteurs d’Apocalypse admettent que tout le reste de leur film peut se voir comme une véritable matière à supercherie.


Ce qui peut être dit de la colorisation des images vaut également pour leur sonorisation et leur commentaire. Gilbert Courtois connaît la différence de bruit entre un moteur Yakovlev et un moteur Stuka, fort bien. Moyennant quoi il se targue de n’avoir donné que des sons authentiques. Quant à Daniel Costelle, il émaille également son récit de noms authen¬tiques  : August Von Kageneck, Gaston Cirech, ¬Armand (l’Alsacien enrôlé dans les « malgré-nous »), etc. Mais les gros plans associés à ces noms forment-ils un montage authentique  ? Même le chien berger qui passe dans une rue de Berlin se voit associé au nom de Blondie, le chien de Hitler. Les documentalistes d’Apocalypse n’ont choisi que des images authentiques, mais le montage de deux authenticités qui n’ont rien à voir – par exemple tel visage et tel nom propre – n’est que pur mensonge au regard de l’histoire.


Notre langue elle-même nous prévient à chaque fois de toutes ces ambiguïtés lorsqu’elle distribue des sens opposés pour des mots tels que histoire (veut-on nous rendre l’histoire visible, ou bien veut-on juste nous raconter des histoires  ?), légende (veut-on nous expliquer ce qu’une image dénote, ou bien veut-on juste construire un récit légendaire  ?) et, bien sûr, image (veut-on nous rendre visible quelque chose du réel, ou bien veut-on juste nous en mettre plein les yeux  ?). Les images d’Apocalypse ne constituent en rien notre patrimoine historique. Elles forment juste un montage et un traitement contestables de ce patrimoine. En ce sens, elles ne nous appartiennent pas. Elles n’appartiennent qu’au monde de la télévision qui les commercialise habilement.


La série Apocalypse n’a restauré ces images que pour leur rendre une fausse unité, un faux présent de reportage et de mondiovision. Elle a pensé que nous étions trop stupides pour -accepter de voir des bribes blêmes, des lacunes, des bouts de pellicule rayés à mort. Elle s’est tout approprié et ne nous a rien restitué. Elle a voulu nous en mettre plein les yeux et, pour rendre les images bluffantes, elle les a surexposées. Façon de les rendre irregardables.


Ecrans, Libération, mardi 22/09/09


http://www.ecrans.fr/En-mettre-plein-les-yeux-et-rendre,8148.html
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Message par Borges Jeu 24 Sep 2009 - 15:22

JM a écrit:Il y a encore des gens bien pour monter au créneau dans la presse. Chapeau Didi-Huberman !

J'ai pensé à Tarantino en lisant la fin du texte, mais curieusement pas à son dernier film mais au précédent :

Elle a pensé que nous étions trop stupides pour ­accepter de voir des bribes blêmes, des lacunes, des bouts de pellicule rayés à mort. Elle s’est tout approprié et ne nous a rien restitué.

Chez QT, les bouts de pellicule rayés à mort sont aussi du "maquillage". Le tout est de trouver ce qu'il maquille ?


Borges a écrit:Hello à tous : pas encore lu le texte de GDH, mais il est bien JM que tu songes à QT quand il fait allusion à Godard et à la fameuse phrase des Histoire(s) du cinéma : « Même rayé à mort un simple rectangle de 35 mm sauve l’honneur de tout le réel. »; cf "images malgré tout", où GDH discute cet énoncé...
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Message par Eyquem Sam 26 Sep 2009 - 12:30

On peut utilement compléter le texte de Didi-Huberman par la critique de Vincent Artuso, qui porte davantage sur le commentaire et le montage, et la lecture des événements qu'ils induisent.

