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Usul fait des vidéos "philosophiques" ...

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Message par Invité Lun 2 Mar 2015 - 9:31




Y a un prob de plus en plus saillant chez Usul, que je trouvais encore vaguement intéressant, à défaut d'être pertinent, à ses débuts quand il ne causait que de jeux vidéos : il mélange à présent, dans sa "philo de bazar expliquée aux nuls", absolument tout dans une soupasse conceptuelle confuse et indigeste.

Il nous oppose, dans sa vidéo sur Lordon, d'un côté la "philosophie du libre-arbitre et de la liberté", et de l'autre une philosophie du déterminisme pur (en se proclamant "spinoziste" et rattachant à ce dernier tout modèle "hyper"déterministe comme les "neuro-sciences" - nawak - qui sont l'outil conceptuel le plus redoutable du capitalisme qu'il dénonce...)

De ce que le libre-arbitre, la liberté, des "sujets", sont devenus des concepts bien sûr instrumentalisés par l'idéologie individualiste marchande (de la "résilience" à "l'intériorisation du malheur", en passant par la "liberté d'expression" analysée par Foucault puis Deleuze comme dispositif d'assujettissement disciplinaire, de quadrillage des désirs, de contrôle en flux continu/tendu où le régime de l'entreprise, étendu à toute la sphère de l'individu, le transforme en "dividu" segmentable, taillable et corvéable à merci; etc etc : mais de tout ça il ne parle pas, et ce ne sont pas des références pour lui, de toute évidence); de ce que le libre-arbitre, la liberté, sont des valeurs célébrées par l'oppression libérale pour aliéner les "sujets" (en leur faisant prendre leur soumission à l'entreprise pour un désir personnel, interne, une décision libre et autonome - c'est uniquement de ça qu'il parle); de ce qu'enfin ces processus d'aliénation sont une réalité qui bien sûr doit être analysée, il en conclut benoîtement, notre Usul (qui pète de plus en plus au dessus de ses capacités réelles d'analyse) que la "liberté" n'existe tout simplement pas ! Il jette aux orties d'un vieil "humanisme" l'enfant avec l'eau du bain. Nous refaisant le remake caricatural et daté de l'hyper-structuralisme-sans-sujet ayant balayé le vieil existentialisme qui n'y voyait goutte, etc. Affaire classée ! ("je suis un rationaliste scientifique, moi", dit-il en substance). Et il décrète fièrement, dans une pure contradiction, qu'il faut donc analyser les déterminismes qui nous agissent, en finir avec cette illusion de la liberté (ce concept ringard qu'il relie au "vieux bigleux de st germain des prés" - sartre), pour pouvoir les décrire d'abord, y résister ensuite. Et il invoque Marx...

Y a juste un petit problème: Sartre, puisqu'il le nomme, ne dit pas autre chose quand il pense le concept de liberté: cette dernière consiste précisément à pouvoir s'arracher aux déterminismes en question. Sartre ne dit pas des choses aussi stupides que: "je suis libre comme le vent, je fais ce que je veux, "c'est mon choix" (comme dans l'émission citée), mais "ma liberté, c'est ce que je fais de ce que la vie, les déterminations objectives ont fait de moi". La prise de conscience d'une détermination pesant sur moi suppose un processus critique réflexif, qui lui-même par définition sort de la détermination - pour la penser en tant que détermination, d'abord, penser la manière d'y échapper ensuite.  Et qu'on le veuille ou non, ça s'appelle la "liberté".
Liberté du sujet (à l'époque de l'Etre et le néant), liberté s'expérimentant ensuite dans une action politique et collective, une conscience de classe en lutte (dans La critique de la raison dialectique).

La "mauvaise foi" étant pour sartre l'invocation des déterminations objectives pour justifier l'impossibilité de toute forme de responsabilité, de décision, acte, pouvant nier/trans-former la situation ("c'est comme ça, c'est dans ma nature, je ne peux rien changer à l'ordre des choses"; ou encore: "c'est la loi du marché, je n'ai aucune prise", etc: bref en termes sartriens ressaisir son "pour soi" sur le mode d'un "en soi".).

Chez Marx, c'est pareil, c'est au nom d'un concept de liberté qu'on peut poser à la fois le concept de l'aliénation de cette dernière, et la possibilité de se désaliéner.


Le pire, c'est que Usul aka l'homme à la pipe pontifiant jadis pour de rire (tout en se prenant au sérieux quand-même dans sa mission d'édification des masses ignares et aliénées) ne s'aperçoit même pas de ces contradictions flagrantes dont son exposé est rempli jusqu'à la couenne. Il invoque ce que Lordon appelle "l'angle alpha", qui serait l'angle de résistance du désir du salarié d'entreprise, de ses intérêts propres, par rapport au désir de rentabilité du patron: plus cet angle est faible, plus le salarié est aliéné au désir de l'entreprise, plus il est fort, plus sa résistance à ce désir est forte. Qu'exprime en termes plus ou moins tarabiscotés et scientistes cet "angle alpha", sinon ce qu'on nomme traditionnellement la liberté, le libre arbitre?
Usul est tout enchanté de l'explication que donne l'enflammée Judith Bernard (qui faisait aussi la promo passionnée, mais ça a dû lui échapper, de la correspondance BHL/Houellebecq sur ASi - les vidéos de talk-shows sur Asi semblent sa seule source de référence "théorique", c'est un peu ballot): "mon angle alpha, c'est moi, mon désir ! C'est ma passion du théâtre, que je soustrais au temps de travail de l'entreprise ! Non, je ne suis pas seulement salariée d'une entreprise, j'ai une passion qui échappe à l'entreprise! " Grotesque : ce qu'on refuse ici de nommer "liberté", et, secondairement, "subjectivité", ce serait juste le temps qu'on parvient à soustraire au temps-de-travail, pour cultiver son petit jardin secret! Si c'est ça, "l'angle alpha", si c'est ça, tout le "désir" possible, qui nous ramène en plus au petit bonheur individualiste sur-le-côté... Aux uns la passion des tomates, aux seconds la passion des modèles réduits de locomotives, aux troisièmes collectionner les timbres-poste ou les trombones à coulisses...)


