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Cosmopolis (Cronenberg)

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Message par Eyquem Dim 27 Mai 2012 - 12:28

C’est peu dire que le film est une expérience pénible. Au bout de 10 minutes, on est déjà saoulé par le dialogue, non seulement parce qu’il est incessant (c’est un film où on parle sans discontinuer : en mangeant, en travaillant, en baisant… y a pas une minute sans dialogue), mais aussi parce que le sens de ce qui se dit se dérobe sans cesse (c’est dû à tout un tas de facteurs : aphorismes, allusions, allégories, coq-à-l’âne, tout ça mouliné à toute vitesse : y a bien des moments où j’ai totalement décroché).

Loin que cette vitesse, cette intelligence à jets continus, produisent de la griserie, un étourdissement, on frôle plutôt la stupidité et la congestion - tout passe par les mots, mais les mots courent après les nombres, qui les ont rendus comme obsolètes (comme dit l'un des personnages : " 'Computer' c'est déjà un mot désuet"). A la fin, on est rincé, on se sent un peu comme ce pauvre Benno Levin, qui raconte avoir craqué parce qu’il arrivait plus à suivre le rythme des taux de change. Le film brasse tant de sujets, tire les fils de tant de références et d’allusions, que je ne saurais pas par lesquels commencer – ni si ça en vaut la peine. C’est comme si le monde et son histoire devaient passer tout entiers par le goulet d’étranglement de cette limousine comme par le nombril d’un sablier - pour être détruits, frappés d'obsolescence ; il ne s’agit pas de bâtir, de construire, d’édifier un « monde », une « ville-monde », mais tout au contraire de détruire : tout doit y passer, à tous les sens qu’on peut donner à cette expression : ce de quoi se nourrit le dialogue interminable, c’est d’abord d’une soif de destruction, d’anéantissement, de consommation. On ne sait pas trop ce qu'est la "cosmopolis" du titre, sinon qu'elle est la ruine du monde ancien. C’est comme si cette odyssée absurde vers un salon de coiffure (qui est, comme toute odyssée, un voyage de retour : ce n’est pas n’importe quel salon de coiffure, c’est le salon qui est lié au père, aux origines de Packer) était aussi une recherche d’un point de résistance, de quelque chose contre quoi Parker buterait, et qui ne se laisserait pas détruire comme le reste. (Rien ne résiste à Packer : il achète, il baise, il tue comme il veut, de manière gratuite, indifférente. Ce qui lui résiste, c’est sa femme (qui ne veut pas baiser), la chapelle Rothko (qu’il ne peut pas acheter), et peut-être aussi sa propre mort, qui est sans doute l’objet véritable de sa recherche.)

Faut que je laisse le film reposer (et que je lise le bouquin, sans doute), mais là, maintenant, j’ai deux personnages en tête : Ulysse et Œdipe. Ulysse, à cause du voyage, du retour. Œdipe, à cause de l’enquête, de la recherche de soi (le suspect qu’il recherche, qui en veut à sa vie, c’est certainement lui-même).



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Message par Invité Dim 27 Mai 2012 - 13:30

Eyquem a écrit :
Ulysse et Œdipe

ce ne sont pourtant pas les plus bavards.
le bavardage est dans l'air du temps tout est bavardage la bouche le cerveau sont les muscles sphincters d'aujourd'hui partout sur tous les médias

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Message par Eyquem Dim 27 Mai 2012 - 13:39

Borges a écrit:Dans One from the Heart, mais c’est une tendance de bien de films de Coppola, l’image veut vivre sa vie toute seule ; elle se veut pure, sans lien, sans le moindre rapport à la moindre altérité, une image qui ne le serait plus de rien, image d’elle-même, image de l’image, une image aussi tautologique que le « travail abstrait », ou ce fric qui ne raconte plus d’histoire dont nous parle Don DeLillo dans Cosmopolis ; un fric qui n’achète plus rien en dehors de lui-même. De l’argent intransitif, en quelque sorte, et qui donne à ceux qui le « gagnent » et le « perdent » le sentiment d’être des artistes ; le fric spéculaire de la spéculation de l’esprit absolu qui cherche à nous faire oublier les corps qui bossent.


http://www.spectresducinema.org/?p=2047&page=2
Le film joue sans doute sur les mots : rat/art
- d'un côté, les super-traders, pour lesquels le rat serait une unité d'échange comme une autre
- de l'autre, les artistes (Pollock, Rothko, Satie, le rappeur mort) qui renvoient Packer à son impuissance à créer quoi que ce soit.



