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Mille et une nuits aux comores

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Message par wootsuibrick Lun 23 Fév 2009 - 18:57

Les contes des milles et une nuits dans le paysage comorien contemporain.



Il sera souvent question dans cette communication, de "folklore" des Milles et une Nuits. En effet la forme des contes change constamment à l'oral. Souvent selon l'humeur, ou la culture du conteur, le conte subit de nombreuses transformations. On assiste souvent à des fusions entre diverses histoires. Ou alors à des changement de structures de la trame du récit. Les éléments les plus persistants restent alors les personnages, ou motifs qui peuplent les Contes des Milles et une Nuits.



1. Histoire : Aspects possible de l'origine et de l'évolution de la diffusion des Contes aux Comores.

Comment évaluer, dater l'entrée du folklore, des récits, composant ce que l'on appelle les Milles et une Nuits aux Comores?
L'arrivée de l'islam aux Comores (IX, Xeme siècle), les origines chiraziennes (du moins le mythe fondateur chirazien), sont elles les principales pistes?
La piste de Chiraz est séduisante car ce que l'on appelle les chiraziens sont censés être venus, de la ville de Shiraz en Perse. En réalité les populations installés aux Comores étaient déjà fortement métissé car elles ont pour la plupart transités par la côte est africaine et notamment à Zanzibar. Les populations non métissées seraient venus en majorité, du moyen orient yéménite selon les traditions généalogiques de certaines familles régnantes des anciens sultanats comoriens.
Mais les contes étant dit à l'oral, il est difficile de trouver des traces de possibles origines remontant à cette perse mythique, une des terre d'origine des Contes des Milles et une Nuits.
Il semble plus crédible en partant de la langue dans laquelle sont dit ces contes de leur trouver d'autres origines géographiques, du moins d'autres fortes influences que chiraziennes. Comme pour les hommes et les idées les contes voyagent , transitent , se métissent et se transforment.

La culture orale dans la société traditionnelle comorienne est diverse. Elle fut diffusée traditionnellement par les hommes et les femmes. Mais les deux sexes ne diffusaient pas les mêmes types d'histoires à l'oral. Chaque sexe ayant ses genres assignés.
Dans le cadre de cette culture orale, il semblerait que traditionnellement les femmes soient chargées de la transmission des contes, donc en partie du folklore des Milles et une Nuits. Le récit de fiction est donc traditionnellement essentiellement l'apanage des femmes. D'ailleurs il est à signaler qu'en langue comorienne la phrase d'introduction du conte rappelle son origine "mensonger" (ndrambo). C'est une histoire inventée. Le conteur (la conteuse) dans une formule d'introduction doit signaler à ceux qui l'écoute que sont récit n'a jamais eu lieu, qu'il est pure fabulation. Cette formule n'est pas systématique, certains conteurs l'omettent souvent. Elle est cependant bien établie.
A contrario les hommes s'occupent traditionnellement d'une dimension plus historienne du Hadith (histoire). Ils évoquent par exemple souvent les guerres des sultanats qui sévirent longuement aux Comores avant l'ère coloniale. Il semblerait aussi que les devinettes (ndzinyo), ou proverbes(wasuyat)aient été aussi un domaine essentiellement masculin. Mbae trambwe !sultan et poète du XVIIème siècle en est d'ailleurs le plus illustre représentant. De nos jours la société étant plus mixte cette catégorisation est peut-être moins forte, surtout dans les grandes villes ou l'existence du conte est mise à mal.

Je tiens à signaler que ces généralités concernent peut-être essentiellement la Grande-comore( NGAZIDJA ) qui a été mon principal champ d'étude. Je connais bien moins l'état actuel de ces traditions dans les autres îles.

Il est donc évident que la culture populaire dont fait partie le folklore des contes des Milles et une Nuits s'est essentiellement répandue à l'oral. L'écrit en arabe ou swahili jusqu'à l'ère de la colonisation européenne n'était l'apanage que des élites sociales, il ne concernait donc que très peu le peuple. Ainsi la culture populaire véhiculant le folklore des "Milles et une Nuits" n'a pas eu droit à la canonisation qu'aurait pu lui permettre l'emploi de l'écrit, du moins avant la seconde moitié du XXème siècle. Les premiers écrits, recensés, en lettres arabes, de la langue vernaculaire, le shikomori, datent du XXème siècle (autour des années 40). Les contes étant dit en shikomori il semble donc peu probable qu'ils aient été écrit avant cette époque.
A vrai dire l'emploi de l'écrit pour conserver les contes est assez moderne. Il s'est d'abord essentiellement fait dans le champ de l'anthropologie, notamment pour des études au CNDRS (centre national de documentation et recherche scientifique).