Le texte est long mais il en vaut la peine, si le sujet vous intéresse. Il me semble que la thèse peut être résumée par ces deux passages :


« Douce France » des années 30 regrettée, Vichy présenté de manière indulgente, sa responsabilité dans la déportation des juifs de France éclipsée, partis de gauche accusés d'avoir permis l'arrivée au pouvoir des nazis, chambres à gaz et bombardements des villes allemandes juxtaposés : telle est la manière d » « aborder l'Histoire d'une façon nouvelle » dans Apocalypse.

(...)

Mais laissons là ces débats et venons-en enfin au fait : Clarke et Costelle reprennent des thèses qui font fortement songer à celles défendues par les historiens révisionnistes au cours de la « querelle des historiens », dans les années 80.

En substance, ceux-ci mettaient en doute l'existence d'une « voie singulière » de l'histoire allemande, menant inévitablement au nazisme ; interprétaient les crimes nazis comme une réaction aux crimes communistes ; établissaient un parallèle entre l'holocauste et les revers subis par le IIIe Reich.

Mais en entier, ce sera mieux.

Pour info : Vincent Artuso explique dans les commentaires qu'il est spécialiste de cette période et qu'il a lui-même co-écrit une série de 25heures sur le procès de Nuremberg, pour France Culture.

Autre info, notable à mon avis: jeter un oeil sur les précédentes productions de Clarke et Costelle, pour voir quel aspect de la guerre, de l'histoire, les intéresse :
http://www.cccprod.com/production-histoire.php

Les dangereuses approximations d'« Apocalypse », docu de France 2
Par Vincent Artuso | universitaire | 17/09/2009


« Apocalypse : la Seconde Guerre mondiale » est incontestablement l'événement de la rentrée chez France Télévisions. Cette série documentaire, en six épisodes de 52 minutes, s'est donnée pour ambition de « raconter la véritable histoire de la Seconde Guerre mondiale, pour que les générations se souviennent de l'Apocalypse ».

Pour cela, ses auteurs, Daniel Costelle et Isabelle Clarke, se sont appuyés sur près de deux ans de recherches, qui leur ont permis de collecter 650 heures d'archives filmées, dont la moitié sont inédites. Mais surtout, les images ont été colorisées, le son d'époque a été remasterisé et la narration confiée à Mathieu Kassovitz.

Clarke et Costelle confient avoir volontairement choisi de « faire d'Apocalypse une œuvre cinématographique », pour « aborder l'Histoire d'une façon nouvelle » et ainsi « transmettre aux jeunes générations la mémoire de cette folie meurtrière généralisée ».

Impressionnés par le dispositif, les médias ont, dans l'ensemble, encensé le projet. Sans plus d'explications, le fonds historique a tout naturellement été crédité de la rigueur et de la nouveauté reconnues à la forme.

Pourtant, à y regarder de plus près, le traitement de l'histoire dans « Apocalypse » n'a non seulement rien de nouveau, mais il véhicule même un discours franchement réactionnaire.

« Douce France » des années 30 regrettée, Vichy présenté de manière indulgente, sa responsabilité dans la déportation des juifs de France éclipsée, partis de gauche accusés d'avoir permis l'arrivée au pouvoir des nazis, chambres à gaz et bombardements des villes allemandes juxtaposés : telle est la manière d » « aborder l'Histoire d'une façon nouvelle » dans Apocalypse.

La « Douce France » des années 30 n'était pas si paisible

Prenons d'abord la méthode. Elle est purement événementielle et s'abstient de toute analyse économique ou sociale. Mince concession à l'histoire des mentalités, la vie quotidienne est parfois abordée, mais sans troubler un récit rythmé par les grandes figures historiques et les faits militaires.

Ce qui fait que de l'espace est accordé à des détails, tant qu'ils ont un rapport quelconque avec les combats. Dans l'épisode 2, vingt-et-une secondes (ce qui est long en télé) sont ainsi consacrées à la découverte de la réserve de caleçons de l'armée française par la Wehrmacht.