J'ai l'impression qu'il y a pas mal de jeux de langage de ce genre dans le roman. Par exemple :
Ultimately, he gets his haircut, both literally and metaphorically. A “haircut” is also a common slang word among stock and currency traders for losing enormous sums of money in the stock market.
http://www.aspeers.com/2008/noble?fulltext
Finalement, le langage est peut-être pas aussi à la ramasse que le disent les personnages (pour eux, le langage, c'est un truc trop vieux, trop lent, pour dire le monde qui est en train d'apparaître - seuls les nombres sont assez rapides pour le dire). Quand Packer répète "We want a haircut", ça dit quelque chose de son désir : il veut être puni, maté (c'est un désir qu'on a déjà vu chez d'autres personnages de Cronenberg).



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Message par Borges Dim 27 Mai 2012 - 14:10


hello eyquem;

oui, bien sûr faut lire le livre; même si c'est pas le meilleur don delillo.

la destruction est centrale, parce que le capitalisme c'est la destruction. Le concept de ville-monde remonte à Braudel; Saskia Sassen parle de ville globale plutôt.

Pour Braudel les villes-monde se font et se défont, incarnant à chaque époque le lieux le plus avancés du mouvement capitaliste...


"pour braudel le mouvement de l'économie peut être comparé à des ondes, c'est un mouvement semblable à celui d'un séisme qui s'étend à partir d'un épicentre d'intensité maximale. Chaque épicentre est une zone de télécommande qui transmet ou reçoit des informations du milieu environnant, en le manipulant, mais en étant à son tour manipulé par lui. De même que les étoiles naissent et meurent, ainsi la lumière des villes-monde brille, puis tend à s'éteindre quand le coeur propulseur bat plus"
(Giuliana Gemelli)

la mort de l'ordinateur n'est que l'une des morts après bien d'autres dont on nous parle depuis longtemps, après celles de dieu, de l'homme, du livre, du cinéma, de la télé...

Dans le passage du bouquin où il est question de la mort de l'ordinateur et du mot "ordinateur" ("qui semble arriéré et idiot") il est aussi question d'une transformation de l'idée même de mort : "Les gens ne mourront pas. N'est-ce pas le credo de la nouvelle culture? Les gens seront absorbés dans les flux d'information. Les ordinateurs périront. Ils périssent sous leur forme actuelle...

le passage n'annonce pas les morts de l'ordi dont on parle aujourd'hui, chez microsoft, mac, et ailleurs, mais sa dissolution dans la texture de la vie quotidienne, alors que de nos jours, la mort de l'ordi, c'est plutôt le retour aux tablettes, la nouvelle loi...


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Message par Borges Dim 27 Mai 2012 - 14:18

Eyquem a écrit:
Le film joue sans doute sur les mots : rat/art
- d'un côté, les super-traders, pour lesquels le rat serait une unité d'échange comme une autre
- de l'autre, les artistes (Pollock, Rothko, Satie, le rappeur mort) qui renvoient Packer à son impuissance à créer quoi que ce soit.