Bien que la question de l'origine du folklore des milles et une Nuits puisse se poser légitimement, il me semble que l'idée de fixer cette origine est illusoire.
Les contes des milles et une nuits, du moins le folklore de ces contes, a cependant peut-être été fortement alimenté par les pays de la côte est de l'Afrique.
Le sultanat d'Oman a sans doute beaucoup joué dans la transmission et l'enrichissement de ces éléments de folklore. Les rapprochements entre la côte est de l'Afrique et les Comores s'étaient renforcée avec la dynastie Busaidi qui suivit la dynastie Yaa'rubi. Cette dynastie était mené par Ahmed Bin Said al Busaidi à partir de la moitié du XVIIIème siècle. Ahmed avait été nommé Sultan d'Oman de la côte est africaine. Certaines régions de Madagascar (le Nord Ouest et notamment l'île de Nosy Be) et les Comores étaient presque considérées par certaines élites arabisées comme des "provinces" de ce sultanat.
Il est à noter que des familles comoriennes sont souvent liés à Zanzibar qui faisait aussi partie de ce sultanat, et était sous le contrôle des membres de la famille Busadi, avec Lamu, et Kilwa.
Ainsi, bien qu'il soit difficile d'étudier avec précision l'évolution des apports, influences qui ont fait évoluer le folklore de la société comorienne, il est évident de lier cette évolution avec les cultures swahili. Il existe des éléments en swahili dans la langue qui véhicule ces contes. Ainsi, des expressions, noms, chants en swahili persistent dans le corpus actuels de contes transmis à l'oral aux Comores. Ces éléments ont d'ailleurs étaient canonisés dans l'ère contemporaine par des institutions à vocation scientifique. En effet de nombreux contes contenant des éléments en swahili ont été collecté et sont étudiés dans le champ de l'anthropologie (voir peut-être les bases de données du CNDRS à Moroni pour approfondir).

En ce qui concerne l'écrit, l'influence direct des contes écrits en arabe ou même en Français (avec la colonisation) s'est peut être faite beaucoup plus à partir du XIXème siècle. Mais cette influence qui concernait à l'origine une frange de la population lettré n'a pu sans doute se faire que de manière périphérique.


2. Différences fondamentales entre la canonisation des contes à l'écrit en occident, et la vie du conte dans une culture populaire essentiellement orale, à l'exemple des Comores.

La canonisation que permet l'écrit peut libérer le Conte de la variation constante dont il fait inévitablement l'objet dans le cadre d'une culture orale. Du moins il peut permettre un référent stable aux variations inévitables qui surviennent lors de son passage dans le champ protéiforme de la culture "vivante".
Le conte baignant dans une culture à dominante orale, est constamment soumis à des variations volontaires ou involontaires dues au fait de son principal socle: la mémoire humaine dans son cadre physiologique et psychique. A contrario de la mémoire écrite qui fixe, conserve la mémoire.

Les Comores n'ont pas reçu le conte des Milles et une Nuits dans une perspective purement littéraire, contrairement à l'Occident. Les êtres, les personnages qui peuplent le conte ont aux Comores des référents sociaux.
Les Contes des milles et une Nuits publiés en Occident, ont pour principal charme leur exotisme, leur référence constante à un folklore qui n'existe pas dans les sociétés occidentales.
Il est à noter qu'Antoine Galland est peut-être la personne qui leur a donné la forme la plus répandu aujourd'hui dans l'imaginaire mondial.

Aux Comores le folklore auquel fait référence le Conte appartient à l'espace, et à l'imaginaire social. La dimension exotique qui fait l'attrait des livres occidentaux est moindre. Les personnages composant les récits des Milles et une Nuits s'adaptent aux patronymes et à la géographie comorienne. Les personnages deviennent comoriens, sans que le fond du récit soit défiguré.
L'explication en est assez simple : les Comores n'ont pas uniquement reçu les contes des Milles et une Nuits, ils ont aussi reçu, adopté, les composantes sociales de la civilisation qui a vu naître ces contes. Ainsi, le djinn comme le sultan existent ou ont existé dans l'espace social.
Le Djinn qui est une figure récurrente de ces contes des Milles et une Nuits, n'est pas exotique au paysage social comorien. Il existe dans l'imaginaire social, dans la réalité sociale, du moins dans le psychisme de la communauté. Ainsi le djinn peut apparaître lors de rites traditionnels qui subsistent encore de nos jours.

L'autre élément récurrent à signaler est celui du sultan. Il est souvent présenté comme un personnage essentiellement tyrannique. Le sultan est souvent une figure du pouvoir à combattre. La figure du sultan est constante dans le cycle de Haroun al-Rashid qui est de loin le plus répandu aux comores. Cette figure du sultan est une réalité historique aux comores. Haroun al-Rashid est donc un archétype parfaitement adaptable aux patronymes comoriens, ou alors il est essentiellement nommé par son titre :"Mfaume". Par contre le personnage qui s'oppose constamment au sultan, Ibanawassi, ou Ibunaswiya n'appartient pas à la tradition des Contes des Milles et une Nuits. Ibanawassi vient de l'imaginaire Bantou de la part africaine des îles Comores. C'est un pendant du futé lièvre des contes bantou.

Il n'y a donc pas dans le cadre comorien de distance entre le folklore du conte et la société dans laquelle il est transmis.
La forme du Conte a donc sans doute changer avec l'évolution de la société, sans que son fond, sa morale ne soit fondamentalement remise en jeu. Il suffit peut-être pour s'en rendre compte d'écouter des conteurs de différentes générations. Il arrive souvent que des objets du quotidien soient évoqués lors de descriptions. Ces objets selon l'âge ou la culture du conteur varient.
Un autre phénomène a été récemment souvent observé par des chercheurs : l'insertion dans la tradition orale, de textes des Contes des Milles et une Nuits tels qu'ils apparaissent dans la littérature mondiale. En effet après lecture des livres mettant en scène Simbad, Aladin, ou Ali Baba et les quarante voleurs (essentiellement des éditions françaises), certains conteurs narrent ces histoires à l'oral, sans souvent avoir conscience que ces personnages appartiennent au même corpus d'histoires, au même folklore que celles contés depuis des siècles aux Comores.
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