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Le Congrès, Ari Folman

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Message par Invité Mar 17 Sep 2013 - 22:37

C'est l'exemple type du film inaboutti mais intéressant.
La première partie évoque les films récents de Cronenberg, très didactique et programmatique (la mort du cinéma, la mort de la machine, le devenir-informattion des corps, la mort de l'ordinateur lui-même, que les corps absorbent, le renforcement du pouvoir dans un climat de paupérisation générale, l'identification du savoir à un pouvoir technocratique extérieur à cettte pauvreté, la mort de l'innocence e).
Une une famille) de losers du cinéma (apparamment Robin Wright, ex-Santa Barbara, joue ce qu'elle est dans la vie: elle a vraiment joué dans Princess Bride et Forrest Gump, joue son vrai rôle d'étoile montante qui a raté sa carrière à la fois par manque et par excès de personnalité: même la maladie de son fils est peut-être autobiographiique, elle est par exemple impliquée dans un fondation de lutte contre la myasthénie)  tire partie de leur position pour comprendre que les carottes sont cuites pour le cinéma et le vieux monde, et à contre coeur décident d'accepter de se scanner en 3D, le monde à venir les trouve plus rentable que les stars confirmése pour tester ses potocoles et techniiques (métaphore un peu lourdingue, le fils malade de Robin, et mobile sentimental de la transaction qu'accepte la mère, se fantasme en pionnier de l'aviation façon Lilienthal tout en vivant dans un aéroport).

Cela pourrait être une satire (au fond assez drôle, les dialogues sont souvent excellents) du cinéma qui essaye de faire un film crépuculaire sur lui-même (plus proche de "a King at New York" ou "Singing in the Rain" que de Wilder), mais qui s'aperçoit que le cinéma est tellement en crise qu'il n'y a plus de public pour rire de cette mort, et les personnages film s'en sortent en inversant la phrase que Debord trouvait ridicule: quand on aime (ou du moins la comprend) la mort on va au cinéma. Après le scan (en fait il s'agît plutôt d'un dôme photogrammétrique que d'un scanner) ils renaissent dans un univers de dessin animé, exactement à mi chemin entre "Qui veut la Peau de Roger Rabbit" et "Matrix" . Une  sorte guerre civile éclate entre le monde intérieur du fantasme, administré par les anciens studios qui sont devenus des vendeurs de drogues et détenteurs d'un sorte de bio-pouvoir pharmaceutique et marchands, et les rebelles du monde réel, dont on ne voit que les effets en toons sur le monde animé, sous forme de stylisation pop et psychédélique. Robin Wright joue un rôle de tampon entre ces deux univers: elle a accepté de travailler pour la compagnie, et essaye lors d'une convention de faire passer un message subversif ("réveillez vous, jetez vos médicaments, utiliser l'énergie que vous mettez à entre dans le virtuel pour luetter contre les souffrances réelles"), qui justement à cause de la guerre civile, ne sera pas entendu. Elle est recueillie par l'avatar désabusé de son animateur, qui la coince et la fait  dériver dans plusieurs époques du monde numérique, qui ressemblent de plus en plus à un jardin d'Eden, mais Robin se sent perdue sans son fils malade qu'elle a entrecroisé dans le monde numérique (le film entrecroise à la fois les vols dans les cieux du Snowman, et de Docteur Folamour pour signifier l'absence et l'obsession pour le fils)
J'ai en fait préféré cette seconde partie à la première (même si la scène du scanning est en effet déjà belle), on trouve des éléments qui évoquent les cités obscures de Schuiten et Peters, l'Incal-méta barons de Moebius et Jodorowski , voire des BD de Charles Burns, voire the Wall de Waters, il y a l'idée d'incarner une dette esthétique dans un récit fluide sans trop la trahir.

Le film possède également une troisième partie: Robin fini pas sortir du monde numérique, et découvre que le guerre civile a abouti à une société totalitaire et pauvre, l'efflorescence psychédélique cache un monde en loque et ségrégué, avec juste le minimum d’infrastructure pour remettre le shoot. Les médecins sont devenus des technocrates qui avec beaucoup de mauvaise conscience gèrent le monde d'en bas depuis des Zeppelins. Elle retrouve l'ancien médecin de son fils, qui lui indique que son fils a fait le chemin inverse pour la retrouver, et lui conseille de repartir dans le monde numérique, elle fait une sorte d'overdose en ayant une hallucination en dessin animé et basé non plus sur des fantasmes mais des souvenirs de sa vie réelle avec son fils.
Je suis un peu réservé, même si le film m'a beaucoup plu par moment et qu'il comporte des images qui restent. Il y a sans doute quelque chose à démonter dans la manière dont la mise en scène d'un pouvoir technocratique et d'une ségrégation de classe est montré comme le secret caché d'une autre aliénation plus visible, liée au bio pouvoir et au contrôle du corps par les médicament (idée géniale: le cinéma se survit sous forme de pharmacopée). Cela annule un peu l'audace du film de faire de la fixité des vieilles formes d'aliénation un secret à partir duquel comprendre la dématérialisation actuelle. Il y a trois récit qui s'emboîtent mal: la fable sur le cinéma comme rempart ayant échoué à endiguer l'apparition du numérique (le choix de l’échantillonnage infiniment varié contre l’épreuve de la sensibilité et de l'incarnation dans une attache), la fable politique (notre désir d'irréalité ne nous permet plus de lutter politiquement, tout en donnant encore la conscience de ce que nous subissons, le film est assez subtil pour pointer que cette irréel tient plus à la solitude de la conscience individuelle qu'à sa destruction) et le récit sur le manque par rapport à la famille, qui est filmé comme le seul refuge ou point d'appuis extérieur encore possible pour s'extraire des deux aliénations: technologiques et politiques, que le film montre comme séparée. Mais ce défaut d'articulation est intéressant, le film  est politiquement plus riche et direct que Waltz avec Bachir: il ne s'agît pas de témoigner du réel tout en le contournant , mais de montrer le virtuel pour l'attaquer, finalement croire en l'hypothèse d'un épuisement du virtuel qui serait déjà le seule chance d'en sortir.
Mais ce qui m'a touché c'est la caractérisation des personnages, finalement ils étaient déjà des ratés ou des marginaux dans l'ancien monde, et soutiennent le numérique car il est l'occasion d'une revanche qui excède leur scrupule, ils sont les mieux placés pour dénoncer la supercherie qu'ils ont provoqué,  cette  idée d'impuissance au coeur de cette revanche, de domination d'autant plus forte qu'elle est issue d'un désir de pouvoir qui n'a pas aboutit est assez juste, même si en fait cynique et insuffisante. C'est un peu la thématique de the Wire énoncée par le drogué repenti: si nous ne pouvons pas lutter du moins nous pouvons vieillir, et vivre cette vieillesse comme si elle était un fait minoritaire. Le film pressent que le tout numérique peut être une prison (il figure les goulags et les exécutions sommaires du XXème siècle) et essaye de la soumettre à notre propre vieillesse avant qu'il ne soit déjà adulte.

Belle musique de Richter

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