TRATder

pour le rat on peut penser à bien des chose... à des usages curieux :



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Message par Eyquem Dim 27 Mai 2012 - 14:20

Sur le site de la Rothko Chapel, je trouve cette citation, avec cette image, qui est peut-être à l'origine des danseurs qu'on voit dans le film (au moment des funérailles du chanteur) :

"Dance, it is known, brings together and epitomizes the other arts that have evolved in the course of history ; the rythm of the dancing body calls for the rythm of music ; the sacred space traced by the dance demands an architecture (built or open) and signs shaped in matter - painting or sculpture" (Dr André Scrima)

Cosmopolis (Cronenberg) Cosmop10




La Rothko Chapel :

Cosmopolis (Cronenberg) 6a00d834b4c13053ef014e5f7ffe5a970c-800wi

http://www.rothkochapel.org/index.php?option=com_content&view=article&id=11&Itemid=14
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Message par Borges Dim 27 Mai 2012 - 14:29

Eyquem a écrit:Sur le site de la Rothko Chapel, je trouve cette citation, avec cette image, qui est peut-être à l'origine des danseurs qu'on voit dans le film (au moment des funérailles du chanteur) :

"Dance, it is known, brings together and epitomizes the other arts that have evolved in the course of history ; the rythm of the dancing body calls for the rythm of music ; the sacred space traced by the dance demands an architecture (built or open) and signs shaped in matter - painting or sculpture" (Dr André Scrima)

Cosmopolis (Cronenberg) Cosmop10




La Rothko Chapel :

Cosmopolis (Cronenberg) 6a00d834b4c13053ef014e5f7ffe5a970c-800wi

http://www.rothkochapel.org/index.php?option=com_content&view=article&id=11&Itemid=14


le chanteur rap Brutha Fez est soufi...
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Message par Eyquem Dim 27 Mai 2012 - 14:30

'jour Borges,
Dans le passage du bouquin où il est question de la mort de l'ordinateur et du mot "ordinateur" ("qui semble arriéré et idiot") il est aussi question d'une transformation de l'idée même de mort : "Les gens ne mourront pas. N'est-ce pas le credo de la nouvelle culture? Les gens seront absorbés dans les flux d'information. Les ordinateurs périront. Ils périssent sous leur forme actuelle...
Oui, j'ai l'impression que c'est le problème de Packer : ne pas pouvoir mourir (de même qu'il ne peut pas dormir).
Là aussi, il faut sans doute opposer le chanteur, mort, pleuré, entouré de danseurs, et Packer, qui est une sorte de vampire dans son tombeau (tous les critiques ont noté ça), et qui ne peut pas mourir, qui cherche sa mort.
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Message par Borges Dim 27 Mai 2012 - 14:54

Eyquem a écrit:'jour Borges,
Dans le passage du bouquin où il est question de la mort de l'ordinateur et du mot "ordinateur" ("qui semble arriéré et idiot") il est aussi question d'une transformation de l'idée même de mort : "Les gens ne mourront pas. N'est-ce pas le credo de la nouvelle culture? Les gens seront absorbés dans les flux d'information. Les ordinateurs périront. Ils périssent sous leur forme actuelle...
Oui, j'ai l'impression que c'est le problème de Packer : ne pas pouvoir mourir (de même qu'il ne peut pas dormir).
Là aussi, il faut sans doute opposer le chanteur, mort, pleuré, entouré de danseurs, et Packer, qui est une sorte de vampire dans son tombeau (tous les critiques ont noté ça), et qui ne peut pas mourir, qui cherche sa mort.

hi

vampire, tu as dit vampire

"
-interviewer : did you read as a child?
-Don delillo : no, not at all. Comics books. This is probably why i don't have a storytelling drive, a drive to follow a certain kind of narrative rhythm.
-Interviewer : As a teenager?
-Don Delillo : not much at first. Dracula when I was fourteen. A spider eats a fly, and a rat eats the spider, and a cat eats the rat, and a dog eats the cat, and maybe somebody eats the dog. Did I miss one level of devouring?"