La situation sociale et politique de l'Allemagne de l'entre-deux-guerres, puis la mise en place du régime nazi sont en revanche survolées en à peine douze minutes.

La même chose vaut pour la description de la France d'avant-guerre. Oubliés la crise économique, les tensions politiques et sociales, les ligues fascistes ou encore le Front populaire. Après tout, « la France est encore un pays très agricole » et c'est, finalement, un paquebot de luxe qui, selon Clarke et Costelle, semble le mieux la décrire :

« Normandie, symbole d'une époque qui va disparaître. Ce magnifique transatlantique représentait l'apogée d'un style, d'une douceur de vivre, du progrès et de la paix. »



Confusion sur les responsabilités de la débâcle de juin 40
En conséquence, la défaite n'est considérée qu'à travers un argumentaire d'ordre militaire qui, neutre en apparence, est en réalité fort orienté.

A propos du nombre de chars dont son armée dispose, l'on apprend que « la France en produit bien trois cents par mois [en mai 1940, les Alliés disposent d'autant de chars que la Wehrmacht sur le front ouest, note de l'auteur] mais les disperse dans tous les secteurs, en appui de l'infanterie. »

Après un blanc de près de dix secondes, le texte reprend :

« L'aviation française souffre aussi d'un grand retard. La France a commandé aux Etats-Unis 4 000 avions. »



Comment peut-on n'avoir aucun retard dans la production de chars et en avoir aussi dans la production d'avions ?

Pour comprendre ce curieux paradoxe, il faut revenir aux débats qui, pour schématiser, ont longtemps opposé la gauche à une certaine droite. Selon la gauche, la défaite était due au conservatisme de l'état-major qui n'avait pas compris que l'heure était à la création de puissantes unités de chars, non à leur dispersion. Pour la droite non-gaulliste, c'était le Front populaire qui, en payant des congés aux ouvriers au lieu de réarmer le pays, portait la responsabilité du désastre.

L'effort de Clarke et Costelle tend à mettre en avant cette dernière interprétation sans attaquer de front la première.

Autre exemple : les erreurs du général Gamelin, commandant en chef des troupes alliées au début de la guerre, sont exposées par la voix-off dans une langue neutre, en évitant tout jugement.Quand il s'agit par contre de mettre en évidence le manque d'équipement, la parole est donnée à un soldat de 2e classe qui déclare :

« Il fallait vraiment qu'on manque de matériel de guerre… On avait un fusil pour deux, par camion. On avait une boîte de dix cartouches qu'on n'avait pas le droit d'ouvrir. Quelle misère ! Parce que si on avait eu de quoi se battre, on se serait battu. On n'est pas du genre à aimer les Boches ! »



C'est également grâce à cette approche en apparence neutre, car événementielle, que Vichy peut être présenté sous un jour un peu moins négatif.

Une présentation indulgente de Vichy
Malgré son impréparation et une gestion politique lamentable (voix off : « Personne n'a envie de la faire cette guerre, pas même le gouvernement, qui a bien été obligé de gesticuler, mais sans convictions »), l'armée française s'est tout de même battue durant la « Drôle de guerre ».

Clarke et Costelle en veulent pour preuve « les incursions de commandos de choc, les corps-francs, dont le héros, Joseph Darnand, est nommé premier soldat de France. Il deviendra l'un des plus féroces collaborateurs des Allemands et finira fusillé. L'armée française, malgré ses héros et sa supériorité numérique, ne bougera plus. »

Sous-entendu : Joseph Darnand, le fondateur de la Milice, fut un héros qu'un funeste destin détourna du droit chemin, pour des raisons qui ne sont pas indiquées. Evidemment, en évitant de parler du développement dans l'avant-guerre d'une extrême-droite révolutionnaire, au sein de laquelle Darnand était particulièrement actif, il est possible d'interpréter son engagement ultérieur sur l'air mélancolique du « soldat perdu ».