C'est bien beau de se faire le chantre de Lordon qui soi-disant expliquerait la logique d'accroissement du capital et la démantibulation du social par un "déterminisme des affects" qui se trouverait chez Spinoza, alourdi ici de l'hyper-sociologisme déterministe de Usul, qui impose l'idée que tout ce qu'il est, tout ce que chacun est, est le fruit d'un pur déterminisme social sur lequel il n'a aucun choix, aucune prise. Et que c'est ce déterminisme implacable qui l'a conduit à "ne pas aimer écouter Michel Sardou", alors que s'il avait eu un autre destin déterminé, il aurait sans doute aimé l'écouter.
Mais ce genre d'explication simpliste est juste con: ça revient, sous couvert de cette "conscience lucide" de nos déterminations objectives, à pratiquer une pure réduction essentialiste, dans laquelle aucun bouleversement social, politique, etc, ne peut par nature se produire: chacun à sa juste place, selon son essence et sa détermination. Autant carrément invoquer, à ce degré, un pur Etat de nature, et dans la foulée se placer sous l'autorité du darwinisme socio-génétique d'un Dawkins, dont l'hyper-libéralisme s'accommode à merveille. Mieux : dont il est la caution théorique. ça devrait enchanter l'intrépide décrypteur Usul de ses chers contemporains: alors là, c'est clair, plus de souci: y a plus de "liberté" (cette illusion naïve du pauvre descartes) - on sait exactement d'où on vient, où on va, ce qui nous attend, dans quelle étagère. En attendant, après le gêne égoïste, le gêne criminel, le gêne de l'entrepreneur et le gêne du branleur-chômiste.

Mais comment, à partir de là, en appeler à la nécessité de sortir d'une essence prédéterminée, quelle qu'elle soit, puisque dans les termes où Usul la décrit, il est impossible de s'en décoller, de s'y arracher?
Là aussi, Usul est fortiche, dans le genre "j'invente des paradoxes fumeux": cette résistance aux déterminismes qu'il dénonce serait comprise, incluse, figurez-vous, dans ces déterminismes mêmes: on ne se révolte contre la chaine implacable des déterminations objectives qui nous ont amenés à telle condition de vie que lorsque cette dernière a atteint son seuil de rupture, au delà duquel elle n'est plus vitalement supportable... "Donc": notre choix de nous opposer à "l'entreprise", au rouleau compresseur du capitalisme, ne dépend pas de nous, là-encore, nulle liberté ! : c'est simplement, si on essaie de comprendre ce raisonnement d'une logique impayable, ce que les théoriciens de l'ultra-libéralisme appellent la "struggle for life". C'est juste parce qu'on est poussé à survivre. C'est quelque part "l'instinct" du survivor. C'est une réaction/transformation "adaptative" en somme, déterminée par le capitalisme lui-même. C'est beau. C'est Rambo quoi. Avant Rambo il était sympa, mais quand Rambo, on a voulu faire de sa vie une vie de chien imbitable, eh bien Rambo il s'est fâché tout rouge et il a tout fait péter ! Ah mais !

Ce qui implique, de toute évidence, puisque tout ça, le seuil de résistance, etc, c'est "déterminé" et qu'on a pas le "choix", que jusqu'à ce point fatal, c'est pas la peine de s'exciter outre mesure contre sa condition, faut juste attendre le point de rupture qui fera qu'on ne pourra plus faire autrement...
Formidable, merveilleux Usul, qui nous explique la résistance à la machine capitaliste par sa logique-même: l'exténuation de la force productive du travailleur. Avant, c'est trop tôt; après, c'est trop tard! Faut juste s'en remettre à la nécessité objective.


Dans cette soupasse confusionniste au bord du délire, usul place BHL, Finkielkraut et consort du côté des "philosophies de la liberté": or ce ne sont pas des philosophies de la liberté: BHL n'arrête pas de se réclamer de Lacan et d'Althusser, de l'aliénation constitutive du "sujet" par les déterminismes de "l'inconscient" (chez Lacan ou Althusser, tout comme Spinoza, mutatis mutandis, le concept de "liberté" existe par ailleurs sous une autre forme), d'une Loi symbolique transcendante (le père-maitre-autorité-état-divin), rempart contre le "fascisme" de la "jouissance" dans lequel sombrent tous ceux qui se fantasment libres, non inféodés à cette Loi (l'anti-oedipe de deleuze étant sa bête noire depuis toujours); quant à Finkielkraut, ce n'est pas au nom d'un concept sartrien, encore moins marxiste, de liberté, d'émancipation et de désaliénation de la logique capitaliste, qu'il cause dans le poste, mais au nom de déterminités comme l'identité, l'héritage (culturel, national), etc.

Bref Usul mélange tout et c'est bien pénible, et même navrant, que d'avoir à subir ses péroraisons de café de philo journalistique ou de philomag, comme une sorte de Monsieur Perrichon ayant appris les fondamentaux philosophiques dans les pochettes surprises de chokotoff... Même Cyprien ou Norman ne sont pas si incohérents.

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