(conversations with don delillo)

étrange liste, qui commence avec deux titres de film de cronenberg... dans dracula, les mouches sont mangées par les araignées, les araignées par les oiseaux, les oiseaux par les hommes, les hommes par les vampires


Cosmopolis (Cronenberg) Watch?v=F9b76RWM7qE

au début du roman, le personnage peut pas dormir, pas juste une ou deux fois dans la semaine, mais quatre, cinq; il évoque sa solitude; aucun ami assez proche à appeler si tard; et même si : "Qu'y avait-il à dire? C'était une question de silences, pas de mots".
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Message par Borges Dim 27 Mai 2012 - 15:04

Eyquem a écrit:
Borges a écrit:Dans One from the Heart, mais c’est une tendance de bien de films de Coppola, l’image veut vivre sa vie toute seule ; elle se veut pure, sans lien, sans le moindre rapport à la moindre altérité, une image qui ne le serait plus de rien, image d’elle-même, image de l’image, une image aussi tautologique que le « travail abstrait », ou ce fric qui ne raconte plus d’histoire dont nous parle Don DeLillo dans Cosmopolis ; un fric qui n’achète plus rien en dehors de lui-même. De l’argent intransitif, en quelque sorte, et qui donne à ceux qui le « gagnent » et le « perdent » le sentiment d’être des artistes ; le fric spéculaire de la spéculation de l’esprit absolu qui cherche à nous faire oublier les corps qui bossent.


http://www.spectresducinema.org/?p=2047&page=2
Le film joue sans doute sur les mots : rat/art
- d'un côté, les super-traders, pour lesquels le rat serait une unité d'échange comme une autre
- de l'autre, les artistes (Pollock, Rothko, Satie, le rappeur mort) qui renvoient Packer à son impuissance à créer quoi que ce soit.



J'ai l'impression qu'il y a pas mal de jeux de langage de ce genre dans le roman. Par exemple :
Ultimately, he gets his haircut, both literally and metaphorically. A “haircut” is also a common slang word among stock and currency traders for losing enormous sums of money in the stock market.
http://www.aspeers.com/2008/noble?fulltext
Finalement, le langage est peut-être pas aussi à la ramasse que le disent les personnages (pour eux, le langage, c'est un truc trop vieux, trop lent, pour dire le monde qui est en train d'apparaître - seuls les nombres sont assez rapides pour le dire). Quand Packer répète "We want a haircut", ça dit quelque chose de son désir : il veut être puni, maté (c'est un désir qu'on a déjà vu chez d'autres personnages de Cronenberg).

une précision : Le passage cité plus haut était, of course, une allusion à la fameuse analogie de Marx : "Le capital est du travail mort, qui, semblable au vampire, ne s'anime qu'en suçant le travail vivant, et sa vie est d'autant plus allègre qu'il en pompe davantage. Le temps pendant lequel l'ouvrier travaille, est le temps pendant lequel le capitaliste consomme la force de travail qu'il lui a achetées. Si le salarié consomme pour lui-même le temps qu'il a de disponible, il vole le capitaliste"





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Message par Invité Mar 29 Mai 2012 - 12:17

ciao !
Finalement, le langage est peut-être pas aussi à la ramasse que le disent les personnages (pour eux, le langage, c'est un truc trop vieux, trop lent, pour dire le monde qui est en train d'apparaître - seuls les nombres sont assez rapides pour le dire).
là, on peut peut-être penser à D&G, au langage comme flux codé opposé à l'axiomatique du Capital.
dans A dangerous method, il y a déjà une transduction du langage à travers une mécanique de chiffrage et de déchiffrement.
bon, mais je n'ai pas encore vu le film - et j'ai déjà parlé de tout ça ailleurs. Wink


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Message par Borges Mar 29 Mai 2012 - 13:05

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Message par Invité Mar 29 Mai 2012 - 19:46