Autre point. Malgré la défaite, la flotte française est quasiment intacte :

« Hitler a demandé seulement qu'elle soit désarmée dans ses ports d'attaches, car il a eu peur qu'elle se joigne à l'Angleterre. Churchill a la crainte inverse : que les Allemands ne s'en emparent. Il donne l'ordre à la Royal Navy de la neutraliser. »



Une forte escadre britannique se dirige alors vers Mers-el-Kébir, l'une des principales bases navales françaises :

« Churchill ne veut prendre aucun risque, il fait envoyer ce signal : rejoignez-nous ou sabordez-vous ou partez pour les Antilles. Vichy n'est informé que des deux premiers points et refuse. »



Le message implicite de ce passage est que, s'il en avait eu connaissance, Pétain aurait éventuellement choisi cette option, ce qui lui aurait permis de reprendre un jour la lutte aux côtés du général De Gaulle. Cette douloureuse zone d'ombre qu'est aujourd'hui Vichy ne serait donc que le résultat d'une transmission défectueuse.

Ce soupçon d'apologie -non de connivence- se confirme dans la suite de la série, moins par ce qui est dit que par ce qui ne l'est pas. Dans l'épisode 3, la politique de collaboration avec l'Allemagne est condamnée. Le statut des juifs du 3 octobre 1940, qui évince les Français israélites de la vie publique, y est aussi évoqué.

Il n'en va pas de même de la progression criminelle de cette politique antisémite de Vichy, sa responsabilité dans les rafles, les milliers d'hommes, de femmes et d'enfants juifs livrés à l'Allemagne nazie.

Pire encore, bien que l'épisode 4 évoque la venue d'Heydrich à Paris en 1942, il y est juste dit que cette visite avait un rapport avec la « solution finale » et non que le bras droit d'Himmler venait négocier directement avec les autorités françaises les modalités de déportation des Juifs de France. Pourquoi frôler cette information sans la donner ?

La gauche allemande responsable de la guerre
Clarke et Costelle racontent l'histoire de la Seconde Guerre mondiale de manière partielle car partiale. Leur vision du monde est d'ailleurs moins frappante lorsqu'on se contente d'isoler les acteurs de l'histoire qui sont décrits avec indulgence. Il faut les mettre en rapport avec ceux qui n'ont pas droit au même traitement pour en saisir la cohérence.

Revenons au début de l'épisode 1. L'Allemagne y est certes présentée comme un pays endeuillé par la Première Guerre mondiale et frappé par la crise des années 30, mais aussi comme la patrie de Marlene Dietrich et de Thomas Mann.

Berlin, y apprend-on, est « l'une des capitales de la culture européenne, l'une des villes les plus libres au monde ». Rien donc ne laisse pressentir l'arrivée au pouvoir des nazis qui, à en croire la narration, va frapper l'Allemagne comme une sorte de catastrophe naturelle :

« Tout bascule en 1933. Hitler et ses milices armées comme les SA (…) font main basse sur l'Allemagne par l'intimidation, par la démagogie, par l'exploitation de l'amertume des anciens combattants allemands. »



La seule explication d'ordre politique à cette apparition intempestive serait la suivante :

« Les nazis profitent de la désunion des partis de gauche que même Hitler semble vouloir séduire en levant le poing. Les communistes allemands sont aux ordres de Moscou pour qui les socialistes sont les vrais adversaires. Pas d'alliance avec eux. »


Cela n'est pas faux. Il est par contre étonnant de l'affirmer en occultant complètement la coalition avec les conservateurs, qui a permis aux nazis d'arriver légalement au pouvoir. Rien non plus sur le vieux maréchal Hindenburg qui, en tant que président, contribua à légitimer le chancelier Hitler.

Le poids du pacte germano-soviétique

Les communistes ne sont, par ailleurs, pas seulement responsables de l'arrivée au pouvoir d'Hitler, mais également du déclenchement de la guerre. Un peu plus loin, il est dit :

« Pour dissuader Hitler, l'URSS est le dernier recours. Elle est liée à la France par un traité d'assistance mutuelle. (…) Malgré leur crainte du communisme, les Occidentaux comptent sur l'URSS. Mais Hitler va les prendre de vitesse. »


Un accord est signé en août 1939. « Pour le monde entier, le pacte germano-soviétique, c'est le signal de la guerre. »

Question : comment les Occidentaux peuvent-ils se laisser « prendre de vitesse » alors que la France est déjà liée à l'URSS par un traité d'assistance mutuelle ? Ce paradoxe s'explique peut-être par le fait que la signature de ce traité en 1935 ne fut jamais suivie de gestes concrets, la crainte du communisme l'emportant finalement au sein de la classe politique française.

Et puis la France était aussi liée à la Tchécoslovaquie par un tel traité d'assistance militaire, ce qui ne l'a pas empêchée de consentir au dépeçage de ce pays en faveur d'Hitler. Or, en évoquant les accords de Munich un peu plus tôt, Clarke et Costelle n'ont pas mentionné ce fait.

Evidemment, cela aurait expliqué les doutes de l'URSS quant à la volonté de la France de rester ferme face à l'Allemagne et, par là même, gêné leur argumentation.

Un parallèle entre les bombardiers alliés et les chambres à gaz ?
Mais laissons là ces débats et venons-en enfin au fait : Clarke et Costelle reprennent des thèses qui font fortement songer à celles défendues par les historiens révisionnistes au cours de la « querelle des historiens », dans les années 80.

En substance, ceux-ci mettaient en doute l'existence d'une « voie singulière » de l'histoire allemande, menant inévitablement au nazisme ; interprétaient les crimes nazis comme une réaction aux crimes communistes ; établissaient un parallèle entre l'holocauste et les revers subis par le IIIe Reich.

Nous avons déjà vu que, dans Apocalypse, l'arrivée au pouvoir des nazis est présentée comme une rupture historique. En ce qui concerne le second point, voyons la façon dont est décrite la « shoah par balles », à partir de l'épisode 3.

On commence par nous montrer des images de liesse qui auraient été tournées dans des villes baltes, à l'arrivée des troupes allemandes :

« La terreur a été telle que tout vaut mieux que le NKVD, la terrible police politique soviétique, qui s'est retirée en assassinant les Baltes anticommunistes dans les prisons.

Les antisémites locaux accusent les juifs d'être complices des communistes. Ils les rassemblent, leur font porter les corps. Les Baltes se livrent ensuite à des pogroms, des violences contre les Juifs, que les Allemands favorisent avec comme consigne : ne pas laisser de traces. »



Non seulement les massacres de Juifs sont explicités par l'évocation d'un lien de causalité avec les exactions du NKVD, mais l'initiative en est, de plus, imputée aux populations locales, les Allemands se contentant de les « favoriser ».

Cette même structure narrative est reprise pour décrire les massacres en Ukraine. Ce n'est qu'ensuite qu'entrent en scène les Einsatzgruppen, les « commandos d'exécution », mis en place, nous dit-on, par Himmler et Heydrich -donc les SS. La complicité de la Wehrmacht, pourtant connue aujourd'hui, est tue.

Troisième point. L'interprétation de la « solution finale » par Clarke et Costelle n'est pas « intentionnaliste » mais « fonctionnaliste », c'est-à-dire qu'ils estiment qu'Hitler n'avait pas d'emblée prévu le génocide mais que cette solution s'imposa à lui au gré des événements.

En soi, cela n'a rien de révisionniste, d'autres historiens le pensent. Ce qui l'est par contre, c'est de voir dans l'holocauste une action de représailles des Allemands. Cette thèse n'est pas exprimée explicitement dans « Apocalypse », mais elle est induite par la construction narrative.