Je ne connais pas fort Braudel (et a Dangerous Method me donne pas envie de voir un Cronenberg) mais l'histoire captaliste pour lui me semble plus l'histoire d'un système d'échange où le foyer change (Gênes, Bruges, Venise, Anvers, parce qu'aucune société n'a le monopole du precessus de consolidation économique, qui change de nature selon les lieux et les époques) qu'un processus de destruction et de recréation (ainsiune sorte de marché commun s'invente dans la Hanse, la structuration en classes sociales organisées dans des cités états plutôt en Flandre, la banque moderne à Gênes, mais chaque maturation cofère la préondérence à un acteur différent). "Décliner suite à une provincialisation" et "subir l'anéantissment" ce n'est pas la même chose. On retombe dans ce que Marx reproche à Poudhon (croire pouvoir opposer le monopole au commerce pour revenir à une innocence économique, un échange directement dérivé du coût du travail, sans voir que le captalisme limite déjà le monopole). Je ne crois pas que Marx lie l'idée de crise du capitalisme et d'aliénation à celle d'anéantissment de civilisation non plus, même quand il parle de fétichisation et de conversion de l'argent en marchandise il essaye de démonter un ordre (cela me semble plus pensé par Adorno, Kracauer ou Benjamin peut-être à partir de Nietzsche, que Marx ou Braudel).
Je dirais l'inverse de Borges, la crise du capitalisme est diffuse (les Indignés aujourd'hui tendent à s'en prendre au capitalisme spéculatif et à la critique de l'écart de richesse, mais à ne pas penser l'aliénation en termes de rapport de production industriel ou de bureaucratisation de l'autorité et de la représentativité politique, justement parce qu'ils sont exclus du marché du travail ils sont contraints à une critique externe de la production , mais c'est l'inverse du paradigme des anénes 70, qui faisait de l'entrisme et de l'établissement en usine une forme de lutte, avec l'ambiguïté de l'idée que le capital culturel étaient ce que les établis devaient réaliser dans l'usine, les traditions de lutte se croisent mais ne se parlent pas) tandis que l'ingérence de l'ordinateur dans la vie humaineest une domination dure, car les données qu'elles génèrent s'agglomèrent très vite et ne sont pas perdues (dupliquer et conserver, pour un ordinateur c'est la même chose)...


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Message par Invité Mar 29 Mai 2012 - 20:34

moi par contre j'ai très envie d'aller le voir.

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Message par Invité Mer 30 Mai 2012 - 20:09

Et je l'ai vu et j'ai trouvé cet exercice de style un peu vain mais d'une grande beauté. Je n'ai pas lu le livre mais j'imagine que le film ne lui cède en rien. C'est un modèle de narration, de choix de mise en scène de mélange de sensualité et de morbidité. Ca manque un peu d'air mais la manière qu'a le trader, le capitaliste d'être par lui même ou par d'autres dépoullé de tous ses attributs et d'abord sa richesse est assez fascinante, l'acteur Robert Pattinson est déjà un choix gagnant pour ce rôle, il sauve d'ailleurs par son jeu les dix dernières minutes de violence contenue plutôt faiblardes - plus jeune on aurait pu imaginer David Bowie dans le rôle.
Une grande première heure est magique : le défilé de ses employés qui dans sa limousine passent pour le quitter définitivement, comme sa femme qui va et vient et qu'il rencontre toujours par hasard.
La scène du toucher rectal par son médecin face à son employée frustrée est une scène d'humiliation d'anthologie.
Il quitte le monde, son monde.

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Message par Invité Mer 30 Mai 2012 - 20:34

Je crois que le film gagne à ne pas être pris au pied de la lettre, c'est à dire tendre l'oreille aux dialogues pour n'en rien rater, ce que fait Eyquem qui a envie manifestement de ne pas aimer, mais aller voir un film pour trousser ce qu'il a de mauvais, quel plaisir ? mais plutôt prendre le dialogue comme des blocs qui sattachent à des séquences, à un contre un, le trader plus un, la séquence imagée et le bloc de dialogue forment un tout intelligible.
Pour qui a l'habitude des films "de dialogue" Rhomer par exemple, c'est aux antipodes mais ça fonctione pareil, on ne peut pas parler du dialogue en lui même, la continuité dialoguée ne peut s'apprécier que dans la séquence visuelle et narrative.
Aborder le dialogue seul n'a évidemment aucun sens, surtout quand la source du dialogue est expressément diégétique comme dans Cosmopolis.
J'ai l'air de faire la leçon à Eyquem, en effet.

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Message par Borges Jeu 31 Mai 2012 - 19:00

vu le film; je partirai de la dernière image de la méthode dangereuse; donc de l'histoire de la royauté et du pouvoir; on se souvient...