Une fâcheuse erreur de chronologie

Au bout d'un quart d'heure, l'épisode 4 évoque les bombardements massifs des villes allemandes par les Alliés. Des raids qui feront de centaines de milliers de victimes civiles. Sur des images de villes dévastées et de civils allemands sous le choc, le texte dit :

« Quant aux Allemands, ils commencent à mesurer les conséquences de la politique hitlérienne. Le régime hitlérien qui s'enfonce dans la démesure meurtrière. Hitler, Goering, Himmler, son adjoint Heydrich mettent en place ce qu'ils appellent la “solution finale”, l'extermination des juifs d'Europe, organisée à la conférence de Wannsee, près de Berlin, en janvier 1942. »



L'intention est-elle de suggérer un lien de cause à effet entre ces deux sujets, abordés l'un à la suite de l'autre, ou est-ce simplement une construction hasardeuse ?

D'un strict point de vue chronologique, parler d'abord des bombardements massifs, puis de la « solution finale » est, en tous cas, incorrect. La première ville allemande à subir un tel sort fut Lübeck, dans la nuit du 28 mars 1942. La conférence de Wannsee avait eu lieu deux mois plus tôt, le 20 janvier 1942.

L'impressionnant dispositif déployé pour produire « Apocalypse » a à ce point réussi à faire diversion que même les rares critiques négatives n'ont visé que sa forme : était-il vraiment nécessaire de coloriser les images ? Pourquoi celles liées à l'Holocauste n'ont-elles pas subi le même traitement ?

Cette dernière question n'a d'ailleurs pas été poussée au bout de sa logique. Interrogé dans le Parisien du 8 septembre, sur la raison pour laquelle les images en rapport avec l'Holocauste avaient été laissées en noir et blanc, Daniel Costelle a répondu que c'était pour ne pas risquer d'offrir des arguments aux négationnistes, tentés de crier à la manipulation.

Clarke et Costelle croient-ils donc si peu en leur propre affirmation de vouloir « raconter la véritable histoire de la Seconde Guerre mondiale » ? Si leur approche était réellement convaincante, ne pourrait-elle pas, au contraire, faire taire définitivement les assassins de la mémoire ? Il n'est pas à exclure que, conscients de leur tartufferie, ils aient préféré ne pas la pousser aussi loin.

http://www.rue89.com/tele89/2009/09/17/les-dangereuses-approximations-dapocalypse-docu-de-france-2

La lecture des commentaires sélectionnés, et des 18 pages de débat sur le forum Passion Histoire est aussi intéressante.
http://www.passion-histoire.net/viewtopic.php?f=69&t=21642
Sur ce forum, on s'aperçoit par exemple que la colorisation n'est pas vraiment ce qui pose problème.
Eyquem
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Message par Eyquem Sam 26 Sep 2009 - 13:18

J'ai lu avec le plus grand intérêt le "chat" de Clarke et Costelle sur le forum de France 2 :

Le but est de toucher les jeunes générations qui ne savent rien de cette guerre, redonner une mémoire vive, renouer un lien entre générations. Nous avons réussi et en sommes fiers.
...
D'où tirez vous cette certitude? Cette information a été vérifiée et validée par nos conseillers historiques.
...
J'ai (Daniel Costelle) réalisé une oeuvre célèbre : "Histoire de l'Aviation". Nous avons d'autre part des spécialistes sur chaque thème abordé qui nous ont aidés. Le rédacteur en chef de la revue "Le Fana de l'Aviation", Michel Bénichou, a écrit dans son dernier numéro que nous avions fait un chef-d'oeuvre.
...
Comment osez vous parler d'ignorants et de "vrais historiens", c'est honteux.
...
Merci à vous et pour voir cette année 1944 comme peut-être vous ne l'avez jamais vue, ne manquez surtout pas les deux dernières émissions, mardi 22 septembre à 20h35!
...
Merci! Nous sommes des passeurs d'histoire pour les nouvelles générations. Ce qui nous motive aussi beaucoup, c'est de raconter l'Histoire d'une manière nouvelle avec des images inédites. De ce point de vue, ne manquez surtout pas les deux dernières émissions.
....
Merci!
...
Merci
...
Rassurez vous, tout est exact et vérifié par notre équipe de conseillers historiques.
...
Merci! Le livre "Apocalypse" (Editions de l'Acropole) est déjà disponible en magasin. Le DVD le sera le 23 septembre, mais vous pouvez déjà le commander sur le site de France Télévisions
...
Nous ne cherchons pas à vous faire "avaler" quoi que ce soit. Nous sommes sûrs de nos sources, 30 ans d'expérience nous permettent de vraiment distinguer les reconstitutions, des images prises sur le vif.
...
Merci à tous! Rendez-vous mardi prochain pour les deux derniers épisodes d'Apocalypse sur France 2!
Passionnant.