Cosmopolis (Cronenberg) Images?q=tbn:ANd9GcTAALrjyD1MyDpov7t91jXq0NSg0b5uIQgXg6MzJ-emqyARn8p-BQ

Cosmopolis (Cronenberg) Images?q=tbn:ANd9GcTu73GB1b8JMDmKTCID1Q34HAuNaen_VzlIgDtQ-wxxkCsxmv8o

que cette position ne soit pas indifférente, que le lien soit nécessaire :
Cosmopolis (Cronenberg) 2Q==

comme dans la méthode dangereuse, il y a une femme blonde, et des brunes...et on parle d'un lac...



Dernière édition par Borges le Ven 1 Juin 2012 - 7:33, édité 1 fois
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Message par Invité Jeu 31 Mai 2012 - 19:02

je n'ai pas vu la méthode dangereuse ...

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Message par Invité Jeu 31 Mai 2012 - 19:09

j'y vois une différence de taille cependant entre camper des personnages réels, fiction simple - dans tous les sens du terme - et camper un personnage de fiction - fiction au carré, personnage forcément double, inévitablement, intrinséquement porteur d'un chiasme.

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Message par Borges Ven 1 Juin 2012 - 8:09

slimfast a écrit:
Eyquem a écrit :
Ulysse et Œdipe

ce ne sont pourtant pas les plus bavards.
le bavardage est dans l'air du temps tout est bavardage la bouche le cerveau sont les muscles sphincters d'aujourd'hui partout sur tous les médias

-contrairement à oedipe le personnage revient à ses origines; ce qu'il y a de commun, c'est le mouvement de déchéance, un mec au sommet de la cité qui se retrouve très bas, à la fin, avec l'homme du ressentiment, l'homme du souterrain...le film est en fait un récit des origines, une remontée du fleuve; un être sans trace, sans marque, lisse, tout de surface, sans histoire, qui au long de son voyage se salit, ramasse des coups... perds ses attributs, veste, cravate... et finalement, la vie...un récit de dépouillement...cette métaphore est inscrite dans la transformation de la voiture...blanche (comme une toile, si on veut) sans identité, et puis complètement marquée...salie... devenue en quelque sorte une oeuvre d'art...je crois pas nécessaire de développer les liens-écarts avec apocalypse...ou avec take shelter (un homme qui va à sa mort...)

-la seule référence mythologique, c'est Icare, par l'homme du souterrain; et puis dans le même ordre de l'élévation orgueilleuse, y a la tour de Babel.

-si on excepte la forme, c'est un récit classique à la cronenberg; toujours le même truc : docteur J et Mister H.

-analogies : taxi driver (les taxi drivers viennent de l'enfer, mais c'est plus le Vietnam, l'enfer....); étrange mouvement de cette limousine; cette lenteur, tout à fait étonnante...

-film raté, en un sens; comme si cronenberg avait aussi eu besoin aussi d'un coupe de cheveux et de saboter son film; il aurait pu faire bien mieux...

-Eric est une espèce de Holden caulfield : sa question sur les limousines est une répétition de la question de Holden. Dans l'un de ses bouquins (Mao?) Don DeLillo aborde le mythe salinger...






--Y a pas de marx dans ce truc : plutôt le contraire; la contestation du système, c'est une maladie de ratés, de RATés...si on veut; l'homme du souterrain est très souvent comparé par Dostoïevski à un rat :

"
cet homunculus se sent parfois si inférieur à son contraire qu’il se considère lui-même, en dépit de toute son intensité de conscience, comme un rat plutôt qu’un homme, ― un rat doué d’une intense conscience, mais tout de même un rat, ― tandis que l’autre est un homme, et par conséquent, etc.… Surtout n’oublions pas que c’est lui-même, lui-même qui se considère comme un rat, personne ne l’en prie, ― et c’est là un point important."