En entier ici (mais je n'ai coupé que quelques messages) :
http://forums.france2.fr/france2/http-forums-france2-fr-france2-apocalypse-liste_sujet-1-htm/questions-costelle-isabelle-sujet_25_3.htm
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Message par Largo Sam 26 Sep 2009 - 13:42

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http://www.raphaelclairefond.com/

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Message par Eyquem Sam 26 Sep 2009 - 13:58

Encore un complément, bien fait, qui donne un aperçu du bidouillage des images et du son - bidouillage qui ne se borne donc pas à la seule colorisation, mais utilise, de manière décomplexée, le recadrage, le ralenti, la sonorisation de films muets, etc :

http://television.telerama.fr/television/apocalypse-non,46881.php

Multiples extraits à l'appui.

Vous aurez ainsi le privilège unique d'entendre Hitler faire claquer ses gants dans la paume de sa main, le 9 mai 1940.
Comme le dit habilement l'auteur de l'article : un documentaire "à hauteur de dictateur"...
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Message par Invité Sam 26 Sep 2009 - 17:38

il y aurait trop de choses à dire sur toute la superbe des auteurs d'Apocalypse et leurs autres sujets(l'affligeante série sur l'aviation citée comme chef-d'oeuvre) ; alors j'en retiens surtout ceci, avant d'oublier complètement ces tacherons de la télé(lu sur le tchat de France 2):

- mme clarke. si votre documentaire ressemble à votre parti pris en rapport avec votre ancienne émission de canal+ et bien, je suis content de ne pas regarder votre émission. les anciens de canal+ se réfugient sur le service public alors qu'ils n'arrétaient pas de critiquer france télévision.
- je ne suis pas Pascale Clark, mais Isabelle Clarke...

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Message par Invité Sam 26 Sep 2009 - 21:44

Je commence le bouquin de GDH, à bientôt par ici alors .. Wink

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Message par DB Dim 27 Sep 2009 - 21:21

J'aimerais bien faire un genre de texte synthèse sur cette apocalypse...
DB
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Message par Invité Dim 27 Sep 2009 - 21:39

Dans la langue des vainqueurs : you're welcome !

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Message par Invité Mar 29 Sep 2009 - 20:23

JM a écrit:Je commence le bouquin de GDH, à bientôt par ici alors .. Wink

GDH dit des choses qui me paraissent intéressantes pour qui étudie le film de Folman. Je ne sais pas si Adeline l'a lu ?

Au fait tu t'es un peu réconcilié avec Didi-Huberman Borges, car il y a quelques temps il me semble que tu le prenais un peu de haut.

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Message par Borges Mar 29 Sep 2009 - 22:10

Je n'ai jamais été fâché contre GDH, et je suis loin de le prendre de haut. Comme dirait le Comte, à côté de lui je ne suis qu'un microbe ( Wink ). Y avait le contexte, la polémique, ton envie de démolir absolument Rancière, et je me disais qu'il ne méritait pas tant de mépris, même si... J'introduisais juste une nuance politique, quand tu le jouais gagnant contre Rancière; si je me souviens bien. Mais il m'arrive d'être injuste; alors je demande pardon - pour être (un)juste, comme disait Derrida.
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Message par Invité Mer 30 Sep 2009 - 5:18

Borges a écrit:
Je n'ai jamais été fâché contre GDH, et je suis loin de le prendre de haut. Comme dirait le Comte, à côté de lui je ne suis qu'un microbe ( Wink ). Y avait le contexte, la polémique, ton envie de démolir absolument Rancière, et je me disais qu'il ne méritait pas tant de mépris, même si... J'introduisais juste une nuance politique, quand tu le jouais gagnant contre Rancière; si je me souviens bien. Mais il m'arrive d'être injuste; alors je demande pardon - pour être (un)juste, comme disait Derrida.

Tu te souviens bien, c'était sans doute pas très malin de ma part de jouer ses énoncés contre ceux de Rancière. Wink

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Message par adeline Mer 30 Sep 2009 - 9:14

Coucou JM,

c'est "Images malgré tout" que tu lis ? Ou son dernier ?

Evidemment, "Images malgré tout", je l'ai lu. N'aurais pas pu écrire l'article sans ! Et même, je le cite, quand j'écris sur les images vidéo, les images et la guerre, la manière dont il faut ou non se protéger des images de la réalité Wink

adeline

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Message par Invité Jeu 8 Oct 2009 - 15:49

Hello,

Bon finalement après avoir lu le livre de GDH, je crois bien que la piste Tarantino est un peu aventureuse ?

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Message par Invité Ven 30 Oct 2009 - 11:00

A lire dans le numéro du Monde Diplo de novembre, un article critique de L. Richard sur cette émission. Le début est à lire ici.

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Message par Le_comte Jeu 5 Nov 2009 - 13:53

Autour d'Apocalypse, on pourrait encore revenir sur certains éléments, même s'il y n'a pas grand chose à ajouter au texte de Didi-Huberman.

La plupart des "bons" documentaires mettent en place un dispositif dans lequel les codes, le langage et le sens sont suggérés au spectateur. Que ce soit par l'entremise du clin d'œil où de l'orientation du regard par le choix d'une scène ou d'une attitude, le spectateur se retrouve toujours dans la possibilité de ressaisir ce qu'il voit, de se positionner dans cet écart et de travailler sa propre perception de la réalité.

Que dire alors, dans cette mesure, du dispositif d'Apocalyspe ? Deux choses, qui fonctionnent comme un doublon intimement lié, et qui vaut pour la plupart des docu-fictions (pour lesquels je n'arrive à tenir en général qu'une grosse demi-heure) :

-le docu-fiction anéantit la réflexivité du spectateur. Tout doit être dit, montré, et se faire passer comme la Vérité. Ce qui induit donc une conception du spectateur idiot et incapable de lire et de s'approprier des images. Tout est mâché, plus aucun écart ne subsiste. "C'est en couleur, car le noir et blanc, c'est vraiment pas cool, personne ne s'y retrouve aujourd'hui", etc.

-Sous l'autorité de la pédagogie et du pseudo devoir de mémoire, celui qui osera critiquer le dispositif sera immédiatement catégorisé comme un "intello", un "moralisateur", un "anti-démocratique", un "anti-égalitaire", et autres accusations plus douteuses encore ("mais vous êtes de quels côtés ?" etc.). Bref, ne pas être bête est un tort.

Voilà ce que présuppose (inconsciemment ?) la plupart des docus-fiction dès l'écriture de leur projet, la pédagogie devant réduire à néant la conscience du spectateur. Le pire, c'est que bon nombre de gens prennent cela au sérieux, et que ces images, suite au buzz, vont acquérir une valeur éducative indéboulonable.

Le_comte

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