"On arrive enfin à l’acte de la vengeance. Le misérable rat, depuis son premier désir, a déjà eu le temps, par ses doutes et ses réflexions, d’accroître, d’exaspérer son désir. Il embarrasse la question primitive de tant d’autres questions insolubles, que, malgré lui, il s’enfonce dans une bourbe fatale, une bourbe puante composée de doutes, d’agitations personnelles, et de tous les mépris que crachent sur lui les hommes de premier mouvement, qui s’interposent entre lui et l’offenseur comme juges absolus et se moquent de lui à gorge déployée. Il ne lui reste évidemment qu’à faire, de sa petite patte, un geste dédaigneux, et à se dérober honteusement dans son trou avec un sourire de mépris artificiel auquel il ne croit pas lui-même. Là, dans son souterrain infect et sale, notre rat offensé et raillé se cache aussitôt dans sa méchanceté froide, empoisonnée, éternelle."





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Message par Invité Ven 1 Juin 2012 - 9:07

Y a pas de marx dans ce truc : plutôt le contraire
la "phrase du film", c'est bien tout le contraire du constat marxiste : inscrite sur un panneau lumineux : "un spectre hante le monde ; le spectre du capitalisme".
différence supposée du capitalisme et du "cyber-capitalisme" dont Eric serait l'incarnation. le problème du film, ce n'est plus l'exploitation de l'homme par l'homme mais ce moment où cette exploitation cède devant le dérèglement de la finance - quand l'argent prend une valeur intrinsèque qui le déconnecte du réel : "i love bath" - la monnaie, pas la ville Wink .
que ce moment soit toujours déjà là dans le système capitaliste, et qu'il soit à la fois toujours illusoire, ça n'apparaît pas dans le film.


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Message par Borges Ven 1 Juin 2012 - 10:33

Cosmopolis (Cronenberg) Untitled-5

(pour qui ne sait pas, on dirait un mec en train de se décomposer, pourrir...)


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Message par Borges Ven 1 Juin 2012 - 10:51

si on situe ce film par rapport au précédent, y a ce passage au début du livre de Don DeLillo : "Freud is finished, Einstein's next. He was reading the Special Theory tonight, in English and German, but put the book aside, finally, and lay completely still, trying to summon the will to speak the single word that would turn off the lights. Nothing existed around him. There was only the noise in his head, the mind in time."

le livre commence par einstein, se termine par augustine (l'un des grands penseurs du temps, si on me demande je sais pas...) : "I have become an enigma to myself. So said Saint-Augustine. And herein lies my sickness."


le film ne garde que augustin...si je me trompe pas.

immense question de la religion dans le film;



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Message par Invité Ven 1 Juin 2012 - 11:06

Borges a écrit :

-film raté, en un sens; comme si cronenberg avait aussi eu besoin aussi d'un coupe de cheveux et de saboter son film; il aurait pu faire bien mieux...



film réussi, en un sens ; Cronenberg aurait pu faire bien pire ....

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Message par Borges Ven 1 Juin 2012 - 11:13



c'est à cette scène que je songeais en lisant la description de l'enterrement de brutha fez dans le bouquin, absolument foirée dans le film; on ne sent rien de la nostalgie de eric (imitation de la vie), rien de son désir d'être pleuré comme le rappeur soufi (la vie artistique et religieuse, mais ici c'est l'islam le modèle de la vie authentique; l'islam soufi; ) quand il serait mort : "puis il pensa à son propre enterrement. Il se sentait indigne et pathétique (...) Quelle configuration aurait-on pu imaginer qui pût rivaliser avec ce qui se passait ici? Qui viendrait le voir gisant? (Terme embaumé en quête du cadavre correspondant) (...) C'était démoralisant, du coup, de penser à cette foule affligée. C'était là un spectacle qu'il lui serait manifestement impossible de susciter."

autre film, sur la solitude des hommes hors du commun; comme le somewhere dont re(parle) Jerzy, le truc zuckerberg...

(on peut penser côté cinéma français à "l'exercice de l'état"; un chauffeur et son patron)




Dernière édition par Borges le Ven 1 Juin 2012 - 11:15, édité 1 fois
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